Annexe n° 1

Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

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? MM. Serge Vinçon, Sénateur, et Marc Laffineur , Député.

? M. Michel Barnier , Commissaire européen chargé de la politique régionale.

? M. Pierre Sellal , Représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne.

? M. Antonio Rodriguez-Laso, Conseiller « politique régionale » à la Représentation permanente de l'Espagne auprès de l'Union européenne.

? M. Tim Figures, Conseiller « politique régionale » à la Représentation permanente du Royaume-Uni auprès de l'Union européenne.

? M. Wilhelm Rissmann , Chef du Département des finances, et Mme Kristina Haverkamp , Conseiller « politique régionale » à la Représentation permanente de l'Allemagne auprès de l'Union européenne.

? M. Gilles Pélurson , Conseiller « politique régionale », et M. Alain Pithon , Conseiller « concurrence » à la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne.

? M. Jean-Charles Leygues , Directeur à la Direction générale « Politique régionale » de la Commission européenne.

? M. Luis Romero-Requena , Directeur général du Budget à la Commission européenne.

? M. Nicolas Jacquet, Délégué à l'Aménagement du Territoire et à l'Action régionale.

? Mme Hélène Eyssartier , Sous-Directrice à la Direction du Budget, et M. Claude Wendling , Chef du Bureau 7-B (Affaires européennes).

Annexe n° 2

Audition, par la délégation pour l'union européenne,
de M. Michel Barnier, membre de la Commission européenne,
sur l'avenir de la politique régionale

(19 novembre 2003)

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M. Michel Barnier :

Le projet de Constitution fait référence pour la première fois à la cohésion territoriale. Depuis la parution, il y a trois ans, du deuxième rapport sur la cohésion, la Commission a animé, de la manière la plus sincère et la plus large possible, un débat sur l'avenir de la politique de cohésion. Elle a veillé à y associer des partenaires de cette politique : collectivités locales, administrations des États membres, secteur privé et associatif, etc. Le résultat de cette réflexion sera présenté dans le troisième rapport sur la cohésion, soit dans le courant du mois de décembre, soit au début du mois de janvier. Je ne saurais vous dire à cette heure si ces propositions en matière de politique de cohésion, qui constituent un élément des futures perspectives financières, porteront sur une période de sept ans, comme je le souhaite personnellement, ou de cinq ans, comme le souhaitent plusieurs de mes collègues. Cette question n'a toujours pas été tranchée par le collège des commissaires.

Nous avons retiré cinq enseignements du débat que nous avons organisé :

- l'attachement à cette politique est fort et elle est considérée comme un succès, comme en témoigne la convergence des quatre pays les moins riches de l'Union (Irlande, Grèce, Portugal, Espagne) ;

- il est nécessaire de concentrer cette politique en faveur de ceux qui en ont le plus besoin ;

- cette politique intéresse toutes les régions de l'Union européenne ;

- les régions ultrapériphériques ont besoin d'un dispositif spécifique ;

- la politique régionale européenne doit être plus simple, plus ciblée et plus décentralisée.

Sur ces bases, j'ai commencé à élaborer des propositions que j'ai régulièrement soumises au collège des commissaires. Aucune de ces propositions n'est définitive tant qu'elle n'a pas fait l'objet d'une présentation globale par la Commission. Mais je peux faire état de l'accord du collège sur un certain nombre de points.

Actuellement, la politique régionale représente 0,32 % du PIB européen, soit 215 milliards d'euros. Les États ont décidé de porter cette enveloppe à 0,42 % en 2006 : mon ambition est de rester à ce niveau en 2007, qui me paraît le seuil de crédibilité de cette politique. Il est par ailleurs acquis que cette politique s'adressera prioritairement aux pays et aux régions en retard de développement. Le Fonds de cohésion, qui finance les pays dont le PNB par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire et l'objectif 1 dont bénéficient les régions dont le PIB par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne communautaire, mobiliseront ainsi 75 % du total. Les quatre départements d'outre-mer français, qui obéiront à cette condition (avec un petit doute pour la Martinique), malgré la baisse de dix points du PIB communautaire consécutive à l'entrée des dix pays de l'élargissement, continueront ainsi à bénéficier des fonds de l'objectif 1. L'effort se portera donc essentiellement sur la convergence des régions en retard, mais aussi sur leur compétitivité avec un volet significatif pour les aider à répondre aux exigences de la nouvelle économie.

