2. Des investissements français en Hongrie importants et de plus en plus à vocation régionale

Aujourd'hui, la France compte 370 implantations en Hongrie, ce qui la place au quatrième rang des investisseurs étrangers, avec environ 8,5 % du stock d'investissements directs à l'étranger (IDE), soit 4 milliards d'euros, derrière l'Allemagne (34 %), les Pays-Bas (15 %) et les Etats-Unis (11 %).

De 1990 à 1997, 43 entreprises hongroises ont été privatisées pour le compte des investisseurs français .

Après la première vague au début des années 90 quand les firmes de l'Hexagone ont investi dans l'agroalimentaire, les grandes opérations ont été réalisées lors des privatisations massives des secteurs énergétiques et télécommunications entre 1995-1996. EDF et GDF ont chacune racheté deux compagnies de distribution d'électricité et du gaz. Vivendi est devenu un opérateur GSM important et la deuxième société de télécommunications de lignes fixes de la Hongrie. Dans le BTP, la société Bouygues a construit des autoroutes, le Palais des Sports de Budapest et l'hippodrome de la capitale. Il convient par ailleurs de mentionner les investissements réalisés dans ce secteur avec, notamment, la société Colas (rachat de six entreprises qui emploient 2.500 personnes) et Vinci (rachat de Hidepito, la troisième société de BTP hongroise).

Dans le secteur pharmaceutique, Sanofi-Aventis et Servier sont devenus les plus importants investisseurs en prenant le contrôle des fabricants pharmaceutiques hongrois.

BNP-Paribas, Crédit Lyonnais, Société Générale, sont présentes dans le secteur financier et les distributeurs les plus importants tels que Cora, Auchan, implantent chaque année des hypermarchés dans les grandes villes de la Hongrie. Accor est par ailleurs la première chaîne hôtelière étrangère en Hongrie.

On citera aussi, parmi les grands groupes français présents en Hongrie, Suez, Schneider, Peugeot, Renault. La présence française se trouve ainsi concentrée en particulier dans les secteurs des services (grande distribution, hôtellerie), de la pharmacie, de la production agroalimentaire, de l'énergie, de l'automobile, ainsi que ceux de l'environnement et des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Le secteur des services concentre 30 % du stock des investissements français en Hongrie.

Dans la période la plus récente, les investissements français ont connu un double mouvement. Après avoir stagné à partir de 1998, année qui correspond à la fin de deux vagues de privatisation, ces investissements ont repris à partir de 2004, pour l'essentiel autour des entreprises implantées sur place qui continuent leurs investissements, tendant à réinvestir sur place une partie de leurs bénéfices.

Auchan, par exemple, réalise désormais en moyenne 80 M€ d'investissements par an en Hongrie pour ouvrir de nouveaux points de vente. Sanofi-aventis a augmenté en 2005 ses capacités de recherche à Budapest (15 M€). Michelin a réorganisé et augmenté récemment la capacité de ses usines hongroises (60 M€). Ces réinvestissements ont été parallèlement complétés par la participation avec succès de plusieurs entreprises françaises aux quelques opérations de privatisation qui restaient encore à conduire.

Les investissements français sont le plus souvent le fait de grandes entreprises qui recherchent une implantation locale, mais qui souhaitent aussi pouvoir servir le marché régional des Balkans , soit 130 millions d'habitants. Cela confirme que très peu de sociétés françaises se sont installées en Hongrie afin d'y délocaliser leurs activités. La hausse très rapide des salaires à partir du milieu des années 90 a d'ailleurs fortement réduit l'intérêt des délocalisations pour les industries à fort taux de main d'oeuvre.

De nombreuses sociétés françaises restructurent leurs activités régionales à partir de la Hongrie . C'est le cas de Renault qui a inauguré mi-2005 à Gyor (nord ouest) un centre régional (pour les Balkans) de pièces détachées pour Renault, Dacia et Nissan. La présence de plusieurs constructeurs automobiles en Europe centrale exige par ailleurs de leurs fournisseurs qu'ils se rapprochent des lieux de production. Dans ce contexte, la compétence de la main d'oeuvre hongroise dans le secteur mécanique constitue un avantage que plusieurs sociétés françaises ont mis à profit en 2006 en créant ou rachetant des unités de production en Hongrie (Plastique Val-de-Loire, Garçonnet, Citele). Plus globalement, le positionnement géographique de la Hongrie attire depuis peu de nombreux investisseurs français.

