C. DISCOURS DE M. SEPPO KÄÄRIÄINEN, MINISTRE DE LA DÉFENSE DE LA FINLANDE, REPRÉSENTANT LA PRÉSIDENCE ENTRANTE DE L'UE

Se déclarant particulièrement honoré et heureux d'intervenir aujourd'hui devant l'Assemblée de l'UEO, en vue de la présidence finlandaise de l'Union européenne qui commencera dans moins de quinze jours, M. Kääriäinen a souhaité aborder dans son intervention trois questions liées à l'avenir de l'Union : les objectifs de la Finlande concernant la politique de sécurité et de défense de l'Union, la politique de défense de la Finlande elle-même, et le moyen de combler le fossé actuel entre l'Union et les opinions publiques.

Au cours de sa prochaine présidence de l'Union européenne, la Finlande aura pour principal objectif de faire de l'Union un acteur crédible sur le plan international. Pour renforcer la confiance des citoyens en l'Europe, des réalisations concrètes sont nécessaires, ce qui signifie qu'il faut rendre plus efficaces les mécanismes de prise de décision. Il faudra aussi aborder les conditions de l'élargissement. Cela dit, M. Kääriäinen souhaite, en tant que ministre de la défense, se concentrer sur les questions de sécurité et de défense. Depuis 2003, date à laquelle elles ont commencé, l'Europe s'est engagée dans de nombreuses opérations extérieures sur trois continents. L'objectif de la Finlande est de les évaluer et de les gérer au mieux et de préparer les nouveaux défis de l'avenir. Les opérations les plus importantes ont été menées en Bosnie-Herzégovine, d'autres sont en cours en République démocratique du Congo. Il est important de bien coordonner les activités militaires et civiles, d'autant plus que l'Union accroîtra bientôt sa présence dans les Balkans en intervenant au Kosovo.

Depuis 1999, année de la dernière présidence européenne de la Finlande, des progrès importants ont été accomplis en matière de capacités. Le nouvel objectif fixé pour 2010 prévoit le catalogue complet des forces européennes et la mise en route d'actions destinées à combler les lacunes actuelles de la PESD. La capacité de réaction rapide sera accrue grâce au concept des "groupes de combat", capables de se déployer dans un délai de dix jours. A partir de janvier 2007 les bataillons communs à l'Allemagne, aux Pays-Bas, à la Finlande, ainsi que le bataillon franco-belge, seront en ordre de marche.

L'Agence européenne de défense, créée en 2004, constitue un forum important pour la coopération en matière de défense dans quatre domaines : les capacités, l'armement, le marché, la recherche et la technologie. La Finlande souhaite renforcer son rôle à l'avenir. Une initiative conjointe des présidences britannique, autrichienne et finlandaise conduira par ailleurs à améliorer la coordination entre les actions civiles et militaires dans les opérations de gestion de crise ainsi que la planification de l'exécution des opérations, en particulier en Bosnie-Herzégovine. L'orateur souligne l'importance du rôle de l'Union européenne sur la scène mondiale en raison de la coopération étroite qu'elle entretient avec la Russie, la Chine, l'ONU, l'Union africaine, l'OSCE et l'OTAN. C'est un élément essentiel du succès de ses opérations.

A la demande de certains parlementaires de l'UEO, le ministre de la défense finlandais présente maintenant l'actualité de la politique de sécurité et de défense de son pays. En 2004, le Gouvernement finlandais a réaffirmé que les "pierres angulaires" de cette politique étaient toujours la conscription universelle, la défense du territoire, et la non-appartenance à des alliances militaires. La Finlande, dont le territoire est vaste mais la population et les ressources naturelles limitées, est l'un des rares pays européens qui continuent à recourir à la conscription. A une époque où les dépenses en matière de défense diminuent, le pays a décidé de mettre l'accent sur le « rapport qualité-prix » de ses équipements. Pour préserver son indépendance territoriale, la Finlande recourt à la conscription, laquelle lui fournit en outre une réserve de capacités disponibles pour des opérations de gestion de crises internationales. Depuis 1956, la Finlande participe à des opérations de maintien de la paix, dans le cadre de la PESD notamment. Elle a rejoint en 1994 le Partenariat pour la paix et a participé à des opérations de l'OTAN. Huit cents Finlandais sont actuellement présents en Afghanistan, au Kosovo et en Bosnie-Herzégovine et deux cents autres font partie d'un bataillon européen créé avec l'Allemagne et les Pays-Bas. La Finlande fait partie du petit groupe de pays qui n'ont pas souhaité adhérer à l'OTAN, mais elle entend renforcer sa coopération avec l'Organisation. L'interopérabilité permise par l'OTAN est nécessaire pour la gestion internationale des crises.

Quand on parle de coopération internationale, il ne faut pas oublier la dimension nationale. Les forces finlandaises de défense ont un rôle déterminant dans la protection de la société nationale et de ses fonctions vitales. Les principes, et la forme d'une coopération intergouvernementale en matière de défense ont été fixés par le gouvernement en novembre 2003. Celui qui lui succèdera après les élections de mars 2007 devra relever de nombreux défis. Il lui faudra en particulier réévaluer les "pierres angulaires" de la politique de défense, y compris les relations avec l'OTAN. Quoi qu'il advienne de cette relation, il est certain que la responsabilité principale de la défense et de la sécurité finlandaises continuera à appartenir aux Finlandais. Mais il est tout aussi certain que la Finlande demeurera un pays de coopération.

Le Ministre souhaite conclure son exposé en évoquant l'importante question des relations entre l'Union européenne et les citoyens de ses États membres, qui ne saurait être éludée. Les attitudes critiques et négatives envers l'Union sont aujourd'hui fréquentes, tout simplement parce que les citoyens ont du mal à voir en elle un instrument pour bâtir un avenir meilleur. Beaucoup y voient au contraire une construction bureaucratique indifférente aux besoins des Européens ordinaires. Un certain nombre de décisions ne provoquent qu'irritation, voire colère. Il en est ainsi, en Finlande, de celles qui portent sur l'agriculture ou sur la chasse, qui semblent être prises en ignorance totale des conditions locales. Cela empêche de voir les succès de l'Union, notamment en matière de paix, de sécurité et de stabilité.

Il faut donc faire en sorte que les décisions de l'Union puissent être comprises par tous les États membres et leurs citoyens. Ce n'est qu'ainsi qu'elles apparaîtront légitimes. C'est donc une nouvelle culture qui doit émerger car les campagnes de publicité ne suffiront pas à changer l'image de l'Union. Cette dernière peut emporter la confiance de ses citoyens si elle mène une politique qui donne une véritable valeur ajoutée. Elle doit donc apporter quelque chose aux politiques nationales et à la coopération interétatique traditionnelle. On a besoin d'une telle valeur ajoutée dans des domaines comme la sécurité, l'emploi, la sécurité sociale, ainsi que pour résoudre les crises environnementales et énergétiques. Il faut donc se concentrer sur ces grandes questions sur lesquelles l'Union doit être plus uniquement la somme de ses Etats membres.

Peut-être l'Union européenne pourrait-elle faire sienne la devise du Centre de Norfolk des forces armées américaines : il n'est pas suffisant de faire les choses mieux, il faut aussi faire des choses meilleures.

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