B. LES CONDITIONS D'UNE REPRISE EN 2003

Des incertitudes géopolitiques (éventualité d'une guerre en Irak) affectent les prévisions pour 2003. Il est cependant très difficile, pour les économistes, de modéliser ce type d'incertitudes. Les prévisions de court terme posent ainsi, de manière conventionnelle, l'hypothèse d'une stabilité des cours du pétrole sur l'année considérée. L'OFCE retient l'hypothèse d'une stabilisation, en 2003, des cours du pétrole à un niveau, assez élevé, de 28 dollars le baril.

1. Scénario de reprise en 2003

La reprise française en 2003 reposerait principalement, pour l'OFCE, sur une lente remontée de l'investissement des entreprises et sur un effet favorable des variations de stocks.

Prévisions de court terme 2002-2003

2001

2002

2003

PIB total en volume ( évolution en %)

1,8

0,9

1,8

Importations

0,8

0,2

5,3

Consommation des ménages

2,7

1,7

1,6

Consommation des administrations

2,4

2,7

1,9

Investissement :

- Investissement productif

3,3

- 0,7

0,4

- Investissement logement

- 0,8

0,4

1,5

Exportations

1,5

0,6

5,3

Variations de stocks ( contribution )

- 1

- 0,7

0

Taux de chômage ( en points,
en moyenne
)

8,8

9,1

9,3

Solde des administrations publiques ( en points de PIB )

- 1,5

- 2,6

- 2,9

La plupart des prévisionnistes s'attendent aussi à une légère reprise de la consommation, qui viendrait conforter la croissance. L'OFCE se distingue en prévoyant un léger tassement de la consommation l'année prochaine.

On observe que les variations de stocks jouent un rôle important pour expliquer l'écart de croissance attendu entre 2002 et 2003. La reprise de l'investissement est un autre élément d'explication avancé. Or, les variations du stock de capital, comme les variations des stocks de marchandises, sont difficiles à mesurer et à modéliser. Les prévisions relatives à ces grandeurs revêtent donc un certain caractère de fragilité. Il convient, de ce fait, de considérer ces prévisions pour 2003 avec prudence.

2. En Europe, une combinaison des politiques économiques peu expansionniste

Les pouvoirs publics peuvent, par la combinaison des instruments de politique monétaire et budgétaire ( policy-mix ) agir sur la croissance, tout du moins à court terme. Il convient, dès lors, de s'arrêter un instant sur les orientations de la politique économique européenne, ainsi que sur celles de nos principaux partenaires.

La politique monétaire menée par la Banque centrale européenne apparaît peu expansionniste. Depuis plus d'un an, la BCE a laissé inchangé son taux minimal de refinancement à 3,25 %. Vu la faiblesse de l'investissement et le ralentissement de l'inflation dans les grands pays de la zone euro, cette position attentiste peut être jugée plutôt restrictive, d'autant que l'euro s'est récemment apprécié face au dollar.

Il est vrai que l'inflation devrait dépasser les 2 % en 2002, c'est-à-dire excéder le plafond que s'est fixé la BCE. On peut cependant regretter que la Banque centrale européenne ne se montre pas plus volontariste, comme son homologue américaine, pour soutenir l'activité.

La politique budgétaire des Etats membres de la zone euro est contrainte par les règles du pacte de stabilité et de croissance. En 2002, le déficit public de l'Allemagne pourrait dépasser la limite prévue par le pacte (3 % du PIB). Il s'en rapprocherait en France, et, dans une moindre mesure, en Italie. Cette situation dégradée des finances publiques des grands Etats de la zone euro rend peu envisageable des mesures de relance budgétaire supplémentaires. Au contraire, il est vraisemblable que les politiques budgétaires deviendront plus restrictives en 2003, plusieurs Etats ayant pris, auprès des instances communautaires, des engagements de réduction de leurs déficits publics.