2006 aura, de ce point de vue, été une année exceptionnelle avec une dizaine d'opérations importantes (OPA françaises, rachat de fabricants locaux, nouvelles implantations), toutes à vocation régionale représentant plusieurs centaines de millions d'euros d'investissements directs. Ces opérations ont été réalisées par la CECAB, ETDE (filiale de Bouygues), Epis-Centre, dont la délégation a pu rencontrer le directeur général M. Stéphane Michel, ou encore Téléperformance, dont M. Philippe Dominati, membre de la délégation, est vice-président du conseil de surveillance. Le dernier investissement important est à mettre à l'actif de la société française Télédiffusion de France (TDF). Certaines de ces actions ont échoué (AREVA), mais l'ensemble de ce mouvement témoigne d'un net regain d'activité des investisseurs français sur le marché hongrois, qui attire désormais également des entreprises de taille plus modeste.

En 2006, on compte en Hongrie presque 400 entreprises françaises, qui ont réalisé un chiffre d'affaires de 8,4 milliards d'euros et emploient près de 60.000 personnes (on rappellera ici que la communauté française en Hongrie compte moins de 3.000 personnes, dont 30 % de doubles nationaux).

Il reste que ces entreprises, comme toutes les filiales de groupes étrangers en Hongrie, participent désormais à l'effort national, notamment à travers la taxe de solidarité qu'elles doivent supporter 17 ( * ) . En compensation, la Hongrie mène depuis trois ans une politique volontariste pour attirer les investissements étrangers par des dispositifs d'aide à l'investissement privilégiant les investissements stratégiques ou d'importance nationale qui concourent à faire de la Hongrie un territoire pour les investissements à forte valeur ajoutée et une base de production et d'exportation régionale.

Dorénavant, la présence française en Hongrie, exprimée à travers des investissements directs, est en réalité devenue essentielle au bon fonctionnement de l'économie locale : ainsi, 5 sociétés françaises figurent parmi les 25 premiers investisseurs étrangers en Hongrie (EDF, Sanofi-Aventis, Auchan, GDF, Suez/Electrabel).

La délégation a pu visiter le site de SANOFI-Aventis à Budapest. Très aimablement guidée par M. Frédéric Ollier, Président Directeur Général de Sanofi-Aventis Hongrie, dont elle a pu apprécier le dynamisme et les talents de manager, la délégation a pu mesurer l'ambition hongroise de ce groupe français, quatrième producteur pharmaceutique du monde.

Depuis 1991, Sanofi 18 ( * ) a investi 574 millions d'euros en Hongrie, à la fois dans la production-distribution et dans la recherche-développement, rachetant progressivement le groupe hongrois Chinoïn de production chimique. Sanofi-Aventis emploie désormais en Hongrie 2400 personnes, dont la moitié de diplômés. Le centre de Budapest, extrêmement moderne, compte 1500 employés, dont 300 se consacrent à la recherche-développement de médecine interne.

Sanofi déploie en effet en Hongrie une importante activité de recherche, utilisant des technologies de pointe, de la recherche amont à la recherche clinique, en s'appuyant sur une équipe innovante et compétitive et sur l'expérience scientifique de la Hongrie, qui était la pièce centrale de la pharmacie dans la division du travail du COMECON. Les Hongrois ne manquent pas de rappeler notamment que douze savants hongrois ont reçu le prix Nobel au vingtième siècle.

Sanofi-Aventis a déboursé 15 millions d'euros pour doubler la capacité de son centre de recherche à Budapest. M. Frédéric Ollier a rappelé combien était onéreux et complexe le processus de recherche clinique, indiquant que, sur un million de molécules passées au crible 19 ( * ) , une seule serait exploitée commercialement au terme d'un processus de développement long de dix à quinze ans.

Illustrant le rôle tenu par les entreprises issues des investissements étrangers dans l'économie domestique hongroise , M. Frédéric Ollier a fait valoir aux sénateurs de la délégation l'importante contribution de Sanofi-Aventis aux dépenses de la Hongrie : d'une part, Sanofi-Aventis contribue, à hauteur de 11 millions d'euros en 2006, au budget médicaments de la Caisse nationale hongroise de sécurité sociale (OEP), qui bénéficie en effet d'une ristourne sur les remboursements qu'elle doit payer à Sanofi ; d'autre part, Sanofi-Aventis acquitte environ 60 millions d'euros d'impôts et de charges sociales et s'inquiète de leur poids croissant, notamment du fait de la taxe de solidarité sur le bénéfice des entreprises (4 %) qui a été instaurée.

* 17 En effet, 40 des 50 premières entreprises locales en termes de chiffre d'affaires sont des filiales de grands groupes étrangers.

* 18 Sanofi-Aventis a été créée en août 2004.

* 19 C'est-à-dire ayant fait l'objet d'un « screening ».

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