ANNEXE 3 EXAMEN DU PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2006 Extrait du compte rendu intégral de la séance du 19 décembre 2006

Articles additionnels après l'article 34

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 36 rectifié bis, présenté par MM. César, Gaillard, Beaumont, J. Blanc, Buffet, Bailly, de Raincourt, Peyrat, de Richemont, Valade, Mortemousque, Guené, Doublet, Pointereau, C. Gaudin et Mercier, Mmes Lamure, Troendle, Férat et Dini et M. Bordier, est ainsi libellé :

Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le dernier alinéa du III de l'article 302 bis MB du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Les redevables dont la partie variable de la cotisation due au titre des années 2003, 2004 et des périodes d'imposition débutant en 2005, 2006 et 2007 est supérieure de 20 % au total des sommes acquittées pour l'année 2002 au titre des taxes parafiscales instituées par les décrets n° 2000-1297 à n° 2000-1299 inclus et n° 2000-1339 à n° 2000-1344 inclus du 26 décembre 2000 sont autorisés à imputer le montant de cet excédent ainsi calculé sur le montant de la taxe à acquitter. »

II. - La perte de recettes pour le compte spécial « Développement agricole et rural » est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Gérard César.

M. Gérard César. Je tiens à signaler que nous avons obtenu sur cet amendement, sans la moindre publicité, vingt signatures, dont celle de M. de Raincourt en personne ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

La taxe qui finance le développement et la recherche dans le secteur agricole repose sur le chiffre d'affaires des exploitations, ce qui ne va pas sans soulever des difficultés. En effet, il s'agit non des recettes, mais d'un résultat incluant notamment le coût des matières sèches qui, dans le domaine viticole, celui que je connais le mieux, sont les bouteilles, les bouchons, les étiquettes, les caisses, etc. Dès lors, un déséquilibre s'opère entre les exploitants qui réalisent un chiffre d'affaires à partir de produits bruts, d'une part, et ceux qui transforment et valorisent leurs produits, d'autre part.

Afin d'éviter une hausse inconsidérée du montant de la taxe pour ces derniers - des simulations révèlent en effet que ce montant pourrait doubler, voire tripler -, le législateur a institué un plafonnement, à hauteur de 20 % supplémentaires par rapport au montant de la taxe dite ANDA, Association nationale pour le développement agricole, acquittée en 2002, laquelle était calculée à l'époque sur la base du volume produit.

Ce plafonnement a été reconduit chaque année, premièrement, parce qu'il constitue un garde-fou pour ces exploitants, deuxièmement, parce que les recettes globales résultant de la taxe ont largement atteint les objectifs prévisionnels.

Cet amendement a pour objet de maintenir ce plafond de 20 % en 2007, de façon à ne pas alourdir les charges pesant sur les exploitants et à ne pas susciter l'incompréhension chez ces derniers.

M. le président. L'amendement n° 49 rectifié ter , présenté par MM. Mortemousque, Barraux et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Le dernier alinéa du III de l'article 302 bis MB du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Les redevables, dont la partie variable de la cotisation due au titre des années 2003, 2004 et des périodes d'imposition débutant en 2005, 2006 et 2007 est supérieure de 22,5 % au total des sommes acquittées pour l'année 2002 au titre des taxes parafiscales instituées par les décrets n° 2000-1297 à 2000-1299 inclus et n° 2000-1339 à n° 2000-1344 inclus du 26 décembre 2000, sont autorisés à imputer le montant de cet excédent ainsi calculé sur le montant de la taxe à acquitter. »

II - La perte de recettes pour le compte spécial "Développement agricole et rural" est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. Cet amendement est très proche, à une légère différence de pourcentage près, de celui que vient de présenter Gérard César.

Ce dernier l'a fort justement fait remarquer, le monde agricole, qui vit actuellement une période difficile, est extrêmement sensible à ce problème, évoqué à l'Assemblée nationale par Daniel Garrigue.

