II. L'AIDE LIÉE : RPE ET FASEP

L'aide française à la Chine transite également par la Réserve pays émergents (RPE, prêts concessionnels) et le Fonds d'aide au secteur privé (FASEP, dons), instruments d'aide liée (en conformité avec les règles de « l'Arrangement d'Helsinki » de l'OCDE 153 ( * ) ) dédiés aux pays émergents et mis en oeuvre par la mission économique de Pékin. Celle-ci donne également son avis sur les projets de l'AFD pour le compte de l'ambassadeur, après consultation du SCAC, et un second avis confidentiel destiné à la DGTPE.

Les engagements et décaissements sur ces deux instruments entre 2000 et 2006 ne suivent pas de tendance régulière, et s'élèvent en moyenne à respectivement 22,2 millions d'euros et 32,5 millions d'euros par an. Leur utilisation tend donc à diminuer, en particulier la RPE.

Engagements et décaissements annuels des RPE et FASEP depuis 2000

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Engagements (1)

RPE

-

54,37

-

6,85

2,2

75

4,68

FASEP

0,33

1,92

2,45

1,06

1,61

3,36

1,72

Total

0,33

56,29

2,45

7,91

3,81

78,37

6,4

Décaissements

RPE

32,1

31

56,7

42,3

29,9

17,8

7,4

FASEP

0,75

1,03

1,41

1,78

0,6

2,71

2,13

Total

32,85

32

58,1

44,1

30,5

20,5

9,55

(1) : les engagements sur RPE correspondent à l'année de signature des protocoles ; ceux sur FASEP à l'année de notification.

Source : mission économique de Pékin

A. LES PRÊTS DE LA RPE

1. Les modalités d'octroi des prêts

La RPE répond au même objectif que les anciens « protocoles du Trésor » auxquels elle a succédé en 1997, tout en limitant la logique de guichet de ces derniers : l'examen des projets est désormais plus approfondi et ils ne sont plus substituables sur une même ligne de prêt. En Chine, la RPE soutient essentiellement les secteurs des transports (liaisons ferroviaires), de l'environnement et de l'équipement médical.

Les conditions financières sont négociées au cas par cas selon les modalités prévues par un accord-cadre conclu le 7 avril 2004 par les deux ministères des finances. On peut ainsi relever les principales caractéristiques suivantes :

- seuls sont éligibles les projets dont le financement dépasse 2 millions d'euros et qui, conformément à l'Arrangement d'Helsinki (sous l'égide de l'OCDE) et selon des hypothèses tarifaires de marché, ne peuvent couvrir leurs coûts opérationnels ni rembourser un crédit à l'exportation de 10 ans à des conditions commerciales normales ;

- les prêts du gouvernement français sont en général « mixés » à parité avec un prêt commercial de 10 ans garanti par la Coface. Ils sont accordés pour une durée de 30 à 35 ans (en tous les cas supérieure à 25 ans), assortie d'un délai de carence de 10 à 18 ans ;

- le financement global du projet inclut un élément-don , au titre de la concessionnalité et conformément aux règles de l'OCDE, d'au moins 35 % et non plafonné (mais en pratique inférieur à 45 %). Les versements des prêts sont effectués selon les mêmes modalités de rétrocession (cf supra ) que pour l'AFD ;

- le prêt ne peut être directement utilisé pour le paiement de taxes et droits sur le territoire chinois, et les flux financiers (remboursement du principal, paiement des intérêts et frais bancaires...) doivent être acquittés nets de toute taxe . Chaque convention de prêt doit prévoir une clause précisant, le cas échéant, l'exemption de taxe des prestataires et fournisseurs français ;

- le financement des travaux, fournitures ou prestations doit être octroyé, à hauteur d'au moins 70 %, à des entreprises françaises 154 ( * ) ; le solde étant affecté à parité à des fournisseurs chinois 155 ( * ) et étrangers. La procédure d'appels d'offres (soumise à la réglementation chinoise) de la mission économique fait toutefois l'objet de critiques des autorités chinoises , qui souhaiteraient que ceux-ci soient internationaux, et non pas réalisés exclusivement auprès d'entreprises françaises. De fait, les projets de l'AFD - il est vrai déliés - peuvent donner lieu à des appels d'offres internationaux.

2. Un instrument appelé à être moins utilisé

Chaque protocole fait l'objet d'une courte convention 156 ( * ) . Sur les 15 protocoles signés depuis 1997, 10 ont été soldés et un seul est véritablement nouveau. Une fois le protocole signé, les décaissements des prêts sont assez rapides , en particulier sur la fourniture de matériels, plus aisée à mettre en oeuvre que les projets de génie civil. Quatre projets sont toutefois soumis - ou l'ont été récemment - à des difficultés et retards importants :

- le projet de fourniture d'équipements d'électrification, de signalisation et de télécommunications pour la ligne ferroviaire à grande vitesse dite « Shitaï » a connu plusieurs reports (la ligne Pékin-Tienjin, remportée par Siemens, étant jugée prioritaire dans la perspective des Jeux olympiques), et les contrats de fournitures on été finalement signés le 28 février 2007. Il présente un grand intérêt pour l'offre française sur la grande vitesse, secteur qui en Chine fait l'objet d'un plan de développement très voire trop ambitieux ;

