M. Michel SERGENT

IV. L'EXÉCUTION DES BUDGETS 2003 ET 2004

A. L'EXÉCUTION DU BUDGET 2003

1. Une régulation importante et heurtée des crédits

a) Les étapes de la régulation

Les crédits du ministère de la jeunesse et des sports ouverts en loi de finance initiale pour 2003 s'élevaient à 403,77 millions d'euros et le montant des crédits disponibles en cours de gestion était de 393,8 millions d'euros , après divers mouvements réglementaires de crédits (annulations, reports, virements, rattachements de fonds de concours et transferts). L'exercice 2003 a été particulièrement marqué par la régulation : les annulations ont ainsi porté sur 30,2 millions d'euros de CP, essentiellement sur le chapitre 43 91 qui a été amputé de 27,8 % de ses crédits ouverts .

Evolution des dotations 2003 en cours de gestion

(en millions d'euros)

Chapitres

LFI

Reports et reprise d'AP

Annulations

Répartitions

Transferts

Fonds de concours

LFR

Crédits disponibles

31-90

157,3

 
 

0,9

- 0,27

 
 

157,94

31-91

24,5

 
 
 

- 0,06

 
 

24,44

31-96

26,1

 
 
 
 
 
 

26,1

33-90

24,5

 
 
 

- 0,01

 
 

24,5

33-91

4,7

 
 
 

- 0,01

 
 

4,74

33-92

0,58

 
 
 
 
 
 

0,58

34-98

44,3

1,52

- 3,1

0,08

0,03

0,01

1

43,9

36-91

17,8

 

- 0,2

 
 
 
 

17,6

37-91

0,69

 
 
 
 
 
 

0,69

43-91

92,03

8,7

- 25,6

0,02

- 0,12

0,02

-0,93

74,11

57-01 AP

5,42

4,8

 

0,4

0,1

1,53

2,52

14,79

CP

6,09

3,3

- 0,26

 

0,8

0,8

2,52

13,26

66-50 AP

5,4

0,44

 
 
 
 

-0,9

5,8

CP

5,06

1,1

- 0,2

 
 
 
 

5,97

Total CP

403,77

14,6

- 29,3

1

0,37

0,85

2,59

393,84

Source: réponses du ministère au questionnaire budgétaire

La régulation budgétaire a connu les étapes suivantes :

Par courrier du 3 février 2003, le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire a demandé aux différents ministères de constituer une réserve de précaution et d'innovation. Pour le budget du ministère des sports cette réserve globale a été fixée à 24,49 millions d'euros , répartie comme suit : 4,26 millions d'euros sur le chapitre 34-98, 16,4 millions d'euros sur le chapitre 43-91, 0,47 million d'euros sur les CP du chapitre 57-01 et 0,36 million d'euros sur les CP du chapitre 66-50.

Une partie de cette mise en réserve a été annulée par un décret d'annulation du 14 mars 2003 pour un montant de 13,47 millions d'euros , portant largement sur les dépenses d'intervention du chapitre 43-91 (9,9 millions d'euros).

Par ailleurs, par note du 28 avril 2003, le ministre chargé du budget et de la réforme budgétaire a informé tous les ministères de la mise en réserve de l'intégralité des crédits 2002 reportés sur 2003. Les reports ainsi gelés s'élevaient pour le ministère à 13,49 millions d'euros.

Compte tenu des difficultés de gestion rencontrées par le ministère, une modulation du gel entre les chapitres 34-98 et 36-91 a été acceptée (dégel de 196.500 euros sur le chapitre 34-98 et « surgel » du même montant sur le chapitre 36-91) et entre les titres V et VI (dégel de 1,5 millions d'euros sur le chapitre 57-01 et « surgel » du même montant sur le chapitre 66-50).

