C. LE NÉCESSAIRE SOUTIEN AU DISPOSITIF DE DIFFUSION DE LA CULTURE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE

L'effort financier consacré par l'Etat à la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle est globalement loin d'être négligeable. Il est néanmoins insuffisant et en-dessous des nécessités, d'autant qu'il est, pour l'essentiel, consacré au financement de quatre grandes institutions qui sont toutes situées à Paris.

La mission d'information ne conteste pas la nécessité, pour un pays comme la France, de disposer de grandes institutions prestigieuses, à même de conserver et de présenter un patrimoine historique d'une très grande valeur, et capables de valoriser des expositions qui couvrent, de façon attractive et approfondie, un large champ disciplinaire.

Mais elle considère que le traitement privilégié dont bénéficient ces institutions leur interdit de cantonner leur action à leur site propre et doit au contraire les inciter à considérer que leur mission de diffusion présente un caractère national. Celle-ci doit s'étendre à l'ensemble du territoire .

La diffusion de la culture scientifique et technique, essentielle pour l'avenir de notre pays, ne doit en effet pas bénéficier aux seuls habitants d'Ile-de-France, mais toucher l'ensemble de la population, jusque dans les plus petits villages, et les personnes qui ne peuvent faire le déplacement jusqu'à Paris.

Pour y parvenir, il faut savoir tirer parti de l'ensemble du dispositif de diffusion de la culture scientifique, qui comporte, à côté des grands musées parisiens, un réseau régional riche, quoique inégalement réparti sur le territoire, de centres de culture scientifique, technique et industrielle -les CCSTI- et surtout une très grande variété de structures associatives et de lieux publics ou privés multiples qui permettent une diffusion par capillarité au plus près des populations, des connaissances et des problématiques scientifiques.

Une mobilisation pour une vraie démocratisation de la culture scientifique passe par le renforcement des partenariats que tous les organismes doivent tisser entre eux. En outre, il faut prendre en compte les contributions qu'apportent d'autres partenaires, centres et laboratoires de recherche, grandes écoles, universités ou grandes entreprises actives en matière d'innovation et de recherche.

La recherche de ces synergies pourrait être grandement facilitée par la création d'une fondation regroupant ces divers intervenants, et dédiée à la réalisation d'actions transversales.

1. La concentration géographique des efforts de l'Etat

Votre mission d'information regrette que l'effort consacré par l'Etat à la diffusion de la culture scientifique ne fasse pas l'objet d'une évaluation globale.

Elle souhaite que l'Etat recense, ministère par ministère, l'ensemble des actions qu'il consacre à la poursuite de cette mission qu'elle juge prioritaire, en précisant, pour chaque enveloppe budgétaire, la proportion des crédits qui bénéficient respectivement à Paris, à l'Ile-de-France et aux autres régions françaises.

Elle demande que, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, les principaux ministères concernés -et notamment le ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, le ministère délégué à la recherche et aux nouvelles technologies, le ministère chargé de l'industrie- identifient les actions qu'ils conduisent ou projettent en ce domaine, les objectifs qui leur sont assignés, les moyens qui leur sont consacrés, ainsi que les programmes dans lesquels ces actions ont vocation à s'insérer.

L'intervention financière de l'Etat est principalement le fait de trois ministères qui exercent notamment la tutelle de grands établissements de culture scientifique et technique : le ministère de la recherche, le ministère de l'enseignement supérieur et le ministère de la culture.

A s'en tenir à ces interventions directes, clairement identifiables, l'effort financier de l'Etat est géographiquement très concentré sur Paris, même s'il convient de prendre également en compte l'appui que d'autres ministères apportent à divers organismes -et notamment aux établissements publics de recherche, aux universités et aux grandes écoles- qui n'ont pas la diffusion de la culture scientifique pour vocation première, mais jouent cependant un rôle important évoqué dans la suite de ce rapport.

a) Le ministère de l'enseignement supérieur

L'effort financier que le ministère de l'enseignement supérieur consacre à la diffusion de la culture scientifique et technique présente les caractéristiques suivantes :

- il s'agit d'un effort significatif puisqu'il devait s'élever en 2002 à près de 30 millions d'euros ; c'est en outre un effort qui a connu une forte croissance puisqu'il a pratiquement doublé au cours des dix dernières années, passant de moins de 100 millions de francs au début des années quatre-vingt-dix, à 150 millions de francs au milieu de la décennie, et à près de 200 millions de francs l'année dernière ;

- cet effort est fortement concentré sur trois grands musées nationaux , Palais de la découverte, Musée des arts et métiers et Muséum national d'histoire naturelle, qui ont absorbé, à eux seuls, 90 % de l'enveloppe globale en 2002 ; cette proportion traditionnellement prédominante, s'est renforcée au fil du temps : elle n'était « que » de 84 % au début des années quatre-vingt-dix ; elle tire son origine de la rénovation dont ont bénéficié ces établissements dans le courant des années quatre-vingt-dix : rénovation du grand rocher du parc zoologique de Vincennes (respectivement 45 millions de francs en 1993 et 41 millions de francs en 1995) équipement de la grande galerie de l'évolution (12,5 millions de francs en 1993 et 6,9 millions de francs en 1994) ; rénovation à compter de 1994 du musée des arts et métiers ; elle comporte, en outre, une dimension partiellement optique du fait du transfert, en 1996, de la dotation du Palais de la découverte ;

- contrecoup de cette concentration sur les trois grands établissements parisiens, les actions en régions font figure de parent pauvre . Leur montant a évolué entre 7 et 12 millions de francs au cours des dix dernières années, et leur poids relatif au sein de l'enveloppe globale s'est régulièrement dégradé, passant d'approximativement 10 % au début des années quatre-vingt, à un peu plus de 6 % en 2002.