- l'installation de serres dans le Guangdong a été bloquée en raison de droits de douane trop élevés (600.000 euros). Le problème a été résolu et le paiement final de 5 % n'a pas été présenté ; le solde de 53.594 euros devrait être prochainement rendu par Natixis ;

- des difficultés techniques importantes, imputables au fournisseur Cegelec comme à l'acheteur chinois, ont affecté l'installation d'équipements pour la gestion des crues (analyse et modélisation du niveau des eaux) du bassin du Xin Jiang, entraînant le refus de paiement du solde par l'acheteur chinois au fournisseur français ;

- la construction d'une station de traitement de l'eau à Nanshi est soumise à un retard de plus de 3 ans et demi , dû à des problèmes administratifs liés au déplacement des chantiers navals occupant le terrain. La station est sur l'emprise du site de l'exposition universelle de Shanghai de 2010.

Bien que la Chine soit toujours demandeuse de ce type de droit de tirage (tout en émettant des critiques sur son manque de souplesse), son niveau de développement justifie désormais moins le recours à la RPE, qui connaît actuellement une évolution avec une diminution quantitative et une diversification sectorielle sur des projets de petite taille . Le secteur des liaisons ferroviaires à grande vitesse apparaît ainsi moins prioritaire, à présent que les entreprises françaises disposent de références suffisantes en Chine, et ont notamment pu influencer les standards chinois de signalisation 157 ( * ) .

Le principe de cofinancements avec la Banque mondiale ou l'AFD (comme au Vietnam avec le financement du métro de Hanoi) est également à l'étude. Il s'agira de prévenir toute « contamination » de l'aide liée par celle déliée, afin d'éviter une requalification par l'OCDE.

Tableau de bord des projets RPE non soldés au 31 mars 2007

Intitulé du projet

Fourniture de véhicules de secours et de lutte contre l'incendie au Sichuan

Fourniture d'équipements d'électrification, signalisation et télécommunications pour la ligne à grande vitesse « Shitaï »

Installation de serres dans le Guangdong

Gestion des crues du bassin du Xing Jiang

Stations de traitement d'eau de Nanshi et Yangshupu

Date de signature

26/05/06

05/12/05

28/05/01

28/05/01

18/05/99

Montant maximum du financement RPE (€)

9.352.898

150.000.000

2.590.000

6.250.000

22.289.571

Montant du prêt gouvernemental (€)

4.676.449

75.000.000

1.295.000

3.125.000

11.144.785

Durée du prêt (ans)

35

34

30

30

35

Taux d'intérêt du prêt du Trésor

0,12 %

0,40 %

0,40 %

0,40 %

0,50 %

Montant des contrats (€)

Non signés

60.882.172

2.585.535

4.460.000

22.289.571

Part du Trésor (€)

-

30.441.086

1.292.768

2.230.000

11.144.785

Reste à payer (€)

-

-

53.594

356.194

878.478

Fournisseur français

Non sélectionné

Alstom, CSEE, Huawei France

Richel

Cegelec

Degrémont

Banque française

Non sélectionnée

Sté Générale, HSBC

BNP Paribas

CIC

Crédit Agricole

Date limite d'imputation

31/12/06 (en report)

31/12/06
reportée au 28/02/07

31/12/02

31/12/02

30/06/00

Date limite de tirage

31/12/09

31/12/09

31/12/04

31/12/04

31/12/09

Source : mission économique de Pékin

* 153 Cet accord, dont sont signataires la plupart des pays membres de l'OCDE, est un « gentlemen's agreement » qui n'a pas la valeur juridique d'un Acte du Conseil de l'OCDE.

Les règles de l'OCDE en matière d'aide liée prohibent le financement sur crédit d'aide de projets commercialement viables, donc assez rentables pour pouvoir se financer sur le marché. Les clauses essentielles sont que le financement doit être octroyé à des maîtres d'ouvrages bénéficiant de la garantie du pays bénéficiaire, et doit comporter une bonification en don supérieure à 35 % du montant global du financement.

* 154 50 % s'agissant de l'instrument analogue de la coopération allemande, mais avec des conditions financières moins avantageuses car sans concessionnalité.

* 155 Sur requête des autorités chinoises, la partie française peut étudier la possibilité de financer une part locale supérieure à 15 % du financement global, essentiellement pour des projets à grande échelle.

* 156 A titre d'exemple, la convention du 8 novembre 2001, portant sur la fourniture d'équipements médicaux pour l'hôpital n° 4 de Chongqing, comprend 9 articles traitant successivement les points suivants : montant plafond et objet des concours financiers, composition des financements (prêt gouvernemental et crédits bancaires), modalités de financement du projet, conditions et modalités de mise en place des concours financiers, monnaie de compte et de paiement (l'euro), conditions d'imputation des contrats (conformité avec les règles de l'OCDE, prévention de la corruption...), dates limite d'imputation et de tirage du prêt gouvernemental français, impôts et taxes, évaluation rétrospective du projet par la France et entrée en vigueur.

* 157 Contribuant à combler un retard sur la concurrence allemande, qui pendant près de 20 ans a formé des ingénieurs chinois.

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