II. DES TENTATIVES POUR MAÎTRISER LES INSUFFISANCES

La complexité qui débouche sur les dysfonctionnements révélés par la crise de la canicule a entraîné des réactions d'ordre concret dans le domaine politique et administratif : détermination des compétences du ministre de la santé en cas de crise, confirmation et extension des pouvoirs de l'InVS, réforme de la transmission des certificats de décès. Un certain nombre d'organes consultatifs ont été réformés également dans le cadre de la loi de santé publique (du 9 août 2004) et des échelons opérationnels ont été restructurés au sein de l'administration du ministère de la santé. Certaines de ces mesures sont positives et paraissent de nature à régler des difficultés avérées ; d'autres dessinent des perspectives qui suscitent davantage de perplexité.

2.1. Des initiatives plutôt positives

Alors que le projet de loi relatif à la politique de santé publique devait être examiné en première lecture par l'Assemblée nationale au début du mois d'octobre 2003, le ministre de la santé, M. Jean-François Mattei a présenté les amendements au projet originel pour concrétiser les mesures qui constituaient une réponse à la crise de la canicule, pour ce qui relevait de la sphère du ministère de la santé au sens large (InVS, y compris les systèmes de recueil de statistiques etc...). Des mesures concrètes avaient déjà été prises au niveau réglementaire sur la transmission des informations relatives aux décès.

* Les nouveaux pouvoirs confirmés du ministre de la santé sont affirmés et concrétisés dans un nouveau chapitre du code de la santé publique intitulé « menace sanitaire grave » comportant cinq articles dont le premier fixe cette nouvelle prérogative du Ministre :

« Menace sanitaire grave : art. L. 3110-1 - En cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et approprié aux circonstances de temps et de lieu afin de lutter contre la propagation de maladies (...) ».

* Les missions de l'InVS ont de leur côté fait l'objet d'une définition et d'une articulation à la fois plus large et plus précise, voire exhaustive. La rédaction précédente de la loi du 1 er juillet 1998 ne laissait déjà aucun doute quant à la réalité de la mission de l'InVS dans une situation telle que celle de la canicule de 2003.

Loi du 1 er juillet 1998

Loi du 9 août 2004

« art. L. 1413-2 - Un Institut de veille sanitaire, établissement public de l'Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, est chargé :

1°D'effectuer la surveillance et l'observation permanente de l'état de santé de la population, en s'appuyant notamment sur ces correspondants publics et privés, participant à un réseau national de santé publique, dans le but :

- de participer au recueil et au traitement des données sur l'état de santé de la population à des fins épidémiologiques ;

- de rassembler, analyser et actualiser les connaissances sur les risques sanitaires, leurs causes et leurs évolutions ;

- de détecter tout événement modifiant ou susceptible d'altérer l'état de santé de la population ;

2°D'alerter les pouvoirs publics, notamment l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé mentionnée à l'article L. 5311-1, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments mentionnée à l'article L.1323-1 et l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale mentionnée à l'article L.1335-3-1, en cas de menace pour la santé publique, quelle qu'en soit l'origine, et de leur recommander toute mesure ou action appropriée ;

3 °De mener à bien toute action nécessaire pour identifier les causes d'une modification de l'état de santé de la population, notamment en situation d'urgence ».

« art. L. 1413-2 - Un Institut de veille sanitaire, établissement public de l'Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, a pour missions :

1°La surveillance et l'observation permanentes de l'état de santé de la population. A ce titre, il participe au recueil et au traitement de données sur l'état de santé de la population à des fins épidémiologiques, en s'appuyant notamment sur des correspondants publics et privés faisant partie d'un réseau national de santé publique ;

2°La veille et la vigilance sanitaires. A ce titre, l'institut est chargé :

« a) De rassembler, analyser et actualiser les connaissances sur les risques sanitaires, leurs causes et leur évolution :

« b) De détecter de manière prospective les facteurs de risque susceptibles de modifier ou d'altérer la santé de la population ou de certaines de ses composantes, de manière soudaine ou diffuse ;

« c) D'étudier et de répertorier, pour chaque type de risque, les populations les plus fragiles ou menacées.

