3. La loi « Sueur »

Les collectivités locales, au même titre que le système de soutien, ont contribué de manière déterminante à maintenir une répartition équilibrée de l'équipement cinématographique sur le territoire.

Leur rôle direct dans le fonctionnement de nombre d'établissements reste aujourd'hui essentiel : à titre d'exemple, le CNC estime que près de 70 % des salles d'Ile-de-France sont exploitées directement par des collectivités territoriales. Cette solution coûteuse s'est souvent imposée faute, pour ces collectivités, de pouvoir soutenir l'activité des exploitants par le biais d'aides directes, les dispositions législatives limitant leurs possibilités d'interventions dans ce domaine.

Les articles 7 et 8 de la loi n° 92-651 du 13 juillet 1992 relative à l'action des collectivités locales en faveur de la lecture publique et des salles de spectacles cinématographiques, codifiés aux articles L. 2251-4 et L. 3232-4 du code général des collectivités territoriales, ont assoupli un régime jugé beaucoup trop contraignant.

a) La réglementation

A l'origine, ce dispositif 49 ( * ) ouvrait aux communes (art L. 2251-4) et aux départements (art L. 3232-4) la possibilité d'attribuer aux salles réalisant moins de 2 200 entrées hebdomadaires des subventions dont le montant ne devait pas excéder 30 % du chiffre d'affaires de l'établissement ou 30 % du coût du projet, si celui-ci portait exclusivement sur des travaux susceptibles de donner lieu à l'octroi d'un soutien financier.

Sa portée a été considérablement élargie par l'article 110 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité : ce dernier relève le seuil en-dessous duquel les collectivités sont autorisées à intervenir, qui passe de 2 200 à 7 500 entrées hebdomadaires, et y inclut l'ensemble des établissements bénéficiant d'un classement « art et essai ».

b) Une évaluation impossible ?

L'élargissement de la portée du dispositif correspondait, à l'évidence, à la volonté de mener une politique plus dynamique de soutien aux établissements de taille modeste ou moyenne, dont la situation financière, en dépit de leur importance incontestée en matière d'aménagement culturel du territoire, reste souvent précaire.

La mission regrette néanmoins que cette initiative n'ait reposé sur aucune étude statistique, rendant l'évaluation de l'efficacité du dispositif quasiment impossible.

En effet, comme l'avait déjà fait remarquer, en 2002, la commission des affaires culturelles du Sénat lors de l'examen du texte précité 50 ( * ) , l'absence totale de données ne permet d'apprécier, encore aujourd'hui, ni le montant des subventions octroyées par les collectivités au titre de la loi de 1992 ni leur éventuel impact sur le secteur de l'exploitation cinématographique.

C'est ce travail de recueil de données, que ni les services compétents du ministère de la Culture ni ceux du CNC n'avaient jugé bon d'entreprendre, que la mission a souhaité initier.

c) Les aides des collectivités territoriales aux salles des régions Lorraine et Midi-Pyrénées

Pour ce faire, la mission a demandé à la direction de l'exploitation du CNC de bien vouloir faire parvenir à la totalité des salles des régions Lorraine et Midi-Pyrénées un questionnaire destiné à évaluer, de manière approximative, l'implication des collectivités territoriales en matière d'exploitation cinématographique.

(1) Le taux de retour du questionnaire

Au total, 77 établissements cinématographiques ont répondu au questionnaire (28 des 76 établissements de Lorraine et 49 des 128 établissements de Midi-Pyrénées), soit un taux de retour légèrement inférieur à 40%.

Communes équipées en Lorraine

68 établissements répartis dans 59 communes

Nombre de questionnaires envoyés

68

Retour

28 questionnaires remplis et 28 villes représentées

Communes équipées en
Midi-Pyrénées

128 établissements répartis dans 108 communes

Nombre de questionnaires envoyés

128

Retour

54 questionnaires remplis et 50 villes représentées

(2) Les aides à l'investissement

• Région Lorraine

En 2000, le montant total des travaux réalisés par les établissements cinématographiques ayant répondu au questionnaire s'est élevé à 35 990 euros HT.

Si les salles de Lorraine n'ont bénéficié d'aucune aide municipale cette année là, les aides départementales représentent néanmoins 21,2 % du montant HT total des travaux, (7 621 euros) et les aides versées par la région 8,5 % du montant HT total des travaux (3 048 euros).

En 2000, les aides des collectivités territoriales à l'investissement ont atteint 30 % du montant HT total des travaux réalisés dans les établissements cinématographiques ayant répondu au questionnaire.

En 2001, le montant total des travaux effectués dans les salles de la région ayant retourné le questionnaire est bien supérieur à l'année précédente, puisqu'il atteint 224 441 euros HT.

Le montant des aides municipales accordées est de 108 652 euros (48,5 % du montant HT total des travaux), celui des aides départementales atteint 49 115 euros (22 % du montant HT total des travaux) et celui des aides de la région se monte à 7 621 euros (3,3 % du montant HT total des travaux).