Le montant des crédits mis en réserve a été réexaminé début septembre 2003. Après négociation avec le ministère du budget et de la réforme budgétaire, un dégel à hauteur de 4,98 millions d'euros a été autorisé sur les crédits des titres III et IV, et le décret du 3 octobre 2003 a procédé à une nouvelle annulation de 15,85 millions d'euros, essentiellement sur le chapitre 43-91 . Le reliquat des crédits maintenus gelés, soit 3,67 millions d'euros (dont 2,76 millions d'euros sur le chapitre 66-50), a été reporté sur la gestion 2004.

b) Les conséquences sur le fonctionnement des services et les actions du ministère

Cette régulation par à-coups, qui s'est surtout exercée sur les crédits de fonctionnement des services déconcentrés, la formation du personnel et les interventions du titre IV, a eu des conséquences préjudiciables au fonctionnement des services . Les crédits relatifs au programme régional d'amélioration du cadre de travail et des conditions de fonctionnement des services déconcentrés, qui permet le renouvellement du parc informatique, bureautique et automobile, n'ont ainsi pas été intégralement versés. Le ministère a également été contraint de diminuer sa participation aux frais de formation et de réduire ses actions d'accompagnement de la réforme des qualifications et des diplômes.

Sur le titre IV, la régulation a conduit à limiter les crédits déconcentrés liés à la pratique sportive locale, à ralentir la montée en charge du suivi médical des sportifs et à accroître la sélection des projets proposés au financement du ministère. Des redéploiements ont été réalisés pour assurer le financement des conventions d'insertion professionnelle des sportifs de haut niveau et le fonctionnement des pôles de haut niveau.

2. Une consommation relativement satisfaisante des crédits

a) Une réelle progression du taux global de consommation

Le taux global de consommation est en progression constante puisqu'il s'est établi à 96,3 % en 2003, après 94,7 % en 2002 et 94 % en 2001. Il est vrai que la situation de départ n'était guère satisfaisante, en particulier lorsque l'on considère l'importance des crédits de fonctionnement, qui constituent une composante habituellement largement consommée. Des progrès sensibles ont été constatés sur les dépenses d'intervention et les dépenses en capital, mais la situation s'est plutôt dégradée sur les dépenses en capital , ainsi que l'illustre le tableau ci-après :

Consommation des crédits sur les exercices 2002 et 2003

 

2002

2003

Personnel (titre III)

96,7 %

98,6 %

Fonctionnement (titre III)

94,8 %

96,9 %

Interventions (titre IV)

94,1 %

99,4 %

Chapitre 57-01 AP

93,3 %

70,9 %

CP

70,5 %

53,8 %

Chapitre 66-50 AP

97,8 %

86,5 %

CP

79,8 %

32,3 %

Total

94,7 %

96,3 %

Source: ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative

b) Une consommation perfectible des dépenses en capital, en partie due à la régulation

Le chapitre 31-90 des rémunérations de personnel dispose chaque année d'un solde structurel positif, qui évolue de façon irrégulière : il est ainsi passé de 7,25 millions d'euros en 2002 à 1,57 million d'euros en 2003, exercice durant lequel les crédits de rémunérations couvrent tout juste les dépenses. Sur le chapitre 31-91, le disponible de fin de gestion représente 3,1 % de la dotation disponible et s'explique soit par des délégations tardives, notamment pour le versement des vacations de jurys de concours, soit par des problèmes locaux en particulier en matière de formation et d'examens. Les crédits disponibles sur le chapitre 31-96 diminuent chaque année et ont atteint 698.000 euros fin 2003. Ils se situent essentiellement sur les articles 50 et 90 et concernent principalement les rémunérations des contrats de préparation olympique et de haut niveau (12 emplois vacants au 31 décembre 2003) et les crédits de vacations de jurys et de formation.

S'agissant des dépenses de fonctionnement de l'administration centrale , les disponibles s'expliquent soit par des retards dans la réception des factures ou la production de justificatifs, soit par un décalage dans la réalisation d'opérations prévues en 2003 et réalisées en 2004 (essentiellement pour les marchés d'informatique). Pour les services déconcentrés , la totalité des crédits a été déléguée. Les crédits restés disponibles au niveau local sont relativement faibles (1 % des crédits délégués) et correspondent essentiellement à des reports de charges.

Le faible montant de crédits disponibles sur le titre IV (450.000 euros) s'explique en particulier par les montants élevés d'annulations intervenues en cours de gestion.