En outre, 20 % de l'enveloppe seront affectés aux autres régions sous la forme d'un nouvel objectif 2. Ceci a été accepté par le collège des commissaires, malgré les propositions de certains experts ou de certains États en faveur d'une renationalisation des politiques régionales, accompagnée d'un assouplissement des règles en matière d'aides d'État. Le collège a rejeté ce type de propositions qui aboutiraient à supprimer les deux plus grandes politiques européennes que sont la politique de concurrence et la politique de cohésion. Si le maintien de l'objectif 2 est ainsi acquis au niveau du collège, l'idée de le réformer, afin d'éviter le saupoudrage et la dispersion, est également admise. Ainsi les fonds seraient-ils alloués sur la base de contrats de compétitivité liés aux objectifs de Lisbonne et Göteborg et concentrés sur trois domaines : la société de la connaissance et l'innovation, l'accessibilité, la prévention des risques et la préservation de l'environnement. Je précise par ailleurs que la moitié de cet objectif 2 sera financée par le Fonds social européen afin de mettre en oeuvre une stratégie transversale de formation et d'adaptation des ressources humaines.

Enfin, 5 % des fonds seraient consacrés aux coopérations transfrontalières, soit un montant beaucoup plus élevé que pour l'actuel Interreg.

La simplification passera par la suppression du zonage pour l'objectif 2 et la clarification des instruments (une même action ne pourra plus être financée par plusieurs fonds : FSE, FEDER,...). Avec une politique de cohésion qui s'adresse à l'ensemble des territoires européens, c'est ainsi une certaine idée de l'Europe, de la solidarité et de la compétitivité que nous défendons.

M. Jacques Oudin :

Vous connaissez les débats autour de l'initiative de croissance et des projets d'infrastructures si nécessaires au développement de l'Europe, mais aussi les difficultés pour les financer. Vous paraîtrait-il inconcevable de créer un Fonds européen alimenté par les recettes des péages routiers qui financerait une partie de ces investissements ?

M. Serge Vinçon :

Quel est l'impact de l'élargissement sur l'évolution du volume global du budget européen et sur celle des contributions nationales ?

M. Simon Sutour :

Il me paraît nécessaire de souligner l'importance fondamentale de la politique régionale européenne pour les territoires français. Si je prends l'exemple du département du Gard, je peux citer trois investissements structurants - la route à deux fois deux voies entre Nîmes et Alès, l'université de Nîmes et la gare TGV de Nîmes - qui ont pu être financés grâce aux fonds structurels. Je constate par ailleurs que nos concitoyens perçoivent de plus en plus l'Europe comme un ensemble de contraintes pour leur vie quotidienne ou leurs habitudes culturelles. Si, en plus, ils constatent que l'élargissement entraîne la disparition des fonds européens, je crains que cela ne serve pas l'idée européenne. Mais, par ailleurs, cette politique régionale est soumise à des contraintes et des demandes très diverses et souvent justifiées, qu'elle émanent des régions ultrapériphériques ou des territoires à contraintes particulières. Il faudra bien en tirer les conséquences au niveau du budget de l'Union. Enfin, je crains que les modalités d'allocation des fonds structurels, qui laisseront beaucoup de liberté aux États, n'entraînent une pénalisation des régions les plus pauvres au détriment des régions les plus dynamiques et, de ce fait, les plus « compétitives » en matière d'élaboration de projets correspondant aux objectifs de Lisbonne et Göteborg.

Je voudrais également savoir s'il vous paraît opportun que le rapport d'information que la délégation nous a confié, à mon collègue Yann Gaillard et moi-même, puisse faire état des positions de la Commission avant la parution du troisième rapport sur la cohésion.

M. Michel Barnier :

Je crois que l'idée d'un péage pour financer les grands projets d'infrastructures, et en particulier la trentaine de projets prioritaires que la Commission vient de retenir, doit être poursuivie et approfondie. Par ailleurs, le fonds de cohésion pourra être mobilisable à 50 % pour le financement de ces grands travaux.

En matière budgétaire, mon sentiment est que l'élargissement nous obligera certainement à aller au-delà de 1 %, qui est le niveau actuel du budget, sans atteindre 1,24 % qui est le plafond fixé par les États. Certains pays bénéficiaires nets actuellement, tels l'Irlande ou l'Espagne, ont perçu et accepté qu'ils contribueraient au financement de l'élargissement. Par ailleurs, si l'on veut financer des infrastructures de transport, une politique de recherche plus ambitieuse, une politique régionale crédible, sachant par ailleurs que la dépense agricole a été bloquée jusqu'en 2013 à 0,40 % du PIB, il ne me paraît pas possible de rester dans l'enveloppe actuelle de 1 % du PIB européen. Nous serons également amenés à réfléchir à une fiscalité européenne, se substituant à des impôts nationaux, dans un souci de clarté et de lisibilité pour les citoyens : il faut que le lien entre la ressource et la dépense européenne soit clairement établi.