Utilisation des crédits enseignement supérieur 1993-2003
Mission de la culture et de l'information scientifiques et techniques et des musées

(source : mission de la culture et de l'information scientifiques et techniques des musées
Ministère délégué à la recherche et aux nouvelles technologies)

Années

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

F

F

F

F

F

F

F

F

F

M€ (MF)

Enveloppes

99 527 099

83 987 252

140 521 805

155 933 306

155 631 739

162 263 880

172 732 280

183 049 680

183 160 000

29,379 (192,71)

Musées nationaux*

85 501 077

70 111 980

121 433 242

145 036 534

144 500 744

152 043 754

158 714 318

168 204 560

168 045 466

26,941 (176,72)

Palais de la
découverte

2 230 000

3 636 800

4 234 500

60 356 737

59 646 073

64 493 077

65 558 486

72 036 363

73 261 101

12,367 (81,12)

Musée des arts et
métiers

7 678 216

8 400 000

18 746 000

25 133 063

26 257 431

30 599 498

35 920 356

38 976 259

37 076 259

5,939 (38,96)

Muséum national

73 522 861

56 675 180

98 309 742

59 096 734

58 597 240

56 951 176

54 735 476

55 470 338

57 658 106

8,634 (56,64)

Musée de l'éducation

2 070 000

1 400 000

143 000

450 000

0

0

2 500 000

1 721 600

50 000

0,651M€ (4,27)

Actions en régions**

10 804 500

7 538 704

7 157 790

7 169 700

7 402 828

6 889 401

10 223 422

10 221 856

11 954 500

1,873 (12,29)

OCIM

2 000 000

2 716 200

900 000

2 000 000

3 025 000

2 935 000

2 956 918

2 600 000

2 600 000

0,406 (2,66)

Autres actions**

1 046 457

3 620 638

323 495

1 453 406

698 741

62 450

451 960

1 791 540

330 340

0,006 (0,040)

Total dépensé

99 352 034

83 987 522

129 814 527

155 659 640

155 627 313

161 930 605

172 346 618

182 817 956

182 930 306

29,225 (191,70)

* Augmentations dues aux mesures nouvelles pour les musées nationaux dont :

- Musée des arts et métiers et la Grande galerie de l'évolution (1994, 1995, 1998, 1999)

- Transfert en 1996 à la mission musée de la dotation du Palais de la découverte

- Grand rocher du parc zoologique de Vincennes/MNHN 1993 : 45 MF, 1995 : 41 MF

** Actions en région dont 3 MF en 1993 pour les collections universitaires

*** Autres actions dont :

- Prêt de 1,5 MF en 1994 à une autre direction

- 1,227 MF pour le Service du Film de la Recherche Scientifique en 1994

b) Le ministère de la culture

Le ministère de la culture exerce la tutelle sur la Cité des Sciences et de l'industrie , et les subventions destinées à celle-ci sont inscrites à son budget tout en figurant également au budget civil de recherche et développement. Elles devraient, en 2003, dépasser les 86 millions d'euros .

(En millions d'euros)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Ressources
Subventions de l'Etat

Chap. 36-60
DO personnel

42,670

43,524

44,088

44,287

45,995

47,035

Chap. 66-98
fonctionnement

31,145

31,252

31,404

31,923

31,245

31,381

Chap.66-98
investissement courants

4,573

4,573

4,878

5,336

5,030

5,560

Chap. 66-98
réhabilitation technique 2003

2,200

Total

78,388

79,349

80,37

81,546

82,27

86,176

Il est à noter que cette subvention , qui a progressé de 8,6 % en cinq années, représente à elle seule un peu plus du triple de l'enveloppe financière consacrée par le ministère de l'enseignement supérieur aux trois autres musées parisiens réunis .

Il est de ce fait manifeste que la Cité des sciences et de l'industrie absorbe à elle seule une part prépondérante de l'effort financier consacré par l'Etat à la diffusion de la culture scientifique et technique.

Le rattachement au budget du ministère chargé de la culture de la Cité des sciences et de l'industrie qui répondait d'ailleurs en partie à une volonté d'affichage -l'objectif d'atteindre 1 % du budget de l'Etat- ne s'est malheureusement pas accompagné d'un engagement du ministère en faveur de la diffusion de la culture scientifique et technique .

Les directions régionales d'action culturelle ne sont pas dans leurs régions partenaires des actions de diffusion de la culture scientifique. Il est significatif que le schéma de service collectif culturel adopté en 2001 ne mentionne pas les centres de culture scientifique, technique et industrielle parmi les 29 équipements culturels qu'il retient.

Cette situation reflète la scission , particulièrement marquée dans notre pays, entre la culture classique ou humaniste, et la culture scientifique , qui opère systématiquement au détriment de cette dernière.

Cette conception française contemporaine marque une régression par rapport à la tradition des encyclopédistes du XVIII e siècle, si attentifs à l'état des sciences et techniques de leur temps.

La mission d'information souhaite que le ministère de la culture considère les sciences et leur histoire comme une des composantes à part entière de la culture au sens large, en y intégrant sa dimension technique et industrielle. Elle l'invite, en conséquence, à s'investir davantage à l'avenir dans un domaine qui relève de ses attributions, et à intégrer la diffusion de la culture scientifique et technique dans les actions qu'il conduit, à l'échelon national comme à l'échelon régional.

c) Le ministère de la recherche

Malgré une progression de près de 60 % depuis 1997, les crédits consacrés par le ministère de la recherche à la diffusion de la culture scientifique sont modestes au regard des subventions destinées aux grands musées parisiens , inscrits respectivement au budget du ministère de la culture et de la communication, ou à celui du ministère chargé de l'enseignement supérieur.

Ces subventions, dont la gestion est largement déconcentrée et permet de financer des actions de proximité, se sont élevées en 2002 à un peu moins de 8 millions d'euros , et représentent donc à peine le dixième de la subvention versée à la Cité des Sciences et de l'industrie.

UTILISATION DES CRÉDITS RECHERCHE HORS CRÉDITS ETUDES 1997-2002
MISSION DE LA CULTURE ET DE L'INFORMATION
SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES ET DES MUSÉES APRÈS RÉGULATION

(source : ministère délégué à la recherche et aux nouvelles technologies)

Années

1997

1998

1999

2000

2001

2002

F

F

F

F

F

€ (MF)

Enveloppes

Fête de la science

4 625 000

4 820 000

4 747 500

6 800 000

6 800 000

1 219 595
(8 MF)

Actions de culture scientifique et technique (CST)

4 400 000

3 098 600

4 973 108

5 120 000

5 100 000

1 000 825 (6,565 MF)

Contrats de plan Etat-Région (CPER)

8 285 000

12 038 000

12 037 000

17 176 000

25 920 000

3 628 191
(23,8 MF)

Hors contrats de plan Etat-Région (HCPER)

10 584 000

13 648 000

11 763 000

4 180 000

7 384 000

1 050 277 (6,89 MF)

Exposciences

600 000

600 000

600 000

600 000

900 000

53 360
(0,35 MF)

Projets d'action éducative (PAE)

2 026 000

2 839 000

2 900 000

3 000 000

3 000 000

457 367
(3 MF)

Audiovisuel *

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

1 500 134

228 694
(1,51 MF)

TOTAL

32 520 000

39 043 600

39 020 608

38 876 000

50 604 134

7 943 306
(52,1 MF)

* sur une période de 18 mois

Les crédits consacrés à la Fête de la science se sont élevés en 2002, à un peu plus de 1,2 million d'euros. Sur ce total, 235 000 euros ont été consacrés au financement du « Village des sciences » installé sur le site du ministère dans les locaux de l'ancienne Ecole polytechnique. Les 985 000 euros restants ont été délégués auprès du préfet de région métropolitain, ainsi que dans les départements et territoires d'outre mer pour financer des projets présentées par des structures associatives ou des municipalités.

