II. UNE SUPERVISION INTERNATIONALE COMPLEXE

A. LA MISSION EULEX

1. Une ambigüité originelle

L'Union européenne n'a pas de position commune sur l'indépendance du Kosovo puisque cinq États membres ne l'ont pour le moment pas reconnue, à savoir la Grèce, Chypre, la Roumanie, la Slovaquie et l'Espagne.

Toutefois, les États membres de l'Union européenne se sont entendus le 17 février 2008 au Conseil affaires générales et relations extérieures sur une déclaration commune permettant la reconnaissance du Kosovo par les États qui le souhaitaient, l'utilisation des instruments financiers de l'Union et le déploiement de la mission « État de droit » EULEX, décidée par le Conseil européen de décembre 2007.

La mission « État de droit » (EULEX Kosovo) a pour objet d'aider les autorités kosovares dans les domaines de la police, de la justice, des douanes et des services pénitentiaires. Les principales priorités de la mission sont la protection des minorités et la lutte contre la corruption et la criminalité organisée. EULEX ne doit assumer ses missions qu'à l'issue d'une période transitoire de 120 jours après son lancement officiel, la responsabilité continuant à incomber à la MINUK pendant ce temps.

A sa pleine capacité opérationnelle, la mission devra compter 1.900 officiers de police, juges, procureurs et agents des douanes, et environ 1.100 agents locaux. Un contingent de 300 policiers et agents chargés du contrôle des frontières pourrait également être déployé si nécessaire.

Le Général français Yves de Kermabon a été nommé chef de la mission EULEX et rend compte au Comité politique et de sécurité (COPS) à Bruxelles. Le Représentant spécial de l'Union européenne (RSUE) lui donne des orientations politiques en fonction de la situation locale.

Le mandat initial d'EULEX est fixé à deux ans mais la mission ne doit s'achever qu'avec la prise de responsabilité par les autorités kosovares. Le budget pour une période de six mois est fixé à 205 millions d'euros.

2. Un relais difficile avec la MINUK

L'Union européenne doit prendre le relais sur place de la Mission intérimaire des Nations unies pour le Kosovo (MINUK).

Dès juin 2008, le secrétaire général de l'ONU, M. Ban Ki-Moon exprimait dans son rapport spécial son « intention, en attendant des directives du Conseil de sécurité de reconfigurer et restructurer » la MINUK en raison de la déclaration unilatérale d'indépendance et de la promulgation de la Constitution du Kosovo qui créaient une réalité nouvelle. La MINUK devait ainsi passer de près de 2.500 personnes en janvier 2008 à 700 à la fin du mois de novembre 2008. La MINUK procéderait au transfert à la mission européenne EULEX de l'essentiel des pouvoirs en matière de police, justice et douanes à l'issue d'une période de transition de 120 jours.

La MINUK resterait chargée d'exercer « des fonctions liées au dialogue sur la mise en oeuvre de dispositions dans six domaines », à savoir la police, les tribunaux, les douanes, le transport et les infrastructures, les frontières et le patrimoine serbe.

La mission EULEX est donc placée sous le « parapluie » de l'ONU en application de cette décision du secrétaire général, sans que cette notion soit juridiquement très claire ni concrètement très aisée à traduire sur le terrain.

Par ailleurs, le représentant de la Fédération de Russie avait jugé « inadmissible » que soit menée une reconfiguration de la MINUK sans l'autorisation du Conseil de sécurité et la Serbie avait aussi clairement exprimé son opposition aux projets du secrétaire général.

De fait, la mission a pu constater sur place que la transition entre la MINUK et EULEX était difficile et que le déploiement d'EULEX, qui devait s'engager à partir de l'été, avait pris du retard.

Les problèmes sont d'ordre juridique, mais aussi politique : la MINUK craint que le dialogue qu'elle entretient avec les Serbes ne soit dégradé ou rompu en laissant EULEX se déployer dans l'ensemble du pays. Des réticences de responsables locaux de la MINUK, essentiellement fondées sur des positions personnelles, se sont également fait jour.

La Serbie, qui s'oppose à la présence internationale dans les communes à majorité serbe du Kosovo, a enfin demandé à ce qu'un dialogue soit noué avec la MINUK sur six domaines techniques, ce qui consisterait en fait en une réouverture des négociations.

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