« Il peut également assurer des fonctions de veille sanitaire pour la Communauté européenne, des organisations internationales et des pays tiers, avec l'accord du ministre chargé de la santé ;

« 3°L'alerte sanitaire. L'institut informe sans délai le ministre chargé de la santé en cas de menace pour la santé de la population ou de certaines de ses composantes, quelle qu'en soit l'origine, et il lui recommande toute mesure ou action appropriée pour prévenir la réalisation ou atténuer l'impact de cette menace ;

« 4°Une contribution à la gestion des situations de crise sanitaire. A ce titre, l'institut propose aux pouvoirs publics toute mesure ou action nécessaire.

« L'institut participe, dans le cadre de ses missions, à l'action européenne et internationale de la France, et notamment à des réseaux internationaux de santé publique ».

Pour être sûr de ne rien oublier, l'article suivant, consacré aux travaux s'imposant dans le cadre des missions, dispose notamment :

« Art. L.1413-3 du CSP. En vue de l'accomplissement de ses missions, l'InVS :

1°Effectue, dans son domaine de compétence, toutes études, recherches, actions de formation ou d'information ;

2°Met en place les systèmes d'information lui permettant d'utiliser, dans les meilleurs délais, les données scientifiques, climatiques, sanitaires, démographiques et sociales, notamment en matière de morbidité et de mortalité, qui sont nécessaires à l'exercice de ses missions ;

3°Elabore des indicateurs d'alerte qui permettent aux pouvoirs publics d'engager des actions de prévention précoce en cas de menace sanitaire et des actions de gestion des crises sanitaires déclarées ; » (...)

L'accent mis fortement sur les sytèmes d'information, les différentes catégories de données et leur transmission immédiate au ministre vise sans ambages à empêcher la réédition d'une crise du type de celle de 2003.

Ce nouvel ancrage législatif ne pourra pas nuire à l'InVS pas plus qu'aux prérogatives du ministre qui sont ainsi pour tous les deux fixées dans le code en parfaite clarté.

* La situation est beaucoup moins nette pour ce qui concerne la fusion du CSHPF (Conseil supérieur d'hygiène publique) de France et du Haut Conseil de la santé (loi du 4 mars 2002) pour former le Haut conseil de santé publique (loi du 9 août 2004).

L'histoire et le rôle de chacune des deux instances « fusionnées » ayant été évoqués précédemment, on se limitera à indiquer l'intérêt éventuel de cette mesure mais aussi les questions qu'elle soulève.

La fusion de ces deux instances a pour objectif une dynamique résultant de ce regroupement entre un CSHPF qui avait nécessairement perdu une partie de ses attributions avec la création des agences sanitaires en 1998 et un Haut conseil de la santé au parcours et à l'apport incertains. Or les deux instances ont un rôle assez différent et pas nécessairement complémentaire pour autant. La rédaction finale retenue par l'Assemblée nationale en deuxième lecture suite aux remarques du Sénat sur le texte initial du gouvernement a permis d'éviter une confusion certaine. En effet, le transfert intégral des compétences du CSHPF au nouveau Haut Conseil de la santé publique risquait de conférer à celui-ci une hétérogénéité fâcheuse et notamment une interpénétration de ses compétences et celles des agences sanitaires.

Le nouveau Haut conseil de la santé publique a donc pour mission (art. L.1411-4 du CSP) :

« 1° De contribuer à la définition des objectifs pluriannuels de santé publique, notamment en établissant le rapport mentionné à l'article L. 1411-2, d'évaluer la réalisation des objectifs nationaux de santé publique et de contribuer au suivi annuel de la mise en oeuvre de la loi prévue à l'article L. 1411-2 .