Sur la critique relative à la dispersion et au saupoudrage des fonds structurels, j'ai fait étudier précisément cette question par mes services et il apparaît que l'essentiel des fonds - 60 % environ - finance des actions qui soutiennent les objectifs de Lisbonne et Göteborg.

Il me semble enfin qu'il serait plus opportun que le rapport d'information de Simon Sutour et Yann Gaillard soit publié après la présentation par la Commission de ses propositions dans le troisième rapport de cohésion. En effet, non seulement les détails de ces propositions ne sont pas encore totalement fixés, mais surtout ce rapport serait plus utile si, s'appuyant sur les propositions de la Commission, il contribuait à nourrir la position de la France dans la négociation qui va s'engager.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe :

Nous sommes tous ici attachés au maintien d'une politique européenne de cohésion. Pouvez-vous nous indiquer quelles sont les perspectives d'évolution, par rapport à la situation actuelle, pour les crédits affectés au Fonds social européen et au programme Interreg ?

M. Jean-Claude Étienne :

Je me réjouis que 20 % des fonds de la politique régionale puissent continuer à financer un objectif 2 pour l'ensemble des régions européennes. L'ambition de cette politique régionale s'en trouverait confortée. Pouvez-vous nous dire en fonction de quels critères ces fonds seront alloués ?

M. Simon Loueckhote :

Actuellement, les territoires d'outre-mer sont aidés dans le cadre de la politique extérieure de l'Union, selon des critères d'attribution très défavorables. C'est pourquoi nous nous rendrons prochainement à Bruxelles pour renégocier le traité d'association des territoires d'outre-mer (TOM) avec l'Union européenne. Par ailleurs, je suis favorable à une introduction rapide de l'euro dans les TOM. Sur ces deux points, la Commission me paraît très hésitante. Pourriez-vous m'apporter des précisions ?

M. François Fortassin :

Avec l'élargissement, la contribution nette de la France va s'alourdir, ce qui se justifie au nom de la solidarité. Mais, pour que cela soit accepté par nos concitoyens, il ne faudrait pas que les aides européennes disparaissent complètement de nos territoires.

Par ailleurs, avec le thème de l'« accessibilité », pensez-vous que l'on pourra encore financer des investissements lourds et structurants, tels que par exemple le viaduc de Millau ?

Enfin, je m'interroge sur le décalage entre le travail extrêmement positif que conduit la Commission et la perception négative qu'en a l'opinion publique. Comment ce déficit d'image pourrait-il être comblé, surtout au moment où certains nouveaux entrants dans l'Union ne conçoivent la solidarité que lorsqu'elle s'exerce à leur profit ?

M. Michel Barnier :

Concernant les sommes consacrées au futur Interreg, tout ce que je peux avancer aujourd'hui est qu'elles seront très supérieures aux sept milliards sur sept ans de la période 2000-2006. Les fonds du futur objectif 2 devraient être répartis sur la base de trois critères : la densité de population, le taux de chômage et le revenu par habitant. Nous étudions également les modalités permettant de renforcer les interventions dans des territoires souffrant de handicaps structurels permanents : les zones urbaines, les zones de montagne, les îles... Nous souhaiterions également réserver un fonds d'excellence permettant, sur la base d'appels d'offres, de financer des projets renforçant la compétitivité européenne, d'une qualité ou d'un intérêt particulier.

J'invite Simon Loueckhote à aller le plus souvent possible à Bruxelles, aussi souvent que les Britanniques par exemple, pour essayer de faire avancer les dossiers qui le préoccupent. Sur la question précise de l'éligibilité des TOM aux politiques régionales, je crois cependant qu'il ne faut pas attendre d'avancée dans le cadre des prochaines perspectives financières. Par contre, la question de l'admissibilité de Mayotte au statut de région ultrapériphérique, à l'instar des quatre DOM, nous a été posée et a de bonnes chances d'aboutir.

Je confirme que le thème de l'accessibilité permettra bien de financer les infrastructures de transport. Je partage également le constat sur la perception négative de la Commission par l'opinion publique. Celle-ci est pourtant investie par le Parlement européen, qui peut la renverser : c'est à mon sens une forme de légitimité et de responsabilité. Mais cette perception négative est néanmoins très grave : la France doit comprendre qu'elle est au coeur de l'Europe et non à côté, qu'elle doit sortir de son silence pour mieux expliquer les décisions européennes.

Je crois que si l'Europe ne rattrape pas son retard en matière de recherche et ne parvient pas à maintenir une certaine avance technologique, elle n'aura aucune chance de freiner les délocalisations industrielles vers des pays émergents. C'est pourquoi la Commission va proposer une forte augmentation de l'effort de recherche.

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