b) Un dossier non prioritaire

Un observateur extérieur est en droit de s'interroger sur le caractère prioritaire ou non du dossier « ressources humaines » dans le domaine hospitalier.

A cette remarque, il sera facile d'opposer plusieurs justifications dont la première est celle de la multitude des réformes en cours dans le domaine hospitalier depuis 2002, observation qui n'est pas sans fondement puisqu'on dénombre sans difficulté plusieurs mutations majeures, comme la mise en oeuvre de la T2A ou de la nouvelle gouvernance hospitalière.

Toutefois, la mise en oeuvre de la T2A aurait dû constituer une occasion de renouveler la réflexion sur la gestion des ressources humaines , notamment dans l'optique d'une analyse de la situation financière des établissements et l'amélioration de leur productivité.

Comme le démontrent les travaux de la mission d'expertise et d'appui aux hôpitaux (MeaH), le secteur public hospitalier est aujourd'hui pénalisé par son organisation. La gestion des ressources humaines doit donc être intégrée à la réflexion sur l'organisation des services. Elle doit aussi être un volet de la restructuration des établissements au sein d'un même territoire de santé.

Or, en l'absence de consigne nationale en matière de gestion des ressources humaines, les établissements hospitaliers dont la situation financière est la plus fragile ont plutôt fait le pari d'une augmentation de leur activité de soins sans toujours tenir compte de l'offre de soins existant au sein du territoire de santé, plutôt que d'engager une réflexion sur leurs effectifs et leur organisation. Ce comportement est signalé dans le récent rapport sur « le contrôle des mesures prises dans le cadre du contrat de retour à l'équilibre financier (Cref) par des hôpitaux perdants à la T2A », publié par l'Igas en janvier 2008. Il souligne qu'un certain nombre des établissements contrôlés ont augmenté leurs effectifs, c'est-à-dire que malgré leurs difficultés financières, ils ont poursuivi leurs recrutements . Cette situation est à mettre en parallèle avec l'absence de gestion prévisionnelle des emplois, dénoncée par la Cour des comptes au niveau national.

Le rapport de l'Igas met également en lumière le caractère limité de la politique de gestion prévisionnelle des ressources humaines développée dans les établissements de santé . Celle-ci est essentiellement assurée par l'intermédiaire d'une rotation importante des effectifs, ce qui a jusqu'à présent dispensé les équipes de direction d'une réflexion plus globale sur la gestion des emplois et des compétences. Ce turn-over accéléré n'a pas été mis à profit pour réfléchir à la possibilité de redéployer et de réduire les effectifs.

Seules les autorités de tutelles nationale et régionales peuvent accompagner les directeurs dans la démarche de gestion active des effectifs , qui ne reçoit pas un accueil favorable de la part des organisations représentatives du personnel et des membres du conseil d'administration.

Le problème n'est pas tant de remettre en cause l'autonomie de l'établissement et les compétences du directeur en matière de recrutement, mais bien d'insérer leurs décisions dans un cadre global. Il est en effet illusoire de penser que les directeurs pourront seuls mettre en oeuvre des plans de retour à l'équilibre comportant des mesures relatives au personnel .

Cela suppose que les directeurs reçoivent l'appui de l'ARH, qui jusqu'à présent n'a eu que des compétences extrêmement réduites en termes de personnel, et qu'il s'inscrive dans le cadre d'une politique globale dont les contours seraient définis au niveau national.

Cela montre que les questions de personnel n'ont pas fait l'objet d'une réflexion prioritaire lorsqu'il s'est agi de faire participer l'hôpital à la réduction des dépenses d'assurance maladie. Les premières propositions d'actions ministérielles, en 2005, portaient d'ailleurs sur un autre sujet, celui de la gestion des achats.

Cette situation doit être prise en compte dans le cadre de la révision générale des politiques publiques :

- au niveau de chaque établissement, en prévoyant que désormais l'évaluation de la compétence de gestion des directeurs n'est plus fondée sur leur capacité à maintenir la paix sociale dans leur établissement, mais sur une vision plus large de la gestion des ressources humaines ;

- au niveau régional, à travers les compétences qui seront confiées aux futures ARS, et surtout aux communautés hospitalières de territoire qui auront un rôle fondamental à jouer en matière de restructuration ;

- au niveau national, avec la mise en oeuvre d'un cadrage national en matière d'emploi dans les établissements de santé.

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