B. LA PRISE EN COMPTE DES ENJEUX DU FINANCEMENT DE LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE

Les problèmes de financement de la production audiovisuelle fonderaient , selon le rapport établi par M. Antoine Schwarz à la demande du ministre de la culture, en décembre 2003, le choix de conserver, voire de renforcer, la mixité du financement des chaînes du secteur public .

1. Le diagnostic

Alors que la production audiovisuelle fait l'objet d' une politique publique active , qui mobilise réglementation et soutien financier , la France subirait un sous-développement de la production de fictions, de documentaires et d'oeuvre d'animation audiovisuels, qu' il faudrait mettre au compte d'une faible demande spontanée des chaînes hertziennes nationales.

L' insuffisance des ressources des chaînes françaises serait globalement responsable de cette situation, que la faiblesse des moyens des chaînes publiques nationales viendrait aggraver par des impacts qualitatifs.

De fait, l' ampleur des commandes de fiction des chaînes de télévision varie, en apparence, fortement, en Europe .

LE POIDS DES COMMANDES DE FICTION EN EUROPE

FR

ALL

R-U

IT

ESP

TOTAL

Ressources des chaînes (Mds €)

6,8

11,1

12,8

6,2

3,8

40,7

Valeur financière de la fiction (Mds €)

0,46

1,07

0,94

0,32

0,21

3,00

% des ressources des chaînes

6,7 %

9,6 %

7,3 %

5,1 %

5,5 %

7,4 %

Volume (en heures)

553

1 800

1 463

761

548

5 125

Valeur horaire moyenne (K€)

827

594

641

422

229

585

Source : Eurofiction économie - INA 2003

La valeur financière brute de la fiction dans les 5 grands pays européens était en 2001 de 3 milliards €, à comparer avec le total des ressources des chaînes (40,7 milliards € en 2000).

Le rapport relève la singularité de la situation existant en France :

- un volume très faible ;

- une valeur globale dans la moyenne ;

- une valeur moyenne élevée .

Il constate aussi que la part des ressources consacrée dans les différents pays à la fiction se situe dans une fourchette assez étroite et en déduit que l'investissement des chaînes dans la fiction, qui constitue pour elles la base de leur programmation, dépend en définitive très largement des ressources globales dont elles disposent.

Ainsi, tout objectif de développement de la production audiovisuelle passerait par une augmentation des ressources des chaînes .

Il convient, par ailleurs, de tenir compte de l'effort particulier consenti par le secteur public en matière de financement d'une production audiovisuelle diversifiée.

Sur ce dernier aspect, le rapport procède aux constatations suivantes sur la contribution de chaque chaîne au financement de la production audiovisuelle :

- pour la fiction , il observe que « malgré l'importance des investissements de TF1, il existe un équilibre parfait entre le secteur public et le secteur des chaînes privées (hertziennes) qui, ensemble, réalisent la totalité des investissements ; Canal +, longtemps acteur important de la fiction (plus de 20 M€ par an jusqu'en 2000) ayant quasiment disparu du champ.

- pour le documentaire , le secteur public domine de manière écrasante mais les secteurs des thématiques et des chaînes locales progressent fortement, leurs apports ayant doublé depuis 1998.

- pour l'animation , France 3 est le leader du secteur, les thématiques n'étant pas absentes.

A ces observations quantitatives s'ajoutent des observations plus qualitatives .

Le rapport estime que « c'est le rôle qualitatif de France Télévisions qui est déterminant pour le secteur » et qu' « au sein de chaque genre, les chaînes publiques contribuent à la diversité » .

En fiction, France 2 et France 3 commandent à la fois des séries, des « unitaires », des mini-séries et des feuilletons. En particulier, le maintien des téléfilms unitaires permet de diversifier les collaborations artistiques et techniques mieux que les séries où des équipes se constituent sur la durée, aspect important de la diversité culturelle qui touche en profondeur tous les métiers de l'audiovisuel.

Pour le documentaire, le secteur public est presque seul à diffuser le traditionnel documentaire de création alors que les chaînes privées privilégient les cases magazines dans lesquelles les documentaires doivent s'insérer.

Le secteur public fait travailler un nombre beaucoup plus important de producteurs que le secteur privé , pour un chiffre d'affaires à peine supérieur .

Le rapport souligne la dualité de l'économie de la production française avec :

- d'un côté , les deux chaînes privées , TF1 et M6, qui passent la majeure partie de leurs commandes auprès d'un nombre limité de producteurs qui, s'agissant de TF1, sont bien rémunérés, même si leur marge d'initiative sur le plan artistique est généralement limitée ;

- de l'autre côté , le secteur public qui fait appel à des fournisseurs plus nombreux qui ont une capacité de proposition réelle mais qui doivent se partager une masse financière relativement faible.

« La tendance naturelle des chaînes publiques sera alors de saupoudrer la masse financière disponible pour satisfaire le plus de candidats et obtenir le plus de volume. La contrepartie est le sous-financement fréquent des productions initiées par le secteur public, notamment les plus ambitieuses d'entre elles, et, par voie de conséquence, le malaise chronique d'une majeure partie du secteur de la production ».

A un niveau plus fondamental, le rapport relève que la pérennité des chaînes du secteur public « n'est concevable à long terme que si leurs missions sont suffisamment spécifiques et ambitieuses et si, corrélativement, des moyens adéquats leur sont donnés ».

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page