2. Un nouveau droit d'amendement très largement utilisé sur les crédits des missions et les articles rattachés

a) Un élargissement du droit d'amendement parlementaire

L'examen du projet de loi de finances pour 2006 a donné lieu à une augmentation très significative du nombre d'amendements déposés, examinés et adoptés sur les crédits des missions et les articles rattachés (+ 266 %) .

Sur les crédits des missions, 88 amendements ont été déposés et 85 examinés. Au total, 44 ont été adoptés, soit exactement la moitié des amendements déposés.

Sur les articles rattachés aux missions, 92 amendements ont été déposés, 91 ont été examinés et 29 ont été adoptés.

Par conséquent , sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2006, 180 amendements ont été déposés sur les crédits des missions et les articles rattachés , 176 amendements examinés et 73 adoptés.

Par comparaison, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, discuté selon les dispositions de l'ancienne ordonnance organique de 1959, 48 amendements sur les crédits et les articles rattachés avaient été déposés et débattus, pour 16 amendements adoptés.

Cette forte augmentation résulte principalement de l'élargissement du droit d'amendement prévu par la LOLF . Sous l'empire de l'ordonnance organique de 1959, le Parlement après un très rapide vote d'ensemble sur les services votés (95 % des crédits en moyenne) ne pouvait que réduire ou rejeter les crédits (mesures nouvelles). Avec la LOLF, l'irrecevabilité financière résultant de l'article 40 de la Constitution demeure, mais elle s'apprécie désormais au niveau de la mission (article 47 de la LOLF), l'examen de cette recevabilité devant s'appuyer sur la motivation des amendements. Ainsi, un parlementaire peut désormais prendre l'initiative de majorer les crédits d'un programme, à la condition de ne pas augmenter ceux de la mission dont relève ce programme. Il convient donc de prévoir lors du dépôt de l'amendement une compensation de la majoration proposée au sein de la même mission.

A cet égard, votre commission des finances se félicite qu'il n'y ait pas eu, en 2005, d'utilisation abusive du droit d'amendement pour accroître la durée des temps de parole. Toutefois, si une telle évolution devait être observée, votre commission des finances pourrait être conduite à une application plus rigoureuse de l'irrecevabilité financière 15 ( * ) .

* 15 Cette interprétation avait été retenue par votre commission des finances lorsqu'elle avait auditionné MM. Loïc Philip, professeur émérite à l'université d'Aix-Marseille, et Michel Lascombe, professeur de droit constitutionnel à l'université de Lille, le 11 mai 2005 :

« Un très large débat s'est ensuite instauré au sujet des conditions d'exercice du droit d'amendement parlementaire dans le cadre de la LOLF, concernant en particulier le régime de l'irrecevabilité financière.

« M. Michel Lascombe, ayant noté la fréquence des gages purement formels - et, selon lui, rarement justifiables au sens de la LOLF - dans les propositions parlementaires entraînant la diminution d'une ressource publique, a en particulier défendu l'idée d'instituer une règle d'irrecevabilité à l'encontre des gages « irréalistes ».

«  MM. Jean Arthuis, président, Jean-Jacques Jégou et François Trucy, semblablement, se sont toutefois interrogés sur le critère de l'« irréalisme » en ce domaine, comme sur l'instance à laquelle devrait revenir la charge d'en juger, et sur les procédures pertinentes pour la justification requise.

« M. Jean Arthuis, président, s'est en particulier interrogé sur la définition d'un critère objectif, irréprochable sur le plan juridique et admissible du point de vue politique, afin d'éviter d'éventuels abus de parole en séance publique, notant qu'en ce qui concernait les projets de loi de finances, la nécessité de respecter les délais constitutionnels d'adoption conférait à ce problème une particulière acuité.

« M. Loïc Philip a rappelé la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel suivant laquelle une disposition qui restreindrait les conditions du droit d'amendement ne serait pas, pour autant, contraire à la Constitution, dès lors qu'elle n'emporterait pas d'obstacles à l'exercice effectif de ce droit ; il a indiqué que, de la sorte, la définition du caractère « irréaliste » des gages, le cas échéant, pourrait revenir au règlement des assemblées ou, à défaut, à la pratique parlementaire ». (Source : bulletin des commissions du mercredi 11 mai 2005).

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