3. Les évolutions économiques

Le coût des obsèques est évalué, hors prestation de marbrerie, à près de 3.000 euros en moyenne. Il connaît toutefois d'amples variations suivant les opérateurs et la nature des prestations.

En 2002, le chiffre d'affaires des services funéraires était estimé à plus de 1,5 milliard d'euros ; celui de la marbrerie funéraire et des travaux de cimetière à 1,6 milliard d'euros ; celui des fleurs funéraires à 1,8 milliard d'euros.

Avec la multiplication des opérateurs funéraires , le marché funéraire s'est diversifié . Alors qu'ils étaient 9.000 à avoir obtenu l'agrément prévu par la loi du 9 janvier 1986, 13.114 habilitations avaient été délivrées par les préfectures au 31 mars 2004 sur le fondement de la loi du 8 janvier 1993. Ce nombre a toutefois connu une baisse récente puisqu'il était de 15.270 au 1 er janvier 1999 et de 14.949 au 1 er juillet 2001.

Dans un mémoire de recherche 13 ( * ) soutenu le 31 mars 2006 à l'Institut d'études politiques de Paris, Mme Pascale Trompette, chargée de recherche au CNRS, observe toutefois : « En premier lieu, l'ouverture à la concurrence ne s'est pas traduite par les entrées exponentielles tant redoutées par la profession. Les nouveaux entrants sont le plus souvent des professionnels du secteur, anciens sous-traitants des Pompes funèbres générales, marbriers ou encore prestataires périphériques étendant leurs activités aux domaines des pompes funèbres. Porteur d'une symbolique peu attractive, le commerce des services funéraires demeure, pour le moment, dans les mains de la « petite famille » du funéraire, en marge des marchés des services aujourd'hui sous la coupe de la grande distribution. En second lieu, la pluralité des intervenants, telle qu'elle s'est historiquement constituée, s'est maintenue : le pôle public résiste au vent libéral, les PME conjuguent leurs forces pour rivaliser avec le groupe national leader, les identités restent plurielles . »

En outre, comme le note le professeur Dominique Lecomte, directrice de l'Institut médico-légal de Paris, dans son rapport sur les décès massifs survenus à l'occasion de la canicule de l'été 2003 14 ( * ) : « il existe plusieurs types d'opérateurs funéraires :

« - des sociétés indépendantes qui couvrent l'ensemble de la filière funéraire et sont autonomes (transport, funérarium, crématorium, thanatopraxie...). Elles ne représentent que 25 à 30 % de ce secteur ;

« - des sociétés à habilitation partielle qui sous-traitent certaines activités avec d'autres professionnels à habilitation également partielle dont certains peuvent avoir une autre activité (ambulancier, taxis...) ;

« - les agences de funérailles sans aucun matériel mais qui coordonnent l'activité de plusieurs professionnels à habilitation partielle . »

Fragilisé par la disparition du monopole communal, le pôle public a néanmoins réussi à se maintenir, principalement dans les grandes villes . En 2002, il aurait ainsi assuré 17 % des convois.

Le nombre des régies a diminué de 29 % entre 1999 et 2004, le nombre des habilitations délivrées passant de 2.950 à 2.083. 59 seulement sont habilitées pour la fourniture des six prestations essentielles : transport de corps avant mise en bière, transport de corps après mise en bière, organisation des obsèques, fourniture des cercueils, des corbillards et des personnels. La très grande majorité, soit environ 70 %, ne fournissent que le personnel nécessaire aux inhumations, exhumations et crémations.

Comme le souligne Mme Pascale Trompette : « L'alternative d'une mutation vers le statut de société d'économie mixte offre manifestement de meilleurs ressorts de compétitivité dans un contexte concurrentiel plus agressif. (...) Le principal atout de la SEM est de bénéficier tout à la fois d'un crédit d'image associé à la grandeur civique, d'une certification de la collectivité à laquelle elle est adossée et de la souplesse d'une gestion privée. A la différence des concessionnaires, la fin du monopole ne les prive pas de l'appui des réseaux publics. L'affichage d'une spécificité du pôle funéraire public face à la privatisation croissante de l'activité participe d'une véritable dynamique de différenciation . »

11.028 entreprises étaient habilitées sur le territoire métropolitain au 31 mars 2004.

Selon une étude réalisée par l'Insee en 2002, 77 % comptaient moins de 10 salariés et 62 % moins de 5 salariés. Les très petites entreprises composent ainsi l'essentiel du tissu économique du secteur.

