CHAPITRE II : LES SITES D'INFORMATION ET DE SERVICES

Il convient de bien distinguer les sites professionnels des sites destinés au grand public qui sont souvent fort utiles mais présentent des dangers dans la mesure où ceux qui les consultent n'ont pas la compétence pour évaluer la qualité des informations qui leur sont communiquées. Le risque de charlatanisme est bien réel, s'agissant en particulier de sites de services commerciaux car l'acquisition de médicaments via Internet peut faire échec à la prescription médicale.

SECTION 1 : LA TRANSFORMATION DE LA RELATION PATIENTS/MÉDECINS PAR LES SITES WEB DE SANTÉ

Le développement relativement lent de l'équipement informatique des familles en France explique que les sites relatifs à la santé aient pour le moment un impact relativement limité sur les patients mais, cette situation évolue très rapidement 5 et l'intégration de l'ordinateur dans l'équipement des familles va accroître de façon exponentielle la consultation des sites consacrés à la santé.

Elle aura bien sûr des conséquences importantes sur les rapports que les patients entretiennent avec les professionnels de santé. Mieux informé, « propriétaire » de son dossier médical, associé à la définition du projet thérapeutique qui va lui être administré, capable d'aller chercher de l'information médicale le concernant, le malade redevient actif dans le traitement de sa maladie, et se trouve ainsi en position de mieux apprécier la stratégie thérapeutique. L'échange devient à la fois plus exigeant et mieux documenté avec toutefois un risque réel de dérapage vers un comportement consumériste qui risque de poser des problèmes en termes de rapports humains (un médecin peut difficilement être regardé comme un banal prestataire de service) et d'incitation à l'augmentation des dépenses de santé car le soignant risque d'être soumis à la pression d'un patient exigeant un volume de prescription (en particulier d'examens complémentaires) supérieur à celui qu'impose son état, sans même parler du patient hypocondriaque...


« A l'instar des USA où le canal santé Health Channel d'AOL attire chaque mois environ trois millions de visiteurs, quelques dizaines de sites Web français se font concurrence pour tenter de fidéliser les consommateurs d'une part, les professionnels de santé d'autre part.

Ils sont de types et d'origines variés, les uns créés par des éditeurs de livres, de revues ou journaux médicaux, d'autres issus d'industriels - principalement ceux du médicament et de la communication - d'autres encore de sociétés savantes ou de collèges professionnels...

La plupart de ces sites comportent une équipe éditoriale, de taille variable (d'une demi-douzaine à une trentaine de personnes) qui s'appuie sur un comité scientifique formé de personnalités diverses : médecins hospitalo-universitaires ou libéraux, responsables de rédactions de revues ou de sociétés savantes. Sur ce point, les éditeurs de revues sont privilégiés, car ils peuvent s'appuyer sur les comités scientifiques de leurs publications.

Ces sites, initialement présentés comme de véritables portails spécialisés pour l'orientation dans le Web médical, n'ont pas tenu cette ambition et se sont repliés sur des bouquets de services plus ou moins originaux : forums de discussions, lettres de diffusion, rubriques d'actualités médicales, juridiques, économiques, fiscales ou sociales du monde de la santé, guides de prescription thérapeutique, fiches d'informations à remettre aux patients...

Certains sites proposent de se positionner comme intermédiaire entre, d'une part, les laboratoires pharmaceutiques ou cosmétologiques qui nécessitent des études cliniques, par exemple pour le test d'un nouveau produit et, d'autre part, les médecins désireux de réaliser ces essais avec leurs patients (informés et volontaires) ; d'autres sites vont jusqu'à proposer des serveurs sécurisés pour l'échange des données médicales, pour ces essais ou pour la constitution de réseaux de santé (ou de réseau ville - hôpital).

