M. Roland du LUART

EXAMEN DE L'ARTICLE 49

ARTICLE 49

Revalorisation de l'aide juridictionnelle.

Commentaire : le présent article prévoit de revaloriser l'aide juridictionnelle de + 6 % et de limiter l'augmentation des plafonds d'admission à cette aide à + 1,8 %.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE MONTANT DE L'UNITÉ DE VALEUR DE RÉFÉRENCE POUR LE CALCUL DE LA DOTATION À L'AIDE JURIDICTIONNELLE

L'article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique prévoit que l'Etat affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau.

Le montant de cette dotation résulte, d'une part, du nombre des missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau et, d'autre part du produit d'un coefficient par type de procédure et d' une unité de valeur de référence .

Le montant de l'unité de valeur de référence s'établit à 20,84 euros depuis 2004 .

B. L'ÉVOLUTION DE L'AIDE JURIDICTIONNELLE

Le nombre des admissions à l'aide juridictionnelle a augmenté de 9,8 % en 2003, de 10 % en 2004 et de 6,6 % en 2005 pour atteindre le niveau de 886.533 admissions . En 2005, le rythme d'évolution a été plus modéré, sous l'effet d'un ralentissement des admissions civiles (+ 5,2 %), alors que les admissions pénales sont restées soutenues (+ 8,5 %).

Le ralentissement observé en 2005 s'est confirmé, selon la chancellerie, au premier semestre 2006 avec une légère baisse des admissions (- 0,7 %) .

La hausse enregistrée au cours des dernières années est à mettre en relation avec les mesures prises en faveur des justiciables les plus fragilisés ou démunis à l'automne 2002 et en 2003 : admission sans condition de ressources des victimes des atteintes les plus graves à la personne ou de leurs ayants droit, augmentation des correctifs familiaux pour les deux premières personnes à charge du demandeur, exclusion des allocations logement de l'appréciation des ressources pour l'admission. En particulier, ces deux dernières réformes expliquent la forte croissance de l'aide juridictionnelle en 2004, dans la mesure où elles s'appliquent sur l'ensemble de l'année, alors qu'en 2003, elles sont intervenues en cours d'année.

L'aide juridictionnelle (AJ) est le plus souvent totale, cette dernière représentant 88 % des admissions.

Les admissions à l'aide juridictionnelle

Admissions

2000

2001

2002

2003

2004

2005

AJ Totale

605.929

570.603

597.561

662.855

734.661

783.690

AJ Partielle

92.850

87.213

91.076

92.996

97.093

102.843

Total

698.779

657.816

688.637

755.851

831.754

886.533

Rejets, retraits désistements

85.592

74.184

76.081

78.303

73.760

104.371

Source : chancellerie

Pour 2005, les rejets définitifs s'établissent à 82.959, soit un taux de rejet définitif de 8,4 % par rapport aux décisions prononcées par les bureaux d'aide juridictionnelle (990.904 décisions).

Les admissions à l'aide juridictionnelle pour des contentieux administratifs ont progressé plus lentement que les années précédentes (+ 1,5 %). En revanche, les admissions relatives aux conditions de séjour des étrangers augmentent fortement en 2005 (+ 17,2 %).

Les admissions 2005 se répartissent à raison de 51 % pour des procédures civiles, 43 % pour des procédures pénales et de 6 % pour des affaires administratives ou relatives aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers.

Entre 2000 et 2006, la dotation initiale inscrite en loi de finances est passée de 235,3 millions d'euros à 303 millions d'euros (+ 29 %), conformément au tableau ci-après.

Dans le projet de loi de finances pour 2007, la dotation budgétaire est portée à 323 millions d'euros sur l'action n° 1 « Aide juridictionnelle » au sein du programme « Accès au droit et à la justice ».

C. LES PLAFONDS D'ADMISSION À L'AIDE JURIDICTIONNELLE

Les plafonds mensuels de ressources, fixés en 1992 à 4.400 francs (670,78 euros) pour l'aide juridictionnelle totale, et à 6.600 francs (1006,16 euros) pour l'aide juridictionnelle partielle, connaissent une revalorisation automatique basée sur l'évolution de la tranche la plus basse du barème de l'impôt sur le revenu , comme le prévoit le troisième alinéa de l'article 4 de la loi précitée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Les plafonds de l'aide juridictionnelle totale (859 euros en 2006) et de l'aide juridictionnelle partielle (1.288 euros en 2006) ont progressé de 28 % entre 1992 et 2006, soit un taux supérieur à l'évolution de l'indice des prix (20 %) sur la même période.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA REVALORISATION DE L'UNITÉ DE RÉFÉRENCE POUR LE CALCUL DE LA DOTATION À L'AIDE JURIDICTIONNELLE

Comme il a été précédemment indiqué, le montant de l'unité de valeur de référence s'établit à 20,84 euros depuis 2004.

Le I du présent article propose de porter ce montant à 22,09 euros en 2007, soit une hausse de 1,25 euro (+ 6 %) .