A titre indicatif, les enveloppes financières dépensées dans chaque région varient entre 30 000 et 60 000 euros. Le ministère estime qu'il contribue pour un peu plus de la moitié au financement global de la Fête de la science.

Les crédits consacrés aux actions de culture scientifique et technique se sont élevés en 2002 à un million d'euros. Gérés par le ministère lui-même, ces crédits sont destinés à soutenir les manifestations destinées au grand public et organisées à l'échelle nationale.

Le ministère finance, en outre, des projets de diffusion de la culture scientifique, à travers les contrats de plan Etat-Région . Ces crédits, d'un montant de 3,26 millions d'euros en 2002, sont, à compter des contrats 2000-2006, délégués dans des régions. Le financement de ces actions est assuré de façon paritaire, par l'Etat et par la région.

Les régions qui n'ont pas souhaité inscrire d'action de diffusion de la culture scientifique dans leurs contrats de plan, bénéficient également d'un soutien de l'Etat, qui s'est élevé à un million d'euros en 2002.

Les exposciences consistent dans la réunion sur un site régional, pendant 3 à 5 jours, de jeunes de 5 à 15 ans qui ont réalisé des projets à caractère scientifique ou technique et qui présentent au public leurs travaux. Ces actions, supervisées par le CIRASTI, un collectif d'associations, sont encouragées par le ministère de la recherche qui leur a consacré en 2002 un peu plus de 53 000 euros à raison de 10 672 euros par exposcience. Ces crédits sont délégués en gestion auprès des préfets de région.

Les projets d'action éducative (PAE), qui ont vocation à être remplacés par les « actions éducatives et innovantes à caractère scientifique et technique » et par les « ateliers scientifiques et techniques » sont orientés vers le public scolaire, et délégués auprès des rectorats. Ils ont bénéficié en 2002 d'un peu plus de 457 000 euros.

Enfin, des actions en matière audiovisuelle ont bénéficié en 2002 d'un peu moins de 230 000 euros.

La mission a souhaité entrer dans le détail de l'analyse de ces crédits, pour en souligner l'extrême modicité, alors qu'il s'agit précisément d'enveloppes financières destinées à financer des actions au plus près du public, sur l'ensemble du territoire national.

La faiblesse de ces crédits souligne l'écrasante disproportion qui existe entre l'effort financier que l'Etat consacre à quelques grandes institutions, certes prestigieuses, mais concentrées sur la capitale, et celui qu'il consent sur le reste du territoire où vit cependant la majeure partie de la population.

2. Les grandes institutions nationales

Les grands musées nationaux que sont la Cité des sciences et de l'industrie, le Muséum national d'histoire naturelle, le Palais de la Découverte et le Musée des arts et métiers sont tous implantés à Paris, même si certains d'entre eux disposent également d'antennes ou d'implantations dans les régions.

Alors que ceux-ci drainent, comme on l'a vu, la majeure partie des crédits consacrés par l'Etat à la diffusion de la culture scientifique et technique, leur rayonnement ne s'étend pas -ou du moins pas suffisamment- sur l'ensemble du territoire. De plus, les exigences administratives et les coûts de transports ne rendent pas accessibles à tous les Français, et en particulier aux scolaires, une visite de ces institutions, pourtant financées par tous.

a) La Cité des sciences et de l'industrie

La Cité des sciences et de l'industrie est, de loin, le plus important des établissements français de diffusion de la culture scientifique et technique de par ses dimensions et les moyens qui lui sont consacrés.

Placée sous la double tutelle du ministère chargé de la culture et du ministère chargé de la recherche, elle a pour mission, aux termes de l'article 2 du décret du 18 février 1985 de « rendre accessible à tous les publics le développement des sciences et du savoir-faire industriel ».

Les moyens dont elle dispose sont considérables qu'il s'agisse de ses locaux, de son budget ou des effectifs mis à sa disposition :

- la Cité dispose en effet d'un espace de plus de 100 000 m 2 ouvert au public qui comporte à la fois des lieux d'exposition (Explora, la Cité des enfants, Argonaute), des salles de spectacles (la Géode, le planétarium, le Cinaxe), une médiathèque, la cité des métiers, la cité de la santé, une cyberbase, ainsi que de nombreuses salles de conférences et un centre de congrès ;

- son budget prévisionnel pour 2003 s'élève à près de 119 millions d'euros , et est financé à hauteur de 72 % par des subventions de l'Etat ;

- les effectifs mis à sa disposition dépassent le millier de personnes , et comportent notamment 945 personnes recrutées sur contrat à durée indéterminée et 50 mises à disposition en provenance de l'éducation nationale, auxquelles s'ajoutent 22 contrats à durée déterminée, 9 emplois-jeunes et 14 contrats en alternance.

La visite qu'elle a effectuée le 26 février 2003 a permis à la mission d'information de constater que les moyens considérables dont dispose la Cité lui permettent d'aborder simultanément des questions relevant de champs disciplinaires très variés, touchant à la fois aux résultats de la recherche fondamentale, aux implications de la science dans l'actualité, et de répondre aux attentes diverses du public adulte et du jeune public.

Conçue il y a plus de vingt ans, la Cité des sciences et de l'industrie a cependant vieilli et la baisse de fréquentation constatée depuis 1998 constitue une incitation à engager une rénovation aujourd'hui nécessaire .

La fréquentation globale de la Cité s'établissait en moyenne autour de 3,5 millions de visiteurs au tournant des années 2000 . Celle-ci n'a été que de 2,6 millions de visiteurs en 2002 pour des raisons qui ne tiennent pas toutes nécessairement à la Cité et peuvent s'expliquer par un contexte global marqué notamment par la mise en vigueur du plan « vigipirate ».

La fréquentation de la médiathèque (900 000 entrées) et celle de la Cité des métiers (200 000 entrées) dont l'accès est gratuit sont restées à peu près stables.

En revanche, la fréquentation des expositions payantes est repassée de 1,53 million d'entrées en 2000 à 1,36 million d'entrées en 2002. Cette contraction affecte « Explora » (passée de 880 000 à 820 000 entrées) et davantage encore la « Cité des enfants » (480 000 visiteurs en 2002 contre 650 000 en 2000).