Comme le souligne Mme Pascale Trompette : « Le développement des réseaux constitue indéniablement un ressort essentiel du dynamisme avec lequel elles abordent ce nouvel âge du marché funéraire. Sur le mode de la franchise (Roc-Eclerc) ou du réseau commercial (Choix funéraire, Voeu funéraire), le maillage des PME et TPE dessine le nouveau paysage d'un secteur jusqu'alors caractérisé par une forte atomisation. Le Choix Funéraire, France Obsèques Liberté, le Voeu Funéraire, Roc Eclerc : avec des concepts marketing très différenciés, ces réseaux nationaux occupent désormais une place majeure dans le paysage national du funéraire. En développant leurs propres maillages commerciaux, les petits entrepreneurs construisent une identité commune tout en conservant une indépendance dans la pratique de leur métier. La mise en commun de ressources permet aux adhérents de bénéficier d'économies d'échelle et de centrales d'achat, de fonctions support (conseil juridique, avocat) et d'un réseau de partenaires professionnels sur l'ensemble du territoire concerné. Mais elle est aussi indissociable de l'affichage d'une politique commerciale et marketing déterminée, que ce soit en matière de prix (Roc Eclerc), de qualité « modèle PFG » (Choix Funéraire) ou encore de proximité (Voeu Funéraire). Enfin, l'affiliation au réseau devient une nécessité pour accéder à un poids suffisant et construire sa place comme interlocuteur des groupes financiers sur le marché de la prévoyance . »

En 2002, le réseau des agréés du « Voeu funéraire », et celui des franchisés « Roc Eclerc » auraient respectivement réalisé 33 % et 14 % des convois.

Après une chute brutale à la fin des années 1990, le groupe OGF-PFG , né de la cession par la Lyonnaise des Eaux de sa filiale de services funéraires PFG au profit du groupe américain SCI, a réussi à stabiliser son activité à environ 25 % des parts du marché national 15 ( * ) .

Comme le souligne Mme Pascale Trompette : « Il demeure un acteur central du secteur, à la source des principales innovations en matière de qualité de service. S'il doit toujours composer avec une structure rigide qui connaît d'évidentes limites en termes de performance, il peut en revanche jouer de son envergure nationale pour séduire les acteurs du marché de la prévoyance . »

La prévoyance funéraire connaît en effet un fort développement alors que, historiquement, l'organisation des funérailles d'un défunt était prise en charge par les membres de sa famille.

Selon une enquête de juillet 2005 réalisée par la Fédération française des sociétés d'assurance, plus de trente-six sociétés commercialisaient, en 2004, des contrats à adhésion individuelle permettant le financement ou la réalisation des obsèques et représentant plus de soixante produits différents.

Comptant 1,4 million de contrats en portefeuille dans les sociétés d'assurances pour des cotisations s'élevant à 556 millions d'euros, ce marché était jusqu'à présent en plein essor, le nombre de contrats conclus et le montant des cotisations collectées ayant respectivement augmenté de 9 % et de 12 % en un an. Le montant global des capitaux garantis s'élevait à 4,3 milliards d'euros à la fin de l'année 2004.

Il convient enfin de rappeler que la fiscalité du funéraire constitue une source de recettes importantes pour l'Etat et les collectivités territoriales. Ainsi, alors que les prestations funéraires sont éligibles au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée par l'Union européenne, la plupart d'entre elles restent taxées à 19,6 % en France.

* 13 Trompette P., Ethnographie des échanges économiques. Le marché des pompes funèbres. XVIIIe-XXe, Mémoire d'Habilitation à Diriger des Recherches en Sociologie, Institut d'études politiques de Paris, 31 mars 2006.

* 14 « Rapport sur les décès massifs : Situation actuelle, circonstances particulières, proposition, plan d'intervention spécifique » du professeur D. Lecomte et du docteur D. de Penanster - 12 mars 2004 - page 29.

* 15 Mme Pascale Trompette observe que : « Sa puissance financière lui permet tout d'abord d'étendre sa couverture du secteur : rachats de PME, développement sur les marchés étrangers, maîtrise des secteurs d'activité en amont et aval du secteur pompes funèbres (menuiserie, marbrerie). La fin des années 90 est douloureuse pour le groupe : après une stratégie de croissance externe, essentiellement destinée à rendre l'entreprise attractive vis-à-vis d'acheteurs potentiels, les PFG accusent une chute brutale de leurs parts de marché. La fragilité du groupe OGF-PFG résulte de coûts de fonctionnement très importants comparativement aux petites structures, assorti d'une réactivité plus faible. En interrompant une large part de leur partenariat avec un certain nombre de fournisseurs (fabricants de cercueil), de sous-traitants (Hygecobel) et autres opérateurs de la filière (marbrerie), les PFG ont également conduit à transformer les structures de coopération en structures d'affrontement. Privé de l'un de leur principal apporteur d'affaires, les intervenants de la filière ont cherché des alliances parmi la concurrence. »

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