En 2001, les aides des collectivités territoriales à l'investissement ont représenté 73,7 % du montant HT total des travaux.

Lorraine
(montant en euros)

Travaux (HT)

Conseils municipaux

Conseils généraux

Conseil régional

2000

2001

2000

2001

2000

2001

2000

2001

35 990

224 441

0

108 652

7 621

49 115

3 048

7 621

% du montant total travaux

-

-

0

48,5

21

22

8,5

3,3

• Région Midi-Pyrénées

En 2000, le montant total des travaux effectués par les salles de spectacles cinématographique ayant répondu au questionnaire a atteint 677 579 euros HT.

Les aides municipales représentent 12 % du montant HT total des travaux (80 044 euros), les aides départementales 1% (7 900 euros) et aucune aide régionale n'a été déclarée.

En 2000, les aides des collectivités territoriales à l'investissement ont représenté 13 % du montant HT total des travaux en région Midi-Pyrénées.

En 2001, le montant total des travaux à atteint 467 415 euros HT.

Les aides municipales représentent 17% du montant HT total des travaux (80 044 euros), les aides départementales 1% (80 044 euros) et les aides régionales 0%.

Il est intéressant de noter que certains établissements ont bénéficié d'une prise en charge de leur travaux à 100% par les communes. C'est le cas des cinémas situés à Vayrac, Castelsarrasin, Capvern, Eauze et Ramonville.

En 2001, les aides des collectivités territoriales à l'investissement ont atteint 18 % du montant HT total des travaux en région Midi-Pyrénées.

Midi-Pyrénées (montant en euros)

Travaux (HT)

Conseils municipaux

Conseils généraux

Conseil régional

2000

2001

2000

2001

2000

2001

2000

2001

677 579

467 415

79 889

80 044

7 900

3 600

0

0

% du montant total travaux

-

-

12

17

1,2

0,7

0

0

(3) Les aides au fonctionnement

Pour la région Lorraine (22 des 28 établissements) comme pour la région Midi-Pyrénées (43 des 54 établissements), 79 % des établissements ayant répondu au questionnaire affirment avoir bénéficié d'une aide au fonctionnement au cours des deux dernières années.

Deux types d'aides au fonctionnement sont à distinguer :

- financières et directes : la collectivité concernée alloue une subvention 51 ( * ) à la régie municipale ou à l'association plus ou moins dépendante de la commune ;

- indirectes : la collectivité prend en charge les postes de dépenses relatifs au chauffage, à l'électricité, met à disposition des locaux ou détache une partie du personnel communal pour le cinéma.

Ce dernier type d'aide est fréquent car il permet une souplesse de gestion et assure la viabilité économique du cinéma.

(4) Les exonérations fiscales

Le taux de salles ayant répondu au questionnaire et bénéficiant de telles exonérations s'élève à 46 % en Lorraine et 70 % en Midi-Pyrénées . Le taux d'exonération est hétérogène et varie de 33 % à 100 % pour les salles associatives et art et essai.

AIDES AU FONCTIONNEMENT ET EXONÉRATIONS FISCALES
ACCORDÉES PAR LES DIFFÉRENTES COLLECTIVITÉS EN LORRAINE

Lorraine (montant en euros)

2000

2001

Subvention d'équilibre

128 392

83 121

Animation

68 285 (municipalités)

3 048 (CG 52 ( * ) +CR 53 ( * ) )

68 285 (municipalités)

5 335 (CG+CR)

Exonérations fiscales

13 établissements sur 28 (46,4 % )

Postes pris en charge

13 établissements sur 28 ( 46,4 % )

AIDES AU FONCTIONNEMENT ET EXONÉRATIONS FISCALES
ACCORDÉES PAR LES DIFFÉRENTES COLLECTIVITÉS EN MIDI-PYRENÉES

Midi-Pyrénées
(montant en euros)

2000

2001

Subvention d'équilibre

90 772

96 354

Animation

23 558 (municipalités)

3 000 (départements)

23 164 (municipalités)

3 000 (départements)

Exonération fiscales

38 établissements sur 54 ( 70 % )

Postes pris en charge

27 établissements sur 54 ( 50 % )

Au total, au vu des résultats de l'enquête, on peut noter que si les communes participent activement à la politique cinématographique du territoire, tel n'est pas (encore) le cas des départements et, a fortiori , des régions .

En effet, on constate que les conseils généraux (la Moselle, le Gers et la Haute-Garonne exceptés), comme les conseils régionaux, interviennent peu en matière de politique d'équipement cinématographique et accordent le plus souvent des subventions symboliques (moins de 3 000 euros) destinées aux opérations promotionnelles.

* 49 Auquel il faut ajouter l'article L.4211-1 du même code relatif à la contribution des régions au développement économique, social et culturel des régions.

* 50 Avis fait par M. Xavier Darcos au nom de la commission des affaires culturelles (n°155, 2000-2001).

* 51 Subvention d'équilibre, opérations ponctuelles d'animation...

* 52 Conseils généraux

* 53 Conseil régional

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