EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenue le mercredi 24 juillet 2001 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a entendu une communication de MM. Eric Doligé, rapporteur spécial des crédits pour la ville , et Auguste Cazalet, rapporteur spécial des crédits des PME, du commerce et de l'artisanat , sur la mission de contrôle qu'ils ont menée sur l'Etablissement public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA).

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial du budget des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat , a déclaré que l'EPARECA, qui employait quinze personnes, était un établissement public peu connu. Il a estimé qu'il s'agissait pourtant d'un élément essentiel de la politique de la ville, puisqu'il avait pour fonction d'acheter et de réhabiliter des centres commerciaux en difficulté dans des quartiers sensibles. Il a rappelé que l'EPARECA avait été créé par le pacte de relance pour la ville du 14 novembre 1996. Il a indiqué qu'il était financé par une dotation initiale de l'ordre de 20 millions d'euros, prélevée sur l'excédent de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA), qui servait à financer les aides au départ accordées par le régime de retraite des commerçants et artisans.

Il a déclaré que ce contrôle, effectué avec M. Eric Doligé, avait donné lieu à dix auditions et quatre déplacements. Il a précisé que ceux-ci avaient permis d'effectuer un contrôle sur pièces et sur place au siège de l'EPARECA, à Tourcoing, et la visite de cinq centres commerciaux, dont deux avaient été réhabilités.

M. Auguste Cazalet a affirmé que globalement, l'impression se dégageant de cette mission de contrôle était que l'EPARECA était un instrument utile, mais que si rien n'était fait pour résoudre certains des problèmes structurels des banlieues, notamment en matière de sécurité, les résultats de son action risquaient de ne pas être durables.

Il a considéré que ce n'était pas à cause d'une insuffisance de la demande que le commerce était peu développé dans les quartiers sensibles. Selon les statistiques disponibles, la consommation de produits alimentaires y est en effet analogue à la moyenne nationale. Il a déclaré que leurs habitants ne pouvaient pas y effectuer les achats dont ils avaient besoin, ce qui causait des difficultés aux nombreux ménages (environ un tiers) qui ne possédaient pas de voiture. Dans les zones franches urbaines, le nombre de commerces avait connu de janvier 1997 à décembre 1999 une plus faible progression que celui des autres entreprises (27 %, contre 82 % en moyenne).

Le rapporteur spécial a ensuite estimé que divers problèmes dissuadaient les commerçants de s'implanter dans les quartiers sensibles : une urbanisation réalisée dans de mauvaises conditions, l'insécurité, l'éclatement de la propriété des centres et leur mauvaise conception architecturale. Il a estimé en particulier que l'insécurité constituait un coût insupportable pour le commerce, les vols à l'étalage pouvant écraser les marges commerciales. Selon l'EPARECA, selon lesquels le vol à l'étalage pouvait représenter jusqu'à 4 % des ventes, auxquels il fallait ajouter 2 % correspondant à la consommation sur place et à la « casse ». Selon l'EPARECA, le vol à l'étalage généralement admis par les supermarchés représente 1 % du chiffre d'affaires. M. Auguste Cazalet a par ailleurs cité l'exemple d'un centre commercial dont le léger bénéfice était absorbé par le coût des vigiles.

M. Eric Doligé, rapporteur spécial du budget de la ville , a souligné la situation dramatique du commerce dans les banlieues. Il a indiqué que M. Cazalet et lui-même avaient été à l'origine relativement sceptiques quant à l'efficacité d'un organisme tel que l'EPARECA. Ce dernier, créé par la loi en 1996, n'est devenu opérationnel qu'au début de 1999. Il a ensuite indiqué qu'il n'avait pas semblé évident qu'un établissement public puisse jouer un rôle efficace dans le développement du commerce dans les quartiers sensibles, compte tenu du caractère en grande partie structurel des phénomènes en cause. Il a indiqué qu'après cinq mois de travaux, M. Cazalet et lui-même avaient été amenés à modifier ce point de vue, et à considérer que l'établissement leur avait révélé son utilité.

