E. AUDITION DE MME NICOLE ALBY, PRÉSIDENTE DE L'ASSOCIATION EUROPA DONNA FORUM-FRANCE (ASSOCIATION POUR L'INFORMATION DES FEMMES SUR LE CANCER DU SEIN ET L'AMÉLIORATION DE LA PRISE EN C HARGE DE CETTE MALADIE), DU DOCTEUR PASCALE ROMESTAING, RADIOTHÉRAPEUTE AU CHU DE LYON-SUD, VICE-PRÉSIDENTE, ET DU DOCTEUR MARC ESPIÉ, CANCÉROLOGUE À L'HÔPITAL SAINT-LOUIS, MEMBRE DU CONSEIL SCIENTIFIQUE

M. Lucien NEUWIRTH, rapporteur - Nous allons maintenant entendre Mme Nicole Alby.

Mme Nicole ALBY - Quelques éléments de présentation de l'association Europa Donna.

Fondée à Milan en 1994 par le Professeur Véronési, notre association est européenne. Nous sommes l'une des premières associations ayant un objectif politique et militant. Nous ne sommes pas une association de malades, mais une association de femmes citoyennes, malades ou non. Nous sommes soutenus par la Ligue nationale contre le cancer. Nous exerçons une action de lobbying quelque peu différente de celle pratiquée aux Etats-Unis. Elle est reconnue par les institutions nationales et européennes.

Les objectifs de l'Association Europa Donna sont de :

- modifier les prises de décision ;

- faire prendre conscience des enjeux liés au cancer du sein ;

- intervenir auprès des instances politiques et administratives.

Les pays membres d'Europa Donna sont l'Allemagne, l'Angleterre, l'Autriche, la Belgique, la Croatie, Chypre, le Danemark, l'Espagne, l'Estonie, la France, la Hollande, la Hongrie, l'Irlande, l'Israël, l'Italie, la Lituanie, Monaco, la Pologne, le Portugal, la Russie, la Slovénie, la Suisse, la Tchécoslovaquie, la Turquie, l'Ukraine et la Yougoslavie.

Europa Donna-Forum France est une association type 1901, née en 1998 et bénéficiant de l'appui institutionnel de la Ligue nationale contre le cancer. Le conseil scientifique est composé de six membres : les Professeurs Jean-Yves Bobin et Daniel Serin et les docteurs Gilles Errieau, Marc Espié, Marielle Lafont-Picton et Michel Marty. Notre association réunit maintenant plus de 600 adhérentes. Nos partenaires sont la Ligue nationale contre le cancer, la Société française de sénologie et de pathologie mammaire, la Société française de cancérologie privée et un certain nombre d'acteurs industriels. Je tiens à remercie ces derniers, qui ont apporté leur soutien en souscrivant à une charte garantissant l'indépendance de l'Association.

Le premier objectif d'Europa Donna-Forum France est de promouvoir la diffusion et l'échange d'informations précises et d'actualité sur le cancer du sein dans toute l'Europe. L'une des grandes inégalités foncières des femmes face au cancer du sein porte sur l'absence d'informations. A travers notre association, nous souhaitons participer à une amélioration de la situation dans ce domaine, et ce pour toutes les femmes, malades ou non. Notre objectif serait en effet que toute femme de 40 ans, c'est-à-dire à l'âge auquel elle commence à entrer dans la période de risque, sache ce qu'est un cancer du sein et qu'il est possible d'en guérir. L'Association a donc également pour objectifs de promouvoir la surveillance des seins et de souligner la nécessité d'un dépistage de qualité et d'un diagnostic précoce. A propos de notre quatrième objectif -faire campagne pour l'obtention des meilleurs traitements-, je souhaiterais rappeler que 30 % des femmes sont soignées dans des centres où moins de dix cas de cancer sont traités chaque année. Les femmes doivent impérativement savoir qu'elles peuvent avoir accès à un centre disposant d'une équipe multidisciplinaire traitant les cancers du sein. L'inégalité en termes d'information et de soins est donc manifeste.

Les autres objectifs de l'Association sont les suivants :

- demander que soit assuré un soutien psychosocial pendant et après le traitement ;

- plaider pour la formation appropriée de tous les soignants, notamment la formation psychologique ;

- connaître les traitements performants et promouvoir leur développement.

Je partage l'avis de Régine Goinère sur ce sujet. Nous rappelons aux femmes concernées par la maladie qu'un protocole n'est pas dangereux. Par conséquent, elles peuvent demander des informations sur le protocole auquel elles sont soumises.

