III. LE PACTE DANS LE PROJET DE TRAITÉ ÉTABLISSANT UNE CONSTITUTION POUR L'EUROPE

Le projet de traité établissant une Constitution pour l'Europe adopté par le Conseil européen des 17 et 18 juin 2004 prévoit la « constitutionnalisation » des dispositions relatives à la discipline budgétaire qui relèvent du traité instituant la Communauté européenne.

Les principales règles en matière de discipline budgétaire demeureront donc au niveau du traité, ce qui rendra difficile toute perspective d'évolution.

Ainsi, les articles III-179 et III-184 du projet de traité reprennent, moyennant quelques adaptations, le texte des articles 99 et 104 précités du traité CE.

De même, le protocole sur la procédure des déficits excessifs annexé au traité CE, qui fixe notamment les seuils autorisés en matière de déficit public et de dette publique, continuerait de s'appliquer. L'article III-184 précité renvoie en effet au « protocole sur la procédure concernant les déficits excessifs ». S'il prévoit qu'une loi européenne du Conseil « établit les mesures appropriées remplaçant ledit protocole », il précise qu'elle doit, comme à présent, être adoptée à l'unanimité , ce qui ne facilite pas une éventuelle réforme du protocole et ne répond pas à la nécessité de doter la zone euro d'une gouvernance spécifique et lisible.

Le projet de traité établissant une Constitution pour l'Europe présente cependant quelques différences par rapport aux textes actuellement en vigueur.

A. DES MODIFICATIONS MINEURES DES PROCÉDURES D'ALERTE PRÉCOCE ET DE DÉFICIT EXCESSIF

1. La possibilité, pour la Commission européenne, d'adresser un avertissement à un Etat membre dans le cadre de la procédure d' « alerte précoce » ou en cas de déficit excessif

La Commission européenne se verrait confier un rôle accru, dans la mesure où elle pourrait désormais adresser directement à un Etat membre un avertissement concernant sa politique économique, dans deux cas de figure :

- lorsqu'il est constaté que ses politiques économiques ne sont pas conformes aux grandes orientations des politiques économiques (GOPE) ou qu'elles risquent de compromettre le bon fonctionnement de l'union économique et monétaire, c'est-à-dire en particulier dans le cadre de la procédure dite d' « alerte précoce » (article III-179 ) ;

- si la Commission européenne estime qu'il y a un déficit excessif dans un Etat membre ou qu'un tel déficit risque de se produire (article III-184 ).

Le résultat des négociations de la conférence intergouvernementale ne rejoint pas sur ce point les propositions conjointes sur la gouvernance économique présentées par la France et l'Allemagne le 20 décembre 2002, selon lesquelles « les responsabilités de la Commission concernant les GOPE et la procédure de déficits publics excessifs devraient être maintenues en l'état ». La France s'est en effet heurtée à l'opposition de plusieurs Etats, dont les Pays-Bas.

2. Au Conseil, l'absence de vote de l'Etat concerné dans le cadre de la procédure d' « alerte précoce » et lors de la constatation d'un déficit excessif

Malgré le pouvoir de la Commission européenne d'adresser directement des recommandations à un Etat dans le cadre de la procédure d' « alerte précoce » ou lors de la constatation d'un déficit excessif, le Conseil conserverait dans ces cas de figure la possibilité d'adopter ses propres recommandations.

Actuellement, les décisions du Conseil relatives à la procédure d'« alerte précoce » et à la constatation d'un déficit excessif (mais pas aux étapes ultérieures de la procédure) sont adoptées à la majorité qualifiée, l'Etat concerné conservant son droit de vote .

Le projet de traité établissant une Constitution pour l'Europe prévoit de mettre fin à cette situation, qui conduit un Etat à être à la fois juge et partie. Ainsi, le Conseil statuerait sans tenir compte de l'Etat concerné :

- dans le cadre de la procédure d' « alerte précoce » (article III-179 ) ;

- au sujet de la constatation d'un déficit excessif (article III-184 ).

3. La nécessité d'une proposition de la Commission européenne pour que le Conseil décide d'un déficit excessif

L'article III-184 précité tend également à renforcer le pouvoir de la Commission européenne dans le cas où le Conseil décide d'un déficit excessif.

En effet, le paragraphe 6 de l'article 140 du traité CE, actuellement en vigueur, prévoit que le Conseil statue sur l'existence d'un déficit excessif sur recommandation de la Commission européenne. Le texte adopté prévoit quant à lui que le Conseil statue sur proposition de la Commission européenne. Ainsi, à défaut du consentement de celle-ci, le Conseil ne pourra modifier qu'à l'unanimité le texte de la Commission européenne 43 ( * ) .

En revanche, le Conseil européen précité des 17 et 18 juin 2004 a supprimé la disposition selon laquelle le Conseil se prononçait également sur proposition de la Commission européenne dans le cas de l'adoption de recommandations à l'Etat concerné .

* 43 En effet, contrairement aux recommandations de la Commission européenne, qui peuvent être modifiées à la majorité qualifiée, les propositions de la Commission européenne ne peuvent être modifiées qu'à l'unanimité.

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