2. Des recommandations contrastées

Dans le prolongement des analyses regrettant l'insuffisance des incitations exercées par le pacte sur les Etats pour qu'ils assainissent leurs finances publiques en période de forte croissance, diverses propositions de réforme ont été envisagées par les intervenants.

Marco BUTI a évoqué deux aménagements.

Le premier est de nature institutionnelle :

« Je pense qu'il faut augmenter la transparence et ici il s'agit d' améliorer la surveillance de la politique budgétaire . Il y a une nécessité de corriger les biais procycliques dont je parlais tout à l'heure. Ici il y a une question de « early warning » pas seulement en mauvaise période mais aussi quand les choses vont mieux.

Je pense que les propositions discutées au niveau de la Convention, de donner à la Commission la possibilité de lancer des avertissements directs plutôt que de passer par le Conseil, qui est nécessairement partisan, sont bonnes. »

Le second consisterait à créer des « Rainy day funds » :

« Je pense aussi que nous pourrions également envisager la possibilité d' améliorer les éléments incitant à bien se comporter en bonne période . Une proposition serait d'avoir la possibilité d'avoir des fonds de réserve mis de côté en bonne période, au lieu de les distribuer, pour les réutiliser après en mauvaise période. »

Dans la même veine, Jean-Luc TAVERNIER a évoqué un aménagement institutionnel qui reviendrait à « dépolitiser » le fonctionnement du pacte, puis l'exemple des Pays-Bas :

« Il y a la solution de Charles WIPLOSZ, qui consiste à renvoyer cela à une sorte d'agence de fonctionnaires indépendants. Ce n'est peut-être pas pour tout de suite. Il y a d'autres pays qui ont essayé de trouver un compromis entre l'intérêt intrinsèque d'avoir une politique de stabilisateurs automatiques et la nécessité de laisser la place à ce besoin d'action discrétionnaire des gouvernements et des parlements.

Il s'agit par exemple, aux Pays-Bas, d'encadrer à l'avance, ex ante, le comportement procyclique. On ne s'interdit pas d'avoir un comportement procyclique, on ne s'interdit pas -parce qu'on sait que ce n'est pas très crédible de se l'interdire tout à fait- de rendre aux ménages et aux entreprises une partie des plus-values fiscales en période de vaches grasses mais on plafonne à l'avance la proportion de plus-values que l'on rendra sous cette forme. »

Enfin, Jean PISANI-FERRY a insisté sur la dimension institutionnelle de la solution.

« Sur le plan des institutions , j'en ai un peu parlé, il y a des choses à faire du côté de chacun des grands acteurs.

La Commission a besoin de sortir de la frustration dans laquelle nous l'avons mise , elle qui se pensait comme un embryon de gouvernement européen et à qui nous avons, en matière macroéconomique, retiré toute fonction de type exécutif. Il me semble que la Commission doit se penser et nous devons l'aider à se penser, comme l'acteur central de l'intelligence du système , c'est-à-dire qu'elle doit produire, apporter des analyses, elle doit faire en sorte de donner autant que possible à la discussion de politique économique en Europe un contenu analytique précis et elle doit, sur cette base, exercer une fonction de surveillance des politiques économiques d'un des différents Etats membres de manière aussi libre que possible.

Actuellement , ce n'est pas le cas puisque c'est, encore une fois, le Conseil qui exerce la surveillance . Je crois que les propositions qui ont été faites de ce point de vue là, de permettre à la Commission d'adresser aux Etats membres, sans passer par le Conseil, des avis, des avertissements sur l'orientation de la politique économique et les problèmes qu'elle peut poser, sont de bonnes propositions. Il me semble qu'il faut essayer d'aller vers un acteur qui est écouté parce qu'il dit des choses pertinentes et qu'il a la capacité de dire ces choses pertinentes parce qu'il a l'information, il a l'analyse qui lui permet de le dire...

Il faut renforcer ce Conseil , lui donner cette capacité et il me semble -mais je sais que c'est un point qui est controversé- qu'il faut aller jusqu'à lui donner une capacité à décider face à certaines situations économiques particulièrement difficiles , à prendre des orientations qui auraient une valeur contraignante pour les Etats membres... »

Il semble possible à votre rapporteur d'interpréter les propos de Jean PISANI-FERRY pour adjoindre à ce volet institutionnel de la réforme, un volet relatif au contenu même de la règle à partir de sa critique implicite du nominalisme du pacte. Cette critique débouche logiquement sur la proposition qu'un raffinement de la surveillance budgétaire intervienne, qui pourrait consister à surveiller les soldes structurels plutôt que les soldes nominaux.

La critique de Jean-Paul FITOUSSI est, quant à elle, cohérente avec sa proposition générale d'assouplir les règles du pacte et son souci de promouvoir une règle d'or sur le modèle britannique (v. infra ).

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