Les trois derniers objectifs de l'Association sont :

- demander l'évaluation régulière de la qualité des équipements médicaux et techniques ;

- s'assurer que toutes les femmes comprennent parfaitement les choix thérapeutiques qui leur sont proposés, y compris en ce qui concerne l'entrée dans un essai clinique, et qu'elles connaissent leur droit à demander un deuxième avis ;

- promouvoir le progrès dans la recherche contre le cancer du sein.

L'Association organise chaque année depuis 1999 un colloque sur le cancer du sein. Nous cherchons à nous faire connaître des institutionnels, des femmes, des médias et des sociétés savantes. Nous participons aux débats médiatiques et institutionnels. La presse généraliste, médicale et féminine a publié plusieurs articles sur notre association et ses actions. Par ailleurs, en décembre dernier, nous avons organisé un colloque sur le cancer du sein. Présidée par M. Neuwirth, cette rencontre a réuni un certain nombre de parlementaires européens. A cet égard, nous souhaitons que soit créé au Sénat un groupe inter-partis de sénatrices, jouant un rôle de pression sur le thème du cancer du sein. Grâce à M. Neuwirth, un troisième colloque d'informations sera organisé au Sénat le 25 juin 2001.

En conclusion, nous souhaitons que de nouveaux types de relations puissent s'établir entre le médecin et la malade, mais également entre le médecin et la citoyenne, et ce afin de favoriser la politique de dépistage. L'information doit donc être de meilleure qualité et mieux diffusée.

Les moyens dont nous disposons pour mener nos actions sont assurés par les cotisations, les sociétés, les industriels et toutes les bonnes volontés. Parmi nos 600 adhérentes et nos quatre délégations régionales, nous bénéficions du dévouement d'un cercle solide de femmes qui oeuvrent pour ce travail d'information et de soutien.

En tant que psychologue, je souhaiterais dire que les postes prévus par le « plan cancer » ne permettent pas de travailler correctement puisqu'ils ne prévoient que trois ou quatre vacations par centre de lutte contre le cancer. Des problèmes liés au remboursement des actes psychologiques ou à la prise en charge de consultations post-traitement permettant la réhabilitation sont également posés.

Enfin, je voudrais insister sur trois points précis : l'information, le droit des patientes à un deuxième avis et les consultations d'onco-génétique. Je souligne que les femmes ont beaucoup à dire sur ce dernier point, car ces consultations ne sont pas seulement du domaine de la biologie moléculaire, mais mettent en jeu la filiation et le droit des gens à contrôler ou non leur destin.

Si les problèmes de réinsertion sont réels, nous avons insuffisamment évoqué les problèmes d'assurance et d'emprunt. Quand une femme a eu un cancer du sein, il lui est en effet très difficile de contracter un emprunt.

A propos de la liaison entre la médecine de ville et l'hôpital, je tiens à faire part du sentiment d'abandon dont souffrent les femmes venant de quitter des centres hyperspécialisés. Il me paraît important que cette commission puisse entendre des gynécologues de ville et de bons généralistes, car ces professionnels rencontrent généralement les femmes à la fois au début de leur maladie et à l'issue de leur traitement. Or les difficultés de communication sont fréquentes entre la médecine de ville et les hôpitaux.

Je compte sur vous pour que nous puissions à nouveau travailler avec les femmes du Sénat. Je voudrais maintenant donner la parole au Docteur Pascale Romestaing, qui est membre du Conseil d'administration de notre association.

M. Lucien NEUWIRTH, rapporteur - Je vous remercie pour votre présentation sur ce que sont votre association et sa philosophie.

Que pensez-vous de l'âge à partir duquel le dépistage est actuellement effectué en France, des moyens matériels mis en oeuvre et de la mobilisation des professionnels de la santé à cet effet ?

Mme Nicole ALBY - Je crois que ce problème technique sera mieux traité par le docteur Romestaing. Je préciserai toutefois qu'en Italie, une loi vient d'être promulguée autorisant les dépistages à partir de 45 ans, contre 55 à 60 ans en moyenne en Europe.

Dr Pascale ROMESTAING - Je répondrai à cette question à la fois en tant que membre de l'Association et médecin radiothérapeute. J'adhère totalement aux propos de Thierry Philip concernant le dépistage, qui, s'il est organisé de façon généralisée, présente des avantages considérables. Il est nécessaire que les femmes soient informées des limites du dépistage qu'elles ne doivent pas confondre avec la prévention, ni assimiler à une solution miracle. Nous savons que la réduction de la mortalité grâce au dépistage est de 30 % et non de 100 %.

