B. LA RÉFORME DE L'UNIVERSITÉ : L'AUTONOMIE AU SERVICE DE LA COMPETITIVITÉ

La réforme des universités au Japon vient de faire l'objet d'une intéressante analyse du Centre d'analyse stratégique (note de veille n° 57 du 7 mai 2007) qui confirme les informations recueillies par la délégation au cours de sa mission.

Cette réforme a d'abord été motivée par la nécessité de rendre les universités japonaises plus compétitives face à la forte concurrence des universités américaines, mais aussi européennes et asiatiques notamment pour attirer des étudiants étrangers.

L'objectif était en outre de favoriser l'ouverture des universités nationales et d' encourager la collaboration université-industrie.

Par ailleurs, la baisse de la natalité au Japon (30 millions d'habitants en moins d'ici 2050) risquait de remettre en cause l'existence d'un certain nombre d'universités par la diminution du nombre d'étudiants notamment les universités privées et municipales. Cette diminution a été drastique depuis 1994 où le nombre de jeunes accédant à l'enseignement supérieur est passé de 810 000 à 694 000. Il était donc nécessaire que le Japon se prépare à cette éventualité.

Enfin, la réforme s'explique par les critiques des acteurs du système universitaire eux-mêmes : étudiants dénonçant l'insuffisante qualité de l'enseignement, chercheurs ayant séjourné à l'étranger et critiquant la rigidité de l'organisation du système de recherche, et, enfin parents faisant part de leur hostilité au système de concours d'entrée à l'université.

La nouvelle gouvernance instaurée par la loi de 2003 est devenue effective en avril 2004.

1. Une autonomie qui va de pair avec une évaluation renforcée

Le passage des universités nationales au statut  d' entreprises publiques administrativement indépendantes a pour but d'assouplir les règles budgétaires, organisationnelles et de gestion des personnels et de favoriser leur développement.

En application du principe de compétitivité, les universités doivent mettre en oeuvre un plan de développement sur 6 ans.

L'autonomie conduit les universités à définir une nouvelle organisation administrative. Elles doivent établir un schéma organisationnel clair, basé sur l'exemple de l'industrie, définissant les responsabilités à tous les niveaux.

La responsabilité de la direction de l'université est confortée et la nomination, par le président, des vice-présidents et des doyens de faculté devra permettre la responsabilisation à tous les niveaux décisionnels.

L'allocation des ressources humaines et financières est faite sous la responsabilité de la présidence , tout en maintenant le consensus au sein de l'université.

Les nouvelles structures mises en place par cette réforme, telles que les centres d'excellence, sont destinées à permettre aux universités nationales d'améliorer leur compétitivité au niveau international.

Le ministère de l'éducation et de la recherche peut mettre fin au mandat du président de l'université au vu des résultats d'une enquête interne .

Le corollaire de cette autonomie est le renforcement de l'évaluation : depuis 2004, les établissements sont soumis à une évaluation externe ; au-delà de l'évaluation tous les six ans par le Comité dévaluation du MEXT, ils sont tenus chaque année, à l'occasion des discussions de leurs objectifs à moyen terme, de présenter le bilan de leurs activités par une auto-évaluation. Les résultats de ces évaluations doivent conditionner la répartition future des moyens de l'Etat. Enfin, toutes les universités sont contraintes à une évaluation institutionnelle par une agence d'évaluation agréée par l'Etat.

2. Une meilleure insertion des universités dans le tissu économique et social

Les universités nationales et privées jouent un rôle clé dans le développement de la recherche publique japonaise. Implantées sur l'ensemble du territoire japonais, elles constituent une infrastructure régionale pour l'enseignement, la culture et l'industrie. Chacune des universités nationales doit prendre en compte le développement régional et local dans la définition de ses orientations, en coopération avec les universités privées.

Les universités peuvent faire appel à des experts extérieurs et des spécialistes pour la direction d'instituts et l'administration et intégrer des experts et des personnalités extérieures dans ces différents conseils.

3. Un statut de droit privé pour les personnels destiné à favoriser souplesse et mobilité

Le passage du statut de fonctionnaire (33 000 fonctionnaires concernés dans les 87 universités nationales) à un statut de personnel sous contrat à durée indéterminée est effectif depuis le 1 er avril 2004. Ceci a permis un assouplissement dans les procédures de recrutement, d'affectation et de rémunération . Le concours pour le recrutement de personnels administratifs n'est plus organisé au niveau national, permettant aux candidats de répondre aux appels à candidatures aux postes proposés dans toutes les universités de la région.

Les personnels peuvent ainsi évoluer entre des fonctions d'enseignement ou d'administration, selon leur désir et les besoins de l'université.

Les salaires ne sont plus établis par rapport à une grille nationale, mais fixés par chaque établissement. L'évaluation des performances individuelles favorise l'introduction d'une rémunération au mérite et non plus uniquement à l'ancienneté.

Les financements externes sont destinés à faciliter le recrutement de chercheurs sur contrats.

Par ailleurs a été offerte la possibilité d'externaliser les activités de valorisation de la recherche.

La diffusion des résultats de la recherche et l'annonce des offres d'enseignement peuvent être développées via les Technology Licensing Offices et d'autres organismes ad hoc .

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La réforme a déjà produit des effets, notamment en termes de coopération recherche-industrie. En effet, le partage d'information ou de moyens matériels était quasi-impossible jusqu'à maintenant. Les barrières sont en train de tomber et, bien qu'il faille beaucoup de temps pour changer les vieilles habitudes, les collaborations « logiques » ne seront plus exclues.

Elle suscite toutefois des interrogations, sur ses effets en termes de disparités d'accès à l'enseignement supérieur et de déséquilibre entre recherche appliquée et recherche fondamentale.

Au cours d'une réunion qui s'est tenue le 18 juillet 2007, la commission a approuvé ce rapport à l'unanimité.

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