3. La reprise de l'acquis communautaire

La capacité de la Turquie à adopter et mettre en oeuvre le cadre juridique de l'Union européenne, qui constitue l'un des critères de Copenhague, a connu des avancées sensibles, bien qu'inégales.

Le gouvernement a désigné le ministre de l'économie comme négociateur en chef pour le processus d'adhésion : chef d'entreprise, Ali Babacan est un fondateur du parti au pouvoir, l'AKP (parti de la justice et du développement). Il a obtenu la confiance des milieux économiques et a conduit l'économie turque sur la voie de la consolidation ; il sera à la fois l'interlocuteur principal de l'Union européenne et le relais des demandes de celle-ci auprès des administrations turques. Il a présenté en octobre le dispositif retenu pour conduire les négociations, qui s'appuie sur les services existants dans les ministères et sur le Secrétariat général pour l'Union européenne. Ce Secrétariat est dirigé depuis cet été par l'ancien représentant permanent turc auprès de l'Union européenne, Oguz Demiralp, qui a étudié dans une école francophone.

La Turquie doit, comme l'ensemble des pays candidats, transposer en droit interne l'ensemble du droit communautaire, appelé acquis , qui est estimé à presque 90 000 pages de journal officiel. Outre les problèmes de traduction, cet acquis doit au préalable être confronté à la législation turque existante, qui doit donc être évaluée. Pour ce « criblage » (ou « screening »), l'acquis communautaire a été découpé par le cadre de négociations en 35 chapitres thématiques : libre circulation des marchandises, agriculture, pêche, fiscalité, environnement... L'ouverture et la fermeture de chacun de ces chapitres sera décidée au sein de la Conférence intergouvernementale à l'unanimité des États membres. Le cadre de négociations prévoit de surcroît que la fermeture de chacun des chapitres ne préjuge pas d'un accord global final sur l'ensemble de la reprise de l'acquis par la Turquie.

L'ouverture de certains chapitres de négociation, comme celui consacré à la libre circulation des marchandises, doit par ailleurs être liée à la bonne application de l'union douanière par la Turquie. Plusieurs problèmes subsistent, notamment en lien avec la propriété intellectuelle et industrielle, la contrefaçon ou les produits agricoles. Ainsi, la Turquie continue d'interdire l'importation d'animaux vivants de l'espèce bovine et de viande de boeuf et le projet d'étendre l'union douanière aux produits agricoles bruts et transformés ne pourra qu'être conditionné à la levée d'un tel embargo. En matière de contrefaçon, les saisies d'objets contrefaits révèlent la réalité du problème auquel sont confrontés les industriels français : en sont victimes des marques comme Vuitton ou Lacoste, des équipementiers électriques, ménagers ou encore de pièces automobiles (Legrand, Schneider, Tefal ou Valeo).

Au sein de cet immense travail de reprise de l'acquis, l'agriculture et l'environnement devront constituer des secteurs prioritaires d'action. L'agriculture a représenté 12 % du PNB turc en 2004 et les transferts publics vers ce secteur économique s'élèvent aujourd'hui à environ 4 % du PNB, soit un niveau représentant à peu près le double du niveau communautaire. Les résultats de l'agriculture sont pourtant peu encourageants, avec une productivité faible et un nombre de personnes employées très élevé (environ 8 millions de personnes, y compris beaucoup d'épouses non rémunérées). De plus, ce secteur économique n'a pas encore été touché par les réformes lancées depuis 2001, l'environnement fiscal et l'ouverture à la concurrence y sont par exemple déficients. Enfin, les préoccupations écologiques sont encore trop peu intégrées dans les autres politiques, notamment en ce qui concerne le développement du tourisme.

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