(2) Un dispositif d'alerte basé sur une connaissance approfondie de l'aléa

Comme il a été constaté précédemment, l'efficacité de tout dispositif d'alerte dépend d'une bonne connaissance préalable de l'aléa. C'est la raison pour laquelle plusieurs études ont été confiées au CEA afin d'établir une carte de l'aléa tsunami.

L'analyse des séismes historiques dans le Pacifique entre 1837 et 2005 laisse penser qu'au moins 15 tsunamis ont touché les côtes polynésiennes dont 11 ont fait des dommages et 2 des victimes.

Le danger qu'un séisme génère un grand tsunami transpacifique avec un risque pour l'ensemble de la Polynésie n'intervient que pour les séismes de subduction de magnitude exceptionnellement forte (magnitude Mm supérieure à 9). Les principales zones de subduction capables de produire de tels séismes sont celles de la côte Sud-Américaine (Chili, Pérou), celle de l'arc des Aléoutiennes et celle du Pacifique Nord-Ouest (l'arc des Kouriles - Japon - Kamchatka). En ce qui concerne cette dernière zone, le risque semble toutefois moins grand dans la mesure où la Polynésie n'est pas dans la zone géographique où le tsunami a son rayonnement maximal.

Trois zones sismiques susceptibles de générer les tsunamis les plus dévastateurs sont donc retenues :

- la zone de la côte Sud-Américaine (Chili, Pérou). Il convient de noter qu'il existe une lacune sismique au Nord du Chili : dans les 20/30 années prochaines, il est attendu un séisme d'une magnitude 9 dans cette zone qui générera un tsunami particulièrement dévastateur dans les îles Marquises puisque les simulations tablent sur une vague de 11 mètres avec des pénétrations jusqu'à 1000 mètres dans l'île d'Hiva Oa ;

- la zone de l'arc des Aléoutiennes;

- la zone Tonga-Kermadec à l'Ouest. La sismicité historique de cette région est mal connue et ce sont les simulations numériques qui laissent penser qu'un tsunami dévastateur en provenance des Tonga pourrait toucher la Polynésie française. En outre, une zone de lacune sismique a été observée aux Kermadec, qui suggère qu'un fort séisme est à attendre dans cette zone.

Par ailleurs, les observations sur le terrain ainsi que les simulations révèlent une forte variation de l'aléa en fonction des îles comme le montre la carte ci-après élaborée par le CEA.

Carte des niveaux d'exposition à l'aléa tsunami de la Polynésie française

Source : CEA/DASE

Ainsi, les Marquises apparaissent particulièrement exposées aux tsunamis puisqu'elles peuvent être affectées par des tsunamis majeurs plus de 4 fois par siècle. En outre, elles font l'objet d'amplifications importantes pour les séismes en provenance de la côte Sud-Américaine. Lors du séisme de magnitude 7,3 au large du Pérou le 21 février 1996, un tsunami de 2 à 3 mètres a été observé dans les îles Marquises contre moins de 10 cm à Papeete. Cet effet d'amplification est lié à la bathymétrie locale : ces îles ont des reliefs sous-marins en pente douce et ne sont pas protégées par un récif corallien.

Dans les îles Australes, l'île de Rurutu est également susceptible d'être touchée deux fois par siècle par des tsunamis. Les autres îles sont protégées par la barrière récifale, les conséquences des tsunamis sont donc moindres.

En ce qui concerne Tahiti, celle-ci est relativement protégée par son récif corallien sauf pour la côte Nord et Nord-est.

La carte des zones susceptibles de générer les tsunamis les plus dévastateurs pour la Polynésie française et la carte des niveaux d'exposition à l'aléa tsunami ont servi de référence pour la mise en place du dispositif d'alerte.

Tout comme aux Etats-Unis et au Japon, l'alerte est graduée en fonction du risque. Trois codes couleur ont été définis, en fonction de la gravité du danger.

L'alerte de niveau 2 (de couleur jaune) est déclenchée lorsque la magnitude Mm du séisme détecté est supérieure à 8 et que l'arrivée prévisible du tsunami sur les côtes polynésiennes n'est pas annoncée avant 9 heures. Le LDG/Pamatai prévient alors la protection civile et le Haut-Commissaire.

L'alerte de niveau 3 (de couleur orange) est déclenchée lorsque la magnitude Mm du séisme détecté est comprise entre 8,7 et 9 et que l'arrivée prévisible du tsunami sur les côtes polynésiennes n'est pas annoncée avant 6 heures. Dans ce cas, le danger de tsunami est confirmé et toutes les autorités locales sont informées.

Enfin, l'alerte de niveau 4 (de couleur rouge) est déclenchée soit lorsque la magnitude Mm du séisme détecté est supérieure à 9, soit lorsque l'arrivée du tsunami sur les côtes polynésiennes est annoncée dans un délai de moins de 3 heures. Concrètement, cela signifie qu'un séisme de magnitude supérieure à 8 dans la zone des îles Tonga entraîne automatiquement une alerte maximale. L'alerte générale est alors donnée afin d'évacuer la population le long des côtes, de faire sortir les bateaux des ports et d'évacuer l'aéroport. En effet, une étude de site a montré que l'aéroport de Faa sur Papeete serait alors inondé et rendu inutilisable.

Les niveaux d'alerte

Origine

Tonga

Amérique du Sud

Toutes les zones sauf Tonga

Magnitude

Mm > 8

(Mw > 7,9)

Mm > 7

(Mw > 7,2)

8 < Mm < 8,7

(7,9< Mw < 8,3)

8,7 < Mm < 9 (8,3 < Mw < 8,7)

Mm > 9

(Mw>8,7)

Archipel

Polynésie française

Marquises

Polynésie française

9 h

2

2

2

3

6 h

2

2

3

4

3 h

4

4

4

4

4

Annulation

1

1

1

1

1

Niveau 1

Situation normale

Niveau 2

Alerte autorités

Hautes autorités (Etat et Territoire)

Niveau 3

Alerte autorités locales

Communes et municipalités (Maire)

Niveau 4

Alerte globale

Evacuation de la population

Compte tenu de la forte exposition des îles Marquises à l'aléa tsunami, une alerte de niveau 2 est déclenchée en cas de séisme au large de l'Amérique du Sud et d'une magnitude supérieure à 7.

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