B. UNE RÉFORME QUI S'INSCRIT DANS L'ÉVOLUTION DES LIBERTÉS PUBLIQUES EN EUROPE ET VERS UNE HARMONISATION AVEC LES PAYS DE L'UNION EUROPÉENNE

Le droit positif français commande qu'une réforme intervienne dans le mode de dévolution du nom, pour s'adapter aux principes nouveaux du droit de la famille. Il est aussi nécessaire de prendre en considération l'environnement européen 1 ( * ) .

Depuis plusieurs années, l'évolution des libertés publiques a été sensiblement -et heureusement- soutenue par l'intervention du droit européen. Des actes fondateurs comme les traités, la charte des droits fondamentaux, ont été précédés ou complétés par la jurisprudence de la Cour de justice des communautés ou celle de la Cour européenne des droits de l'Homme.

Il convient à cet égard d'évoquer l'arrêt BURGHARTZ rendu le 22 février 1994 par cette dernière juridiction et qui a rangé le nom dans la sphère du droit au respect de la vie privée et le régime de son attribution au nombre des droits et libertés reconnus par la Convention européenne. Les considérants de cet arrêt ont été repris en 1995 par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe dans une recommandation n° 1271 relative aux discriminations entre les hommes et les femmes pour le choix du nom de famille et la transmission du nom des parents aux enfants. La même assemblée a recommandé au Comité des ministres du Conseil de l'Europe de demander aux Etats membres qui maintiennent dans leur droit des dispositions de caractère sexiste, de prendre les mesures appropriées pour établir une égalité stricte entre le père et la mère pour la transmission du nom aux enfants.

Dans une réponse à une question écrite n° 37445 du 15 novembre 1999 de Mme Marie-Jo Zimmermann (J.O. du 20 mars 2000 p. 1876), Mme la Garde des sceaux considère que la France n'est pas tenue de se soumettre à la recommandation de l'Assemblée européenne. Elle estime que la législation française « ne traduit aucune considération sexuelle ou inégalitaire, mais est fondée sur le mode d'établissement de la filiation propre à chaque famille » ajoutant que dans la famille légitime « l'attribution à l'enfant du nom de son père découle de la présomption de paternité ». Cette argumentation témoigne, à tout le moins, d'un refus de prendre en considération les acquis récents du droit des personnes et d'une volonté certaine de pérenniser un système volens nolens , discriminatoire et inégalitaire puisqu'il postule a priori la primauté du lien de la filiation paternelle sur celui de la filiation maternelle.

Cette position de la Chancellerie, opposée aux recommandations de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, constitue a contrario un encouragement pour les auteurs de la proposition de loi d'amener la législation de notre pays à prendre davantage en compte les acquis européens en matière de libertés publiques.

In fine , on observera que le régime français de dévolution du nom se caractérise par un relatif isolement avec les autres pays d'Europe. Certes, la transmission du nom peut être fixée par des règles subsidiaires qui relèvent de la seule compétence des Etats. Néanmoins, la perspective d'une communauté de destins entre les pays d'Europe et le développement d'une circulation plus ouverte et plus libre des femmes et des hommes à l'intérieur des pays de l'Union européenne, un rapprochement des législations -sinon une uniformisation- seront de nature à simplifier la vie de citoyens européens, à faciliter les échanges et à développer leurs relations.

* 1 Cf annexe 2, la transmission du nom patronymique. Document de travail du Sénat. Série législation comparée, Division des études de législation comparée du service des affaires européenne, février 2000.

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