III. LES MUSÉES ONT-ILS LES MOYENS DE FONCTIONNER ?

M. Henri Loyrette, président-directeur du Louvre, notait dans l'introduction aux actes du colloque organisé au Louvre en 2000 sur l'avenir des musées : « la « vogue » des musées, pendant les vingt-cinq dernières années, ne s'est pas accompagnée de l'excitation intellectuelle que d'autres temps ont connue. Tout se passe comme si l'institution, dans son principe, allait de soi et comme si c'étaient les moyens de sa survie qui devenaient problématiques ».

La mission ne peut que partager cette analyse. L'avenir des musées dont l'importance en tant qu'acteurs de la politique culturelle fait l'unanimité, semble dépendre aujourd'hui des solutions qui seront apportées à leurs difficultés de fonctionnement.

A. LES BESOINS EN PERSONNELS NÉS DU RENOUVEAU DES MUSÉES

1. Conservateur : un nouveau métier ?

Le développement qu'ont connu les musées depuis les années 70 a conduit à une extension de leurs missions : de simples réceptacles d'une collection, les musées sont devenus des institutions culturelles à part entière.

Cette mutation, qui compte parmi les plus importantes qu'ait connues la politique culturelle au cours des dernières années, a conféré à l'emploi de conservateur une dimension nouvelle.

Comme le soulignait le conservateur du musée d'art contemporain de Lyon, M. Thierry Raspail : « un conservateur n'est pas responsable d'une collection mais d'un établissement culturel ».

En effet, au-delà des tâches scientifiques relatives à la conservation et à l'étude des collections, le conservateur doit désormais assumer de multiples tâches aussi diverses que l'organisation d'expositions temporaires, l'élaboration d'une politique des publics ou encore la recherche de mécènes.

D'après les entretiens qu'ils ont pu avoir avec différents responsables de collections publiques, les membres de la mission ont constaté que ces derniers avaient tous une conscience aiguë des responsabilités nouvelles qui sont les leurs.

Cependant, prédomine chez ces personnels le sentiment de ne pouvoir faire face de manière satisfaisante à l'ensemble de leurs tâches, faute de la disponibilité nécessaire. Ce sentiment recouvre à l'évidence une réalité lorsque l'on considère, par exemple, les difficultés rencontrées dans la tenue des inventaires ou les procédures de récolement. Par la force des choses, les activités nouvelles liées, par exemple, à l'organisation d'expositions temporaires prennent le pas sur les tâches d'études et de conservation proprement dites. Cette tendance est accentuée par la logique économique dans laquelle doivent s'inscrire les musées. En effet, s'ils ont bénéficié de coûteux programmes de rénovation mis en oeuvre par les collectivités publiques -Etat et collectivités territoriales-, ces dernières leur demandent de plus en plus de « rapporter », tout du moins de contribuer par leurs ressources propres au financement de leurs coûts de fonctionnement, qui se sont trouvés alourdis par les opérations mêmes qui ont favorisé leur succès. Au-delà de leurs responsabilités scientifiques, les conservateurs doivent désormais être également des gestionnaires.

Cette évolution est commune à l'ensemble des musées occidentaux. Ainsi, lors du colloque précité, M. John Sander, conservateur de la Städtische Galerie de Frankfort, déclarait : « De plus en plus de musées investissent dans les expositions temporaires. De ce fait, dans un grand nombre d'institutions, le temps dont disposent les conservateurs pour s'occuper de leur propre conservation est de plus en plus réduit ».

Sans rentrer dans la polémique relative à l'opposition qui pourrait exister entre la recherche de nouveaux publics, exigence à la fois culturelle et économique, et la mission de recherche que doivent assumer les musées, la mission ne peut que souligner la nécessité de tenir compte, dans la formation et le recrutement des conservateurs, des mutations qu'ont traversé au cours des dernières années les institutions muséographiques.

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