II. DES FONCTIONS DE RÉACTION BUDGÉTAIRE DIFFÉRENTES, LES RÉSULTATS DE L'ÉTUDE DU CEPII

L'étude du CEPII réalisée pour le présent rapport (v. annexe) confirme, et permet d'affiner, le diagnostic d'un défaut d'homogénéité des réponses apportées par les politiques budgétaires européennes aux fluctuations de l'activité économique.

Il s'agit d'apprécier la politique budgétaire, en examinant sa réactivité à la situation économique conjoncturelle et sa sensibilité à la situation de l'endettement public , principalement dans trois pays : l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni.

Elle révèle que, si au cours du temps les fonctions de réaction budgétaire de ces trois pays ont évolué, les divergences ont été de règle, les toutes dernières années étant dominées par l'inertie budgétaire manifestée par l'Allemagne.

A. QUELQUES PRÉCISIONS DE MÉTHODE

L'étude du CEPII se consacre à identifier si, sous ces deux angles, les politiques discrétionnaires conduites en France, en Allemagne et au Royaume-Uni ont été homogènes ou non.


• Il est, en effet, a priori légitime que la politique budgétaire poursuive un double objectif 12 ( * ) :

- le premier, de stabiliser la conjoncture économique , c'est-à-dire de remédier aux écarts entre la production et la demande ;

- le deuxième, de préserver la viabilité financière de l'économie et d'éviter tout excès 13 ( * ) d'endettement public.


Dans une certaine mesure , ces objectifs peuvent être jugés contradictoires puisque le premier peut s'accompagner, en cas de phase récessive, d'une augmentation du déficit budgétaire, alors que le second tend à orienter l'usage de la politique budgétaire dans le sens structurel d'une réépargne publique 14 ( * ) .

Le but de stabilisation économique est incontestablement un objectif ; la réaction à la dette publique exprime plutôt une contrainte pesant sur la politique budgétaire.


Mais, le conflit existant a priori entre ces deux finalités doit être nuancé .

Une politique budgétaire de stabilisation conjoncturelle peut , en dépit de l'augmentation de l'appel public à l'épargne qu'elle suppose, ne se traduire par une augmentation de la dette publique que transitoirement, si elle réussit . Pour cela, il faut que le creusement du déficit ex ante provoque les effets attendus - une augmentation de la production - dans des proportions telles que la progression ex ante du ratio « dette publique/PIB » soit effacée ex post par l'accroissement du PIB (dénominateur du ratio).

Inversement, une politique budgétaire sensible à la dette publique peut peiner à atteindre son objectif si la réduction du besoin de financement public (ou l'augmentation de la capacité de financement publique) entraîne une contraction de l'activité qui contrecarre la baisse du ratio dette publique/PIB .


• Il faut avoir ces nuances à l'esprit, avant de prendre connaissance des résultats de l'étude du CEPII sur les déterminants des politiques budgétaires discrétionnaires conduites en France, en Allemagne et au Royaume-Uni. En effet, cette étude n'entend pas sonder les intentions des responsables des politiques en cause. Elle se propose uniquement d'identifier, à l'aide des outils objectifs de l'économétrie, l'ampleur de leur réactivité, d'une part, à l'écart entre la croissance effective et la croissance potentielle, d'autre part, à la dette publique afin de juger de leur homogénéité.

Or, selon les « vertus » prêtées à la politique budgétaire - qui sont âprement discutées, ce qui constitue comme on l'a expliqué au chapitre I du présent rapport un obstacle considérable à l'élaboration de politiques économiques coopératives en Europe -, un même objectif peut entraîner des réponses radicalement contraires.

Ainsi, des réactions de politique budgétaire différentes peuvent traduire une identité fondamentale d'objectifs .

* 12 La politique budgétaire peut, bien entendu, poursuivre d'autres objectifs. Ainsi, dans la vision traditionnelle qu'en donne l'économiste Richard Musgrave, elle exerce trois fonctions : celle de stabilisation conjoncturelle, celle d'allocation de moyens financiers et celle de répartition du revenu.

* 13 La notion d'endettement public excessif n'est simple qu'en apparence et mériterait à elle seule des développements approfondis qui ne sont pas l'objet du présent rapport. Dans ce dernier, on se contente d'estimer si la politique budgétaire est sensible à la dette publique.

* 14 Que cette tendance soit pertinente est une autre question à laquelle votre Délégation a consacré de nombreux développements. La réduction du niveau relatif de la dette publique peut emprunter des chemins budgétaires contraires. Certains estiment qu'une politique budgétaire restrictive, passant par une augmentation de l'épargne publique, en est le chemin le plus sûr. D'autres, considérant l'impact économique très aléatoire d'une telle option ainsi que l'effet d'une politique budgétaire efficace sur la croissance potentielle, sont plus attentifs à la soutenabilité d'un désendettement public et craignent les incidences de politiques qui reposeraient sur une orientation budgétaire trop malthusienne.

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