W. QUELS ENSEIGNEMENTS POUR LES AGENCES DU MÉDICAMENT ?

L'extrême acuité d'une question dont le développement ne fait sans doute que commencer avec le Vioxx ne permet pas de tirer des « enseignements stabilisés » et en tout cas pérennisés. Mais sa remise en perspective avec les problèmes de fond qui ont été identifiés autorise à pointer les difficultés et, d'autre part, à rappeler les impératifs auxquels les procédures et les instances doivent rester soumises.

1. Des difficultés croissantes

* Identifiées depuis longtemps pour la plupart, elles sont devenues plus aigues au fur et à mesure des développements scientifiques et technologiques, notamment de la puissance des médicaments, de la capacité à en mesurer les effets, de la lourdeur et de la longueur des recherches, de la complexité des procédures d'expertises, ainsi que celles d'autorisation de mise sur le marché. En outre, l'évaluation, les exigences de sécurité se situent à un niveau de plus en plus élevé alors qu'on attend en même temps une efficacité de plus en plus grande.

Or, on se trouve ici dans un domaine spécifique avec la nécessité de tirer des éléments de comparaison exprimés en terme de souffrance, maladie et mort. Le rapport n'est pas en termes de « coût/avantage », mais cela doit être souligné de « bénéfice/risque ». Si le risque zéro n'existe nulle part, dans le domaine pharmaceutique le risque non négligeable est généralement avéré, en rapport avec le bénéfice médical attendu. Il n'est donc pas anormal que des médicaments puissent être risqués, voire dangereux (certains anticancéreux par exemple). Le point d'équilibre est donc difficile à déterminer et l'évolution naturelle renforce cette difficulté.

* Le poids de la dimension financière des exigences du marché n'est pas moindre et, on le voit avec le cas du Vioxx, la stratégie de recherche et de développement commercial d'un nouveau médicament a éclipsé brutalement le critère premier qui devait rester celui du bénéfice médical ajouté.

On retire l'impression fort inquiétante que la procédure du retrait du Vioxx par Merck devait surtout satisfaire les procédures boursières en réservant, comme la SEC le prévoit, la primeur de l'information aux actionnaires.

* Enfin, ne doivent pas être oubliées non plus les contraintes que représentent pour l'industrie pharmaceutique la longueur des procédures d'AMM, le coût des recherches et des besoins cliniques qui justement doivent apporter davantage de garanties que par le passé, la durée de vie commerciale limitée des médicaments et la judiciarisation peut décourager l'innovation scientifique. On aura garde d'oublier aussi le poids de la promotion auprès du corps médial qui s'illustre en France entre autres par l'existence d'un réseau de 23.000 visiteurs médicaux pour 206.400 médecins (de ville et hospitaliers).

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