Quelques sites comportent une partie réservée aux professionnels de santé, accessible seulement sur inscription, après avoir fait preuve de sa qualité de professionnel de santé (par exemple par la fourniture du numéro d'inscription à l'ordre des médecins) et une partie ouverte au public. D'autres présentent plusieurs rubriques orientées vers les professionnels ou le public, avec ou sans inscription préalable, mais sans réel contrôle de la qualité des visiteurs. »

(
Rapport sur l'état des lieux 2003 de la télémédecine en France, Dr Vincent Hazebroucq)

A) La typologie des sites Web de santé

Il est possible aujourd'hui, via Internet, d'informer les usagers et les malades :

- sur leurs maladies et sur les alternatives thérapeutiques,

- sur la qualité médicale, le confort, l'accueil, les ressources en personnel et en moyens techniques des structures hospitalières qui sont à leur disposition mais il n'y a pas que le recours à Internet qui permet de le faire puisque la presse publie régulièrement des classements des hôpitaux,

- sur les titres, les qualifications, l'expérience et les résultats des spécialistes auxquels ils pourraient s'adresser pour une intervention ou un avis (les malades aux Etats-Unis peuvent obtenir ces informations sur plusieurs sites. Par exemple : « healthscope.org » ou « healthgrades.com »).

Un patient confronté à une pathologie va trouver, en tapant le nom de sa maladie, une multitude de sites susceptibles de l'informer et il lui est difficile de séparer le bon grain de l'ivraie faute de certification des sites .

Aussi convient-il de distinguer deux catégories de sites : les sites à finalité de service public, qui délivrent une information vérifiée et n'ont pas de visées mercantiles, et les autres sites où le meilleur peut côtoyer le pire ; ces derniers doivent pour « durer » se rattacher à un modèle économique viable et rencontrent beaucoup de difficultés.

1) Les sites d'information sur la santé à finalité de service public

Les personnes publiques disposent toutes aujourd'hui de sites Internet auxquels se réfère assez spontanément la population.

Les sites que nous pouvons recenser sont très nombreux et ne sont pas nécessairement dédiés exclusivement à la santé. Par exemple, si nous allons sur le site du ministère des affaires étrangères, nous pouvons obtenir des conseils d'ordre médicaux sur certaines destinations.

Ces sites remplissent une mission de service public dans les domaines les plus variés. Par exemple, lors de l'épidémie de SRAS, le site du ministère de la Santé permettait de donner une information vérifiée aux personnes susceptibles d'avoir été exposées à cette épidémie et leur indiquait la conduite à suivre.

Ce type de site a également pour vocation de communiquer une information pouvant être relayée par des sites privés. Pour poursuivre l'exemple précédent, l'alerte sanitaire récente relative au protocole de prise en charge des victimes de l'épidémie de pneumopathies atypiques asiatiques, émanant de la Direction générale de la santé (DGS), a été publiée en avant première sur le site Web -relayé par sa liste de diffusion- du Quotidien du médecin. Le protocole médical, publié par la DGS a ainsi paru sur le site Internet de la Société française de pneumologie, alors qu'il ne figurait pas encore sur le site officiel du ministère de la Famille, de la Santé et des personnes handicapées.

Nous pouvons multiplier les exemples dans les domaines les plus divers par exemple, le patient confronté à un problème de déontologie médicale obtiendra sur le site du conseil de l'ordre les renseignements relatifs à la marche à suivre nécessaire pour engager une action.

Au-delà de la diffusion d'informations il existe des sites associatifs qui peuvent jouer un rôle de service public en mettant en relation les patients. C'est par exemple le cas du site « orphanet » qui regroupe les patients atteints de maladies rares et leur permet d'échanger leurs informations. Il constitue également un outil précieux pour les professionnels de santé confrontés à des situations dont ils sont peu familiers. L'E-santé contribuera à n'en pas douter au développement d'associations de malades dans le cas notamment de maladies graves ou rares. Elle permettra de tisser des liens de solidarité qui , non seulement augmentent le niveau d'exigence et de compétence des patients, mais constituent aussi , par l'expérience d'un vécu commun, un vecteur puissant pour mieux affronter la maladie et vaincre le sentiment d'isolement trop souvent ressenti par les malades et leurs familles.