Les rapporteurs spéciaux ont effet jugé que l'un des problèmes essentiel des centres commerciaux de banlieue était l'éclatement de la propriété, et que ceci avait pour conséquence l'impossibilité d'organiser ces centres de manière cohérente. Il a indiqué que l'EPARECA intervenait en rachetant les magasins, en les réaménageant, en les restructurant le cas échéant, et en les louant à des commerçants choisis pour constituer une offre cohérente, la perspective à moyen terme étant de revendre le centre à une entité unique. Il a cependant estimé que, compte tenu du caractère récent des opérations réalisées, il était peut-être trop tôt pour affirmer avec certitude que l'action de l'EPARECA avait été durablement efficace. Il a en outre considéré que l'EPARECA n'était pas concurrent d'autres investisseurs immobiliers, tant privés que publics, qui ne s'intéressaient pas, ou très peu, aux quartiers concernés. Il a en particulier indiqué que la caisse des dépôts et consignations recherchait une rentabilité de 5 %, alors que l'EPARECA avait pour seul objectif financier de ne pas être déficitaire.

M. Eric Doligé, rapporteur spécial du budget de la ville , a jugé que l'un des principaux problèmes de l'EPARECA était son sous-dimensionnement. Ainsi, sur la centaine de demandes jugées recevables par l'EPARECA, 50 n'ont pas encore été prises en compte, 50 sont en cours d'étude et seulement 6 correspondent à une opération terminée. Trente ans seraient dans ces conditions nécessaire pour réhabiliter l'ensemble des centres commerciaux potentiellement concernés. M. Eric Doligé a donc proposé de créer de nouveaux établissements publics, analogues à l'EPARECA et localisés en diverses parties du territoire.

Il a estimé que le cadre général des interventions de l'EPARECA n'était pas satisfaisant, le cadre juridique étant particulièrement lourd, avec une tutelle de sept ministres ou ministres délégués. Lorsque l'EPARECA décide d'investir en partenariat dans une opération, et donc de créer une société, un arrêté interministériel est nécessaire, procédure de quatre à six mois. Il a ajouté que l'EPARECA devait demander une garantie lorsqu'il empruntait à la Caisse des dépôts et consignations. Il a indiqué que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie interdisait à l'EPARECA de constituer une holding regroupant toutes ses filiales (ce qui permettrait d'alléger la tutelle lors des créations de société), et l'obligeait à appliquer le code des marchés publics, ce que la loi n'imposait pas.

Pour conclure, M. Eric Doligé, rapporteur spécial du budget de la ville , a affirmé que l'insécurité jouait un rôle essentiel dans les problèmes du commerce en banlieue. Il a en particulier estimé que le coût de la petite délinquance pouvait suffire à rendre un commerce non rentable. Il a indiqué que M. Cazalet et lui-même formulaient 17 propositions pour redynamiser le commerce en zone urbaine sensible.

M. Paul Loridant a indiqué qu'il avait demandé à l'EPARECA de réhabiliter un centre commercial de la commune des Ulis, dont il était maire, mais que celui-ci avait jugé que des centres commerciaux plus délabrés devaient avoir la priorité. Il a estimé que l'existence d'un organisme tel que l'EPARECA était justifiée, et a souligné que le secteur privé, de même que la Caisse des dépôts et consignations, s'intéressaient peu aux centres commerciaux des zones urbaines sensibles. Il a considéré que le financement de l'EPARECA par la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat était légitime, les grandes surfaces étant en grande partie responsables de la situation difficile du petit commerce.

M. Jacques Chaumont s'est interrogé sur le régime fiscal de la démarque inconnue.

M. Jean Arthuis, président , a estimé que la grande distribution devait supporter une partie de la charge de la sécurité dans ses magasins.

A l'issue de ce débat, la commission a donné acte à MM. Auguste Cazalet et Eric Doligé de leur communication et a décidé d'autoriser la publication de leurs conclusions sous forme d'un rapport d'information.

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