Si la fréquentation du Centre des congrès paraît stable autour de 200 000 entrées, la fréquentation de la Géode a enregistré un tassement, revenant de 650 000 entrées en 2000 à 520 000 entrées en 2002.

Le Gouvernement a pris la mesure de l'effort qu'il convenait d'engager pour permettre à la Cité de renouer avec l'engouement qu'elle a connu, et a chargé son nouveau président, M. Jean-François Hébert, d'une mission de rénovation de l'établissement.

La mission souhaite que la Cité renoue avec l'ambition qui lui a été assignée lors de son lancement et insiste tout particulièrement sur une des missions de l'établissement qui lui paraît essentielle et qui a été, semble-t-il, sinon abandonnée, du moins peut-être négligée au cours des dernières années : sa vocation nationale.

Elle tient en effet à rappeler que, dans la conception de ses promoteurs, la Cité des sciences et de l'industrie devait s'attacher à la diffusion de la culture scientifique sur l'ensemble du territoire national.

Le rapport de la « mission d'études du musée national des sciences et de l'industrie de la Villette » publié en octobre 1979 avait particulièrement insisté sur cette dimension de sa mission. Considérant que le Centre de la Villette ne devait « pas être conçu comme un établissement purement parisien », il invitait la future cité des sciences à tisser des relations avec les musées techniques de province, et avec les centres spécialisés en régions, souhaitant que ces relations soient décentralisées, et que se développe l'échange des productions entre ces diverses entités.

Cette conception initiale a trouvé sa traduction dans l'article 2 du décret du 18 février 1985 portant création de l'établissement public de la Cité aux termes duquel celle-ci doit assurer la diffusion des sciences, des techniques et du savoir-faire industriel dans les régions et à l'étranger, et doit coopérer avec les collectivités territoriales, les organismes, fondations et associations, poursuivant des objectifs répondant à sa vocation.

Dès les premières recommandations qu'elles ont formulées, le 25 juin 2002, la commission des affaires culturelles du Sénat et la mission d'information ont invité le Gouvernement, dans la lettre de mission qu'il devait adresser au futur président de la Cité des sciences et de l'industrie, à l'occasion de sa nomination prochaine, à rappeler que la mission qui incombe à cet établissement de « rendre accessible à tous les publics le développement des sciences, des techniques et du savoir-faire industriel » doit s'étendre à tout le territoire et, qu'à ce titre, il doit participer effectivement à « leur diffusion dans les régions ».

Cet appel n'est pas resté sans réponse et le ministre de la culture et de la communication , dans un message qu'il a adressé à la mission à l'occasion de la tenue du colloque qu'elle a organisé le 11 septembre 2002, a indiqué qu'il demanderait au prochain président de la Cité de « développer tout particulièrement son action territoriale, en renforçant les contributions qu'elle a pu apporter, par exemple à travers son offre de produits, ses partenariats avec des centres de culture scientifique, la mise à disposition de ses expositions, et en construisant de nouvelles relations avec les collectivités locales ».

Ces orientations ont été confirmées dans la lettre de mission que le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, le ministre délégué à la recherche et aux nouvelles technologies, et le ministre de la culture et de la communication ont adressée au nouveau président de la Cité, M. Jean-François Hébert, le 10 octobre 2002. Dans cette lettre, les trois ministres rappellent le prix qu'ils attachent à ce que le rayonnement de la Cité s'étende aux régions et indiquent qu'ils attendent de sa part des propositions concrètes pour renforcer son action territoriale .

Le président Jean-François Hébert a confirmé aux membres de la mission d'information et de la commission des affaires culturelles, à l'occasion de la visite qu'ils ont effectuée à la Cité le 26 février 2003, sa détermination à resserrer les liens avec l'ensemble des partenaires en région.

En l'état actuel des choses, la Cité évalue la proportion de son activité consacrée à cette collaboration entre 5 % et 20 %.

Ses services indiquent notamment :

- qu'elle réalise des expositions ou des éléments d'exposition à l'intention exclusive des centres de province ; ainsi une dizaine d'expositions de format variable, compris entre 250 et 350 m 2 , et de complexité variable ont permis à la Cité de contribuer à la réalisation d'une cinquantaine d'opérations en région en 2002, en partenariat avec les acteurs locaux de diffusion de la culture scientifique, ou avec des municipalités ;

- qu'elle réalise en outre des expositions itinérantes de type bibliobus, ou accessibles à de petites unités ; ainsi six « inventomobiles », constituées de modules entreposés dans des caisses transportables sont mis à la disposition des écoles pour des sommes très modiques ; des micro-expositions de moins de 30 m 2 , constituées de panneaux, sont par ailleurs mises gratuitement à disposition de petites structures locales ;

- que la création en partenariat avec le Palais de la découverte et une quinzaine de centres de culture scientifique, technique et industrielle d'un « Groupe de liaison de producteurs d'expositions » facilite depuis 1999 la réalisation d'expositions en collaboration ; dans ce contexte ont été coproduites trois expositions : « Objectif Mars » avec la Cité de l'espace, « Des gènes et des hommes » avec le CCSTI de Marseille, et « La chimie, naturellement » avec le CCSTI de Rennes-Bretagne ;

- que la Cité assure également un rôle de formation des animateurs des expositions itinérantes et de conseil notamment en matière d'accessibilité aux personnes handicapées.

Ces initiatives ne sont certes pas négligeables. Elles gagneraient à être connues et développées, car la mission d'information a retenu des auditions et des contacts qu'elle a noués avec les acteurs locaux et régionaux de la culture scientifique l'impression que la Cité leur apparaissait comme très repliée sur elle-même . Nouer des relations avec des entités dont les moyens et les capacités d'accueil sont à une toute autre échelle que celle de la Cité nécessite en fait une mutation radicale des méthodes et des concepts de travail. Être partenaires de structures pour lesquelles 1 000 euros est une forte somme quand on raisonne en millions d'euros, impose une évolution voire une révolution culturelle.

Plusieurs de ces acteurs ont estimé que, au rebours des intentions affichées, ils ne percevaient aucune volonté réelle de la Cité d'apporter son appui à des petites structures de province .

La collaboration avec la Cité est, dans l'ensemble, jugée plus difficile qu'avec les autres structures parisiennes, et les problèmes d'échelle sont souvent évoqués : de par ses dimensions, la Cité peinerait à s'engager dans la mutation radicale évoquée ci-dessus pour se mettre à la portée d'organismes de taille modeste. Ses coûts de production mettraient en outre ses réalisations hors d'atteinte des faibles budgets des entités provinciales.

