B. LE CADRE LÉGISLATIF PROPOSÉ PAR LA DIRECTIVE SUR LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE

1. Les principes

a) Le régime d'établissement et d'information (section 1)

Les États membres ne peuvent soumettre le lancement et l'exercice de l'activité d'un prestataire de service de la société de l'information à un régime d'autorisation préalable (article 4). Il s'agit du principe de la liberté d'établissement.

L'article 5 énumère les informations générales que doit fournir le prestataire au destinataire du service et aux autorités compétentes, en particulier son nom, son adresse géographique, ses coordonnées, éventuellement son numéro d'immatriculation au registre du commerce, etc. Les prix doivent être indiqués de manière claire et préciser si les taxes et frais de livraison sont inclus.

b) Communications commerciales7( * ).(section 2)

Les communications commerciales doivent être clairement identifiables comme telles (article 6).

Selon l'article 7, les États membres pourront autoriser les communications commerciales non sollicitées par courrier électronique (" spamming ") ; ces communications doivent pouvoir être identifiées dès leur réception par le destinataire ; des registres " opt-out " regroupent les personnes physiques qui ne souhaitent pas recevoir ce type de communications dans leur boîte aux lettres électronique.

L'article 8 autorise la communication commerciale des professions réglementées sous réserve du respect des règles professionnelles visant l'indépendance, la dignité et l'honneur de la profession ainsi que le secret professionnel et la loyauté envers les clients et les confrères.

c) Contrats par voie électronique (section 3)

Aux termes de l'article 9 relatif au traitement des contrats par voie électronique , les États membres s'assurent que leur régime juridique ne fait pas obstacle à l'utilisation des contrats électroniques ou ne conduit pas à priver d'effet et de validité juridique de tels contrats pour le motif qu'ils sont passés par voie électronique.

Cet article est complémentaire de la directive du Parlement européen et du Conseil sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques, adoptée définitivement le 30 novembre 1999 mais non encore publiée au Journal Officiel des Communautés européennes.

Cet article ne s'applique pas :

- aux contrats qui créent ou transfèrent des droits sur des biens immobiliers, à l'exception des droits de location ;

- aux contrats pour lesquels la loi requiert l'intervention de tribunaux, d'autorités publiques ou de professions exerçant une autorité publique ;

- aux contrats de caution et de garantie fournis par des personnes agissant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de leur activité professionnelle ou commerciale ;

- aux contrats relevant du droit de la famille ou du droit des successions.

L'article 10 prévoit les informations à fournir par le prestataire de service. Il s'agit de s'assurer de la qualité du consentement du consommateur.

L'article 11 porte sur la passation d'une commande . Le vendeur doit accuser réception de la commande de l'acheteur. La commande et l'accusé de réception sont considérés comme reçus lorsque les parties auxquelles ils sont adressés peuvent y avoir accès.

Dans les cas où le consommateur, face à une offre concrète qui lui est faite par le vendeur, n'a le choix qu'entre cliquer " oui " ou " non " pour accepter ou non cette offre, il s'agit de déterminer clairement le moment de conclusion du contrat , dans un but de sécurité juridique.

d) La responsabilité des prestataires intermédiaires (section 4)

Une distinction fondamentale est opérée entre les prestataires intermédiaires, selon qu'ils assurent le simple transport des informations ou qu'ils stockent les données. Au fur et à mesure de la discussion législative, l' irresponsabilité des fournisseurs d'accès ou d'hébergement a été soumise à plusieurs conditions .

• L'article 12 s'applique au simple transport (" mere conduit "). Les États membres prévoient dans leur législation que la responsabilité pour les activités de transmission et la fourniture d'accès 8( * ) ne peut être engagée pour les informations transmises, à condition que le prestataire :

- ne soit pas à l'origine de la transmission ;

- ne sélectionne pas le destinataire de la transmission ;

- et ne sélectionne et ne modifie pas les informations faisant l'objet de la transmission.

• L'article 13 régit la forme de stockage dit " caching ", c'est-à-dire les formes de stockage automatique, intermédiaire et temporaire de l'information dans le seul but de rendre plus efficace la transmission ultérieure de l'information.

Il s'agit de la pratique permettant à un internaute français, par exemple, d'accéder, sur un site intermédiaire basé en France, à un site Internet dont le contenu a été élaboré dans un autre État, afin de limiter le temps de connexion au réseau et de réduire le coût de la communication.

