B. LES FACTEURS DE SUCCÈS ET LES LIMITES DES « OFFICES » DU CONGRÈS

Les offices du Congrès des États-Unis, notamment le Congressional Research Service (CRS), le General Accounting Office (GAO) et le Congressional Budget Office (CBO) constituent aujourd'hui l'une des caractéristiques les plus originales des institutions des États-Unis et sans doute l'un des piliers de la démocratie américaine.

Ces offices jouent ainsi un rôle essentiel en matière de prospective.

En outre, ils contribuent à la qualité technique des débats parlementaires , ainsi qu'à la diffusion d'une expertise et d'une culture communes parmi les membres du Congrès. Le rôle des services de la commission conjointe des impôts suggère d'ailleurs l'utilité d'une expertise parlementaire en matière d'application des mesures fiscales.

Enfin, ces offices contribuent à la transparence des choix publics.

Ils sont toutefois le fruit d'une histoire et d'un contexte constitutionnel singuliers .

Par exemple, contrairement à une idée reçue, le « chiffrage » par le CBO du coût des dispositions législatives en discussion a au moins autant pour fonction de réguler le fonctionnement interne du Congrès que renforcer l'expertise du Congrès face à l'exécutif.

Plus généralement, les missions du CBO sont étroitement liées aux particularités de la procédure budgétaire américaine, caractérisée par une complexité extrême et par les faibles pouvoirs budgétaires de l'exécutif, et de ce fait aux antipodes du « parlementarisme rationalisé » de notre cinquième République : le Congrès des États-Unis reconstruit le budget, alors que le Parlement français ne fait que l'autoriser.

En fait, si les offices du Congrès des États-Unis remplissent des missions exercées en France par des administrations dépendant de l'exécutif, cela résulte notamment de ce que les pouvoirs et les responsabilités du Congrès des États-Unis sont plus étendus que ceux du Parlement français.

Quoi qu'il en soit, l'étude détaillée du fonctionnement des offices du Congrès permet de mettre en évidence certains facteurs explicatifs de leur réussite :

- leur caractère bicaméral , qui leur permet de concentrer des moyens importants ;

- leur indépendance vis-à-vis des organes politiques du Congrès, qui garantit leur crédibilité scientifique ;

- un recrutement diversifié de haut niveau ;

- un accès quasiment illimité à l'information détenue par les administrations publiques ;

- leur transparence méthodologique et la volonté de constituer eux-mêmes des administrations exemplaires ;

- le formalisme des protocoles de saisine et de diffusion, qui préservent notamment les droits de la minorité ;

- le temps . Il a fallu ainsi des années au GAO pour accumuler l'expérience et la crédibilité nécessaires à l'efficacité de ses évaluations de politiques publiques ;

- un programme de travail adapté au calendrier parlementaire, donc des rapports produits en temps utile ;

- des efforts d'information et de pédagogie sur les limites de leurs travaux ;

- la capacité des parlementaires à poser les bonnes questions ;

- enfin, la volonté politique des parlementaires de mettre en oeuvre leurs préconisations.

Même s'ils disposent de moyens considérables, d'experts de très haut niveau, de procédures internes rigoureuses, et de « plateaux techniques » pointus, ces offices ne constituent d'ailleurs pas une panacée .

En matière de prévisions et de projections économiques ou budgétaires, ils se sont ainsi trompés de concert avec les autres institutions d'analyse économique.

De même, on peut souligner que le CBO ne chiffre que les effets directs des dispositions législatives en discussion, et n'essaie jamais d'évaluer les effets « de retour » d'une mesure donnée. Les études du CBO ne prennent ainsi pas en compte l'idée selon laquelle des allégements d'impôt ciblés sur un secteur d'activité pourraient soutenir l'emploi et l'activité de ce secteur, donc les recettes fiscales et sociales.

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