Ces sites à finalité informative, émanation directe où indirecte des pouvoirs publics et des facultés de médecine, hôpitaux publics ou sociétés savantes, sont animés par des interlocuteurs stables, aisément identifiables et responsables ; leur développement est de nature à assurer une meilleure information du patient, leur utilité en cas de crise sanitaire n'est pas à démontrer et leur mode de fonctionnement ne pose guère de problèmes éthiques mais, la situation des sites à finalité commerciale est plus complexe.

2) Les autres sites

A la différence des sites évoqués précédemment, ces sites ont une finalité commerciale. Ils obéissent à des impératifs de rentabilité qui peuvent poser des problèmes sérieux d'éthique.

Il est difficile d'en établir une typologie car nous trouvons de très nombreux sites ayant une finalité commerciale qui proposent une très grande variété de prestations.

Ce qui frappe est d'abord la durée de vie assez brève de nombre d'entre eux qui, faute d'arriver à un équilibre financier satisfaisant, ont fermé leurs portes ces dernières années.

La constitution et la gestion de sites Web présente un coût. Ce problème n'est pas spécifique à la santé : les internautes et les professionnels sont réticents à acquitter un prix lors des consultations, pour des raisons diverses qui vont de la crainte de communiquer un numéro de carte bancaire via Internet à la possibilité de consulter de nombreux sites gratuits consacrés à la santé.

Cette situation est profondément malsaine d'un point de vue économique, elle implique un financement des sites d'information de santé par la publicité ou la vente de fichiers qui peut constituer un problème si le patient n'est pas informé de ce mode de financement et croît être sur un site « objectif ».

« Si la viabilité économique de ce secteur ne fait guère de doute à terme, du fait du nombre de clients potentiels, les déboires boursiers récents de nombreuses sociétés de l'e-technologie ont conduit beaucoup d'opérateurs privés à basculer vers des sites à accès réservé et payant. La crainte n'est dès lors pas infondée que certains sites puissent être tentés par des formes plus ou moins explicites de publicité médicale ou pharmaceutique, afin de renforcer leur assise financière. » 6 .

Exemples de fermetures récentes de sites

( Rapport sur l'état des lieux 2003 de la télémédecine en France, Dr Hazebroucq Vincent)

Medisite

Créée en 1996 par un ancien pharmacien, gérant d'une société de communication spécialisée dans le multimédia santé (création de cédérom pour l'industrie, créations de sites Web médicaux, quelques revues...), Médisite a disparu au début de l'année 2003, engloutissant avec elle un capital d'une vingtaine de millions d'euros.

Atmedica

Il faut également citer la fermeture très récente du site Atmedica, à l'origine conçu, en novembre 2000, comme un portail Internet proposant un bouquet de services destinés aux professions de santé. A l'origine, Atmedica avait été lancée, avec un budget tout aussi important que celui de son principal concurrent, précédemment cité, Medisite, par le groupe Vivendi - Havas qui souhaitait ainsi valoriser son secteur de presse et d'édition médicales (Masson, le Quotidien du Médecin, le Quotidien du Pharmacien, le Généraliste, l'Annuaire de l'industrie pharmaceutique, le Vidal...), et ensuite revendue en bloc au groupe Medimédia France.

Dernièrement le site Atmedica a fermé ses rubriques spécifiques et se limite dorénavant à aiguiller les visiteurs vers les sites des revues ou éditeurs partenaires. Atmedica propose cependant encore un service de serveur Internet sécurisé pour l'envoi par les laboratoires de biologie médicale des résultats des analyses médicales aux médecins traitant, en substitution du courrier ou de la consultation par minitel. L'intérêt principal pour les médecins traitants est de pouvoir facilement intégrer ensuite les résultats dans les dossiers de chacun de leurs patients (un outil de téléchargement propose d'automatiser le processus) ; en outre, le serveur propose des tableaux ou des graphiques comparatifs permettant de voir comment évoluent les résultats de plusieurs dosages successifs ».

