d) Un désintérêt politique relatif pour le secteur de la microélectronique qui empêche l'instauration d'une stratégie industrielle efficace

L'Union européenne finance de nombreux programmes de recherche dans le secteur des semiconducteurs, mais ils ne sont pas insérés dans une stratégie industrielle cohérente. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène :

- une méconnaissance profonde des enjeux de ce secteur et de son impact sur la compétitivité de l'ensemble des entreprises : l'industrie des semiconducteurs est peu visible même si elle est déterminante pour toutes les secteurs de haute technologie.

En outre, le nombre d'emplois qu'elle crée est souvent sous-estimé car ne sont comptabilisés que les emplois directs. En ce qui concerne le site de Crolles par exemple, 4.500 emplois directs génèrent plus de 22.000 emplois indirects.

Par ailleurs, elle est trop souvent associée à l'industrie électronique. Comme celle-ci a fait l'objet d'importantes délocalisations vers l'Asie, l'industrie de la microélectronique n'est plus jugée stratégique. Ainsi, la direction générale de l'entreprise et de l'industrie au sein de la Commission européenne s'intéresse peu à ce secteur ;

- la concentration géographique de l'industrie de la microélectronique dans un petit nombre d'Etats européens, ce qui amoindrit son intérêt au niveau communautaire. En outre, les pays concernés directement par la microélectronique (la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Irlande, les Pays-Bas et la Belgique) apparaissent incapables de développer une stratégie commune leur permettant de faire pression sur la Commission européenne et notamment d'infléchir la politique de la direction de la concurrence ;

- l'illusion que l'Europe peut renoncer à la production des composants électroniques et se concentrer sur les activités de R&D, alors que dans ce secteur d'activité, production et R&D sont très souvent imbriquées.

e) Une coopération scientifique entre les grands instituts de recherche européens encore perfectible

Récemment, le CEA (à travers le LETI et le LITEN), le CSEM (centre suisse d'électronique et de microélectronique), le VTT (Technical research centre of Finland) et l'alliance Fraunhofer dans le domaine de la microélectronique ont signé une alliance sur les technologies hétérogènes afin de mener des projets de recherche en commun et de développer des solutions et des produits innovants pour l'industrie.

Cette initiative doit être saluée et soutenue politiquement et financièrement dans la mesure où elle donne une lisibilité internationale à la recherche européenne dans un secteur technologique très porteur.

En effet, les alliances, aussi bien dans le domaine de la recherche que dans l'industrie, sont une des clés du renforcement de la compétitivité européenne dans la mesure où aucun acteur ne dispose de moyens financiers suffisants pour maintenir seul son avance technologique.

Les instituts Carnot et les instituts Fraunhofer ont également développé des partenariats dans le domaine de la recherche appliquée dans une optique de transfert industriel.

Conscient de l'importance stratégique de ce type de collaboration, le ministère allemand de la recherche met à la disposition des instituts Fraunhofer un budget spécifique pour les partenariats transfrontaliers.

En revanche, les instituts Carnot doivent financer leurs actions partenariales avec d'autres centres de recherche européens sur leurs fonds propres, ce qui limite fortement le nombre des projets.

Afin d'encourager la coopération scientifique entre les grands instituts de recherche européens, il conviendrait donc de prévoir dans le budget de l'Agence Nationale de la Recherche un financement spécifique pour les projets de partenariat en matière de recherche appliquée.

Enfin, la coopération entre les centres de recherche européens est encore perfectible, notamment entre le LETI et l'IMEC.

Certes, ces deux centres d'excellence ont des modèles de vente différents : alors que le LETI privilégie les collaborations bilatérales en réservant à ses partenaires l'exclusivité d'exploitation des résultats, l'IMEC favorise les programmes de recherche multilatéraux dans lesquels les résultats sont partagés entre tous les participants.

Néanmoins, dans la mesure où ces deux organismes de recherche travaillent souvent sur les mêmes sujets, les partenariats devraient être multipliés au niveau de la recherche la plus amont, notamment à travers l'échange de chercheurs.

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