Prévisions de la Commission relatives au solde des administrations publiques des Etats de la zone euro

2002

2003

Allemagne

- 3,8 %

- 3,1 %

France

- 2,7 %

- 2,9 %

Italie

- 2,4 %

- 2,2 %

Espagne

0,0 %

- 0,3 %

Pays-Bas

- 0,8 %

- 1,2 %

Belgique

- 0,1 %

0,0 %

Autriche

- 1,8 %

- 1,6 %

Portugal

- 3,4 %

- 2,9 %

Irlande

- 1,0 %

- 1,2 %

Finlande

+ 3,6 %

+ 3,1 %

Grèce

- 1,3 %

- 1,1 %

Luxembourg

+ 0,5 %

- 1,8 %

MOYENNE Zone euro

- 2,3 %

- 2,1 %

Aux Etats-Unis, le policy-mix apparaît nettement plus expansionniste. Les autorités fédérales ont adopté, dès 2001, des mesures de soutien budgétaire. Les Etats-Unis sont passés, en deux ans, d'une situation d'excédent à une situation de net déficit ; le déficit américain devrait avoisiner les 2,8 points de PIB en 2002 et 2003. La politique monétaire vient, elle aussi, soutenir l'activité. Lors de la dernière réunion de son comité de politique monétaire, en date du 6 novembre 2002, la Réserve fédérale américaine a abaissé de 50 points de base son principal taux directeur, le ramenant ainsi à 1,25 %. Compte tenu de l'inflation (qui devrait être de l'ordre de 1,2 % en 2002), les taux d'intérêt réels sont proches de zéro. Il est vraisemblable que cette orientation expansionniste de la politique économique soit maintenue en 2003.

Cette orientation expansionniste de la politique économique aux Etats-Unis ne doit cependant pas faire oublier que l'économie américaine reste caractérisée par d'importants déséquilibres. L'économie mondiale s'exposerait à de sévères ajustements, si ces déséquilibres venaient à être brutalement corrigés.

L'endettement des ménages américains est une première cause de préoccupation. A cet égard, les évolutions observées depuis un an ont été assez contradictoires. Les ménages américains ont tiré parti de la baisse des taux d'intérêt, initiée par la FED en 2001, pour renégocier leurs emprunts bancaires à des taux plus avantageux. Mais les nouvelles marges de manoeuvre financières, que la baisse des taux leur a permis de dégager, n'ont pas été affectées au désendettement : elles ont soutenu la consommation, au besoin via de nouveaux emprunts. En revanche, les baisses d'impôt décidées par le Gouvernement fédéral ont, semble-t-il, été utilisées par les ménages pour relever leur taux d'épargne, passé de 1 à 3,5 % entre 2001 et 2002. L'endettement des ménages se maintient pourtant à un niveau élevé, supérieur à 100 % du revenu disponible brut, soit un niveau quasiment double de celui observé en Europe. On ne peut exclure, à court terme, l'amorce d'un mouvement de désendettement des ménages, qui viendrait peser sur la consommation, et donc, sur la croissance.

La deuxième source d'incertitudes tient au lourd déficit de la balance courante américaine. Après une diminution en 2001 (à 417 milliards de dollars, en baisse de 9 % par 2000), il devrait croître à nouveau en 2002 (les chiffres du premier trimestre indiquent un déficit qui s'élèverait à 420 milliards de dollars en rythme annuel). Or, les flux de capitaux étrangers servent, de plus en plus, à financer les déficits publics, et de moins en moins l'investissement privé. Cette situation, qui répond au creusement du déficit public et à la montée des primes de risques imposées aux entreprises américaines, pourrait exercer une pression à la baisse sur le taux de change du dollar. Le dollar s'est déjà déprécié de 11 % par rapport à l'euro au cours du premier semestre 2002. Ces variations de change réduisent la compétitivité-prix des exportations de la zone euro. D'après les simulations de la direction de la Prévision, une dépréciation de 10 % du dollar tendrait à exercer un effet négatif, de l'ordre de un demi-point de PIB, sur l'activité de la zone euro, et de la France, à l'horizon de deux ans.

Il convient, pour terminer, de dire quelques mots du Japon, pays dans lequel la politique économique devrait rester fortement expansionniste. Le déficit public devrait avoisiner 8 % du PIB en 2002 comme en 2003, et les taux d'intérêt de court terme pratiqués par la Banque du Japon sont nuls. Mais la persistance d'une situation de déflation, depuis plusieurs années, ainsi que l'insuffisance des réformes structurelles, limitent l'efficacité de la politique macroéconomique.

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