Ces déboires n'ont pourtant pas interdit le développement de sites Web consacrés à la santé.

Il est intéressant de noter que plusieurs sites se situent sur des marchés émergents tels que l'hébergement de dossiers médicaux pour lesquels le modèle économique n'est pas encore défini.

Les choix effectués par l'assurance maladie dans les mois à venir seront déterminants pour dynamiser l'offre dans ce domaine. Il existe une large palette de solutions techniques pour héberger le dossier médical qui vont de la carte à puce, hébergeant un dossier simplifié dont le patient serait en possession, à un hébergeur unique du dossier médical informatisé, au niveau national, qui peut être une personne publique ou privée.

Si les pouvoirs publics optent, par exemple, pour un certain libéralisme en encourageant la mise en place d'hébergeurs choisis par l'un des partenaires du système (malade ou patient) en matière de sites agréés pour recevoir les dossiers médicaux, il est probable qu'à partir du socle financier que constituera cette fonction, des sites essaieront d'accueillir de véritables portails d'e-santé.

Il faut noter que l'article 2 du projet de loi relatif à l'assurance maladie prévoit le recours à des hébergeurs.

Le modèle économique viable en matière de sites d'e-santé pour le grand public reste encore à bâtir : il est probablement nécessaire d'aller au-delà des règles de déontologie posées par la CNIL, par exemple en obligeant les sites à préciser la nature de leurs liens avec les fournisseurs de produits auxquels il est fait référence.

Devant le développement de ces sites, la commission nationale de l'informatique et des libertés a élaboré des recommandations sur les sites web de santé qui sont détaillées dans le tableau qui suit :

Sites Web de santé (CNIL) 7

« La consultation des sites Web consacrés à la santé répond à un besoin légitime d'information mais appelle des précautions particulières compte tenu des possibilités d'exploitation, notamment commerciale, des informations laissées sur le site (qu'il s'agisse d'informations communiquées par l'internaute ou des données de navigation).

Afin que les internautes appelés à consulter ces sites soient clairement informés de l'usage fait de leurs données, des destinataires de celles-ci et de leurs droits et des mesures de sécurité prises pour garantir la confidentialité de leurs données, la CNIL a été amenée, à la suite d'un audit effectué sur 60 sites de santé, à émettre un certain nombre de recommandations à l'attention des responsables de sites dont les principales sont énumérées ci-après (la liste complète de ces recommandations figure dans la délibération du 8 mars 2001).

L'indication de la raison sociale et du siège social du site doit apparaître clairement dès la page d'accueil (par exemple sous le titre : « qui sommes-nous ? »).

Le site doit comporter une rubrique « Informatique et Libertés/Protection des données personnelles», accessible depuis la page d'accueil ; cette rubrique doit notamment spécifier l'usage qui sera fait des données de santé communiquées par l'internaute et/ou par le professionnel de santé, et préciser en particulier qu'elles ne feront l'objet d'aucune exploitation commerciale et ne seront transmises à quiconque à des fins commerciales ou de prospection commerciale.

En cas de cession ou de mise à disposition de tiers, à des fins commerciales, de l'adresse email ou des coordonnées de l'internaute, (à l'exclusion donc de toute donnée de santé), l'internaute doit en être informé et mis en mesure de s'y opposer, par le biais d'une case à cocher.

En cas d'exploitation, à des fines commerciales, des données de connexion sous une forme nominative, l'accord des personnes doit être recueilli par le biais d'une case à cocher.

Il doit être fait mention des coordonnées ou de l'adresse email du service ou du correspondant chargé de répondre aux demandes de droit d'accès présentées par les internautes. Ce droit doit pouvoir s'exercer à tout moment en ligne.