Les centres régionaux déplorent en outre que leurs productions ne soient que très exceptionnellement mises en valeur sur le site de la Villette et l'un des rares centres qui peut se targuer d'avoir pu montrer l'une de ses réalisations dans l'enceinte de la Cité note, non sans amertume, que « la question financière a été vite élucidée puisque la Cité des sciences n'avait pas de budget pour indemniser [son] travail ».

La quasi-totalité de ces acteurs locaux insiste cependant sur l'intérêt que présente le développement de la concertation et de la coproduction d'expositions, à condition bien entendu qu'elle s'accompagne d'une attitude respectueuse de l'identité des partenaires et ne se traduise pas par une mise sous tutelle.

La mission d'information souhaitait rappeler ces propos, non pour minimiser les réalisations de la Cité, mais pour indiquer à ses responsables l'ampleur de la tâche qui reste à accomplir pour que la Cité joue un rôle national en tenant compte du fait que les milliers d'acteurs du réseau de diffusion de la culture scientifique et technique disposent au total de moins du dixième du budget de la Cité et que ce sont ces acteurs et ceux-là seuls qui lui permettront de remplir ses obligations.

b) Le Musée des arts et métiers

Le Musée des arts et métiers vient de bénéficier d'une rénovation complète , qui a duré de 1992 à 2000, et dont le coût global s'est élevé à plus de 360 millions de francs (64 millions de francs pour les réserves et 298 millions de francs pour la rénovation des espaces d'exposition permanente à Paris).

Il possède une collection d'objets scientifiques et technologiques considérée comme l'une des plus remarquables du monde et assure la conservation de quelque 80 000 pièces dont certaines sont uniques.

Il dispose de 6 000 m 2 d'exposition et de 5 000 m 2 de locaux au sein du Conservatoire national des arts et métiers à Paris, et de 6 000 m 2 destinés aux réserves à Saint-Denis.

Le musée est un des services du Conservatoire national des arts et métiers qui est lui-même un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, placé sous la tutelle du ministère en charge de l'enseignement supérieur.

Les effectifs mis à sa disposition sont de 80 postes environ, et son budget est de l'ordre d'un peu moins de 7 millions d'euros.

Il reçoit environ 200 000 visiteurs par an dont 40 000 scolaires.

Le musée évalue à plus de 20 % la proportion de son activité consacrée à la collaboration avec les structures locales ou régionales de diffusion de la culture scientifique.

Il cite en exemple plusieurs expositions parfois réalisées en partenariat avec d'autres institutions et qui ont vocation à être présentées en version itinérante.

Il indique que l'expérience apportée par les membres de l'équipe du musée dans le cadre des projets itinérants, ou dans celui de la préparation des expositions se fait à titre gracieux. Il considère que la logique commerciale ne doit pas s'appliquer dans le domaine de l'expertise, mais plutôt aux produits dérivés qui accompagnent ces manifestations.

Le musée participe en outre à la formation des formateurs. Il contribue à l'élaboration de la documentation utilisée dans les instituts universitaires de formation des maîtres, et à la formation de ces derniers qu'il accueille lors de stages de deux ou trois jours pilotés par des professeurs relais. Il fournit en outre des mallettes qui peuvent être diffusées par le Centre national pour la documentation pédagogique ; il organise également des ateliers pédagogiques pour faire travailler les élèves en petits groupes.

c) Le Palais de la découverte

Le Palais de la découverte est implanté depuis 1937 dans le Grand Palais. Il a pris, en 1990, le statut d'établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel et est placé sous la tutelle du ministère délégué à la recherche.

Il dispose actuellement de 16 415 m 2 dans l'aile Ouest du Grand Palais, dont 12 695 m 2 sont ouverts au public. Il dispose en outre en banlieue d'un entrepôt qui lui permet de stocker divers matériels et des expositions itinérantes.

Son budget prévisionnel pour 2003 est de 19 millions d'euros, couvert à 75 % par les subventions du ministère chargé de l'enseignement supérieur, et ses effectifs sont d'environ 300 agents.

Il accueille chaque année environ 500 000 visiteurs , dont 20 % de scolaires.

Des présentations permanentes sont réparties dans ses six départements et sont accompagnées par des exposés et des expériences réalisées devant le public.

Son planétarium qui accueille 250 000 visiteurs par an est le planétarium de référence en France.

Le Palais de la découverte a en outre une activité remarquée d'expositions temporaires : le « Théâtre des sens » en 1988, « Le papier, c'est la vie » et « l'Attitude Nord » en 1999, « Le crépuscule des dinosaures » en 2000, « Parfum l'expo » et « Pompéi, nature, sciences et techniques » en 2001.

Le Palais de la découverte est, en outre, depuis plusieurs années, le coordinateur de la Fête de la science pour l'Ile-de-France.

Dans les réponses qu'il a adressées à la mission d'information, le Palais de la découverte, contrairement à d'autres organismes parisiens, a la modestie d'évaluer à moins de 5 % la part de son activité consacrée à la collaboration avec les structures locales ou régionales de diffusion de la culture scientifique et technique.

Cette modestie est tout à son honneur, car la mission a relevé, dans les réponses que lui ont adressées de nombreux CCSTI, tout comme dans les auditions auxquelles elle a procédé, que de nombreux organismes régionaux et locaux de diffusion de la culture scientifique faisaient état de collaborations nombreuses et satisfaisantes avec le Palais de la découverte.

La coproduction d'expositions semble en effet fréquente avec les centres de culture scientifique, technique et industrielle. Des réalisations communes ont été conduites notamment avec ceux de Rennes, de Besançon, de Mulhouse, de Toulouse et de Bordeaux.

Malgré des moyens modestes, si on les compare à ceux de la Cité des sciences, le Palais de la découverte semble en effet considérer que la collaboration avec les organismes de province relève effectivement de ses missions et s'attacher à fabriquer des expositions qui sont conçues, dès l'origine, pour être itinérantes, et s'adapter aux capacités d'accueil des villes moyennes. Ses collaborations sont d'ailleurs peut-être d'autant mieux accueillies qu'il ne semble pas chercher à se prévaloir du monopole de l'initiative et des idées. Ainsi, de nombreuses expositions itinérantes comme « l'os vivant », « le sucre », ou « le sommeil » ont été réalisées en commun, par une mise en réseau des organismes.

Contrairement aux trois autres institutions, le Palais de la découverte n'a pas bénéficié, pour l'instant, de moyens nécessaires à une rénovation qui paraît pourtant nécessaire.

Dans la réorganisation des implantations des grands musées qu'entraînera la création du musée Branly, et les grands travaux prévus pour rénover l'ensemble du Grand Palais, il conviendra de respecter la spécificité et l'autonomie de cet établissement et de ne pas le priver d'une implantation géographique qui a certainement contribué au succès qu'il connaît auprès du public.

d) Le Muséum d'histoire naturelle

Le Muséum national d'histoire naturelle est un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel constitué sous la forme d'un grand établissement de l'éducation nationale.

