E. PRENDRE EN COMPTE LA DÉCENTRALISATION

1. Les collectivités locales financent majoritairement les infrastructures de transports

Les collectivités locales participent de manière essentielle et prépondérante au financement des infrastructures de transports .

En 2001, les départements ont ainsi dépensé 2,9 milliards d'euros, les régions 1,8 milliard d'euros, et les communes de plus de 10.000 habitants 1,1 milliard d'euros.

Le total des dépenses des collectivités locales en faveur des investissements de transports a représenté 8 milliards d'euros en 2000.

Ventilation fonctionnelle des dépenses en capital des collectivités locales pour les transports

(en millions d'euros)

Transport

Route

Route et

Transport

Voies

Transport

Transport

collectif

et voirie

transport

ferroviaire

navigables

maritime

aérien

Total

urbain

urbaine

routier

1997

1 719,9

1 840,2

2 906,6

1,7

8,2

27,1

4,1

6 507,9

1998

1 693,7

1 803,3

3 149,6

343,8

8,5

32,9

3,4

7 035,2

1999

1 694,5

1 803,6

3 717,9

366,2

9,1

30,9

3,2

7 625,5

2000

1 718,4

1 996,3

3 847,9

489,2

7,8

35,7

4,3

8 099,6

Source : Commission des comptes des transports de la Nation - Direction générale de la comptabilité publique, DAEI/SES

Par comparaison, les dépenses en capital des administrations publiques centrales ont représenté 3,5 milliards d'euros la même année .

Les dépenses en capital de transport des administrations centrales

(en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

Fonctionnement

10 397

10 443

10 458

10 976

11 603

Capital

3 476

3 506

3 857

3 583

3 506

Total

13 873

13 949

14 315

14 559

15 108

Sources : DGCP, DAEI/SES

La dernière ventilation connue des dépenses de l'Etat date de 1998. Elle permet de constater que les dépenses d'exploitation, qui s'élèvent à 10,5 milliards d'euros, sont consacrées pour un peu plus de la moitié au secteur ferroviaire (5,7 milliards d'euros), le reste allant en priorité au transport routier (1,4 milliard d'euros), aux transports collectifs urbains (856 millions d'euros), et aux voies navigables (772 millions d'euros).

Concernant les dépenses en capital , le secteur ferroviaire est également prioritaire (1,5 milliard d'euros) devant le secteur routier (1 milliard d'euros).

On notera enfin que le transport maritime et le transport aérien sont les deux modes qui absorbent le moins de financements de l'Etat, qu'il s'agisse d'exploitation ou d'investissement.

Ventilation par fonction des dépenses des APUC pour les transports en 1998

(en millions d'euros)

Transport

Route

Services

Route et

Transport

Voies

Transport

Transport

Total

collectif

et voirie

communs

transport

ferroviaire

navigables

maritime

aérien

urbain

urbaine

routier

Dépenses d'exploitation

856,8

38,3

746,2

1 462,9

5 761,4

777,2

359,5

443,9

10 446,1

P51 Formation Brute de Capital Fixe

0,0

464,7

6,7

1 059,1

0,0

117,8

58,4

0,0

1 706,7

D92 Aides à l'investissement

147,4

6,6

22,9

18,6

1,1

0,0

32,0

35,7

264,2

D994 Autres transferts en capital

0,0

0,0

0,0

0,0

1 524,5

0,0

0,0

0,0

1 524,5

NP11 NP2 Acquisitions nettes de

cessions d'actifs corporels et incorporels

0,0

0,0

-0,2

0,0

0,0

1,1

0,0

0,0

0,9

Dépenses en capital

147,4

471,2

29,4

1 077,7

1 525,6

118,9

90,4

35,7

3 496,3

Total

1 004,2

509,5

775,7

2 540,6

7 286,9

896,1

449,9

479,6

13 942,4

2. Compenser les transferts de charge par des ressources pérennes

L'audit relève que la participation des collectivités locales est traditionnellement concentrée sur le réseau national non concédé aménagé dans le cadre des contrats de plan. Mais les collectivités locales sont aussi sollicitées pour le financement des nouvelles sections autoroutières (ex : A 28) et pour les grands projets ferroviaires (TGV Est) 26 ( * ) .

L'interrogation porte donc sur l'avenir des financements assurés par les collectivités locales . Le transfert annoncé d'une partie du réseau routier national aux départements va conduire à leur faire financer l'entretien d'un réseau très important et nécessitera des transferts de ressources adaptés.

Par ailleurs, en prenant en comme référence la récente concession de l'autoroute A 28, votre rapporteur spécial ne peut que souligner l'implication financière croissante des collectivités locales et l'allongement significatif des durées de concessions.

Votre rapporteur spécial craint que les collectivités locales ne soient conduites à financer toujours davantage le développement du réseau routier, en plus d'avoir désormais à leur charge les transports ferroviaires régionaux. Il faudra incontestablement leur donner les moyens d'assumer leurs nouvelles charges par des transferts de recettes ou la possibilité d'instaurer des péages sur certaines voies.

3. Autoriser les collectivités locales à instaurer des péages

Votre rapporteur spécial souhaite que les collectivités locales soient autorisées à instaurer des péages d'infrastructures sur les liaisons qu'elles réalisent et non pas seulement sur les ouvrages d'art.

