b) Le recrutement des Think Tanks

La première fonction des Think Tanks est évidemment de produire des contributions plus ou moins originales aux débats de politique économique.

Les Think Tanks disposent pour ce faire de services d'études comportant souvent à la fois des chercheurs à plein temps, des chercheurs associés généralement non-résidents (universitaires, consultants, éditorialistes, etc.) et des chercheurs invités ( visiting scholars ).

S'agissant de leurs chercheurs à plein temps, les critères de recrutement des Think Tanks différents de ceux des centres de recherche universitaires.

En effet, à l'exception de la RAND (dont 46 % des chercheurs ont un doctorat), les experts des Think Tanks ont moins souvent des diplômes universitaires de niveau doctorat (Ph. D.).

Par exemple, moins de 20 % des chercheurs du Center on Budget and Policy Priorities disposent d'un Ph.D : la plupart sont titulaires d'un Master Degree ou d'un Bachelor Degree en sociologie, en sciences politiques, en politiques publiques ou en droit.

En fait, toutes choses égales par ailleurs, les Think Tanks préfèrent recruter des personnes un peu moins bien diplômées mais disposant d'une expérience professionnelle préalable, notamment dans les milieux du Congrès ou de l'administration : la plupart des experts des Think Tanks sont ainsi d'anciens fonctionnaires ou d'anciens staffers politiques.

Dans la plupart de ses offres d'emplois la Brookings Institution stipule ainsi expressément qu'elle préfère des candidats qui associent des compétences en matière de recherche avec une expérience dans l'administration.

La composition de la division des politiques nationales du Center on Budget and Policy Priorities illustre bien le profil des experts des Think Tanks de Washington.

En effet, les principaux emplois précédemment occupés par les douze experts de cette division en poste en septembre 2000 étaient respectivement : chef d'unité du Congressional Budget Office (CBO), analyste au CBO ; analyste à l'Office of Management and Budget de la Maison Blanche ; chef de bureau des affaires budgétaires d'une agence fédérale ; staffer d'une sous commission permanente de la Chambre des représentants ; staffer de sénateur ; chercheur à l'Urban Institute ; chercheur à la Brookings ; avocat ; salariés d'associations caritatives nationales (deux personnes) et étudiant.

Les Think Tanks les plus prestigieux attirent d'ailleurs des experts de très haut niveau .

Par exemple, la Brookings Institution comptait dans ses rangs au début de 2001 Mme Alice Rivlin, ancienne directrice du CBO et M. Joseph Stiglitz, ancien économiste en chef de la Banque mondiale.

Les motivations des experts des Think Tanks sont diverses.

A titre d'exemple, voici, dans l'ordre, les dix arguments avancés par l' Urban Institute pour attirer des chercheurs :

- la faculté d'influencer les décisions publiques ;

- le fait d'étudier des sujets d'actualité , qui concernent directement la vie quotidienne des Américains ;

- un environnement de travail stimulant ;

- le prestige d'une institution renommée pour la qualité et la neutralité de ses travaux ;

- le fait de travailler en équipe, dans une atmosphère « amicale et décontractée, mais aussi respectueuse » ;

- une expérience de première main du fonctionnement de l'administration fédérale et du Congrès ;

- la diversité intellectuelle des chercheurs de l'institut ;

- les programmes de formation continue ;

- des perspectives de carrière tant interne qu'externe, notamment grâce aux nombreux contacts de experts de l'institut avec des chercheurs et des dirigeants d'autres institutions ;

- une rémunération et des avantages sociaux (notamment en termes de congés annuels) compétitifs par rapport à ceux de l'administration.

Ce dernier point mérite d'être souligné : les Think Tanks attirent les chercheurs les plus brillants parce qu'ils les rémunèrent relativement bien, d'autant plus que les rémunérations offertes par l'institution peuvent parfois se cumuler avec des honoraires de conseil, des vacations d'enseignement, des prestations d'éditorialiste ou la rétribution de conférences.

Enfin, dans les Think Tanks les plus politiquement engagés, l'opportunité de vivre pleinement de ses engagements militants constitue assurément une source de motivation. Dans ces Think Tanks engagés, les chercheurs sont d'ailleurs recrutés sur des critères d'affinités idéologiques. Par exemple, le Cato Institute attend de ses employés qu'ils s'engagent en faveur des principes de la libre concurrence.

Parmi les divers avantages qu'offerts les Think Tanks , il semble bien que la liberté intellectuelle (et la possibilité d'exercer en parallèle des activités d'enseignement et de consultant), ainsi que la faculté de participer activement et personnellement aux grands débats d'actualité, jouent un rôle déterminant.

Mais, il convient également de souligner que les Think Tanks constituent une excellente position d'attente pour des collaborateurs politiquement engagés et un vivier d'experts pour les commissions parlementaires et la Maison blanche.

Les flux de personnels entre les Think Tanks d'une part, les administrations fédérales, le Congrès et les staff s des responsables politiques, d'autre part, s'effectuent ainsi dans les deux sens.

Par exemple, l'ancien directeur des études fiscales du Cato Institute fut récemment recruté au sein de l'équipe de fonctionnaires de la commission conjointe des impôts du Congrès.

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