« 2° De fournir aux pouvoirs publics, en liaison avec les agences sanitaires, l'expertise nécessaire à la gestion des risques sanitaires ainsi qu'à la conception et à l'évaluation des politiques et stratégies de prévention et de sécurité sanitaire ;

« 3° De fournir aux pouvoirs publics des réflexions prospectives et des conseils sur les questions de santé publique ».

(...)

On note que tout risque d'interpénétration avec les tâches des agences n'est pas vraiment écarté même si le rapporteur du projet à l'Assemblée nationale a précisé que les missions de ce Haut conseil portent « plutôt sur la conception et la gestion des politiques que sur l'évaluation et la gestion des risques, cette dernière expertise étant plutôt du ressort des agences ». Par ailleurs, le transfert des pouvoirs hérités du CSHPF à ce nouveau Haut Conseil comporte bien des pouvoirs consultatifs en matière de règles générales d'hygiène (44 ( * )) .

A ces modifications, dont l'objectif est celui d'une clarification et d'une unification, s'en ajoute d'autres dont le principe est moins clair, mais la perplexité qu'elles inspirent est nettement plus forte.

2.2. Des perspectives qui interrogent

2.2.1. Le Comité national de santé publique (CNSP)

L'inadéquation du CNSS (Comité national de sécurité sanitaire) à ses missions était déjà évidente et largement constatée avant même la crise de la canicule. Il était logique qu'il n'y survive pas. L'instance qui a été imaginée pour le remplacer par la loi de santé publique du 9 août 2004 est le Comité national de santé publique (CNSP) (art. L.1413-1 du CSP).

Aux termes de cet article, le CNSP a pour mission :

« 1°De coordonner l'action des différents départements ministériels en matière de sécurité sanitaire et de prévention ;

« 2°D'analyser les événements susceptibles d'affecter la santé de la population ;

« 3°De contribuer à l'élaboration de la politique du Gouvernement dans les domaines de la sécurité sanitaire et de la prévention et d'en examiner les conditions de financement ».

(...)

Le CNSP est destiné à coordonner de manière permanente les nombreux ministères concernés par la politique de santé publique. Il est exact qu'aucune instance ministérielle chargée explicitement de cette mission n'existait jusque là. Il doit comporter deux sections : l'une chargée de la prévention générale vis-à-vis de maladies ou problèmes largement répandus dans la population (maladies cardiovasculaires, obésité, nutrition), l'autre chargée de la sécurité sanitaire qui était censée être l'objectif principal du défunt CNSS.

D'après les indications qui ont été données à votre rapporteur, le CNSP dans sa fonction interministérielle de sécurité sanitaire sera une instance de concertation et de coordination des ministères impliqués dans la gestion des risques. C'est là que pourra se débattre une véritable politique de sécurité sanitaire, ce qui est plus large que la coordination scientifique des agences. Il s'agira :

-- de définir et partager les objectifs et les priorités de sécurité sanitaire ;

-- de faire émerger une doctrine cohérente de gestion des risques entre les différents secteurs (air, eau, sols ...) ;

-- de veiller à une allocation des ressources cohérentes au regard des priorités ;

-- de coordonner les contrats d'objectifs des différentes agences ;

-- de discuter des modalités de suivi du travail des agences ;

-- de préparer les positions européennes à prendre sur les grandes questions de sécurité sanitaire ;

-- de prévoir les modalités d'évaluation de la politique de sécurité sanitaire ;

-- de développer une gestion prospective et anticipatrice.

En outre, il est envisagé que le CNSP soit appelé à reprendre les échanges qui se déroulaient au sein du CNSS. Cette perspective ne manque pas d'inquiéter, sachant l'inadéquation avérée des activités de cette instance précédente.

La fonction de coordination interministérielle est certainement celle dont la nécessité et donc la justification sont les moins discutables. Il reste à s'assurer que la composition et le mode de fonctionnement interne permettront d'atteindre une certaine efficacité.