Il est clair que je suis tout à fait prêt à voter l'amendement de Gérard César, dont l'adoption ferait de toute façon tomber le mien, l'essentiel étant pour moi que cette disposition soit retenue en commission mixte paritaire, car le moindre dérapage serait fort mal perçu par la profession agricole.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces deux amendements tendent à proposer, avec un bel ensemble, de modifier les modalités d'application du mécanisme de plafonnement temporaire de la taxe sur le chiffre d'affaires acquitté par les exploitants agricoles, en prolongeant son application d'une année : c'est la taxe ADAR, Agence pour le développement agricole et rural.

M. Gérard César. Ex-taxe ANDA !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette taxe sur le chiffre d'affaires est affectée à hauteur de 85 % au financement du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

Je rappelle que cette taxe a été instaurée par la loi de finances rectificative pour 2002. Je m'en souviens, car ce sujet avait beaucoup fait souffrir à l'époque la commission des finances. Il avait même donné lieu à un véritable psychodrame !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'était un supplice !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous vous en souvenez, monsieur le président ! Confrontés à une improvisation complète, nous avions dû, comme nous le faisons souvent, malheureux soutiers que nous sommes, faire en sorte que cela tienne à peu près debout.

Il s'agissait de remplacer neuf taxes parafiscales par cette nouvelle taxe sur le chiffre d'affaires. Nous avions dû mettre en place un mécanisme de plafonnement, qui se voulait transitoire, de l'augmentation du prélèvement qu'aurait pu faire subir à certains exploitants agricoles l'entrée en vigueur de la nouvelle taxe. L'objectif était de ne pas pénaliser ceux des exploitants réalisant un chiffre d'affaires important, notamment, cher collègue et ami Gérard César, les viticulteurs.

Il fallait, en particulier, aller à la rencontre des préoccupations de la profession agricole, car, avant l'ADAR, il y avait autre chose et l'on a pu constater ce qui relevait en réalité d'une gestion de fait. Nous voulions pallier les inconvénients de cette situation et en sortir, dans l'intérêt collectif, y compris donc dans l'intérêt des professionnels.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Avant, il y avait l'ANDA !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Avant l'ADAR, il y avait l'ANDA, qui s'était en effet mise dans une très mauvaise situation.

Depuis lors, le provisoire a duré et le plafonnement a été reconduit chaque année. Le présent amendement tend à maintenir la part variable de la taxe à 120 % de la cotisation de référence de l'année 2002.

Monsieur le ministre, l'année dernière, j'étais intervenu sur ce sujet en vous demandant ou bien d'en rester à ce dispositif, et de le faire appliquer, ou bien d'en sortir. Mais rester dans le dispositif de 2002 et prolonger, chaque année, le provisoire d'une année supplémentaire, ce n'est pas très cohérent !

J'avoue avoir de la peine à comprendre pourquoi ce sujet revient chaque année le 15 décembre. S'il revenait le 1 er juillet, nous travaillerions beaucoup mieux ! Si un véritable travail était fait en amont pour préparer la loi de finances et le collectif budgétaire, si nous n'étions pas obligés d'examiner les problèmes à la dernière minute et de se faire soutirer « aux forceps » une année de plus, nous pourrions trouver des formules plus intelligentes pour les professionnels !

Mais que fait le ministère de l'agriculture ? Que font les intéressés ? Je me pose sérieusement la question !

Il est tout de même trop facile de recevoir chaque année de M. le ministre de l'agriculture, à une ou de deux semaines du collectif budgétaire, une belle lettre de supplication ! Bien sûr, nous sommes toujours émus par les plaidoyers de nos collègues qui sont attachés à ce secteur professionnel !

M. Michel Charasse. Il faudrait envoyer quelques caisses de pinard à la commission des finances ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Allons, allons ! (Nouveaux sourires.)

En tout cas, chacun doit comprendre l'embarras de la commission !

Nous avons aussi entendu M. le Premier ministre annoncer, à Saint-Geniès-des-Mourgues, le 8 décembre dernier, des mesures de soutien en faveur de la filière viticole.