En ce qui concerne l'âge de dépistage, la question est relativement complexe. Des essais randomisés conduits depuis plusieurs années ont montré que le bénéfice du dépistage est significatif pour les femmes de plus de 50 ans et de moins de 70 ans. Avant 50 ans, un essai a toutefois démontré un éventuel bénéfice pour les cancers apparaissant après 50 ans. Je serais donc favorable au dépistage de masse qui présente les avantages d'être organisé et de réaliser des mammographies de qualité. Ce point est important car le radiologue qui effectue dix mammographies par an n'est pas le même que celui qui en réalise 500 ou plus sur la même période. Si la qualité de l'appareil est importante, la qualité de l'interprétation de l'image est également cruciale.

En réalité, la mammographie s'inscrit dans une chaîne dont chaque élément est essentiel. Ainsi, une mammographie interprétée peut conduire à réaliser des examens para-cliniques dans le cas où des anomalies ont été détectées. Un chirurgien ou un radiologue doit alors être capable de réaliser une microbiopsie ou une biopsie à ciel ouvert qui sera interprétée par un anatomopathologiste. En cas de cancer, le chirurgien pourra proposer le traitement le mieux adapté et le moins mutilant possible. Cette chaîne ne peut fonctionner dans les meilleures conditions que dans le cadre d'un dépistage de masse organisé qui n'existe pour le moment que dans 30 départements. La question sur ce sujet porte donc sur la généralisation du dépistage. Je partage tout à fait l'avis de Thierry Philip quant à son intérêt pour la généralisation et l'évaluation de ce test et de ce diagnostic.

En ce qui concerne l'âge, je reste assez fidèle au seuil des 50 ans dans la mesure où des essais randomisés montrent un bénéfice significatif d'une mammographie réalisée tous les deux ans à partir de cet âge.

Notre association insiste également sur les limites du dépistage, parmi lesquelles figure le surdiagnostic qui conduit la malade à développer une maladie qui ne serait sans doute pas apparue du vivant de la malade. A trop chercher, on finit par trouver des choses minuscules que l'on étiquette « cancer » et qui inquiètent parfois inutilement la personne concernée.

Enfin, dans les cas de cancer se déclarant entre deux mammographies -appelés cancers de l'intervalle-, celles-ci peuvent démobiliser la patiente et le médecin. Ces cancers sont de deux types : l'un apparaissant réellement et l'autre n'ayant pas été détecté lors du précédent examen. La patiente peut être faussement rassurée par le simple fait d'avoir subi un test six ou huit mois auparavant. Nous insistons sur les avantages du dépistage mais également sur ses limites qu'il faut bien connaître pour les mesurer et les gérer. Pour répondre à ce dernier objectif, le dépistage de masse représente le moyen le plus efficace.

M. Lucien NEUWIRTH, rapporteur - Je vous remercie pour cette présentation. Avez-vous, Mme Alby, quelque chose à ajouter ?

Mme Nicole ALBY - J'ai demandé au docteur Espié de vous présenter la structure de prise en charge en activité à l'hôpital Saint-Louis, que nos collègues anglo-saxons appellent les breast cancer clinic. Ce modèle fonctionne efficacement, c'est pourquoi je lui ai demandé de vous présenter ses idées dans ce domaine.

M. Lucien NEUWIRTH, rapporteur - Nous sommes preneurs d'idées !

Dr Marc ESPIÉ - Mme Alby m'a initialement demandé de parler du « plan cancer » par rapport au cancer du sein. Je souhaiterais donc tout d'abord aborder ce point qui débouche sur ce que Mme Alby vient d'évoquer.

Le plan du gouvernement s'articule autour de quatre axes :

• La prévention

Aucune mesure n'a été envisagée dans ce domaine. Cette position est logique puisqu'aucune cause n'a jusqu'à présent été identifiée. La base de la prévention repose sur la connaissance de l'épidémiologie. Un registre national des cancers représente à cet égard un outil indispensable, puisqu'il permet notamment d'avoir une réelle connaissance de l'évolution de cette maladie et de ses causes, et ce sans être obligé d'extrapoler à partir des données des Etats-Unis ou des pays scandinaves qui ne correspondent pas à la situation observable dans notre pays.

• Le dépistage

Le plan prévoyait de faire bénéficier les 7,4 millions de femmes françaises âgées de 50 à 74 ans d'un dépistage de masse organisé, et ce dès 2001. Cette mesure n'est restée qu'un voeu pieux puisque seuls 32 départements sont concernés et 40 l'envisagent. Les mesures nouvelles annoncées à travers le plan pour former les professionnels et augmenter la participation des femmes n'ont également pas été généralisées à l'ensemble du territoire national. Il y va dans ce domaine de l'égalité de traitement des citoyennes. Il s'agit donc d'une urgence de santé publique.