« L'analyse des événements susceptibles d'affecter la santé de la population » relève aussi de la compétence de l'InVS (cela a même été lourdement confirmé par la même loi), de la DGS au ministère et le cas échéant, selon les événements, des agences sanitaires. Les « doublonnages » sont donc prévisibles même si l'on prétend se placer à des échelons différents. Enfin, parfait mélange des genres, ce Comité national de santé publique est amené à contribuer à l'élaboration de la politique du Gouvernement dans les domaines de la sécurité sanitaire et de la prévention d'en examiner les conditions de financement , alors que l'on créé dans le même texte un Haut Conseil de santé publique . Donner des compétences d'orientation (pour le moins) en matière budgétaire à un tel organe consultatif est déjà inédit ; en outre, cela risque dès le départ de lui conférer une efficacité réduite par un positionnement institutionnel et administratif bancal.

Les réformes les plus récentes accroissent donc une compléxité publiquement dénoncée. On aurait pu espérer qu'elles donneraient un tout autre résultat. Cette remarque peut s'appliquer de la même façon à la création du département de gestion des situations d'urgences sanitaires de la DGS en son sein.

2.2.2. Le département des situations d'urgences sanitaires à la DGS

Lors de la réorganisation de l'été 2000 a été créé à la DGS un « bureau des alertes et des problèmes émergents ». Cette initiative a permis d'identifier un partenaire unique pour les partenaires extérieurs y compris l'InVS, mais il est vite apparu légitime aux services déconcentrés de le consulter devant toute situation anormale, ou de crise avérée, ce qui a favorisé les remontées d'information et les demandes de conseils. L'implication du bureau dans la gestion des situations exceptionnelles et les retours d'expérience qu'il a organisés ont conduit naturellement à lui confier l'élaboration des plans de réponse à des risques divers, dont les risques bioterroristes. L'élaboration de ces plans (variole, SRAS, grippe) représente une charge de travail considérable car il est nécessaire d'examiner une multitude d'éventualités et d'apporter des réponses concrètes (et plus seulement théoriques) à un niveau de détail très fin.

Ce bureau n'avait pas été dimensionné pour ce type d'activité. Le fait que son intitulé évoque « les problèmes émergents » montre bien que l'intention initiale était de développer une activité de prospective plus que de gestion opérationnelle des situations d'urgence. Or ce bureau s'est vite trouvé débordé au point de ne plus pouvoir faire face à la situation qu'il a en partie engendrée par son dynamisme.

C'est à la suite de ce constat que le ministre de la santé a annoncé en mars 2004 la création du « département des situations d'urgence sanitaires ».

Les éléments d'information recueillis à ce jour permettent d'apporter les précisions suivantes sachant que ce département « construit autour du bureau 5B préexistant aura pour perspective de devenir une sous-direction » et que l'effectif de départ de 20 personnes devrait être porté à terme à quarante.

On distingue ainsi trois missions : l'alerte, la préparation et les partenariats opérationnels.

-- la mission d'alerte

La première priorité est de consolider l'acquis du bureau 5B concernant le recueil et le traitement des informations et de travailler en lien étroit avec l'InVS à qui incombe l'analyse des informations et leur qualification en signaux d'alerte, ainsi qu'avec les services déconcentrés (ou les acteurs de santé) qui doivent gérer les situations.

Pour autant, ce nouveau département ministériel ne doit en aucun cas se substituer à la mission de l'InVS dont la loi relative à la politique de santé publique prévoit d'ailleurs le renforcement. C'est bien l'institut qui est en charge des systèmes de surveillance épidémiologique dont certains s'intègrent dans un cadre international. Cependant, toutes les alertes ne sont pas issues de tels systèmes. Les DDASS, les DSV, les DDCCRF, le COGIC (comité de gestion interministériel des crises), les autres agences comme l'AFSSAPS et l'AFSSA, les médecins, les établissements, les associations, les médias peuvent signaler des événements qu'il faut immédiatement traiter. Et c'est vers le ministère que ces acteurs se tourneront spontanément. Il y a donc besoin d'une équipe pour les traiter, les interpréter, alerter le ministre si nécessaire.

