II. LES QUESTIONS POSÉES

A. LE NIVEAU DE PROTECTION DE L'UNION EUROPÉENNE

La protection douanière a été constamment réduite au niveau agrégé depuis des décennies, mais des pics tarifaires (des droits de douane très élevés) continuent à pénaliser les importations de nombreux produits, tandis que les pays émergents maintiennent des niveaux de protection moyens souvent élevés. Enfin le nombre d'accords régionaux de libre-échange mis en place augmente de façon très rapide (préférences commerciales dites « réciproques »), tandis que des traitements préférentiels ont été accordés sans contrepartie, notamment aux pays en développement (préférences « non réciproques »). C'est pourquoi une information détaillée, bilatérale et désagrégée, est nécessaire pour calculer le niveau de protection mondial et l'effet d'une libéralisation commerciale.

Les positions européennes sont souvent caractérisées comme protectionnistes dans les négociations internationales, et la France est à son tour désignée comme le pays membre oeuvrant le plus directement dans ce sens. Sans aucun doute, cette présentation est-elle encouragée par le niveau élevé de protection de l'agriculture européenne. Mais dans le même temps, le marché européen est assez largement ouvert s'agissant des produits non-agricoles. L'Europe a également mis en place de nombreux accords de libre-échange et accordé un accès préférentiel à de nombreux pays en développement : Bassin méditerranéen, pays ACP, plus récemment initiative Tout Sauf les Armes en faveur des Pays les Moins Avancés. Cette situation, qui se traduit par une forte complexité des relations commerciales bilatérales de l'Union (Figure 1), devrait abaisser sensiblement le niveau de protection effectivement appliqué par l'Union, dès lors que les droits de douane sont calculés au niveau bilatéral (on parlera de droits appliqués préférentiels). A l'opposé, les droits appliqués à l'ensemble des autres membres de l'OMC (on parlera de droits NPF, par référence à la clause dite de la Nation la Plus Favorisée du GATT) ne concernent finalement que 11 partenaires commerciaux de l'Union européenne, sur un total de 208 exportateurs potentiels vers l'UE (contre 25 pays se voyant opposer le NPF par les États-Unis, qui de ce point de vue sont donc plus « multilatéraux » que ne l'est l'UE).

Figure 1 Le « bol de spaghetti » : les accords commerciaux de l'UE en 2001

Source : CEPII [1]

Plusieurs difficultés apparaissent immédiatement.

Les calculs doivent être faits au niveau le plus fin, ce qui pose des problèmes de taille des bases de données dès lors que l'on travaille au niveau bilatéral. On passe en effet, au niveau fin de la nomenclature harmonisée, de 5 000 observations X le nombre de pays, à 5 000 observations X le nombre de pays élevé au carré. Chaque observation est ensuite multipliée à son tour par le nombre d'instruments de protection utilisés pour la catégorie de produits concernés.

L'existence de droits de douane exprimés par unité (x euros pas kilogramme ou par unité) et non en pourcentage de la valeur du produit, impose de connaître la valeur d'un kilogramme (ou d'une unité) pour assurer la conversion en pourcentage de la valeur (pour obtenir un équivalent « ad valorem » du droit de douane spécifique). On parle à ce sujet du problème des « valeurs unitaires ».

Enfin, une image synthétique de la protection ne peut être donnée qu'en procédant à une agrégation des droits sur les produits au sein de grandes catégories, ou encore entre groupe de partenaires : on s'intéresse à la moyenne des droits de douane européens dans l'industrie, ou encore à la protection du textile-habillement européen vis-à-vis des pays européens, et non au droit de douane imposé, par exemple, sur un anorak en coton pour femme importé du Pakistan. Il s'agit alors de choisir une méthode d'agrégation des données individuelles permettant de ne pas fausser les résultats. Ce point technique, bien connu des spécialistes, est coûteux en termes de calcul dès lors que l'on cherche à utiliser des agrégateurs ne biaisant pas les résultats.

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