• La qualité de la prise en charge et l'amélioration des soins

Cet axe se décompose en six points.

- réduire les inégalités en améliorant l'organisation des soins

Les écarts de mortalité par cancer entre les régions traduisent davantage des problèmes socio-économiques et environnementaux qu'un seul problème d'organisation des soins. Les schémas régionaux d'organisation des soins (SROS) et les programmes régionaux de santé en cancérologie (PRS) vont sûrement dans le bon sens. Il ne faut toutefois pas en attendre de résultats à court terme. Cette rationalisation du système des soins doit être définie en fonction des situations réelles et des besoins afin de prendre en charge les malades atteints de cancers, et non dans une logique de pure rentabilité.

- favoriser l'accès aux techniques innovantes

Notre retard dans ce domaine est très important. En effet, la France, par rapport aux autres pays européens, manque d'IRM (imagerie par résonance magnétique nucléaire) et de Pet-Scan, c'est-à-dire de scanners par émission de positrons. Or ces outils sont nécessaires pour l'amélioration des procédures de diagnostic et de bilan des cancers, et notamment celui du sein. Certains départements n'ont aucun accès à ces techniques. Le dépistage induit un diagnostic plus important de lésions non palpables découvertes par la mammographie. Pour les explorer, des biopsies sous anesthésie locale sont nécessaires. Pour cela, nous manquons en France de tables dédiées pour des biopsies stéréotaxiques à visée diagnostique. Il existe une surcharge de travail dans certains services de radiothérapie. Il s'agit alors moins d'augmenter le nombre d'appareils que de renforcer les appareils présents dans l'environnement de la radiothérapie (scanners, simulateurs, dosimétrie,...). Enfin, le « plan cancer » fait référence aux allogreffes de moelles osseuses. Or il me semble que celles-ci ne sont pas indiquées dans le traitement du cancer du sein.

- mieux prendre en compte l'évolution de la chimiothérapie et de la radiothérapie

Malgré les propos de M. Chérioux, je tiens à préciser qu'en 2001, il existe des inégalités dans l'accès, notamment à la chimiothérapie, liées aux différents modes de financement des secteurs public et privé. Schématiquement, le secteur privé a financièrement intérêt à utiliser des médicaments chers en hôpital de jour, alors que l'administration souhaite que les hôpitaux publics utilisent des médicaments peu onéreux. A cet égard, un groupe de travail a été mis en place dans le cadre du « plan cancer » afin de réfléchir à la réduction de ces disparités.

- renforcer la prise en charge initiale

L'annonce du diagnostic est fondamentale pour le vécu de la maladie par le patient. Le temps dédié à ces consultations est essentiel et doit donc être pris en compte. Une formation des professionnels à la relation médecin-malade est nécessaire. Des certificats de psychologie doivent également être inclus dans le cadre des études médicales. La possibilité de pouvoir rencontrer une psychologue est insuffisante. A cet égard, il faut savoir que la rémunération de cette dernière catégorie de professionnels est généralement insuffisante compte tenu de leur formation -de niveau bac+5. Un groupe de travail a également été mis en place sur ce sujet.

- améliorer l'accès aux tests de prédisposition génétique

5 à 10 % des cancers du sein sont liés à une mutation chromosomique héréditaire. D'un point de vue statistique, le cancer du sein représente donc probablement la maladie génétique la plus importante. Un groupe de travail a également été mis en place sur ce sujet. La prise en charge des tests réalisés est envisagée. Il convient cependant de noter que jusqu'à présent la majorité de ces tests ont été financés par des contrats de recherche ou des organisations caritatives. Ainsi, lorsque le financement n'est plus assuré, les tests s'arrêtent. Les résultats ne sont alors pas délivrés aux malades.

- améliorer les pratiques et la prise en charge à domicile

Je ne ferai pas de commentaires particuliers sur ces deux derniers points.

• L'amélioration des conditions de vie et des droits des malades

Ce dernier axe vise à renforcer la garantie du respect des droits des personnes atteintes de cancer et à améliorer l'information des personnes concernées et de leur famille. Il convient toutefois de comprendre que, si l'information dans ce domaine est fondamentale, celle-ci ne permettra jamais d'atteindre une égalité entre le médecin, qui « sait », et le malade, qui de par sa maladie, est dans l'incapacité psychologique d'être neutre et objectif par rapport à ce qu'il doit vivre. La notion nord-américaine de contrat entre le malade et le médecin m'apparaît donc comme relativement illusoire.