Il est indispensable que la DHOS, la DGAS et la DGSNR qui ont également créé des cellules de gestion des situations d'urgence soient étroitement associées à l'exécution de cette mission.

-- la mission de préparation

Elle consiste à développer les outils opérationnels permettant de mobiliser la société pour faire face à des situations d'urgences sanitaires. Cela concerne le système de santé, mais aussi la dimension sanitaire d'autres systèmes (transports collectifs, logements, écoles, etc ...).

En pratique, il s'agit essentiellement de l'élaboration et de la mise à jour des procédures correspondant au traitement de situations ponctuelles connues, d'une part, et des plans de réponse à des menaces plus générales (plan canicule, plan SRAS, plan grippe, plans répondant à des menaces terroristes ...), d'autre part. Cette activité devra être complétée par la conception d'exercices permettant de tester la faisabilité de certaines options et le caractère opérationnel des plans.

-- la mission des partenariats opérationnels et de la communication couvre en fait la structuration des liens pour la circulation des informations et le partage des tâches avant que l'urgence survienne et selon la typologie des urgences réalisée dans la mission de préparation.

La mission d'évaluation des quatre inspections dans son rapport précité (page 26) faisait part de ses doutes relatifs au positionnement de ce département vis-à-vis de l'InVS et vis-à-vis du COGIC :

-- L' « InVS, dont la mission, encore réaffirmée et précisée dans le projet de loi de santé publique, est de recueillir et d'interpréter tous les signaux d'alerte émanant soit des dispositifs de surveillance, soit des professionnels de santé. Or, dans la mesure où le nouveau département de la DGS aurait notamment pour mission « de recueillir et traiter les signaux d'alerte sanitaire, quelles que soient leur origine », on peut craindre un risque de doublonnage, voire de confusion, qu'il conviendra de réduire au maximum.

-- Le Comité de gestion interministérielle des crises (COGIC) de la direction de la défense et de la sécurité civiles qui est le lieu de veille permanente et de mobilisation des différents moyens de secours et d'intervention, dès lorsqu'une crise, sanitaire ou autre, nécessite une organisation de sa gestion au plan national. Le rôle de la sécurité civile, et la coordination des différents plans d'urgence selon un modèle uniformisé, sont d'ailleurs renforcés et réaffirmés par le projet de loi de modernisation de la sécurité civile, déposé récemment au Parlement. S'il est légitime et nécessaire que le ministère de la santé élabore les plans d'urgence destinés à faire face aux crises sanitaires ou aux composantes sanitaires des crises, et qu'il s'organise de manière à être en mesure de se mobiliser pour gérer la composante sanitaire d'une crise ou une crise à dominante sanitaire, la juxtaposition pure et simple au COGIC d'une structure de veille permanente propre au ministère de la santé est de nature à entraîner une duplication coûteuse de moyens ».

Il est à noter que la plupart des directions concernées par ce projet n'ont pas été appelées à une concertation par la DGS avant l'annonce de sa réalisation. Compte tenu des risques qui viennent d'être évoqués, cela aurait peut-être pu être évité.

2.2.3. Les CIRE

Les cellules interrégionales d'épidémiologie (CIRE) constituent le « bras » de l'InVS sur le terrain à la fois pour l'alerte, le suivi et la coordination de la veille au niveau régional. Elles sont naturellement appelées à jouer un rôle accru dans le cadre de la loi de santé publique (9 août 2004) avec les plans régionaux de santé publique et en particulier le plan d'action relatif à l'alerte et à la gestion des situations d'urgence sanitaire. La montée en puissance de ces structures, dont l'intérêt a été prouvé lors de l'épisode de légionellose dans la région de Lens en octobre-décembre 2003, se fait progressivement. 16 CIRE existent actuellement et emploient 71 scientifiques sur les nouvelles missions des CIRE ; le rapport annuel de l'InVS publié en octobre 2004 indique (page 53) :

« La mission fondamentale des CIRE évolue : le simple appui technique aux services déconcentrés de l'Etat qui leur était dévolu doit laisser la place à une véritable déclinaison des missions nationales de veille et d'alerte sanitaires au niveau régional. La place institutionnelle des CIRE doit parallèlement évoluer : il s'agit d'organiser la présence de l'InVS en région.