Son statut, qui vent d'être redéfini par le décret du 3 octobre 2001, lui assigne une triple mission :

- la recherche fondamentale et appliquée ;

- la conservation et l'enrichissement des collections issues du patrimoine naturel et culturel ;

- l'enseignement, l'expertise, la valorisation, la diffusion des connaissances et l'action éducative et culturelle à l'intention de tous les publics.

Il est placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés de l'enseignement supérieur, de l'environnement et de la recherche.

Le nombre d'entrées est d'environ 2,46 millions de visiteurs payants , sur l'ensemble de ses implantations dont 675 000 pour le parc zoologique de Vincennes, 511 000 pour la grande galerie de l'évolution et 111 000 pour le Musée de l'homme.

Le musée entretient des relations avec les musées d'histoire naturelle en régions, et constitue, avec l'aide du ministère de la recherche et de sa mission pour les musées, une base de données des musées d'histoire naturelle.

Les expositions temporaires qu'il réalise donnent lieu, dès leur conception, à des variantes itinérantes, définies en liaison avec les muséums d'histoire naturelle de province.

L'avenir du Musée de l'homme est actuellement en question, le projet de musée des arts premiers du Quai Branly devant en effet être réalisé à partir notamment des collections ethnologiques non européennes du Musée de l'homme.

La constitution de ce nouvel établissement va donc entraîner pour ce dernier une remise en question difficile, la cession d'une partie de ses collections l'amenant à redéfinir un nouveau projet muséal articulé autour de la vision contemporaine de l'homme.

3. La diffusion en région de la culture scientifique, technique et industrielle

La diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle dans les régions de France peut s'appuyer sur une grande variété de musées de société ou éco-musées, de maisons de la nature, et de musées d'histoire naturelle et de musées techniques, ainsi que sur une trentaine de centres de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI).

Les musées d'histoire naturelle en région ont fait l'objet d'efforts significatifs de rénovation pédagogique, de traitement de l'actualité, et d'économie de moyens par mise en réseau des expositions.

Les musées de société jouent également un rôle important, en permettant la connaissance de la sociologie et de l'économie du passé, qui interrogent notre développement.

Les CCSTI, au nombre d'une trentaine, sont des lieux actifs de présentation, de diffusion, d'évaluation, de confrontation et d'organisation de débats sur des thèmes qui ont trait aux sciences, aux techniques et à leur rôle dans le développement durable.

Ils se sont regroupés en deux réseaux complémentaires : la réunion des CCSTI, et l'association des musées et centres pour le développement de la culture scientifique, technique et industrielle (AMCSTI), qui accueille également d'autres structures.

Ces centres, qui ont généralement vu le jour dans les années quatre-vingt-dix sont pour la plupart issus d'initiatives individuelles.

Leur réalisation a dans l'ensemble bénéficié d'un appui financier de l'Etat, et bien souvent aussi des Fonds européens de développement régional. La majeure partie des charges financières de leur construction a généralement été assurée par les collectivités locales : régions, villes d'accueil et dans une moindre mesure, départements.

Généralement constitués sous la forme d'associations régies par la loi de 1901, ils sont en pratique très divers par leurs dimensions, les effectifs dont ils disposent, et par leur champ d'activité.

Au cours de leur visite à Nausicaa , le centre national de la mer de Boulogne-sur-mer, le 20 mai 2003, les membres de la mission d'information ont pu mesurer l'impact réel et potentiel que peuvent avoir ces centres, lorsqu'ils sont gérés avec rigueur et conviction.

Installé dans le bâtiment de l'ancien casino, en bord de mer, Nausicaa dispose de locaux d'une surface de 18 000 m 2 , dont la construction, réalisée en 1991 et 1998, a coûté 245 millions de francs. Contrairement à beaucoup d'autres structures, Nausicaa tire l'essentiel de son financement de ses ressources propres, qui se sont élevées en 2002 à 7,96 millions d'euros, pour un montant de subvention de 62 000 euros.

Nausicaa a pour mission de sensibiliser le public à une meilleure gestion des océans.

Les dimensions ludique et pédagogique des présentations sont mêlées dans une approche fortement unifiée par un discours engagé qui cherche à faire comprendre au visiteur la gravité des menaces qui pèsent sur l'avenir de la vie sur terre et dans les mers, et la nécessité d'un infléchissement rapide des comportements humains, à l'échelle individuelle comme à l'échelle collective.

Nausicaa accueille 650 000 à 790 000 visiteurs par an , en provenance de la région Nord-Pas-de-Calais, mais également de la région parisienne et des régions voisines, ainsi que de Belgique et de Grande-Bretagne.

Il est tentant de mesurer les effets d'une saine gestion en divisant le coût des dépenses publiques par le nombre de visiteurs. Même si l'on admet un amortissement sur vingt ans des investissements qui conduirait à deux millions d'euros par an de dépenses totales pour 700 000 visiteurs, trois euros par visiteur, cela fait rêver en terme d'efficacité ! Il est vrai que les deux millions de visiteurs annuels de Marineland dans les Alpes-Maritimes ne coûtent pas un centime à l'Etat ni aux collectivités locales, et pourtant Marineland 5 ( * ) constitue aussi une forme de diffusion de la culture scientifique, certainement moins appuyée que Nausicaa.

La réussite d'une structure comme Nausicaa ne doit pas occulter certaines faiblesses que présente le dispositif global des CCSTI en France.

Celui-ci reste caractérisé par une irrégularité dans sa répartition géographique : si la région Rhône-Alpes est riche de cinq centres, d'autres sont à l'évidence plus pauvrement loties et la carte nationale des centres résulte davantage d'une juxtaposition d'initiatives locales que d'un schéma équilibré.

Les auditions auxquelles la mission a procédé, et les réponses écrites qu'elle a reçues de nombreux centres lui ont donné le sentiment que ceux-ci appelaient de leurs voeux un renforcement des collaborations, notamment avec les grandes institutions muséales parisiennes.

Elle souhaite par ailleurs que France 3 Régions se fasse davantage l'écho des réalisations et manifestations des centres .

Il est également important que ces centres s'attachent à diffuser la culture scientifique en-dehors de leur site propre, à l'image de ce que fait le « Pavillon des Sciences » en Franche-Comté. En complément de ses divers sites d'exposition, celui-ci a mis en place un programme d'animation itinérant : le « colporteur des sciences ». Sillonnant la région, celui-ci permet à des communes non encore pourvues d'équipement culturel de se familiariser avec la culture scientifique et technique grâce aux outils pédagogiques qu'il présente.