Cette revalorisation pour 2007 du montant de l'unité de valeur de l'aide juridictionnelle correspond à un effort financier total de 16,3 millions d'euros , selon la chancellerie.

B. LA LIMITATION DE L'AUGMENTATION DES PLAFONDS D'ADMISSION À L'AIDE JURIDICTIONNELLE

L'article 4 de la loi précitée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique dispose que les plafonds de ressources permettant l'octroi de l'aide juridictionnelle sont revalorisés au 1 er janvier de chaque année « comme la tranche la plus basse du barème de l'impôt sur le revenu » .

Or, les dispositions de l'article 75 de la loi de finances pour 2006 portant réforme, à compter de 2007, de l'impôt sur le revenu, ont eu pour effet d'augmenter de 25 % toutes les tranches du barème applicable aux revenus de 2006 par rapport aux limites afférent aux revenus de 2005.

En l'absence de mesure correctrice, les plafonds d'aide juridictionnelle seraient donc relevés de 25 % au 1 er janvier 2007 .

L'impact de cette évolution sur la population éligible à l'aide juridictionnelle serait important et est estimé à 85 millions d'euros supplémentaires à prévoir au titre de la dotation à l'aide juridictionnelle. Cet impact n'est pas pris en compte dans la dotation de l'action n° 1 « Aide juridictionnelle » du programme « Accès au droit et à la justice ».

Le II du présent article permet donc de neutraliser cette conséquence de la réforme de l'impôt sur le revenu et de préserver le champ actuel de l'aide juridictionnelle.

Il prévoit pour 2007 une augmentation des plafonds d'admission à l'aide juridictionnelle à 1,8 % , correspondant à l'évolution de l'indice des prix à la consommation pour 2006 et, en prévision, pour 2007.

III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale n'a pas encore examiné le présent article.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Etant donnée la croissance du nombre de demandes d'admission à l'aide juridictionnelle (+ 9,8 % en 2003, + 10 % en 2004 et + 6,6 % en 2005) et l'année de la dernière revalorisation de cette aide (2004), la revalorisation envisagée de l'unité de référence pour le calcul de la dotation de l'aide juridictionnelle ne paraît pas suffisante à votre commission .

Les crédits de paiement du programme « Accès au droit et à la justice » enregistrant un recul de 5,7 millions d'euros (du fait, notamment, de la suppression des dépenses de personnel auparavant supportées par ce programme, ces charges ayant été transférées au programme « Justice judiciaire »), votre commission vous propose un amendement aux crédits du programme « Aide juridictionnelle » afin d'augmenter, dans une proportion plus conforme aux besoins attendus, l'enveloppe consacrée à l'aide juridictionnelle .

Cet amendement vise à maintenir globalement les crédits de paiement du programme « Aide juridictionnelle » à leur niveau de l'exercice 2006, soit 344,1 millions d'euros, la hausse de + 5,7 millions d'euros étant affectée à l'enveloppe destinée au financement de l'aide juridictionnelle (action n° 1 « Aide juridictionnelle ») . L'augmentation des autorisations d'engagement et des crédits de paiement du programme « Aide juridictionnelle » de + 5,7 millions d'euros est compensée par une réduction de - 2 millions d'euros des autorisations d'engagement et des crédits de paiement consacrés, au sein du programme « Conduite et pilotage de la justice et organismes attachés » (action n° 4 « Gestion administrative commune »), aux dépenses informatiques hors grands projets (- 1 million d'euros pour le poste « Maintien de l'existant » 73 ( * ) et - 1 million d'euros sur le poste « Renouvellement des matériels » 74 ( * ) ) et d'une réduction de - 3,7 millions d'euros des autorisations d'engagement et des crédits de paiement consacrés, au sein du programme « Justice judiciaire » (action n° 6 « Soutien »), aux dépenses immobilières 75 ( * ) .

Cette augmentation des crédits de l'action n° 1 « Aide juridictionnelle » a pour conséquence de porter la revalorisation de l'aide juridictionnelle à 8,1 % et l'unité de référence pour le calcul de la dotation de cette aide à 22,47 euros (contre 22,09 euros), selon les estimations de votre commission et sous réserve d'une coordination plus précise effectuée avec les services de la chancellerie.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié afin d'en assurer la coordination avec la modification des crédits de l'action n° 1 « Aide juridictionnelle » du programme « Accès au droit et à la justice ».

PROJET DE LOI DE FINANCES

ARTICLES DEUXIÈME PARTIE

MISSION JUSTICE

* 73 Le poste « Maintien de l'existant » est doté, dans le projet de loi déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, de 36,5 millions d'euros en crédits de paiement (cf bleu).

* 74 Le poste « Renouvellement des matériels » est doté, dans le projet de loi déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, de 7,7 millions d'euros en crédits de paiement (cf bleu).

* 75 Les dépenses immobilières font l'objet, dans le projet de loi déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, d'une autorisation de crédits de paiement à hauteur de 103,2 millions d'euros.