Toute collecte directe de données auprès de l'internaute (sous forme ou non de questionnaire) doit être accompagnée d'une information précisant, sur le support de collecte, le caractère obligatoire ou facultatif du recueil de chaque information demandée (par exemple par le biais d'un astérisque).

Des mesures de sécurité reposant notamment sur le recours à des moyens de chiffrement ainsi que sur des dispositifs de journalisation des connexions doivent être mises en place pour assurer la confidentialité des données. »

B) Les sites interactifs et les sites d'information

Un nombre très important de sites de santé proposés sur Internet a vu le jour depuis une dizaine d'années. Après une phase de développement intense l'offre arrive aujourd'hui à une certaine maturité mais, il convient de distinguer entre deux types d'offre différents : les sites d'information qui utilisent essentiellement les technologies de l'Internet et favorisent l'accès du grand public (donc des patients) à l'information médicale immédiate, internationale et sans obstacles ni médiation, et les sites interactifs qui posent de redoutables problèmes de déontologie ; les sites commerciaux de vente de médicaments posant un problème particulier.

1) Les sites d'information

Souvent, le patient effectue une recherche à partir d'un portail santé qui répond à des modalités techniques identiques à celles des portails qui se sont développés dans les autres domaines. Ce sont des sites généraux, qui proposent des liens organisés de manière thématique ainsi que des services, tels que des annuaires de sites, des fonctions de recherche, des articles et documents. Ils peuvent être orientés vers le grand public et/ou vers les professionnels de santé.

Le grand public peut trouver sur ces sites :

- des informations sur les pathologies, organisées par spécialité, dont la qualité est parfois inégale ;

- des éléments d'orientation vers des professionnels spécialisés et vers les réseaux associatifs ;

- des données relatives à leur éventuelle prise en charge sociale, cette notion est importante car le patient peut assez aisément compléter son information dans des domaines liés aux conséquences financières de sa pathologie pour lesquels les personnels médicaux ne savent pas toujours le renseigner.

Il faut noter qu'il n'existe pas pour le grand public de système de référencement lui permettant de mesurer le sérieux d'un site.

Parmi les services les plus couramment disponibles pour les professionnels, on retrouve :

- des informations, le plus généralement commentées, portant sur l'actualité médicale et scientifique ;

- des logiciels médicaux, des renseignements sur du matériel informatique et des conseils d'utilisation ;

- des informations sur du matériel médical ;

- des ouvrages ;

- des forums de discussions entre praticiens ;

- des liens vers des sites sélectionnés.

Ces sites ont une finalité d'information et l'internaute peut en consulter plusieurs sur un même sujet. Le problème de la qualité de l'information se pose, mais dans des termes voisins de ceux que soulève la presse médicale qui peut être de qualité variable, en particulier parce qu'elle s'adapte à la structure et aux attentes de son lectorat.

2) Les sites interactifs pour les particuliers

Les applications interactives de l'e-santé connaissent un développement rapide. En effet, un grand nombre de sites offre des avis médicaux spécialisés. En apportant à un patient une réponse ponctuelle sur une question de santé qui lui est particulière, ils peuvent parfois aboutir à de véritables téléconsultations.

Or, la téléconsultation reste aujourd'hui interdite en France (cf. 2 ème partie) . Le problème est donc bien celui de la frontière à établir entre la délivrance d'une information générale sur un problème médical, d'une part, et une consultation qui conduirait à établir un diagnostic à distance, d'autre part. Dans ce dernier cas nous nous trouvons en présence d'un acte de pratique illégal de la médecine qui tombe sous le coup du code pénal.

Toutefois, Internet ne connaissant pas de frontière, le respect des lois nationales peut être malaisé.

Or, des sites donnent des renseignements sur toutes les médecines dites parallèles qui trop souvent émanent de charlatans quand il ne s'agit pas d'escroquerie pure et simple.

3) Les sites interactifs pour les professionnels : un outil de dialogue essentiel

Internet a vu se développer, au cours des dernières années, un nombre important de sites sur lesquels les professionnels de la santé dialoguent.

