B. L'ÉCHEC DES CONTRATS DE RETOUR À L'ÉQUILIBRE

1. Une politique contractuelle pour le redressement des établissements

Les contrats de retour à l'équilibre financier (Cref) ont été lancés en 2004 afin de permettre l'assainissement de la situation financière des établissements de santé, relativement dégradée en 2003 et 2004 et, par voie de conséquence, faciliter la réforme de la T2A 7 ( * ) .

La circulaire du 14 juin 2004 a donc mis en place une aide nationale non reconductible de 300 millions d'euros destinée à financer les reports de charges des établissements de façon à permettre le passage à la nouvelle tarification « sans passif ».

La répartition de cette enveloppe entre les ARH a été effectuée en tenant compte de la situation financière des établissements de chaque région. A l'intérieur de la région, l'ARH devait répartir l'enveloppe en fonction d'une « analyse approfondie de la situation de chaque établissement » et « au regard des effets de la T2A ». Toutefois, la répartition ne pouvait devenir effective qu'après conclusion d'un contrat, celui-ci étant établi sur la base d'un plan de redressement.

2. Un manque d'efficacité préoccupant

Les premiers contrats mis en place ont fait l'objet d'une évaluation sévère, notamment par un rapport de l'Igas consacré au contrôle des contrats conclus par des hôpitaux « perdants » à la T2A 8 ( * ) .

Les principales critiques portent sur les points suivants :

- un objectif mal défini

Pour la mission de l'Igas, la mise en place d'une enveloppe non reconductible au motif qu'il y avait nécessité d'apurer les reports de charges, n'était pas adaptée à l'objectif de redressement durable des établissements. Elle a en effet plutôt émis un signal négatif en donnant l'assurance que les reports de charges des années antérieures seraient couverts sans pour autant rendre obligatoire des efforts de productivité.

Le rapport de l'Igas estime qu'il aurait été préférable « d'accorder, par exemple au sein de l'enveloppe Migac, une enveloppe annuelle destinée à financer les restructurations et les mesures d'amélioration de l'efficience de l'hôpital. Le calibrage de cette enveloppe aurait été revu chaque année en fonction des résultats obtenus dans chaque région, notamment dans le domaine des contrats de retour à l'équilibre ».

- une mise en oeuvre souvent tardive et mal ciblée

Les constatations faites par l'Igas montrent que, parfois, les aides ont été versées en l'absence de tout contrat, que, souvent, la procédure du Cref a été utilisée tardivement alors que de tels contrats auraient été nécessaires, que souvent aussi le critère de l'efficience T2A n'a pas été suffisamment pris en compte. En effet, il aurait été plus pertinent d'utiliser les Cref pour, à titre prioritaire, accompagner les établissements perdants à la T2A et non l'ensemble des hôpitaux en déficit.

- un contenu insuffisant

Beaucoup de mesures nécessaires au redressement durable des établissements semblent fréquemment absentes des contrats, par exemple un diagnostic sur la performance médico-économique des services ou encore des objectifs de restructuration des sites, d'amélioration des outils de gestion, de rétablissement de la capacité d'autofinancement.

Par ailleurs, les mesures d'économies prévues sont généralement peu ambitieuses, en particulier en ce qui concerne la maîtrise de la masse salariale.

La mission de l'Igas dénonce même le fait que six des dix-huit contrats qu'elle a examinés ne comportent pas explicitement d'objectif de retour à l'équilibre financier à l'échéance du contrat.

- la non-prise en compte de programmes d'investissement souvent conséquents

Les Cref n'ont généralement pas tenu compte de l'impact sur les charges d'exploitation des importants programmes d'investissement engagés par les hôpitaux.

La mission de l'Igas estime que le rétablissement de la situation financière aurait dû être un préalable au lancement des opérations d'investissement et que la préparation des contrats aurait dû s'accompagner d'une révision en profondeur des programmes d'investissement envisagés.

- des prévisions de recettes irréalistes

Le principal reproche fait par la mission de l'Igas aux contrats est celui d'avoir misé sur un développement peu réaliste de l'activité pour redresser la situation financière. Il est même arrivé que l'optimisme affiché ait eu pour seul but de justifier des équipements surdimensionnés par rapport à l'activité de l'hôpital.

Ces objectifs d'activité ont en outre été parfois adoptés en contradiction avec l'évolution de l'offre de soins sur le territoire et même des objectifs quantifiés fixés dans le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM).

- la non-réalisation des objectifs financiers

En conséquence de prévisions de recettes irréalistes et de mesures d'économies insuffisantes ou non réalisées, les Cref n'ont pas atteint leurs objectifs financiers. Ils ont seulement permis, dans la majorité des cas, une amélioration apparente de la situation financière du seul fait des aides exceptionnelles consenties. Pour le long terme, la correction durable des situations difficiles est beaucoup plus incertaine.

Pour le rapport de l'Igas, « tout se passe comme si certains établissements s'étaient durablement installés dans une culture du déficit ».

Les rares informations disponibles pour 2008 ne permettent pas d'envisager de réels progrès : la situation financière d'un certain nombre d'hôpitaux publics reste critique et la voie du redressement encore mal assurée.

* 7 La mise en place de la T2A s'est faite de la façon suivante : 10 % en 2004, 25 % en 2005, 35 % en 2006, 50 % en 2007 et 100 % en 2008.

* 8 Rapport sur le contrôle des mesures prises dans le cadre du contrat de retour à l'équilibre financier (Cref) par des hôpitaux « perdants » à la T2A - n°2007-164P - janvier 2008.

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