C. UNE DÉPARTEMENTALISATION ADAPTÉE

1. Organiser une assemblée unique, exerçant les attributions du département et de la région

Le comité pour la départementalisation de Mayotte s'est prononcé pour la création d'une assemblée départementale et d'une assemblée régionale. En revanche, M. Ahamed Attoumani Douchina, président du conseil général, a expliqué à votre délégation qu'il jugeait plus réaliste l'organisation d'un conseil commun pour le département et pour la région.

Au moment où s'engage une réflexion sur la simplification et la clarification de l'organisation territoriale de notre pays, il ne paraît pas opportun de créer deux assemblées pour administrer un territoire peuplé de 186.000 habitants. Le doublement des échelons territoriaux compétents sur le même territoire se révèlerait contre productif. Ce serait une source de complexité qui mettrait en péril le succès de la départementalisation et l'avenir de Mayotte dans son nouveau statut.

Votre commission estime par conséquent qu'il convient de doter Mayotte d'une seule assemblée exerçant à la fois les compétences du département et de la région .

2. Mettre en oeuvre des prestations sociales adaptées dans le cadre de la disparition progressive de la spécialité législative

La départementalisation signifiera pour Mayotte un alignement sur le droit commun, avec toutefois des adaptations tenant à ses « caractéristiques et contraintes particulières », comme le prévoit l'article 73 de la Constitution.

Etant donné l'ampleur des domaines où s'applique encore le principe de spécialité législative, cet alignement devra être progressif afin de ne pas bouleverser une collectivité qui connaît par ailleurs une mutation accélérée. En effet, Mayotte devra passer de la spécialité à l'identité législative dans les sept domaines suivants :

- impôts, droits et taxes ;

- propriété immobilière et droits réels immobiliers ; cadastre ; expropriation ; domanialité publique ; urbanisme ; construction ; habitation et logement ; aménagement rural ;

- protection et action sociales ;

- droit syndical ;

- droit du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ;

- entrée et séjour des étrangers et droit d'asile ;

- finances communales.

L'application du droit commun suppose, dans certains domaines, un important travail préalable. Tel est le cas pour l'établissement des bases d'imposition nécessaires à la mise en place d'une fiscalité locale.

D'ailleurs, la loi organique DSIOM du 21 février 2007 prévoit déjà l'alignement de Mayotte sur le droit commun en matière fiscale et douanière. En effet, l'article L.O. 6161-22 du code général des collectivités territoriales dispose que le code général des impôts et le code des douanes entrent en vigueur à Mayotte au plus tard le 31 décembre 2013.

En matière de protection sociale, les besoins de la population mahoraise sont très importants, comme l'ont notamment souligné les maires rencontrés par vos rapporteurs. Toutefois, l'application immédiate à Mayotte des prestations sociales en vigueur dans les départements de métropole (revenu minimum d'insertion...) ne pourrait que bouleverser les équilibres économiques et sociaux de l'archipel.

Le régime de prestations sociales applicable à Mayotte

Le régime de sécurité sociale mis en place à Mayotte en avril 2004, après la publication du décret portant application de l'ordonnance du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte, a créé un dispositif d'assurance maladie équivalent au régime de base de sécurité sociale métropolitain. Il fixe notamment les règles concernant le ticket modérateur à la charge de l'assuré et donc du remboursement des frais de consultations chez les médecins et d'achat de médicaments.

En 2004, la Caisse de Sécurité Sociale de Mayotte (CSSM) succède à la Caisse de Prévoyance Sociale de Mayotte, assurant ainsi en tant qu'un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public les remboursements des frais de soins.

La CSSM prend en charge les indemnités journalières de maladie et de maternité des salariés. Pour les fonctionnaires et agents publics, les indemnités journalières de maladie et de maternité sont prises en charge par l'employeur selon les règles prévues par leurs statuts respectifs.

Dans le système public (le Centre Hospitalier de Mamoudzou, son antenne de Dzaoudzi, les maternités rurales et les dispensaires) la gratuité des soins a été maintenue pour les Français et étrangers en situation régulière.

En revanche, et afin de lutter contre l'important phénomène de l'immigration clandestine, les étrangers en situation irrégulière amenés à fréquenter le système public sont soumis, depuis avril 2004, au paiement d'une consignation. À titre d'exemple, pour une consultation, les médicaments nécessaires et un suivi médical, il est demandé le paiement de 10 euros. Une aide médicale de l'Etat est maintenue pour permettre la prise en charge des personnes impécunieuses dans un état médical grave et présentant des risques pour la santé publique. M. Rémi Carrayol, coordinateur du collectif « Migrants Mayotte », a expliqué que ce régime pouvait rendre difficile l'accès aux soins urgents des personnes en situation irrégulière. Par ailleurs, il pourrait présenter un risque sanitaire pour l'ensemble de la population, notamment en cas d'épidémie.

Le régime d'assurance vieillesse géré par la Caisse de sécurité sociale de Mayotte concerne les salariés du privé et les agents non-titulaires de la collectivité. Pour ceux-ci, un alignement progressif des conditions de départ à la retraite sur celles du régime général de métropole est prévu. Jusqu'en 2005, les salariés peuvent prendre leur retraite à partir de 55 ans mais ils ne la toucheront à taux plein que s'ils la prennent à partir de 60 ans.

À partir de 2006 : l'âge de la retraite augmentera d'une année par an pour arriver en 2010 à 60 ans. Les autres agents dépendent soit de la Caisse de retraite des fonctionnaires et des agents des collectivités publiques de Mayotte soit de leur caisse de retraite en métropole pour les fonctionnaires mutés ou détachés à Mayotte.

L'Etablissement des allocations familiales de Mayotte a été mis en place en mars 2002. Il compte 13.377 familles allocataires (août 2007). Il gère les prestations familiales pour tous les allocataires français et étrangers détenteurs d'un titre de séjour conforme à la réglementation des prestations familiales, ayant la charge effective et permanente d'enfants. De manière générale, la mère est l'allocataire mais les prestations familiales peuvent être servies au père. Initialement plafonnées à 3 enfants, les prestations familiales sont dues pour chaque enfant à charge scolarisé depuis le 1 er janvier 2006.

Les prestations familiales ont été revalorisées à compter du 1 er janvier 2007 en application du décret n°2007- 463 du 25 mars 2007 relatif à l'amélioration de la protection sociale dans la Collectivité départementale de Mayotte.

Votre commission recommande par conséquent que ces prestations s'appliquent de façon progressive et adaptée, afin de ne pas obérer le développement de Mayotte .

Un fonds de développement économique et social pourrait ainsi être créé à titre transitoire pour apporter aux personnes qui en ont besoin des aides adaptées et construire des infrastructures indispensables au développement de l'archipel : crèches, maisons de retraite, maisons du handicap...

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