Le développement des expériences de réseaux de soins va renforcer le développement de ces sites et sera probablement un facteur important du décloisonnement entre la médecine hospitalière et la médecine libérale que tous les acteurs du système de soins appellent de leur voeux depuis de longues années.

Depuis les ordonnances Debré de 1959, il existe une frontière bien marquée entre le secteur hospitalier et la médecine de ville, en particulier les médecins généralistes. L'introduction des nouvelles technologies de l'information et de la communication avec ses potentialités dans le domaine du travail en réseau, conduira inéluctablement à une prise en charge du malade, associant tous les acteurs et favorisant une continuité des soins entre l'hôpital et le domicile, qui n'est pas aujourd'hui toujours organisée d'une manière satisfaisante.

Le dialogue facilité entre professionnels appartenant à des structures différentes facilitera une prise en charge globale et sociale du patient. Cela est très important car, avec le vieillissement de la population, la distinction entre les domaines sanitaire et social risque d'être de moins en moins nette.

Aussi, l'établissement des réseaux de soins et le développement de la prise en charge à domicile reposera de plus en plus sur le recours aux nouvelles technologies de l'information.

Cela est particulièrement évident dans le cadre de pathologies chroniques telles que le diabète, nécessitant des interventions successives, échelonnées dans le temps, de plusieurs spécialistes qu'il est indispensable de mettre en oeuvre une véritable collaboration de l'ensemble des intervenants, afin d'élaborer conjointement une véritable planification thérapeutique et d'assurer sa mise en oeuvre.

De tels réseaux de soins sont déjà opérationnels en cancérologie ou en hémato-oncologie et dans le cadre de la lutte contre les maladies rares, où des sites de dialogues entre professionnels présentent un intérêt évident du fait de l'évolution des pathologies. Autrefois les médecins soignaient des maladies aiguës qui guérissaient spontanément ou entraînaient rapidement la mort. Aujourd'hui les trois quarts des activités médicales concernent des patients atteints d'une affection chronique qui implique un suivi permanent et une coordination des activités de tous les soignants conduits à intervenir successivement et à plusieurs reprises dans le cours de la maladie , d'autant que ces patients souffrent, le plus souvent, de plusieurs affections. Cette évolution modifie de deux manières le travail des professionnels :

- Lorsqu'ils soignent un patient, ils ne peuvent se contenter, comme ils le faisaient autrefois, d'écrire quelques notes sur une maladie aiguë banale mais, ils doivent apprendre à recueillir périodiquement des informations médicales sur une ou plusieurs maladies chroniques, à les interpréter et à les communiquer ;

- Ils doivent également apprendre à coopérer avec plusieurs soignants auprès d'un malade pour prendre soin de ce dernier durant des années d'une ou de plusieurs maladies souvent incurables, mais dont l'évolution est prolongée par les progrès des thérapeutiques notamment médicamenteuses.

Pour assurer ce suivi au long cours, les rôles et les fonctions des professionnels de soins devront évoluer : les médecins doivent confier à d'autres professionnels toutes les tâches qui n'exigent pas leur compétence . Par exemple, les infirmières peuvent assurer le suivi des malades chroniques, mettre en oeuvre chez les cardiaques une rééducation physique, apporter à tous ceux qui ont besoin d'un régime diététique ou plus simplement d'une alimentation équilibrée les conseils indispensables, organiser et réaliser les programmes de promotion de la santé. Les manipulateurs radio et les orthopédistes verront également leurs responsabilités s'accroîtrent. Au total, et le Conseil National de l'ordre des médecins consultés par vos rapporteurs n'est pas hostile à cette évolution, les médecins ne travailleront plus en « solo » dans leurs cabinets mais en groupe multidisciplinaire et communiqueront avec les usagers et les professionnels des soins par Internet (ou par un réseau local interfacé avec l'intranet d'un ou de plusieurs hôpitaux) avec l'aide d'un dossier médical unique auquel chaque soignant pourra apporter des informations spécifiques. Ce dossier étant le plus souvent géré, comme le prévoit la loi, par un « infomédiaire » , « un hébergeur » . Il est d'ailleurs étonnant de constater que si tous les responsables syndicaux et politiques reconnaissent la nécessité de supprimer les barrières qui nuisent à la communication entre les hospitaliers et les médecins libéraux comme entre les généralistes et les spécialistes, ils rappellent peu souvent l'intérêt des nouvelles technologies de l'information pour réduire ces obstacles.