Certes, comme le rappelle l'audit, la mise à péage des itinéraires s'inscrit dans un cadre juridique contraignant . Le Code de la voirie routière ne prévoit explicitement la perception de péages que sur les seules autoroutes concédées par dérogation à un principe général de gratuité.

La mission d'audit relève que « pour le réseau national non autoroutier, il semble acquis qu'existe un principe de gratuité, qui pour les déplacements particuliers, pourrait revêtir un caractère constitutionnel. De fait, le Conseil d'Etat vérifie dans le cadre des enquêtes publiques relatives aux nouveaux projets d'autoroutes qu'un itinéraire alternatif gratuit demeure ouvert à la circulation. Au-delà de ces contraintes juridiques, d'autres considérations, notamment d'aménagement du territoire, ont joué historiquement dans la définition du domaine routier soumis à péage. Ainsi, plus de 3.000 kilomètres d'autoroutes sont à l'heure actuelle non concédés et, partant, non soumis à péage. »

L'hypothèse d'instauration d'un péage sur les routes express
relevant de la compétence des collectivités territoriales

En l'état actuel du droit, il n'existe aucune possibilité pour les collectivités territoriales d'instaurer un péage sur le réseau routier relevant de leur compétence. Les seules compétences actuellement reconnues par la loi aux communes et aux départements en matière d'instauration de péages concernent les ouvrages d'art (ponts, tunnels). Les départements et, sous certaines conditions, les communes sont autorisées à percevoir, à titre exceptionnel et temporaire, une redevance sur les ouvrages d'art pour couvrir soit les charges de remboursement des emprunts relatifs à la construction de l'ouvrage et à l'aménagement de ses voies d'accès, (cas d'une réalisation assurée directement par la collectivité), soit les charges d'exploitation et d'entretien et la rémunération de l'amortissement des capitaux investis, si l'ouvrage est réalisé en concession (art. L. 153-3 et L. 153-5 du code de la voirie routière).

Les collectivités territoriales n'ont donc pas la possibilité de recourir au péage pour financer la construction ou l'exploitation d'une partie de leur réseau routier, à l'instar de ce que peut faire l'Etat pour son réseau autoroutier. Or, le péage est un instrument qui a fait la preuve de son efficacité. En gageant le remboursement des emprunts sur les recettes futures, il permet de lever les ressources nécessaires au développement des infrastructures routières. Fondé sur le principe de l'utilisateur-payeur, il pourrait aussi permettre le développement ou l'entretien du réseau routier territorial sans faire appel au contribuable local.

Une des pistes envisagées est donc d'étendre et de faciliter, pour l'ensemble des collectivités publiques compétentes en matière routière, le recours au mode de financement par le péage. Le contexte actuel s'y prête : ampleur des besoins de financement pour les infrastructures dans un contexte de forte contrainte budgétaire auquel n'échappent pas les collectivités territoriales, extension des compétences et d'autonomie financière des collectivités territoriales, intérêt des formules de partenariat public-privé.

Il s'agirait dès lors de compléter le code de la voirie routière pour autoriser l'Etat, mais aussi les départements, les communes, ou leurs groupements compétents à percevoir un péage en vue de financer la construction, l'exploitation, l'entretien des voies express faisant partie de leur domaine, que ces voies express soient construites en régie ou confiées à un concessionnaire. L'instauration du péage serait réservée aux voies ayant le statut de voie express, c'est-à-dire offrant un niveau de service en rapport avec le péage perçu par l'usager.

Bien entendu, cette démarche devrait être accompagnée d'un dispositif de règles ou de recommandations permettant de prendre en compte l'existence du réseau autoroutier de l'Etat et de conserver la cohérence d'un réseau d'infrastructures à haut niveau de service. Il faudrait inévitablement définir les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales pourraient instaurer un péage, préciser ou renforcer les conditions prudentielles dans lesquelles les collectivités pourraient être autorisées à s'engager financièrement dans ce type d'activité et mettre en place une structure de conseil aux collectivités locales en matière d'ingénierie juridique et financière.

4. Mettre en oeuvre à moyen terme des schémas interrégionaux de service

Votre rapporteur spécial souhaite que soient revalorisés les schémas régionaux de transports : en effet, il est nécessaire d'entendre les demandes des régions, et non de leur imposer un schéma qui ne correspondrait pas à leurs besoins. A cet égard, votre rapporteur spécial estime que les travaux de la DATAR auraient été plus pertinents s'ils avaient mieux associé les collectivités locales.

Par ailleurs, votre rapporteur spécial est convaincu que ce qu'il convient d'appeler les « interrégions » sont le cadre pertinent de réflexion sur le développement des projets d'infrastructures.

Il rappelle que la loi n° 2003-327 du 11 avril 2003 relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques a créé huit circonscriptions interrégionales. Ces huit circonscriptions sont composées d'un nombre entier de régions. Il s'agit de blocs homogènes qui répondent à une logique géographique et économique, malgré leur superficie relativement importante.

Ces circonscriptions sont pour le moment de simples circonscriptions électorales pour l'élection des représentants français au Parlement européen. A terme, il serait utile qu'une réflexion s'engage pour donner un véritable statut à ces interrégions, dans le domaine du financement des transports.

* 26 Votre rapporteur spécial pourrait également évoquer la question des échangeurs autoroutiers. Il estime qu'il serait nécessaire d'engager une réflexion sur ce sujet en privilégiant l'inclusion des échangeurs dans l'équilibre des concessions autoroutières plutôt qu'un financement par les collectivités locales pour des montants élevés.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page