Par ailleurs, la prise en charge psychologique individuelle et personnalisée doit être proposée à l'ensemble des malades qui en font la demande. Les groupes de parole sont certes utiles, mais ne doivent pas remplacer cette prise en charge individuelle. Les associations de malades jouent un rôle important qui doit être valorisé, y compris dans le fonctionnement des structures hospitalières et des services médicaux.

A propos des nutriments oraux et des prothèses, les bandages nécessaires au traitement des lymphodèmes, les manchons et les prothèses capillaires sont insuffisamment remboursés par la sécurité sociale qui propose un remboursement de 500 francs pour une prothèse capillaire coûtant 2.000 francs. Se pose également le problème de la cotation du drainage lymphatique manuel pour les patientes dont le bras est trop gros et qui est généralement sous-côté par la sécurité sociale. Les kinésithérapeutes pratiquent peu fréquemment ce type de soins, qu'ils exercent avec une compétence par conséquent assez limitée.

Je n'ai relevé dans le « plan cancer » aucun élément spécifique au cancer du sein concernant les soins palliatifs et la douleur. Quant aux cancers professionnels et aux cancers du sein, l'absence d'un registre épidémiologique doit être soulignée puisqu'un tel outil permettrait de faire le lien entre une exposition et le développement ultérieur de la maladie.

Dans le domaine de la recherche, le « plan cancer » considère l'ARC et la Ligue nationale contre le cancer comme les deux seuls acteurs. Or il ne me paraît pas normal que la santé publique s'appuie exclusivement sur des organisations qui ont certes un rôle essentiel, mais qui ne doivent pas conduire les pouvoirs publics à se désengager vis-à-vis de la recherche médicale en France.

Enfin, l'amélioration de la prise en charge du cancer du sein passe par des équipes spécialisées en sénologie, et ce du dépistage au traitement. La mise en place de structures dédiées est une des pistes qui doit être envisagée et favorisée dans les différents lieux déjà existants (cliniques, centres hospitaliers généraux, CHU, centres de lutte contre le cancer) ou créés à cette fin.

M. Lucien NEUWIRTH, rapporteur - Je vous remercie.

M. Claude HURIET, président de la mission - J'ai retenu que l'association Europa Donna était uniquement ouverte aux femmes, en bonne santé ou atteinte d'un cancer du sein. Comment justifiez-vous ce ciblage puisqu'il existe d'autres cancers féminins ? Le cancer du sein est certes le plus fréquent et le plus dramatique quant à ses effets, mais j'imagine que cela n'est pas la seule explication. Votre association envisage-t-elle de s'ouvrir ?

Mme Nicole ALBY - Cette question me tourmente. Europa Donna a été fondée par le Professeur Véronési qui était le spécialiste du cancer du sein en Italie. Il a initialement souhaité attirer l'attention de la Commission européenne sur ce problème, qui s'inscrit dans une problématique de société beaucoup plus large. Personnellement, je trouverais normal que tous les cancers féminins soient regroupés. Je n'ai pas encore l'autorité pour défendre ma position vis-à-vis de mes collègues européennes. Je partage donc votre avis, d'autant plus que notre association regroupe à la fois des femmes malades et non malades. L'effet de solidarité déjà présent pourra alors être démultiplié.

Dr Marc ESPIÉ - En France, le cancer du sein concerne 35.000 nouveaux cas et 11.000 décès, contre 3.000 nouveaux cas de cancer du côlon. Cette différence représente de fait une spécificité du cancer du sein. De plus, nous disposons pour ce type de cancer de moyens de dépistage efficaces. Malheureusement, la situation en matière de moyens de santé publique n'est pas identique pour le cancer de l'ovaire.

M. Lucien NEUWIRTH, rapporteur - L'insuffisance de participation de tous les gouvernements qui se sont succédé depuis 30 ans est peut-être liée à l'existence de la Ligue nationale contre le cancer et de l'ARC, qui assuraient une grande partie de la recherche sur le cancer. Leurs actions ont quelque peu justifié l'immobilisme des politiques vis-à-vis de cette question de santé publique.

Dr Marc ESPIÉ - Vous avez certainement raison. Il y a effectivement eu un déplacement vers ces organisations, mais également vers l'industrie pharmaceutique. En effet, une grande partie des travaux de recherche clinique effectués en France en cancérologie est financée par l'industrie, avec tous les problèmes relationnels que cela peut entraîner entre les médecins et les industriels.

M. Lucien NEUWIRTH, rapporteur - Je vous remercie.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page