4) Le commerce électronique

Comme dans de nombreux autres domaines, le commerce électronique appliqué à la santé connaît un grand développement. C'est, bien entendu, le cas aux Etats-Unis, où le commerce électronique de médicaments s'est développé de façon très rapide. Ce développement s'explique largement par la structure de remboursement des soins médicaux à base d'assurance privée et la médiocrité de la couverture d'assurance maladie de beaucoup d'américains qui essayent d'obtenir le meilleur prix possible pour l'achat de médicaments.

Toutefois, vos rapporteurs considèrent, après s'être rendus aux Etats-Unis, que ce phénomène ne devrait pas être transposable à la France pour plusieurs raisons :

- Le remboursement par l'assurance maladie impose le passage par une officine et la politique de maîtrise des dépenses de santé implique de renforcer ce rôle, par exemple pour la substitution de médicaments génériques. Des patients qui feraient l'acquisition, via Internet, de médicaments, ne seraient donc pas remboursés en l'état actuel du droit.

- Le réseau d'officine est suffisamment dense pour rendre peu attractif le recours à Internet qui suppose des délais de livraison.

Vos rapporteurs ont le sentiment que la question de l'acquisition via Internet de médicaments délivrés sur prescription médicale et remboursés par l'assurance maladie ne devrait guère se poser en France dans les années à venir.

Ce problème pourrait exister pour l'acquisition de médicaments non commercialisés en France et surtout pour les médicaments non délivrés sur ordonnance, et non remboursés par l'assurance maladie, pour lesquels l'attrait du prix le plus bas pourrait peser dans les considérations d'achat.

Cette évolution, si elle se produit, pourrait à terme compromettre la situation financière d'officines. Si l'activité de sites Internet qui vendraient des médicaments en France est strictement interdite, car il s'agit d'exercice illégal de la pharmacie, rien dans les faits n'empêche des internautes de commander des médicaments à un site situé dans un pays étranger autorisant ce commerce, par exemple en Amérique du nord.

Cette situation, si elle n'est pas trop inquiétante pour le moment, impose la vigilance car les patients ne mesurent pas toujours les risques sanitaires graves qu'ils encourent, en important des produits pharmaceutiques en dehors des circuits traditionnels qui garantissent la qualité de leurs achats.

Toutefois, le Conseil économique et social note dans son rapport précité que : « Ainsi, le secteur de santé sur Internet devrait atteindre plusieurs milliards de dollars de chiffre d'affaires en 2003 (le secteur de la santé pèse 1000 milliards de dollars aux Etats-Unis, soit l'équivalent du PIB français). Les sociétés qui ont investi ce marché rencontrent un grand succès auprès des investisseurs et passent des alliances avec les grands acteurs du monde de la santé et du Web.

Le consommateur américain, dans un système où il n'existe pas d'encadrement spécifique de la vente de produits pharmaceutiques. Toutefois, la vente en ligne de la parapharmacie et des compléments alimentaires est sûrement appelée à connaître une croissance importante en France, si l'on se réfère à ce qui se passe aux Etats-Unis, où la parapharmacie pourrait connaître une augmentation de près de 700 millions de dollars de chiffre d'affaires entre 1998 et 2002, les compléments alimentaires de plus de 400 % ! Ce commerce illicite paraît, aux dires de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, se développer en France ... ». 8

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