4. Les réseaux associatifs, vecteurs d'une diffusion par capillarité

Enfin, la diffusion de la culture scientifique et technique est assurée, au plus près des populations, par une très grande variété de sociétés savantes, ou d'associations reposant pour l'essentiel sur le bénévolat.

La mission d'information a porté un grand intérêt à l'action que mènent les organismes réunis au sein du CIRASTI, le collectif inter-associatif pour la réalisation d'activités scientifiques et techniques et internationales.

Ce collectif regroupe 13 associations nationales d'éducation populaire et 20 collectifs régionaux qui oeuvrent dans le domaine de la diffusion de la culture scientifique et notamment l'Association française d'astronomie, l'Association nationale sciences techniques jeunesse (ANSTJ), l'Association française des petits débrouillards, les Eclaireuses et éclaireurs de France, la Fédération Léo Lagrange, les foyers ruraux, les Francàs, la Ligue de l'enseignement, l'Office central de la coopération à l'école...

Ces associations mènent des actions d'une extrême variété . Leur action globale est évaluée par le collectif, depuis sa création en 1985, à 202 exposciences ayant soutenu 5 669 projets de jeunes.

En prise à la fois avec le tissu social local et les milieux scientifiques, elles constituent un vecteur inestimable pour permettre une diffusion en profondeur de la culture scientifique et technique .

Ainsi, à titre d'illustration, les foyers ruraux ont organisé, récemment à Saint-Pol-de-Léon, quatre expositions et trois débats portant sur des thèmes essentiels pour la population comme, par exemple, la gestion de l'eau. Ces débats, conduits avec la participation de chercheurs du CNRS et de l'INRA (Institut national pour la recherche agronomique) ont permis de mettre en perspective les approches contradictoires des agriculteurs, des habitants et des touristes.

Des micro-réalisations de ce type sont susceptibles d'avoir un impact social sans commune mesure avec le coût très réduit de leur réalisation . On note que l'appel au tissu des compétences (chercheurs ou enseignants ainsi que retraités du secteur public comme du secteur privé), est très fort et efficace.

Comme le rappelait le président du CIRASTI, M. Hervé Antoine, lors du colloque du 11 septembre 2002 au Sénat, il est important de faire, non le pari du béton, mais celui de l'intelligence, de la dynamique et de l'invention pour trouver de nouvelles formes de mises en relation.

Ces initiatives sont particulièrement intéressantes, mais la mobilisation de ce grand réseau ne bénéficie que de subventions sporadiques du ministère de la recherche, et le cas échéant, du ministère en charge de la jeunesse. Il nous paraît essentiel de faire porter sur ce secteur une attention particulière.

La mission regrette que le partenariat avec les grandes institutions parisiennes et en particulier avec la Cité des sciences et de l'industrie soit peu développé.

Même si le CIRASTI est encore hébergé dans l'enceinte de la Cité, ses dirigeants estiment que l'élan initial qui se proposait de tisser un véritable partenariat avec les structures locales, s'est perdu, et que la Cité n'a pas fait preuve au cours de ces dernières années, d'un esprit de coopération positif. Ils souhaitent le développement d'un véritable partenariat, à condition que celui-ci ne s'établisse pas dans une relation de soumission mais puisse, malgré les disparités d'échelle, fonctionner dans les deux sens.

La mission souhaite que la Charte que viennent de signer le ministère de la recherche et la réunion des centres de culture scientifique technique et industrielle n'aboutisse pas à renforcer uniquement les pôles régionaux sans les inciter fortement à utiliser plus qu'ils ne le font la diffusion par capillarité de la culture scientifique et technique par les associations et organisations locales, véhicules privilégiés de proximité, donc de démocratisation effective de la culture.

5. La conjonction nécessaire des efforts

La diffusion de la culture scientifique et technique relève, en France, d'une grande multiplicité d'acteurs . Elle ne prendra toute son efficacité que si ces acteurs arrivent à unir et fédérer leurs efforts et si les pouvoirs publics sont capables de leur donner des perspectives à moyen et long terme, pour que leurs actions ne se perdent pas dans l'indifférence.

Les organismes qui ont pour vocation première la diffusion de la culture scientifique et technique, qu'ils soient de dimension nationale, régionale ou locale doivent rechercher, d'avantage qu'aujourd'hui, à développer les coopérations et les partenariats .

Il convient qu'ils s'appuient également sur des organismes dont la diffusion scientifique n'est pas la vocation première, mais qui peuvent apporter un appui déterminant : les universités , et d'une façon générale les établissements d'enseignement , ainsi que les centres et laboratoires de recherche publics et privés.

Ces missions essentielles nécessitent, rappelons le, de l'avis de la commission et de la multiplicité des personnes que nous avons consultées, une véritable mobilisation perçue comme telle par l'ensemble des industriels, l'ensemble des universitaires, l'ensemble de la communauté scientifique, et doivent être psychologiquement valorisées.

Des mises à disposition à temps partiel ou total de pédagogues expérimentés permettraient de mieux aider les multiples associations locales de culture scientifique et technique, maillon essentiel mais délaissé de la chaîne qui va des grands établissements vers les centres régionaux et les acteurs de terrain. La possibilité pour ceux d'entre eux qui le souhaiteraient, à un moment de leur carrière, de changer de métier, constitue une opportunité pour la pédagogie des sciences.

A cet effet, la mission considère comme importantes les recommandations suivantes :

a) Une indispensable structure légère de concertation

Il faut créer une équipe restreinte de quelques membres, présidée par une personnalité de premier plan , incontestée pour le monde universitaire et scientifique, qui ait eu des responsabilités administratives au niveau national, et qui puisse se consacrer à temps plein à organiser une coopération souhaitée entre les acteurs multiples que nous venons d'évoquer.

Tout naturellement, on pense que cette personnalité devrait travailler initialement au sein du ministère de la jeunesse, de l'éducation et de la recherche, et être dotée d'une structure d'appui légère et d'un secrétariat adapté.

Un comité ad hoc pourrait servir de conseil à cette équipe. Nous souhaitons que le Parlement soit associé à ce comité pour bien montrer l'importance que la représentation nationale accorde à ce rôle de concertation.

