LA FORMATION : DES HABITUDES DE MANAGEMENT ET D'UTILISATION DES OUTILS DE PILOTAGE INFORMATIQUE À HARMONISER

Les éléments observés sur le terrain

Il est important de rappeler ici que l'objet de la mission était de s'attacher à remonter le point de vue de l'unité (commissariat ou brigade). Ainsi, s'il existe nécessairement un certain nombre de réalisations (statut du formateur, plans de formation, définition de besoins, cursus types, catalogues,...) au sein des administrations centrales, il s'agit d'en observer la perception sur le terrain.

Une formation en fonction du niveau hiérarchique plus que du besoin métier

La mise à disposition d'outils de bureautique et de gestion du service ne saurait être décorrélée d'un programme de formation adapté au niveau de compétence et à l'emploi des personnels concernés. Il semble pourtant que la politique de formation qui prévaut aujourd'hui au sein des deux forces de sécurité ne corresponde pas exactement à l'état de l'art en la matière.

Dans la gendarmerie, la formation se décompose en deux phases distinctes et complémentaires. La première consiste en une formation initiale généraliste correspondant à la polyvalence traditionnelle des gendarmes (officiers et sous-officiers) en mesure de traiter l'ensemble des questions relatives à la sécurité des biens et des personnes.

La deuxième phase est davantage partitionnée puisqu'elle concerne à la fois les passages de grade mais aussi la spécialisation. En effet, la formation continue est appliquée pour toute promotion au grade supérieur, avec l'enseignement de matières adaptées telles que le commandement ou encore la direction d'enquêtes judiciaires. Sur ce point, il est intéressant de noter que, dans le corps des sous-officiers, il est impératif d'obtenir la qualification d'officier de police judiciaire (OPJ) pour devenir gradé. Cette qualification n'est pas nécessaire dans la progression de carrière en Police Nationale, ce que regrettent certains commissaires qui se voient adjoindre des brigadiers anciens mais sans compétence judiciaire suffisante pour les seconder dans l'exercice de leurs responsabilités, surtout en matière de Police de Proximité.

Dans la Police Nationale, le fonctionnement en deux étapes de la formation est similaire. La prise de fonction de certains postes nécessite également de suivre une formation complémentaire.

Dans le cadre particulier de la formation à BB 2000, un certain nombre de constats ont pu être fait en matière de transfert de compétences. Il s'agit tout d'abord de l'application d'un principe étonnant de formation prioritaire des responsables de brigade ou de leur adjoint. Si ce principe répond au besoin de maîtriser la plupart des modules (surtout celui de commandement), il concerne un personnel expérimenté moins disponible et familiarisé avec l'outil informatique que leurs gradés et gendarmes.

Des formateurs pas toujours légitimes

Autre difficulté dans la transmission du savoir : c'est généralement à ces responsables d'unité qu'il incombe de former le reste de la brigade. Cette fonction-là encore pose de nombreux problèmes au gradé concerné :

§ se voir confier une fonction sans aucun rapport avec son métier initial,

§ transmettre un savoir-faire sur une technologie avec laquelle il n'est pas le plus familier,

§ assurer une session de formation tandis que la direction de l'unité consomme la quasi-totalité de son temps de travail,

§ réunir un personnel souvent engagé dans diverses missions et donc rarement au complet.

S'il existe pour BB 2000, comme pour d'autres thèmes, des « formateurs relais », le principe connaît malheureusement quelques limites : les sessions de formation ne précèdent que très rarement la prise de fonction de commandant de brigade. De plus, cette formation, qui ne dure que 2 jours en moyenne, ne s'adresse pas encore à l'ensemble des personnels concernés, tels que les membres des groupes de commandement des compagnies et groupements. Cette carence est semble-t-il en passe d'être comblée, même s'il appartient au formateur de réaliser lui-même ses supports pédagogiques pour la conduite de ses sessions de formation.

L'éloignement géographique des formations est également souvent rappelé, en particulier pour le personnel administratif. Ces derniers doivent, dans la police, aller à Gif-sur-Yvette (Région Parisienne), quel que soit leur département d'affectation. Découragés par cet éloignement, peu d'agents suivent réellement des formations.

Le résultat de la formation est insatisfaisant

Les personnes formées ne sont pas toujours celles qu'il faudrait former en priorité. Ainsi, les commandants de brigades doivent-ils fournir des indicateurs qu'ils extraient de BB 2000 en les transposant sur d'autres supports.

Exemple : dans certaines brigades d'un groupement de gendarmerie visité, BB 2000 devient une charge pour les personnels de terrain. Dans la mesure ou les gendarmes de la compagnie et du groupement ne sont pas formés et demandent des synthèses en fin de mois qui figurent pourtant dans les informations transmises via BB 2000, il faut donc créer de nouveaux tableaux. Ceux qui exploitent les données ne sont pas formés pour cela : le secrétariat de la compagnie a été formé il y a trop peu de temps et en tout cas bien après les CB : il faut imprimer puis faxer les données déjà transmises à la compagnie par RUBIS, car elle ne sait pas exploiter l'outil.

L'appropriation même de l'outil est inégale, ce qui influence considérablement la saisie quotidienne et la crédibilité des indicateurs. En effet, comme l'explique un commandant de compagnie, « la formation brute n'est pas suffisante, cet outil est un allié dont nous devons comprendre tous les avantages dans notre travail quotidien. Un accompagnement du changement nous permettrait de mieux l'exploiter d'une manière générale, mais il conduirait également les gendarmes du terrain à faire l'effort de le renseigner de manière plus détaillée ». La conséquence sur la fiabilité des données est indiscutable.

Il n'existe pas de formation continue connue de tous

Enfin, à la question « connaissez-vous les différentes formations disponibles pour vous dans l'exercice de vos fonctions », la réponse est souvent laconique. Aussi bien dans la police que dans la gendarmerie, hormis les examens nécessaires pour certains passages de grade, le flou subsiste sur les formations mises à disposition.

L'absence de support de communication transversal en est une cause principale, puisque la formation est essentiellement gérée par un échelon administratif (légion ou SGAP) avec lequel les policiers et gendarmes ne sont que très peu en contact au quotidien. Malgré cela, l'absence de catalogue récapitulatif explique le peu de connaissance des policiers et gendarmes rencontrés sur leur possibilité de monter en compétence dans leurs différents domaines d'activité.

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