Dans ce cadre, pour le compte du GRSP, la CIRE sera le pilote du plan régional relatif à l'alerte et à la gestion des situations d'urgence sanitaire. Par ailleurs, la CIRE participera à l'élaboration du PRSP et aux travaux du GRSP. Au sein de ce Groupement d'intérêt public (GIP), l'InVS s'investira dans le diagnostic régional, l'identification des problèmes de santé régionaux et des indicateurs permettant le suivi des programmes, au travers de chaque CIRE qui apportera une référence méthodologique et scientifique à ces travaux, ainsi que sa compétence et son savoir-faire ».

La conception d'origine avancée pour les CIRE (« simple appui technique aux services déconcentrés de l'Etat ») laisse quelque peu perplexe car elle apparaît minorante. On veut espérer que leur rôle spécifique, leur autorité scientifique et à travers elles, celle de l'InVS, seront reconnus au niveau qui doit être le leur.

C'est aussi ce que souligne le rapport d'évaluation des quatre inspections (page 68) :

« Dans la perspective, d'une part de la participation des cellules interrégionales d'épidémiologie aux travaux du groupement régional de santé publique créé par la loi relative à la santé publique, groupement d'intérêt public présidé par le représentant de l'Etat dans la région et dont l'InVS est membre, d'autre part de leur inévitable implication dans l'élaboration du plan d'action relatif à l'alerte et à la gestion des situations d'urgence sanitaire, composante rendu obligatoire par l'article 10 bis de la loi précitée, du plan régional de santé publique arrêté par le représentant de l'Etat dans la région, il apparaît à la mission indispensable : d'asseoir les relations de l'Institut, des CIRE, des DRASS et des DDASS sur un protocole précisant les méthodes de travail et la répartition des tâches entre les différents acteurs ; de préserver l'autorité scientifique de l'Institut de veille sanitaire sur l'ensemble des travaux de la CIRE concernant la veille sanitaire et l'alerte, y compris le plan régional d'action ; de reconnaître à la CIRE un pouvoir fonctionnel d'animation et de formation des DDASS dans le cadre de leurs contributions à la fonction de veille et d'alerte ».

Cette mise en garde répond à une nécessité car le risque a été ou est réel d'une marginalisation fonctionnelle par rapport aux directions régionales et départementales de services du ministère est réel.

Enfin, les moyens des CIRE doivent être concentrés de la manière la plus efficace en évitant l'éparpillement tant que la masse critique d'efficacité n'a pas été atteinte pour une région ; il apparaît que les options prises par le directeur général vont dans le bon sens.

* 44 Art L.1311-1 du CSP : Sans préjudice de l'application de législations spéciales et des pouvoirs reconnus aux autorités locales, des décrets en Conseil d'Etat, pris après consultation du Haut Conseil de la santé publique et, le cas échéant, du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels, fixent les règles générales d'hygiène et toutes autres mesures propres à préserver la santé de l'homme, notamment en matière :

- de prévention des maladies transmissibles ;

- de salubrité des habitations, des agglomérations et de tous les milieux de vie de l'homme ;

- d'alimentation en eau destinée à la consommation humaine ;

- d'exercice d'activités non soumises à la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ;

- d'évacuation, de traitement, d'élimination et d'utilisation des eaux usées et des déchets ;

- de lutte contre les bruits de voisinage et la pollution atmosphérique d'origine domestique ;

- de préparation, de distribution, de transport et de conservation des denrées alimentaires.

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