La responsabilité de cet intermédiaire ne peut être engagée, à condition que le prestataire :

- ne modifie pas l'information ;

- se conforme aux conditions d'accès à l'information ;

- se conforme aux règles concernant la mise à jour de l'information ;

- agisse promptement pour retirer l'information qu'il a stockée ou pour rendre l'accès à celle-ci impossible dès qu'il a effectivement connaissance du fait que l'information a été retirée de là où elle se trouvait initialement sur le réseau, ou du fait que l'accès à l'information a été rendu impossible, ou du fait qu'un tribunal ou une autorité administrative a ordonné le retrait de l'information ou interdit son accès.

• L'article 14 s'applique à l' hébergement de données, c'est-à-dire le stockage des informations. La responsabilité de l'hébergeur ne peut être engagée pour les informations stockées à la demande d'un destinataire du service, à condition que :

- le prestataire n'ait pas effectivement connaissance que l'activité ou l'information est illicite et, en ce qui concerne une action en dommages, n'ait pas connaissance de faits ou de circonstances selon lesquels l'activité ou l'information illicite est apparente ;

- ou le prestataire, dès le moment où il en a connaissance, agisse promptement pour retirer les informations ou rendre l'accès à celles-ci impossible.

En matière de " caching " et d'hébergement, les États membres peuvent organiser la possibilité, pour un tribunal ou une autorité administrative, d'exiger du prestataire de service qu'il mette fin à une violation ou qu'il prévienne une violation.

L'absence d'obligation générale en matière de surveillance est posée à l'article 15. Les États membres n'imposent pas aux prestataires une obligation générale de surveiller les informations qu'ils transmettent ou stockent, ou une obligation générale de rechercher activement des faits ou des circonstances indiquant des activités illicites.

Les États membres peuvent prévoir l'obligation pour les prestataires de services, d'informer promptement les autorités publiques compétentes d'activités ou d'informations présumées illicites auxquelles se livreraient les destinataires du service, ou de communiquer aux autorités judiciaires compétentes, à leur demande, les informations permettant d'identifier les destinataires avec lesquels ils ont conclu un accord d'hébergement.

2. La mise en oeuvre

L'article 16 encourage l'élaboration de codes de conduite par les associations ou organisations commerciales, professionnelles ou de consommateurs.

L'article 17 tend à promouvoir le règlement extrajudiciaire des litiges . En cas de désaccord entre un prestataire de service et le destinataire du service, ceux-ci doivent pouvoir avoir recours à des mécanismes de règlement extrajudiciaire des différends, disponibles dans le cadre du droit national, y compris par des moyens électroniques.

Ce mécanisme viserait particulièrement les cas de litiges concernant des transactions sur Internet mettant en jeu de faibles montants financiers.

L'article 18 indique que les recours juridictionnels prévus par le droit national, portant sur les activités des services de la société de l'information, doivent permettre l'adoption rapide de mesures 9( * ) , y compris de mesures conservatoires, visant à mettre un terme à toute violation présumée et à prévenir toute nouvelle atteinte aux intérêts concernés.

L'article 19 organise la coopération entre les États membres d'une part, entre les États membres et la Commission d'autre part.

L'article 21 demande aux États de déterminer le régime des sanctions applicables aux violations des dispositions nationales prises en application de la directive. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

3. Les dispositions finales : réexamen, transposition, entrée en vigueur

Au plus tard trois ans après la date d'adoption de la directive, et ensuite tous les deux ans, la Commission présentera un rapport sur l'application de cette directive. Elle formulera des propositions de modifications en particulier en matière de protection des mineurs, de protection des consommateurs et de bon fonctionnement du marché intérieur.

Les États membres sont tenus de transposer cette directive dans les dix-huit mois suivant son entrée en vigueur 10( * ) .

*

Le processus communautaire n'est pas achevé. Le Conseil doit adopter une position commune sur la directive proposée, puis le Parlement européen examinera le texte en deuxième lecture. Une conciliation est éventuellement envisageable sous présidence française (second semestre 2000).

Ainsi, alors que la Délégation du Sénat pour l'Union européenne a examiné en juin 1999 la proposition de base de la Commission, votre commission des Lois se prononce sur la proposition de résolution en ayant connaissance de la proposition de directive issue de l'accord politique du 7 décembre 1999.

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