B. UN CONTEXTE PÉNALISANT POUR LA FRANCE

1. Des clubs moins riches que leurs concurrents européens

La libéralisation du marché du travail européen est intervenue dans un contexte financier peu favorable aux clubs français , en particulier en ce qui concerne le football et le basket ball.

Le football, qui recueille, à ce jour, la plus grande audience auprès du public et dont les enjeux financiers sont les plus lourds en Europe, fait l'objet d'une étude annuelle par le cabinet Deloitte, la « Deloitte money League ». Le classement que cette étude faisait apparaître pour la saison 2003/2004, qui a précédé l'adoption du DIC par la France, était éloquent.

Recettes des 20 premiers clubs de football européens pour la saison 2003/2004

(en millions d'euros)

Club

Recettes

Ligue nationale

Manchester United

259,0

Angleterre

Real Madrid

236,0

Espagne

Milan AC

222,3

Italie

Chelsea

217,0

Angleterre

Juventus Turin

215,0

Italie

Arsenal

173,6

Angleterre

FC Barcelone

169,2

Espagne

Inter Milan

166,5

Italie

Bayern Munich

166,3

Allemagne

Liverpool

139,5

Angleterre

Newcastle United

136,6

Angleterre

AS Rome

108,8

Italie

Celtic Glasgow

104,2

Ecosse

Tottenham

100,1

Angleterre

Lazio Rome

99,4

Italie

Manchester City

93,5

Angleterre

Schalke 04

91,4

Allemagne

Olympique de Marseille

88,0

France

Glasgow Rangers

86,2

Ecosse

Aston Villa

84,4

Angleterre

Source : Deloitte money League 2005

Dans un classement dominé par trois grands championnats, en particulier par l'Angleterre, le seul club français alors présent dans le « top 20 » européen, l'Olympique de Marseille, ne figurait qu'en 18 ème position, avec des recettes presque trois fois inférieures à celle du club de tête cette saison là, Manchester United.

2. Des niveaux d'impôts et de charges élevés pour les meilleurs joueurs

A ce manque relatif de recettes s'ajoutait un problème de compétitivité des clubs du fait du niveau des prélèvements fiscaux et sociaux en France. Là encore, les salaires les plus élevés, c'est-à-dire ceux des meilleurs footballeurs, sont les plus concernés.

Notre collègue Yvon Collin a bien analysé ce phénomène dans un rapport d'information 4 ( * ) datant de juin 2004, soit quelques mois avant l'adoption du DIC. Se fondant sur des calculs du cabinet Deloitte et Touche, il avait fait apparaître le « coût employeur » total d'une rémunération nette après impôt de 1,8 million d'euros par an correspondant à un joueur de niveau international dans les pays accueillant les 5 principaux championnats de football en Europe. Les résultats sont retracés dans le graphique suivant.

Ainsi, pour aboutir à une rémunération nette de 1,8 million d'euros, les clubs français devaient, en 2004, dépenser près de 5,4 millions d'euros, alors que leurs principaux concurrents pouvaient se « limiter » à une dépense d'environ 3,5 millions d'euros.

3. Un contrôle rigoureux de la santé financière des clubs

Le II de l'article 17 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives a introduit le principe selon lequel chaque fédération disposant d'une ligue professionnelle doit créer un organisme assurant le contrôle juridique et financier des clubs relevant de sa compétence.

C'est ainsi qu'ont été créées, pour ce qui concerne les sports bénéficiant du DIC, la direction nationale de contrôle de gestion (DNCG) de la Ligue de football professionnel (LFP), la direction nationale d'aide et de contrôle de gestion (DNACG) de la Ligue nationale de rugby (LNR) et la direction nationale du conseil et du contrôle de gestion (DNCCG) de la Ligue nationale de basket-ball (LNB).

Ces directions , bien que restant dépendantes des informations transmises par les clubs, disposent d'un véritable pouvoir de contrôle et de sanction dont elles font usage quand cela est nécessaire . Ainsi, en football, la DNCG a rétrogradé les clubs de Brest et de Nice en 1991 et surtout l'Olympique de Marseille en 1994, un an après la victoire de ce club en Ligue des champions et alors qu'il avait fini deuxième du championnat de France. En rugby, le club de Grenoble a été rétrogradé en Pro D2 en 2005. Et, en basket, la DNCCG a, en 2005, interdit l'accès en Pro A aux clubs de Rouen et du Paris basket racing.

Si l'action de ces directions a fortement contribué à prévenir les véritables dérives financières observées dans des pays voisins (bien décrites dans le rapport précité de notre collègue Yvon Collin) et doit à ce titre être encouragée, le relatif isolement de la France dans cette politique de rigueur peut rendre la tâche des clubs français plus ardue dans les compétitions continentales.


Exemple : le pouvoir de contrôle et de sanction de la DNCG de la LFP
aux termes de l'article 11 de son règlement

[La commission de contrôle des clubs professionnels a] notamment dans [son] domaine, compétence pour:

- (...) obtenir des clubs tous renseignements, utiles aux procédures de contrôle, concernant les entités se rattachant juridiquement ou économiquement à eux,

- (...) contrôler la situation juridique et financière des clubs sur pièces ou sur place en procédant à des enquêtes et vérifications qui leur sont demandées par la la L.F.P. ou qu'elles jugent utile d'entreprendre.

- (...) examiner et apprécier la situation des clubs et le cas échéant, appliquer l'une ou plusieurs des mesures suivantes :

1. Interdiction de recruter de nouveaux joueurs sous contrat (aspirants, apprentis, stagiaires, espoirs, professionnels, fédéraux). Cette interdiction peut être totale ou partielle.

2. Recrutement contrôlé dans le cadre d'un budget prévisionnel ou d'une masse salariale prévisionnelle limitée (les contrats et avenants sont soumis avant homologation à une décision de la D.N.C.G.).

(...)

5. Interdiction d'accession sportive

6. Exclusion des Championnats Nationaux. Cette mesure proposée par la D.N.C.G. est soumise à l'examen et à la décision du Conseil Fédéral pour les clubs présentant une situation financière particulièrement obérée et ne justifiant pas de perspectives significatives de redressement à moyen terme.

7. Limitation du nombre de joueurs mutés en équipe supérieure

(...)

9. Donner un avis sur la délivrance ou le retrait de l'autorisation d'utiliser des joueurs professionnels.

10. Donner un avis sur le respect des critères d'octroi de la licence UEFA.

Source : règlement de la DNCG de la LFP

* 4 Rapport d'information n° 336 (2003-2004) fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification (juin 2004).

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