Ceci est d'autant plus important que les ressources existantes sont très nombreuses mais ne sont pas exploitées à leur juste valeur . Citons en vrac : documents publiés par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), documents sous forme de bandes dessinées par l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), les affiches par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), les programmes spécialisés du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), les multiples affiches types dazibao liées à la Fête de la science, les mallettes de « la Main à la pâte », les documents accompagnant les expositions de la Cité des sciences, du Muséum du Palais de la découverte, de Nausicaa, etc. Tout ceci est souvent de qualité internationale dans son contenu et parfois dans sa forme. Mais il n'existe pas de structure qui puisse les inventorier et les faire diffuser. Cette richesse est disponible et permettrait aux multiples structures de capillarité de les réutiliser éventuellement en les réadaptant aux besoins locaux.. Les médias n'en font pas état puisqu'on ne peut leur présenter. Si l'on compare à ce qu'ils consacrent aux événements sportifs ou à tel ou tel personnage du monde du show-biz, on mesure le chemin à parcourir et que beaucoup sont prêts à parcourir (cf. « E = M6 », « C'est pas sorcier », la Cinquième, Arte, les pages scientifiques de certains quotidiens parisiens ou régionaux, etc.)

b) La fondation ad hoc

La commission des affaires culturelles, à l'initiative de notre mission, avait suggéré la création d'une fondation pouvant gérer les participations des très multiples acteurs publics et privés concernés par le renforcement des structures de diffusion de la culture scientifique et technique.

Cette proposition est d'une certaine façon mise en valeur par le projet de loi encore en discussion relatif au mécénat. Elle sera à nouveau évoquée dans le cadre des nouvelles fondations de recherche dans le cadre du projet de loi sur l'innovation.

Nous pensons que dès lors qu'une ou plusieurs fondations d'importance nationale pluridisciplinaires seraient créées ou confirmées dans leur fonction recherche et diffusion de la culture scientifique, elle (ou l'une d'elles) aurait vocation à abriter la structure de concertation dont nous proposons la création ci-dessus et son secrétariat.

c) Les établissements d'enseignement

Le service public de l'enseignement apporte une contribution précieuse à la diffusion de la culture scientifique, en dehors du cadre strictement scolaire :

- en mettant à la disposition des organismes de diffusion de la culture scientifique, des personnels enseignants pour effectuer une mission de médiateur du savoir ; ces mises à disposition permettent aux enseignants, dans le déroulement normal de leur carrière, d'assurer leur vocation de transmetteurs du savoir, en direction d'un public différent ;

- en ouvrant leurs locaux , qui assurent une large couverture du territoire, à des actions de diffusion de la culture scientifique et technique.

La mission souhaite rappeler le rôle particulier que doit jouer en ce domaine le service public de l'enseignement supérieur .

Aux termes de l'article 4 de la loi de 1984 sur l'enseignement supérieur codifié à l'article L. 123-3 du code de l'éducation, « la diffusion de la culture et l'information scientifique et technique » figurent parmi les quatre missions attribuées au service public de l'enseignement supérieur.

Or, cette mission tend à être aujourd'hui considérée comme une tâche annexe, au regard des priorités dont bénéficient traditionnellement les missions de formation et de recherche. A ce titre, elle est généralement assurée par des personnels sur la base du volontariat et du bénévolat.

Il paraît nécessaire aujourd'hui de rappeler aux établissements universitaires l'importance du rôle qu'ils doivent jouer en ce domaine, et de les inciter à y affecter les moyens nécessaires et pas uniquement à l'occasion de la semaine de la science.

La mission sénatoriale considère en effet que les universités ne pourront véritablement s'impliquer dans des actions de diffusion de la culture scientifique, que si elles y affectent des personnels qui renonceront, pour une période déterminée, à leurs activités de recherche pour se consacrer à des tâches de médiation scientifique , et qui seront évalués précisément sur la façon dont ils s'en acquitteront.

Il faut en effet sortir d'un système où les personnels ne sont évalués que sur leurs travaux de recherche, et où les actions de médiation ne relevant que du bénévolat risquent de souffrir à la fois d'un moindre degré d'exigence et d'un handicap pour la carrière de ceux qui s'y engagent. D'autant plus que la fonction de formation professionnelle continue peut viser nombre de personnels des médias qu'ils soient audiovisuels ou de presse écrite.

d) Les laboratoires de recherche

Il est indispensable que les grands organismes publics de recherche, qui font avancer le « front du savoir », s'attachent également à faire comprendre au public les enjeux et la portée des recherches qu'ils mènent et qui sont financées par la collectivité.

Les acteurs de terrain de la diffusion de la culture scientifique se sont accordés sur un double constat , qui n'est paradoxal qu'à première vue :

- le contact direct du public avec les chercheurs est irremplaçable ; le succès de la « Fête de la science », celui de « l'Université de tous les savoirs » et les succès des visites d'universités ou de laboratoires confirment le désir du public de recueillir le savoir scientifique « à la source » en quelque sorte, et de pouvoir interpeller le cas échéant ceux qui le produisent ; en outre, le chercheur est généralement le mieux à même de faire sentir et partager la passion de la connaissance qui est le moteur de toute vie consacrée à une activité de recherche ;

- la médiation est une activité difficile et qui ne s'improvise que rarement. Les médiateurs professionnels sont une solution. Mais celle-ci comporte des dangers d'ordre corporatiste. Il est essentiel de former les chercheurs ( comme les enseignants) à cette activité de médiation qui constitue de toutes façons un aspect essentiel de leur mission.

La mission d'information sénatoriale souhaite en effet rappeler les termes de la loi d'orientation et de programmation pour la recherche du 15 juillet 1982.

Dans son article 24, la loi dispose que : « les métiers de la recherche concourent à une mission d'intérêt national », et cite, parmi les cinq aspects que comporte cette mission « la diffusion de l'information et de la culture scientifique et technique dans toute la population et notamment parmi les jeunes ».

Cet aspect nous paraît aujourd'hui essentiel. C'est de lui que dépend en partie l'acceptabilité sociale de la recherche, et donc son avenir. C'est lui qui permettra, autant que l'existence de grands centres, d'éviter l'obscurantisme qui tente nombre de nos contemporains. C'est lui qui stoppera la dérive qui inquiète scientifiques et industriels : la baisse d'attractivité pour les jeunes des études scientifiques.

Il convient donc, comme pour les universités, que cette mission ne soit plus considérée comme une tâche annexe relevant du bénévolat, mais qu'elle soit normalement prise en compte dans l'évaluation et le déroulement de la carrière du chercheur . Il y va d'ailleurs de leur propre intérêt.

Ces quatre points sont cohérents.

Ils permettront à la fois de mieux irriguer une capillarité nécessaire, d'utiliser les multiples actions préexistantes et donc de mieux gérer l'argent public en y associant les initiatives privées. Le tout pour le plus grand bien de notre société.

* 5 Marineland est contestée par les ennemis des cétacés captifs et reconnue néanmoins comme un outil pédagogique pour le grand public.

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