Concernant les dépenses en capital des titres V et VI, le ministère évoque une « légère diminution » du taux d'utilisation des AP - bien qu'il soit passé de 93,3 % en 2002 à 75,3 % en 2003 - et rappelle que la régulation a eu une incidence sur le potentiel d'utilisation des AP . L'administration centrale s'est retrouvée à certaines périodes de l'année devant une insuffisance de CP et a dû par conséquent retarder certaines opérations, ce qui explique la sous-consommation des AP. Les reliquats d'AP proviennent principalement de fonds de concours rattachés après la clôture de l'exercice budgétaire et des inscriptions en loi de finances rectificative. Si l'on ne tient pas compte des AP inscrites tardivement sur le budget le taux de consommation est de 88 %.

Le faible taux de consommation des CP (53,3 % pour les titres V et VI) s'explique, selon le ministère, par les gels et ouvertures tardives de crédits, que ce soit au titre des fonds de concours ou en loi de finances rectificative. Outre ces facteurs, le montant des crédits non consommés s'élève encore à 2,32 millions d'euros (dont 1,3 million d'euros en administration centrale), soit 12,1 % des CP disponibles . Le ministère a toutefois encouragé les ordonnateurs secondaires à restituer tout au long de l'année les sommes non utilisées pour pouvoir les réaffecter à de nouvelles opérations.

Votre rapporteur spécial relève que ces niveaux encore insuffisants de consommation sur les dépenses en capital contribuent à pérenniser l'accumulation des « AP dormantes » et nuisent à la sincérité des inscriptions budgétaires.

B. L'EXÉCUTION DU BUDGET 2004 AU COURS DU PREMIER SEMESTRE

1. Une régulation d'ores et déjà supérieure à celle de 2003

Au cours du premier semestre 2004, le budget du ministère des sports est passé de 399,04 millions d'euros en loi de finances initiale à 410,12 millions d'euros de crédits disponibles, soit une augmentation de 2,8 %. Cette variation recouvre en particulier 10,6 millions d'euros de reports de crédits (soit 2,7 % des crédits disponibles), ainsi que le détaille le tableau ci après :

Evolution des dotations 2004 du ministère en début d'exercice (ancien périmètre)

(en millions d'euros)

Chapitres

LFI

Reports

Annulations

Répartitions

Transferts

Fonds de concours

Crédits disponibles

31-90

157,4

 
 
 

-0,08

 

157,3

31-91

25,2

 
 
 

-0,02

 

25,2

31-96

26,6

 
 
 
 
 

26,6

33-90

24,94

 
 
 

-0,01

 

24,94

33-91

4,8

 
 
 

-0,01

 

4,79

33-92

0,58

 
 
 
 
 

0,58

34-98

46,04

1,11

 

0,02

-0,02

0,01

47,16

36-91

18,8

0,04

 
 
 
 

18,85

37-10

0,85

0,07

 
 
 
 

0,92

37-91

0,34

 
 
 
 
 

0,34

43-91

85,14

0,44

 
 

0,1

 

85,74

57-01 AP

5

4,3

 
 
 

4,27

13,58

CP

4,35

6,1

 
 
 

0,4

10,88

66-50 AP

5,34

0,78

 
 
 
 

6,11

CP

3,99

2,84

 
 
 
 

6,83

Total

399,04

10,64

0

0,07

-0,04

0,4

410,12

Source: ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Le montant élevé des reports sur les CP des dépenses en capital, qui fait plus doubler les dotations ouvertes en loi de finances initiale , est à rapprocher du solde disponible en fin d'exercice 2003 (8,97 millions d'euros), qui s'explique en partie - mais pas totalement - par les effets de la régulation et des ouvertures tardives de crédits.

L'exercice 2004 est, comme en 2003, marqué par une régulation importante mais un peu plus tardive que l'année précédente.

Suite à la demande conjointe, par lettre du 20 avril 2004, du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire, une réserve de précaution de 34,59 millions d'euros (dont 22,36 millions d'euros sur les crédits d'intervention du titre IV), supérieure de 41,2 % à celle demandée début 2003, a été constituée pour permettre de faire face aux dépenses supplémentaires et de financer les besoins nouveaux que justifieraient des aléas éventuels. Cette note précisait en outre que les crédits 2003 reportés sur 2004, exceptés ceux non consommés au titre du collectif de fin d'année et les fonds de concours tardifs, soit 6,58 millions d'euros, seraient provisoirement rendus indisponibles .

