3. Les allégations santé et les compléments à base de plantes : des compétences frontalières difficiles

Il s'agit ici de produits spécifiques dont l'importance peut paraître marginale si l'on s'en tient aux quantités en cause. Les questions qu'ils soulèvent sont d'une moindre ampleur que celles portant sur les produits phytosanitaires ou les OGM. Mais elles posent des questions totalement nouvelles qui justifient pleinement un examen particulier. Retenons un point de départ simple : pour l'essentiel, les conditions dans lesquelles elles sont traitées sont satisfaisantes, alors que la configuration des compétences et des circuits administratifs est complexe.

a) Les allégations santé des produits alimentaires

L'AFSSA et l'AFSSAPS ont ici des compétences partagées alors que la DGCCRF est en première ligne. C'est en effet au titre du code de la consommation (art. L 121-2) que les mentions alléguant d'un bénéfice pour la santé doivent pouvoir être prouvées scientifiquement. La DGCCRF, en charge de l'application et du contrôle, saisit donc l'AFSSA en vue d'expertise, laquelle est confiée au comité d'experts en nutrition humaine.

Parallèlement, les dispositions du code de la santé publique (art. L 5122-14) s'imposent : lorsque la publicité affirme, suggère ou suppose qu'un produit possède des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou des effets de restauration, correction ou modification de fonctions organiques, les producteurs ou distributeurs doivent soumettre une demande de vise à la commission administrative dite « du visa PP » (publicité produit) dont le secrétariat est assuré par l'AFSSAPS.

L'AFSSA et l'AFSSAPS ont établi une procédure conjointe de traitement pour garantir la cohérence du traitement de ces dossiers : l'AFSSA mène l'évaluation scientifique des dossiers déposés au titre du visa PP ; un représentant del'AFSSAPS se rend aux réunions du CES nutrition lorsque les dossiers d'allégations sont examinés ; un représentant de l'AFSSA se rend aux réunions préparatoires de la commission du visa PP.

Cette procédure, qui est bienvenue, ne permet pas néanmoins de résoudre les problèmes de fond qui se posent ici. Les entreprises peuvent engager le processus à différents niveaux, le cadre administratif de ces produits est éclaté. Il n'y a pas de référentiels scientifiques généraux d'évaluation sur les allégations santé même si l'AFSSA a publié des lignes directrices générales sur les dossiers industriels soumis au comité d'expert spécialisé « nutrition », et si un projet de règlement est à un stade d'élaboration avancé.

Par ailleurs, l'impossibilité juridique et matérielle de contrôler l'absence de demandes de visa affaiblit la portée du dispositif « publicité produit ». Quels que soient les efforts de la DGCCRF pour les contrôles qu'elle exerce effectivement, l'absence de tout mécanisme d'autorisation ou de déclaration ne permet pas un recensement, ni même une identification tangible du recours aux allégations. Les différents interlocuteurs interrogés à ce sujet ont tous fait part de l'insuffisance des réglementations, et notamment le Conseil national de l'alimentation. Il apparaît que le nombre de dossiers soumis à l'AFSSA est beaucoup trop faible et qu'une modification de la réglementation devrait s'attacher à rendre systématique la vérification des allégations.

En ce qui concerne la publicité, l'effectivité du rôle du BVP (Bureau de vérification de la publicité) a directement été mise en cause par tous les interlocuteurs interrogés.

Une amélioration de la situation est envisageable à partir d'une proposition de règlement européen concernant les allégations nutritionnelles et de santé. Ce texte, qui devrait entrer en vigueur en 2005 prévoit que l'usage d'allégations de santé dans l'étiquetage, la présentation et la publicité de denrées alimentaires sera soumis à une procédure d'autorisation, après évaluation scientifique par l'Autorité européenne de sécurité alimentaire (AESA). Si l'AESA saisit les agences nationales sur ces dossiers, l'AFSSA pourra procéder à une évaluation des allégations sur leur validité scientifique et leur formulation (sur le produit ou par la publicité).

Il serait souhaitable d'unifier la procédure en la confiant à l'AFSSA. A défaut, il est urgent et nécessaire de donner aux services de contrôle les moyens juridiques et administratifs d'intervenir efficacement dans ce domaine des « allégations santé ». En quelques années, ce qui n'était qu'une question marginale est en passe de devenir un réel problème car il faut bien admettre que des producteurs ou distributeurs très imaginatifs n'ont guère de difficulté à aller à la rencontre de publics avides de produits « miraculeux » en croyant être averti des réalités scientifiques.

C'est d'ailleurs la même tendance qui se retrouve pour les compléments alimentaires à base de plantes.

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