III. LES ENJEUX DES PROCHAINES PERSPECTIVES FINANCIÈRES POUR 2007-2013

A. UNE FORTE PRESSION À LA HAUSSE DU BUDGET COMMUNAUTAIRE

Les dépenses communautaires représentent aujourd'hui environ 1 % du PNB des 25 Etats-membres 56 ( * ) . Le débat, qui s'est récemment initié sur les prochaines perspectives financières, se focalise à présent sur les perspectives de hausse substantielle du budget communautaire, liées à deux séries de facteurs :

- l'effet quantitatif de l'élargissement , du fait de l'extension de l'application des politiques communautaires et en particulier des transferts au titre des aides régionales ;

- sur le plan qualitatif, la volonté de réaliser les objectifs fixés lors du sommet de Lisbonne de mars 2000 , qui devrait se traduire par une augmentation très substantielle des crédits de certaines politiques internes (recherche, réseaux transeuropéens, éducation...) : faire de l'Europe une économie fondée sur la connaissance et l'innovation, renforcer la croissance endogène et la compétitivité des Etats-membres, moderniser le modèle social européen en investissant dans les ressources humaines et en luttant contre l'exclusion sociale. Une nouvelle structure budgétaire viendra ainsi consacrer la budgétisation par activité déjà initiée pour l'exercice en cours, selon une logique de coût complet.

Au total, selon les enveloppes et les modes de calcul retenus, l'enjeu financier des prochaines perspectives budgétaires porte, selon le rapport précité de nos collègues Marc Laffineur, député, et Serge Vinçon, sur 800 à 1.000 milliards d'euros .

B. LES TROIS SCÉNARII D'ÉVOLUTION EN PRÉSENCE

Les négociations se révèlent d'ores et déjà difficiles, chaque Etat membre s'efforçant de préserver un sujet qu'il considère comme intangible (le mécanisme de correction pour le Royaume-Uni, la PAC pour la France, la limitation de la contribution nette pour l'Allemagne ou les Pays-Bas...), et mettent en exergue trois scénarii selon la part du PNB communautaire envisagée.

1. Le scénario de la Commission européenne : un relèvement sans doute excessif des dépenses

- la Commission européenne a présenté le 11 février 2004 ses propositions de cadrage financier, qui conduisent à une forte hausse des dépenses communautaires puisqu'elles atteindraient 57 ( * ) , en moyenne sur la période, 1,25 % du PNB communautaire en crédits d'engagement et 1,14 % en crédits de paiement 58 ( * ) (soit une hausse moyenne de 4 % par an), pour un montant global de 1.025 milliards d'euros en crédits d'engagement et de 928 milliards d'euros en crédits de paiement. Le plafond de Berlin, fixé à 1,24 % du PNB, serait ainsi dépassé en 2013 puisque les crédits d'engagement atteindraient 1,27 %. La Commission entend également satisfaire les pays contributeurs nets en instituant un mécanisme d'écrêtement des soldes nets, sorte de généralisation du « rabais » britannique, qui jouerait à partir d'un seuil contributeur de 0,45 % du PIB. Ce mécanisme ne profiterait que marginalement à la France , puisqu'en dépit d'un doublement de sa contribution nette en 2007 par rapport à 2004 (respectivement 0,38 % et 0,17 % du PIB), son solde culminerait à 0,46 % en 2013. Il convient également de relever que ce cadrage budgétaire repose sur une hypothèse de croissance annuelle du PNB des vingt-cinq Etats-membres de 2,3 %, que l'on peut juger optimiste.

D'après les estimations de l'Institut français des relations internationales (IFRI), le coût net de l'élargissement 59 ( * ) selon ce scénario avoisinerait 75 euros par habitant et par an pour les anciens Etats-membres, soit cinq fois plus que pour la période 2004-2006.

Le scénario de la Commission tend à contenter les nouveaux Etats-membres comme les gros contributeurs nets et contribuerait donc à faire supporter par la France, souvent perçue comme un pays financièrement favorisé bien qu'elle soit le deuxième contributeur en volume au budget européen, une part importante du coût de l'élargissement . Le mécanisme d'écrêtement généralisé aboutirait en outre à pérenniser la correction britannique, dont les justifications d'il y a vingt ans (niveau de richesse relatif, poids de la PAC dans les dépenses communautaires, assiette TVA plus large...) ont aujourd'hui perdu beaucoup de leur légitimité 60 ( * ) , et dont la France est aujourd'hui le premier contributeur avec une quote-part de 30,7 % en 2003. Une telle évolution serait contraire à l'esprit communautaire, qui implique de répartir de façon équitable le coût des acquis historiques de l'Europe. La révision de la correction britannique doit donc clairement être inscrite à l'agenda des négociations.

* 56 0,99 % dans le budget 2004 et 1,03 % dans l'avant-projet de budget 2005 présenté par la Commission européenne.

* 57 En incluant le Fonds européen de développement, qui ne sera budgétisé qu'à compter de 2008, et le Fonds européen de solidarité affecté aux régions touchées par les catastrophes naturelles.

* 58 Nos collègues Marc Laffineur, député, et Serge Vinçon dénoncent, à juste titre, le « décalage considérable et excessif » entre crédits d'engagement et de paiement que comporte cette proposition.

* 59 Soit la différence entre les dépenses budgétaires reçues par les nouveaux Etats-membres (environ 27 % du total en 2013) et leurs contributions au budget communautaire (7 %).

* 60 Ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la Commission européenne en 1999. En outre, à compter de 2008, la France bénéficiera moins de retours agricoles qu'elle ne contribuera au rabais britannique.

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