B. LA CONTRIBUTION DES PRESTATIONS SOCIALES À LA RÉDUCTION DES INÉGALITÉS

Quelques données, malheureusement un peu éparses, permettent d'approcher la portée redistributive de certaines dépenses publiques correspondant à des transferts sociaux 96 ( * ) .

LES PRESTATIONS SOCIALES DONT LA REDISTRIBUTIVITÉ EST ÉTUDIÉE

Ne sont concernés que les transferts monétaires (à l'exclusion des dépenses publiques concourant à la production de biens et services publics sociaux, comme la santé, voir chapitre ci-après), hors aides versées par les collectivités locales qui sont régies par une diversité des barèmes qui complique singulièrement l'analyse. Ne sont pas prises en compte les prestations assurancielles (retraites, assurance-maladie ou assurance-chômage) considérées comme correspondant plutôt à un transfert de revenu dans le temps opéré par un individu pour lui-même. Il s'agit d'une limite non négligeable puisque, comme on le montre plus loin, de tels transferts peuvent comporter une certaine redistributivité.

Par conséquent, les prestations sociales ici envisagées sont principalement les prestations familiales , sans ou sous conditions de ressources, les aides au logement (ne sont pas prises en compte les aides à l'accession à la propriété), et les minima sociaux .

Les développements ici présentés ne concernent que la France.

*

Les prestations sociales dont la redistributivité est ici étudiée sont :

- les prestations familiales sans condition de ressources : allocations familiales, allocation de soutien familial, allocation d'éducation de l'enfant handicapé, complément de libre choix d'activité, aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée et son complément, allocation de garde d'enfant à domicile, complément de libre choix de mode de garde et subventions publiques pour la garde d'enfants en crèches collectives et familiales ;

- les prestations familiales sous conditions de ressources : complément familial, socle de la prestation d'accueil du jeune enfant, allocation pour parent isolé, allocation de rentrée scolaire, bourses du secondaire ;

- les allocations de logement ;

- les minima sociaux : revenu minimum d'insertion, minimum vieillesse, allocation supplémentaire d'invalidité, allocation pour adulte handicapé et ses compléments.

EFFETS DES PRESTATIONS SOCIALES SUR LES INÉGALITÉS EN FRANCE (2006)

Montant par équivalent adulte, en euros

Quintiles de niveau de vie avant redistribution

Ensemble de la population

1er

2e

3e

4e

5e

Revenu avant redistribution

Montant par équivalent adulte

6 980

13 570

18 500

24 610

44 270

21 580

Part dans le revenu net

108,4

108,7

110,8

112,0

112,7

111,4

Prestations familiales sans condition de ressources

Montant par équivalent adulte

960

560

510

490

460

600

Part dans le revenu net

14,9

4,5

3,1

2,2

1,2

3,1

Prestations familiales sous conditions de ressources et aides à la scolarité

Montant par équivalent adulte

540

270

180

120

20

230

Part dans le revenu net

8,4

2,2

1,1

0,5

0,1

1,2

Aides au logement (location)

Montant par équivalent adulte

970

200

40

10

0

240

Part dans le revenu net

15,1

1,6

0,2

0,0

0,0

1,2

Minima sociaux

Montant par équivalent adulte

800

130

40

20

10

200

Part dans le revenu net

12,4

1,0

0,2

0,1

0,0

1,7

Total

3 270

1 160

770

640

490

1 270

Revenus après prestations

Montant par équivalent adulte

10 250

14 730

19 270

25 250

44 760

22 850

Lecture : les individus du 5 e quintile (celui qui regroupe les 20 % des ménages ayant les ressources les plus élevées) ont perçu, en moyenne, 460 euros de prestations familiales sans conditions de ressources, ce qui a augmenté leur niveau de vie de 1,2 %.

Source : INSEE-DGI, enquête Revenus fiscaux 2004 (actualisée 2006), modèle Ines, calculs Drees et Insee.

* Les prestations sociales brutes se révèlent redistributives . Elles réduisent les inégalités monétaires de répartition du revenu.

Le revenu avant redistribution est nettement inégalitaire, le rapport entre le dernier quintile de revenu et le premier s'élevant à 6,3. Après versement des prestations sociales, ce rapport tombe à 4,4 .

Les prestations sociales représentent un montant de 3.270 euros par adulte relevant du plus bas quintile de revenu, 1.160 euros pour le deuxième et 770, 640 et 490 euros au-delà.

Le rapport entre les prestations sociales versées aux ménages du quintile inférieur et celles attribuées au quintile des revenus supérieurs est de 6,7 à contre-courant de la distribution du revenu avant distribution .

Les montants en cause sont cependant inférieurs à celui-ci et c'est pourquoi des écarts importants de revenus subsistent après prestations.

* Mais, la redistributivité des dépenses sociales n'est vraiment forte - voire perceptible - qu'au profit du premier quintile de revenu . Au-delà, la redistributivité est faible sinon inexistante.

Le bénéfice des prestations sociales est très concentré. Les membres du premier quintile absorbent, par exemple, 79 % des sommes versées au titre des minima sociaux et des allocations logement .

DISTRIBUTION DES PRESTATIONS SOCIALES PAR QUINTILE (EN % DU TOTAL)

Q1

Q2

Q3

Q4

Q5

Prestations familiales
sous conditions de ressources

46,6 %

24,0 %

16,0 %

11,1 %

2,2 %

Prestations familiales
sans conditions de ressources

31,2 %

19,0 %

17,5 %

16,8 %

15,5 %

Total des prestations familiales

35,5 %

20,4 %

17,1 %

15,2 %

11,8 %

Allocations logement

78,5 %

17,1 %

3,3 %

0,8 %

0,2 %

Minima sociaux

80,7 %

11,8 %

3,9 %

2,2 %

1,3 %

Total allocations logement
et minima sociaux

79,6 %

14,6 %

3,6 %

1,5 %

0,7 %

Lecture : en 2006, les personnes qui font partie du 1er quintile de niveau de vie ont bénéficié de 46,6 % du montant total des prestations familiales sous conditions de ressources.

* Les prestations les plus redistributives sont les allocations de logement suivies des prestations familiales sans conditions de ressources 97 ( * ) . Les minima sociaux et les prestations sociales sous condition de ressources réalisent une moindre redistribution.

A ce propos, on peut remarquer que le « ciblage » des dépenses publiques n'est pas la variable la plus déterminante pour les effets redistributifs des prestations.

* 96 Les développements qui suivent sont principalement tirés de l'étude « 1996-2006 : 10 ans de réformes du système de redistribution ». Amar, Laïb, Marical et Mirouse.

* 97 Et non sous conditions de ressources. Celles-ci étant d'un montant nettement moindre que les prestations familiales sans conditions de ressources, leur impact redistributif est plus faible en dépit d'une concentration sur les plus bas revenus plus forte.

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