C. LES CASINOS

18.- Les casinos et la loi Sapin

La loi Sapin paraît à la Cour des comptes inadaptée aux casinos (qualification de service public mal comprise, mise en concurrence difficile).

Faut-il exclure ces établissements de son champ d'application ou établir des cahiers des charges types et des modèles spécifiques de rapport annuel des délégataires ?

19.- S'agissant de la Commission supérieure des jeux

Son existence, dans le contexte actuel, est éminemment utile mais elle gagnerait à se concerter davantage avec ceux dont elle examine les cas.

L'opinion d'un maire qui sollicite une autorisation d'ouverture d'un casino, ses arguments touchant au développement durable de la commune, méritent considération.

Les professionnels concernés, d'autre part, devraient avoir leur mot à dire.

Si l'Etat voulait bien définir et soutenir avec un peu de constance une politique des jeux, donner des objectifs de développement des différentes filières, la CSJ en serait instruite et pourrait s'affranchir de sa ligne actuelle qui, faute de consignes, s'apparente plus à un frein qu'à toute autre chose.

Plus important : la composition de la CSJ fait appel à un grand nombre de hauts fonctionnaires experts et compétents, mais exclut tout représentant de la profession à la différence des instances anglo-saxonnes. Elle dispose, grâce au travail de la Sous-direction des libertés publiques et à celui des rapporteurs, de tous les éléments des dossiers.

Cependant, elle n'émet qu'un simple avis laissant au seul ministre de l'Intérieur le pouvoir de décision et de motivation.

De deux choses l'une : ou la CSJ est compétente et représentative et elle peut « décider », ou elle ne l'est pas et l'examen des demandes revient au cabinet du ministre instruit par les services.

Votre rapporteur estime qu'il faut retirer au ministre de l'Intérieur son pouvoir régalien actuel de décision en matière d'autorisation des casinos : cela aurait l'avantage de lui éviter d'être soupçonné, si sa décision s'écarte de l'avis de la Commission, d'avoir fait preuve de favoritisme.

Dans l'hypothèse où la CSJ exercerait à la fois les pouvoirs d'instruction et de décision, il est évident qu'elle doit pouvoir recourir aux moyens des sous-directions des courses et des jeux et des libertés publiques qui doivent continuer à jouer le rôle essentiel qui est le leur actuellement.

Après tout, les Autorités de régulation, créées récemment pour intervenir dans des secteurs industriels majeurs, comme les Télécom (ART) ou l'Electricité (CRE), disposent de moyens importants d'expertise et de pouvoirs étendus de décision et de sanction .

A l'inverse, si l'Etat, qui aura adopté bientôt (on peut l'espérer) une politique des jeux pour la France, ne dote pas la CSJ de tels moyens qui permettraient d'étendre éventuellement ses compétences au-delà du secteur des casinos, celle-ci sera inéluctablement supplantée par un autre organisme chargé de réguler ce domaine.

Dans la loi sur les jeux, que le Rapporteur appelle de ses voeux, la CSJ doit donc voir son rôle accru et ses pouvoirs étendus, sauf à créer une véritable autorité indépendante de régulation.

Une contrepartie s'impose cependant : comme dans tous les cas où un pouvoir est conféré, les « décisions d'une autorité » doivent pouvoir faire l'objet de recours ; on le sait, ce n'est pas pratiquement le cas aujourd'hui, même si c'est théoriquement possible, les opérateurs ne pouvant que se plier aux oukases d'un ministère aussi autoritaire.

Une autre contrepartie sans doute aussi : de même que l'ART communique beaucoup, et de manière très précise, sur tous les sujets y compris sur ceux qui « fâchent », une CSJ dotée de tels pouvoirs aurait l'obligation d'être transparente et expressive .

20.- Quant un casino fait une demande de machines à sous, il est anti-économique de lui faire attendre un an, voire plusieurs années , son autorisation .

De même, « saucissonner » cette autorisation en plusieurs tranches ne fait que ralentir, voire compromettre la montée en puissance de l'établissement.

En outre, un tel frein ne profite qu'aux groupes importants de casinos qui peuvent, seuls, supporter un long différé de la rentabilisation de leurs investissements.