Monsieur le ministre, que peut-on faire à ce stade ? Faut-il accepter une nouvelle prolongation d'une année ? Si tel est le cas, nous devrons être bien conscients, mes chers collègues, que c'est la dernière fois (Sourires) et que, l'an prochain, il faudra tout remettre à plat et redéfinir les conditions de ces financements.

En effet, je rappelle que cette taxe, affectée à la recherche agronomique, agricole et agroalimentaire, constitue tout de même un dispositif utile pour les professions ! Il y a donc là une question de responsabilité. Prolonger chaque année un régime transitoire, c'est céder à une facilité qui atteint naturellement ses limites.

Monsieur le ministre, c'est à vous de nous dire ce que nous sommes en mesure de faire. Nous avons entendu l'appel de nos collègues Gérard César et Dominique Mortemousque. Vous êtes, encore plus que la commission des finances, le gardien du déficit... pardon, le gardien de l'orthodoxie budgétaire ! (Sourires.)

Nous souhaiterions donc que vous nous indiquiez votre vision des choses et, surtout, que vous traciez un plan de travail. Cela nous éviterait de voir revenir l'année prochaine, dans cet hémicycle, le même amendement et de nous faire soutirer une nouvelle année de prorogation.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Dans le métier que je fais, et qui a beaucoup de points communs avec le vôtre, monsieur le rapporteur général, il y a des jours où l'on gagne et d'autres où l'on perd ! (Sourires.)

Si je regrette comme vous que le système proposé consiste à prolonger encore le provisoire, je n'ai néanmoins aucune autre solution à vous soumettre aujourd'hui. J'aurais souhaité que nous puissions avancer ensemble sur cette question et trouver une solution pour remplacer ce dispositif appelé, depuis l'origine, à être provisoire. Mais nous n'y sommes pas encore parvenus.

L'honnêteté m'oblige à vous dire que, dans un certain nombre de domaines, nous avons beaucoup progressé. Je rappelle que les audits lancés au sein du ministère de l'agriculture, notamment sur les téléprocédures, ont permis de faire des progrès considérables, et que l'audit sur Natura 2000 a donné lieu à d'importantes économies.

Sur le sujet qui nous occupe à présent, il n'y a pas eu d'audit et les engagements pris n'ont pu être entièrement tenus. Mais je m'empresse d'ajouter que je vais signaler personnellement à mon collègue et ami Dominique Bussereau, qui fait, au ministère de l'agriculture, un travail remarquable, qu'il nous faut en l'occurrence, comme on dit au Sénat, « presser le pas ».

D'ici là, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous serais reconnaissant de bien vouloir adopter l'amendement de M. César, sur lequel je lève le gage, et de poursuivre ainsi le combat dans l'esprit que je vous ai indiqué.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 36 rectifié ter .

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On voit bien ici les limites d'un système de cogestion et l'on se demande, à un moment donné, qui décide et qui arrête !

Nous pourrions convenir que nous consacrerons le premier semestre de l'année prochaine à regarder d'un peu plus près cette taxe ADAR, notamment dans le cadre d'une mission d'information. Notre collègue Joël Bourdin, après les excellentes diligences qu'il a conduites autour des Haras nationaux, me paraît tout désigné pour s'atteler à cette tâche.

En tant que de besoin, pourquoi ne pas faire application des dispositions que nous offre la LOLF pour demander à la Cour des comptes de nous assister dans cette démarche ? Un magistrat pourrait accompagner M. Bourdin pour nous permettre, à la fin du mois de juin, d'y voir plus clair, de faire des propositions et de sortir de cette situation qui est tout sauf confortable !

On a vraiment l'impression que l'inertie règne dans ce domaine, ce qui ne donne pas une image fidèle de l'agriculture française !

M. le président. Monsieur le rapporteur général, quel est maintenant l'avis de la commission sur l'amendement n° 36 rectifié ter ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36 rectifié ter .

(L'amendement est adopté.)

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