B. UN RALENTISSEMENT CONFORTANT L'HYPOTHÈSE D'UN « ATTERRISSAGE EN DOUCEUR »

De fait, le ralentissement des prix de l'immobilier en France est resté très progressif : depuis un pic à près de 16 % en 2004, la croissance de l'indice des prix des logements anciens Notaires-INSEE a atteint près de 15 % en 2005 et 9,9 % en 2006. Au deuxième trimestre 2007, la hausse des prix était de 6,7 % en rythme annuel. D'après la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) 69 ( * ) , le rythme annuel de progression des prix atteint 4,7 % au troisième trimestre 2007. Au cours de ce troisième trimestre, la FNAIM a toutefois constaté une baisse des prix (- 0,9 %), ce qui tend à accréditer l'hypothèse d'un retournement de cycle.

Cette évolution s'explique principalement par le déséquilibre qui est apparu progressivement entre l'offre et la demande de logement : l'augmentation des taux du crédit immobilier, combinée à l'arrivée sur le marché de nouveaux logements mis en chantier auparavant, a entraîné un ralentissement des prix.

Après une période de forte augmentation de l'investissement en logements au cours des années 2004 et 2005 70 ( * ) , on observe un gonflement des stocks de logements neufs. Il s'est produit un ralentissement du rythme de construction, dont les effets ne seront pas immédiats en raison des délais particulièrement longs d'ajustement entre l'offre et la demande sur le marché immobilier.

GRAPHIQUE N° 3

NOMBRE DE LOGEMENTS AUTORISÉS/COMMENCÉS
(variation des 12 derniers mois par rapport aux 12 mois précédents)


Source : MEDAD/SESP, Sitadel

En ce qui concerne la demande, la diminution des marges bancaires ne suffit plus à amortir la hausse des taux. Jusqu'en juin 2007, les emprunteurs ont continué à bénéficier de conditions de crédit avantageuses 71 ( * ) malgré la hausse des taux longs. Depuis l'été, on observe toutefois une augmentation plus nette des taux du crédit immobilier. Au troisième trimestre 2007, le taux d'intérêt moyen pour un crédit immobilier est ainsi passé de 4,08 % à 4,4 % (contre 3,36 % fin 2005).

La durée des prêts , qui avait fortement augmenté depuis 2001 (à un rythme moyen de l'ordre de 6 mois par an jusqu'en 2003, puis de l'ordre de 12 mois par an de 2004 à 2006) tend à se stabiliser 72 ( * ) .

Le nouveau dispositif de crédit d'impôt sur le revenu au titre des intérêts d'emprunt supportés pour l'acquisition ou la construction d'une habitation principale devrait être un facteur d'amélioration de la solvabilité des ménages , s'il n'a pas d'impact sur les prix immobiliers. Cette mesure, mise en place par l'article 5 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, s'applique aux acquisitions et constructions réalisées à compter du 6 mai 2007. Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit un renforcement du dispositif, puisque le crédit d'impôt serait porté de 20 % à 40 % pour les intérêts payés au titre de la première annuité de remboursement. D'après des simulations réalisées par le courtier en crédit immobilier Empruntis, cet avantage fiscal représente - pour un emprunt de 200.000 euros sur 20 ans au taux de 4,80 % - une baisse du taux d'intérêt de 0,2 point de pourcentage pour un célibataire, 0,35 point pour un couple sans enfant et 0,41 point pour un couple avec deux enfants.

Le tassement de la demande n'est pas encore visible dans les statistiques d'encours de crédits des ménages , contrairement à ce que l'on observe aux Etats-Unis. En 2006, la croissance des prêts à l'habitat, qui forment l'essentiel de la dette des ménages, se poursuit à un rythme soutenu (+ 15 %). L'endettement des ménages français a certes progressé au cours des dernières années (de 55 % du revenu disponible en 2000 à 69 % en 2007), mais il reste, en moyenne, très modéré par rapport à d'autres pays (Espagne, Royaume-Uni ou États-Unis où il atteint 130 % de leur revenu).

Dans ce contexte, le tassement du marché immobilier français pourrait s'opérer graduellement . Le déséquilibre qui vient d'apparaître entre l'offre de logements neufs et la demande de logement des ménages, contribuerait à un ralentissement ou même à une baisse des prix. Toutefois, des enchaînements cumulatifs de baisse des prix sont peu probables : en effet, le dynamisme du marché depuis une dizaine d'années a reposé sur l'accession à la propriété de particuliers, qui ont acheté pour se loger et qui, contrairement aux spéculateurs, ne vendront pas en cas de recul de prix. Sous réserve que les taux d'intérêt n'augmentent pas au-delà du raisonnable, la baisse des prix devrait rendre solvables de nouveaux ménages, ce qui conduirait à une contraction de l'offre excédentaire.

Au total, les projections à moyen terme présentées dans ce rapport excluent le risque d'une crise immobilière majeure pouvant pénaliser la croissance.

Ce scénario pourrait toutefois être perturbé, en cas de transmission à la France du retournement du marché immobilier en cours aux Etats-Unis, par le biais d'une déstabilisation du système financier international.

* 69 A propos des divergences et complémentarités existant entre les deux principaux outils de mesure des prix de l'immobilier ancien, voir « La mesure des prix immobiliers : de nombreuses sources, diversement exploitées », Note de la Délégation pour la Planification du Sénat (septembre 2007).

* 70 Hors terrains, la formation brute de capital fixe (FBCF) en logements s'est accrue de 4,9 % en volume en 2005, soit un rythme supérieur à 2004 (4,4 %). Pour les seuls logements neufs, cette FBCF a progressé de 9 % en volume en 2005 (7,8 % en 2004). La formation brute de capital fixe en logement comprend les acquisitions de logements neufs (hors valeur des terrains), les travaux d'amélioration et de gros entretien, les acquisitions de logements d'occasion nettes des cessions de ces mêmes logements (hors terrain d'assiette) et l'ensemble des frais et droits inhérents à ces opérations (source : Comptes du Logement, Edition 2007, DAEI/SESP et DGUHC). Elle ne retrace pas les achats de logements anciens.

* 71 A ce sujet voir le rapport d'information sur « L'accès des ménages au crédit en France », n° 261 (2005-2006) de M. Joël Bourdin au nom de la délégation pour la Planification.

* 72 Source : Crédit Logement/CSA (Observatoire du financement des marchés résidentiels).

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