3. Des indicateurs sans lien direct avec l'objectif poursuivi

Les indicateurs de performance sont étroitement corrélés aux objectifs auxquels ils sont associés : ils en mesurent la réalisation et permettent de fixer les cibles à atteindre les prochaines années.

La lisibilité et la clarté des indicateurs exigent qu'ils soient directement liés aux objectifs. Votre commission des finances regrette qu'une minorité d'indicateurs ne respectent pas ce critère de base.

Par exemple, au sein du programme « Action de la France en Europe et dans le monde » de la mission « Action extérieure de l'Etat », pour mesurer l'atteinte de l'objectif n° 1 « Défendre et représenter les intérêts de la France », il est proposé un indicateur relatif à la « résonance dans les médias des initiatives françaises » : cet indicateur n'est pas satisfaisant car la défense et la représentation effectives des intérêts français ne consiste pas à recenser le nombre d'articles parus, mais davantage à mesurer l'impact de l'action des postes français à l'étranger dans leurs rapports avec la presse locale. Cette dimension qualitative n'est pas appréhendée par l'indicateur proposé, lequel intègre de surcroît les médias français alors que l'objectif retenu vise les seuls intérêts français en dehors du territoire national.

S'agissant du programme « Appels en garantie de l'Etat » de la mission « Engagements financiers de l'Etat », l'objectif n° 2 vise à « Satisfaire la demande des entreprises en couverture de risque de change, sous la contrainte de gestion de l'équilibre de la procédure ». Le seul indicateur proposé est la « position nette réévaluée », afin de s'assurer que la gestion de la garantie - mesurée par la valeur au coût du marché du portefeuille - se fait à l'équilibre. Cet indicateur ne mesure donc pas l'objectif retenu de satisfaction de la demande des entreprises, mais seulement une des contraintes dans l'atteinte de cet objectif.

Votre commission des finances propose ainsi d'envisager un autre indicateur en lien direct avec l'objectif, tel que le nombre d'entreprises bénéficiaires de la couverture de change.

Cet indicateur pourrait distinguer la situation des PME et des autres entreprises, les plus grandes pouvant opérer des compensations entre flux sur un grand nombre de contrats et recourir davantage aux instruments de marché.

Dans le programme « Développement des entreprises » de la mission « Développement et régulation économiques », l'objectif n° 4 « Développer l'usage des communications électroniques et promouvoir l'économie numérique » n'est pas mesuré par l'indicateur n° 3 qui propose de conduire une enquête d' « opinion [auprès] des entreprises sur l'impact de l'évolution de la réglementation relative à l'usage des communications électroniques et à l'accès à l'économie numérique ». Pour apprécier le développement effectif des communications électroniques, il serait plus pertinent de mesurer le nombre de transactions électroniques enregistrées sur le territoire national et le nombre de communes françaises ayant accès au réseau de téléphonie mobile, en prenant en compte la dépense publique engagée.

Pour apprécier le lien effectif entre l'objectif et l'indicateur de performance, il convient que l'évolution de l'indicateur soit bien corrélée aux dépenses effectuées pour parvenir à l'objectif visé . Cette condition n'est pas toujours respectée . Ainsi, au sein du programme « Recherche spatiale » de la mission « Recherche et enseignement supérieur », l'indicateur « Taux de succès de lancement » par Ariane Espace ne suffit pas pour mesurer l'atteinte de l'objectif « Garantir à la France un accès à l'espace libre, compétitif et fiable » : le nombre de lancements réussis dépend non seulement des crédits alloués, mais aussi de la qualité de l'ingénierie ou de l'encadrement technique.

L'importance de facteurs exogènes à la dépense publique ne permet ainsi pas toujours de considérer qu'un indicateur mesure fidèlement la réalisation de l'objectif . A titre d'illustration, dans le programme « Concours spécifiques et administration » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », l'objectif n° 3 (associé à l'action « Administration des relations avec les collectivités territoriales ») a pour but d' « Améliorer l'information des collectivités territoriales et de l'administration territoriale sur la décentralisation ». L'indicateur n° 2 associé à cet objectif est le « nombre de visites supérieures à une minute sur les sites intranet et Internet de la direction générale des collectivités locales (DGCL) ». Si cet indicateur permet de mesurer la qualité des informations disponibles sur le site de la DGCL et est de nature à favoriser l'enrichissement du contenu du site, il ne permet toutefois pas de porter un jugement sur l'information des collectivités territoriales et de l'administration territoriale concernant la décentralisation, en raison de l'importance des autres sources d'information disponibles sur le même sujet, à commencer par celles du Sénat lui-même !

Toujours dans le domaine des relations entre l'Etat et les collectivités territoriales, l'indicateur d'activité n° 1 « Nombre de conventions de service comptable et financier signées » s'avère exclusivement quantitatif : il ne permet pas de mesurer l'atteinte de l'objectif n° 8 « Renforcer la qualité du servie partenarial rendu aux collectivités locales » associé au programme « Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local » de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques ».

Le lien entre l'objectif et l'indicateur est parfois trop lointain pour être considéré comme satisfaisant , par exemple en ce qui concerne l'indicateur n° 2 « Taux de satisfaction des employeurs d'agents sortis d'école » de l'objectif n° 3 « Pourvoir rapidement les postes ouverts au recrutement au sein des services » du programme « Soutien des politiques de l'équipement » de la mission « Transports ».

Il convient enfin de veiller à ce que les indicateurs associés à un objectif ne mesurent pas davantage un autre objectif du même programme . Ainsi, dans le programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission « Aide publique au développement », l'indicateur « Proportion de l'aide consacrée aux objectifs du Millénaire réalisés en partenariat avec les bénéficiaires » est plus cohérent avec l'objectif n° 4 « Renforcer le partenariat mondial pour le développement dans un cadre européen et multilatéral » qu'avec l'objectif n° 6 « Assurer un service culturel et de coopération de qualité » auquel il est associé dans l'avant-PAP annexé au projet de loi de finances pour 2005.

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