21.- La fiscalité des casinos est certes très lourde, mais surtout extrêmement compliquée.

Pas moins de 14 prélèvements, impôts et taxes se succèdent, se superposent et s'entrecroisent.

Il faut simplifier au moins le système des prélèvements de l'Etat et celui des divers abattements.

Si l'Etat va jusqu'au bout de son projet de réformer l'imposition du produit brut des machines à sous en substituant, à la base, le produit réel au produit théorique, cette modification devrait logement faire partie d'une réforme d'ensemble.

22.- Les tranches du barème du prélèvement progressif des casinos n'ont pas été actualisées depuis... 1988 !

Ceci n'est pas équitable et doit être corrigé.

23.- La perception du droit de timbre (au profit de l'Etat), droit d'entrée journalier aux salles de jeux traditionnels des casinos, devrait être supprimée.

Son rapport est minime et il est contre productif pour la survie de jeux qui ont beaucoup de mal à résister à l'engouement pour les « bandits manchots ».

Sa suppression ouvrirait peut-être une piste pour concevoir un contrôle d'entrée centralisé pour toutes les catégories de jeux permettant de filtrer les personnes interdites à tous les jeux (machines et tables).

24.- La profession de casinotier ne peut plus longtemps se dispenser de posséder, d'une manière ou d'une autre, un système de formation des personnels .

Il ne serait pas difficile, par exemple, de créer dans les lycées techniques une telle formation.

25.- Il n'est pas raisonnable d'interdire aux casinos d'un même groupe de muter d'un établissement à l'autre certains personnels quand apparaissent des besoins de remplacements occasionnels.

26.- La politique des interdits de jeux est sage et bien appliquée pour ce qui concerne les jeux traditionnels des casinos, mais rien n'existe pour les machines à sous .

Or, 90 % du chiffre d'affaires de ces établissements est fait avec ces machines et l'on peut vraiment supposer que le pourcentage de joueurs compulsifs dans ce secteur doit être au moins le même que pour les jeux traditionnels.

Il est urgent d'imaginer et de mettre en place un système aussi efficace que celui des interdits de jeux volontaires actuels.

Ce n'est pas facile car, d'une part, l'entrée aux salles de machines à sous est totalement libre et ne fait appel à aucun contrôle et, d'autre part, le nombre d'entrées y est considérable (plus de dix fois supérieur à celui des salles de jeux).

De toutes les façons, la gestion du fichier central des interdits de jeux du ministère de l'Intérieur doit être modernisée et les mises à jour de ce fichier devrait être transmises aux fichiers informatiques des casinos par une liaison, sinon « on line » mais au moins hebdomadaire et automatique.

On pourrait aussi envisager le recours à des technologies nouvelles « biométriques » (identification automatique par caméra ou lecture optique d'empreintes digitales).

27.- Cybercasinos et loteries sur Internet

L'Etat ne peut plus longtemps négliger le développement rapide des jeux sur Internet. L'interdiction internationale se lézarde et, en même temps, se multiplient les sites sauvages, hébergés ou non dans les paradis fiscaux ou des îles bienveillantes.

Les joueurs n'ont aucune garantie d'aucune sorte. La plupart des banques refusent la couverture des cartes bancaires. Les jeux échappent à toute fiscalité et ils représentent une très remarquable filière de blanchiment de l'argent.

Les casinotiers français réclament de l'Etat qu'il les autorise à ouvrir des casinos virtuels apportant aux joueurs toutes les garanties dont ils jouissent dans les casinos « sédentaires ».

Devant le silence persistant des autorités, le groupe Partouche vient d'ouvrir ostensiblement un site, à l'étranger, géré par un étranger. Il a agi, ainsi, en bravant la loi, parce que l'Etat vient, en revanche, d'autoriser la Française des jeux à ouvrir une loterie sur Internet : deux poids, deux mesures.

Votre rapporteur propose que l'Etat, d'urgence, se penche sur le problème, légalise et autorise ces pratiques en s'entourant des précautions requises. Indirectement, une telle mesure profitera aux jeunes industriels français dont le savoir-faire informatique dans ce domaine ne trouve pas pour l'instant à s'employer.

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