Compte tenu des difficultés de gestion rencontrées, le ministère a adressé au contrôleur financier, par courrier en date du 16 juillet 2004, une proposition de modulation des crédits gelés au titre de la réserve de précaution d'un montant de 34,59 millions d'euros qui conduisait à relever le gel sur les crédits du titre IV à hauteur de 29,81 millions d'euros.

S'agissant de la politique de la jeunesse et de la vie associative (direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative - DJEPVA, et délégation interministérielle à l'innovation sociale et à l'économie sociale - DIES) - dont, rappelons-le, le rattachement budgétaire au MJSVA sera effectif à compter de 2005 - les crédits de la DIES ont été gelés à hauteur de 1,35 million d'euros, dont 0,59 million d'euros ont été ensuite été dégelés, et les crédits de la DJEPVA ont subi un gel portant sur 19,13 millions d'euros, avant d'être partiellement dégelés le 13 juillet 2004.

Le décret n° 2004-962 du 9 septembre 2004 a conduit à l'annulation de près de 26 millions d'euros de crédits au titre de la politique des sports , dont 18 millions d'euros sur le chapitre 43-91 (soit 21 % de la dotation disponible et la totalité des reports) et 61 % des reports gelés, et de 9,96 millions d'euros sur les crédits de jeunesse et vie associative . Cette régulation, contrairement à l'objectif initialement annoncé, a fait participer le ministère à des redéploiements interministériels, sans qu'il bénéficie pour autant de dotations supplémentaires pour financer des dépenses non prévues en loi de finances initiale pour 2004.

Le ministère a toutefois bénéficié de 4,5 millions d'euros de recettes supplémentaires, liés au reversement d'une partie de l'excédent de gestion du GIP Paris Saint-Denis , qui gère le Stade de France. Cette dotation a permis de limiter les effets du gel en abondant la préparation aux Jeux Olympiques des filières d'accès au haut niveau, la médecine du sport, des actions nouvelles en faveur de la promotion du sport dans le cadre de l'année européenne de l'éducation par le sport, ainsi que des actions de promotion de l'athlétisme, du sport féminin, du sport familial et d'activités pour les jeunes ne partant pas en vacances (opération « Solidar'été »).

2. Les conséquences sur la gestion des services

Comme en 2003, la régulation a affecté les moyens de fonctionnement des services et la formation du personnel , ce qui conduit en particulier à une obsolescence des logiciels et du matériel informatiques, et à ce que le ministère ne puisse plus assurer ses engagements au titre des contrats de plan Etat-région en matière de formation. Compte tenu de l'ampleur du gel, le ministère n'a également pu déléguer aux services déconcentrés que 80 % des crédits prévus, mais la hausse de la part régionale du FNDS a permis de compenser en partie cette réduction, et en particulier d'assurer le financement du dispositif « plan sport-emploi ». Certaines AP ont enfin été retardées, notamment celles relatives aux contrats de plan, et certains travaux achevés n'ont pu être financés dans les délais, faute de CP disponibles sur le chapitre 66-50.

Dans le domaine de la jeunesse et de la vie associative , la DIES n'a pu honorer la totalité des conventions pluriannuelles d'objectifs en cours de validité, et la DJEPVA a du retarder le versement des subventions à des associations nationales qui n'étaient pas prévues dans le cadre de conventions pluriannuelles.

Votre rapporteur spécial déplore cette situation et rappelle que la régulation, si elle est effectivement un mal nécessaire en période de rigueur budgétaire, doit être suffisamment organisée et précoce pour permettre aux services de réviser leur plan de charge. Les annulations et dégels tardifs ne font ainsi qu'entretenir l'illusion, en cours de gestion, de la perspective d'un déblocage de crédits. Pour un meilleur respect de l'autorisation parlementaire, c'est bien dès la loi de finances initiale qu'il convient, le cas échéant, de faire les choix difficiles et de proposer une dotation cohérente avec la contrainte budgétaire globale.