CHAPITRE III -

UNE QUESTION EN SUSPENS :
L'INDEMNISATION DES PRÉJUDICES
OCCASIONNÉS PAR LA CRISE

Lorsque l'actuel système de lutte contre la fièvre aphteuse fut institué, en 1991, bon nombre de voix s'élevèrent pour s'interroger sur les modalités d'indemnisation de la totalité des dommages occasionnés par une éventuelle épizootie de fièvre aphteuse. Force est de constater que depuis lors si l'indemnisation d'une partie des pertes directes a été prévue par plusieurs textes, ceux-ci ont omis de résoudre la délicate question des pertes indirectes. Une situation inacceptable résulte, depuis l'apparition de la crise, de cet état de fait.

I. LE SYSTÈME DE COMPENSATION CRÉÉ EN 1990-1991 DEMEURE TRES INCOMPLET

A. LA DIRECTIVE N° 90/423 ET LA DÉCISION DU CONSEIL EUROPÉEN DU 26 JUIN 1990

Lorsque les partenaires européens ont modifié la directive de 1985 sur la lutte contre la fièvre aphteuse, ils se sont davantage préoccupés de faciliter les mouvements d'animaux, comme le revendiquaient le Royaume-Uni, le Danemark et l'Irlande, que de déterminer les conditions dans lesquelles toutes les victimes d'une épidémie seraient indemnisées des dommages causés par la mise en oeuvre de la nouvelle stratégie de prophylaxie. Les textes adoptés à cette époque traduisent ces préoccupations et se caractérisent par de regrettables lacunes en matière indemnitaire , puisque le dernier considérant de la directive n° 90/423 du 26 juin 1990 prévoit seulement que « des mesures séparées doivent instituer un régime de soutien financier aux Etats membres en ce qui concerne l'abattage, la destruction et autres actions d'urgence ».

Ces mesures sont fixées par une décision du Conseil européen n° 90/424 du même jour dont l'article 2 précise qu'un Etat membre bénéficie de la participation financière de la Communauté pour l'éradication de la fièvre aphteuse dès lors que « les mesures immédiatement appliquées comportent au moins la mise sous séquestre de l'exploitation dès la suspicion et, dès la confirmation officielle de la maladie :

- l'abattage des animaux des espèces sensibles, atteints ou contaminés, ou suspects d'être atteints ou contaminés et leur destruction ;

- la destruction des aliments contaminés ou des matériaux contaminés, dans la mesure où ces derniers ne peuvent être désinfectés ;

- le nettoyage et la désinfection de l'exploitation et de son matériel ;

- la création de zones de protection ;

- l'application de dispositions propres à prévenir le risque de dissémination de l'infection ;

- la fixation d'un délai à observer avant le repeuplement de l'exploitation après abattage ;

- l'indemnisation rapide et adéquate des éleveurs ».

L'article 11 de la même décision prévoit, quant à lui, que, sans préjudice des mesures de soutien à prendre dans le cadre des organisations communes des marchés (OCM) pour soutenir ceux-ci, la participation financière de la Communauté en cas d'apparition de la fièvre aphteuse est égale à 60 % des frais engagés par l'Etat membre au titre :

de l'indemnisation des éleveurs pour :

- l'abattage et la destruction des animaux ;

- la destruction du lait ;

- le nettoyage et la désinfection de l'exploitation ;

- la destruction des aliments contaminés et la désinfection des matériaux contaminés ;

- les pertes encourues par les éleveurs du fait de restrictions à la commercialisation d'animaux d'élevage et d'embouche par suite de la réintroduction de la vaccination d'urgence ;

du transport éventuel des carcasses vers les usines de traitement ;

de toutes autres mesures indispensables à l'éradication de la maladie dans le ou les foyer(s), lesquelles sont définies par la Commission.

On retiendra de ces principes que la Communauté indemnise partiellement les Etats au titre des dépenses qu'ils ont réellement engagées , dans un délai qui, selon les informations transmises à votre rapporteur, peut aller jusqu'à 2, voire 3 ans.

Rien, dans les textes européens, ne vise l'indemnisation des préjudices indirects occasionnés par l'irruption d'une épizootie qui rend pourtant nécessaires diverses mesures administratives telles que des embargos ou des restrictions de la circulation des animaux. Enfin, ces dispositions ne concernent que la compensation des dépenses occasionnées aux éleveurs des foyers touchés par la maladie , à l'exclusion des propriétaires d'animaux victimes d'abattages préventifs et des autres acteurs intéressés, tels que les négociants et les marchés en bestiaux.

Les carences de ces dispositions ont été évoquées lorsque le Parlement français a transposé la directive n° 90-423 précitée.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page