D. LA VALORISATION DU SAVOIR-FAIRE DE L'INDUSTRIE NATIONALE DES TITRES D'IDENTITE

L'apparition d'une nouvelle génération de titres d'identité constitue également un tournant à ne pas manquer pour l'industrie française. Celle-ci dispose en effet d'avantages concurrentiels importants pour occuper une position dominante sur ce marché émergeant.

1. Les nouveaux titres d'identité, leviers de modernisation de l'Imprimerie nationale

Forte de son passé d' « imprimeur du Roi » depuis 1538, l'Imprimerie nationale a toujours tenu une place prépondérante dans la production des documents officiels. Les nouvelles exigences en matière de titres d'identité ont coïncidé, au cours des dernières années, avec un mouvement de restructuration de l'activité de l'Imprimerie nationale. Alors que les innovations concernant les titres auraient pu achever de déstabiliser un opérateur confronté à de lourdes pertes financières et à la recherche d'un second souffle, elles ont tout au contraire représenté une opportunité pour moderniser en profondeur cet établissement devenu une société anonyme de droit privé à capitaux d'Etat depuis 1993.

A cet égard, votre rapporteure spéciale tient à souligner et à saluer la capacité d'adaptation de l'Imprimerie nationale à son nouvel environnement économique et technologique . Cette réactivité a permis la préservation non seulement de l'emploi mais aussi d'une tradition et d'un savoir-faire précieux. Elle constitue le meilleur gage de réussite pour relever les défis à venir.

Par la loi n° 93-1419 du 31 décembre 1993 relative à l'Imprimerie nationale, l'Imprimerie est passée du statut de direction centrale du ministère des finances et du budget à celui de société anonyme de droit privé à capitaux d'Etat . Du même coup, l'usage voulant que l'Imprimerie nationale ait l'exclusivité de toutes les impressions des documents des administrations et des entreprises publiques a été abandonné. Or, l'ensemble de ces productions correspondait à 93 % de son chiffre d'affaires.

Une période de difficultés et d'incertitudes quant à l'avenir de l'Imprimerie, durement concurrencée sur ces marchés jusqu'alors « réservés » et souffrant d'une stratégie de développement et de diversification mal maîtrisée, s'est alors ouverte. Un point bas est atteint en 2003 où, suite à un appel d'offre perdu, l'Imprimerie nationale se retrouve contrainte d'abandonner son plus gros marché, celui des annuaires téléphoniques, qui représentait 44 % de son chiffre d'affaires de l'époque.

A partir de 2004, un plan de restructuration est élaboré et mis en oeuvre, avec notamment un recentrage de l'activité de l'Imprimerie sur les produits sécurisés destinés aux Etats . Ce plan constitue un bouleversement dans la tradition de l'Imprimerie nationale et il est d'ailleurs ressenti comme tel par ses personnels, qui vont néanmoins consentir aux efforts d'adaptation nécessaires à la survie de la société. Il s'agit en effet ni plus ni moins d'opérer un renversement des priorités et une ouverture sur de nouveaux métiers. L'activité d'industrie lourde de l'Imprimerie (impression, recours à des rotatives offset...) doit désormais cohabiter avec une activité de très haute sécurité : le fiduciaire et la fabrication des nouveaux titres d'identité.

Malgré la perte au profit d'un opérateur privé (Oberthur technologies) d'un appel d'offre en 2005 concernant le marché des passeports électroniques , l'Imprimerie nationale finit par obtenir la production de ces documents à la suite d'un jugement rendu en appel (le 4 mars 2006) concernant l'attribution définitive de ce marché. Ce jugement, rendu en faveur de l'Imprimerie, s'appuie notamment sur le décret n° 2006-1436 du 24 novembre 2006, pris en application de l'article 2 de la loi précitée du 31 décembre 1993 relative à l'Imprimerie nationale.

Le monopole pour l'Imprimerie nationale de l'impression des titres d'identité : le décret n° 2006-1436 du 24 novembre 2006

Pris en application de l'article 2 de la loi précitée du 31 décembre 1993 relative à l'Imprimerie nationale, le décret n° 2006-1436 du 24 novembre 2006 prévoit que l'Imprimerie nationale est seule autorisée à pouvoir réaliser les documents déclarés secrets par le ministre intéressé ainsi que :

1° Les cartes nationales d'identité , les récépissés de pièces d'identité et les pièces d'identité des gens de mer ;

2° Les certificats de nationalité et les attestations de nationalité ;

3° Les documents de circulation délivrés par l'Etat : les passeports , les passeports diplomatiques, les passeports de service, les passeports d'urgence et les laissez-passer ;

4° Les titres et les documents d'identité, de séjour ou de circulation délivrés par l'Etat aux étrangers : les permis de séjour, les autorisations provisoires de travail, les documents délivrés aux demandeurs d'asile, aux réfugiés ou apatrides, les vignettes de l'espace Schengen et les formulaires d'attestation d'accueil.

Elle est également la seule autorisée à produire des documents administratifs dont l'exécution doit s'accompagner de mesures particulières de sécurité, soit :

1° Les documents d'état civil ou relatifs au pacte civil de solidarité (PACS) ;

2° Les diplômes, les certificats, les attestations et les brevets nationaux délivrés par l'Etat ;

3° Les cartes, les titres ou les permis attestant l'obtention par une personne d'une décision de l'Etat lui ouvrant des droits ou lui accordant l'autorisation d'exercer certaines activités ;

4° Les cartes permettant d'identifier les agents publics ;

5° Les certificats d'immatriculation des véhicules ;

6° Les moyens de paiement utilisés par l'Etat.

Parmi les mesures particulières de sécurité, le décret vise en particulier la centralisation des opérations de réalisation des documents dans des locaux à accès contrôlé et protégés contre les intrusions ainsi que l'utilisation, dans la réalisation des documents, de procédés techniques destinés à empêcher les falsifications et les contrefaçons, tels que l'impression sur des papiers ou supports spéciaux, l'emploi de graphismes, de techniques d'impression, de reliures, de revêtements, de films ou de façonnages particuliers, l'insertion dans les documents d'éléments optiquement variables comme les hologrammes, la numérotation des documents ou de leurs pages par impression, perforation, estampage ou gravure, l'insertion de microprocesseurs ou d'autres dispositifs électroniques garantissant l'intégrité des informations, ou l'insertion de données dans les documents dans le cadre du processus de fabrication.

Ainsi, le 13 avril 2006 , le premier passeport électronique personnalisé sort-il du site de production de l'Imprimerie nationale à Douai, classé « Point sensible de première catégorie » (PS1) 21 ( * ) .

Au total, en s'appuyant sur une politique de cessions d'actifs volontaristes (cessions de huit divisions) et un recentrage sur les titres sécurisés 22 ( * ) , l'Imprimerie a su rétablir son compte de résultat redevenu positif en 2008 , alors qu'il présentait une perte de 50 millions d'euros en 2003. Ce rétablissement s'est accompagné d'une relocalisation géographique (à Douai, contre sept sites de production auparavant), d'une réduction des effectifs (qui sont passés de 1.500 salariés en 2003 à 550 salariés en 2008) et d'un recentrage sur cinq métiers (contre treize auparavant).

En 2008, les métiers du fiduciaire représentaient ainsi 65 millions d'euros sur un chiffre d'affaires total de 125 millions d'euros (soit 52 % du chiffre d'affaires). L'objectif poursuivi correspond, par ailleurs, à un doublement, sur les trois prochains exercices, du chiffre d'affaires provenant du développement des titres sécurisés.

Dans son activité de production des titres d'identité sécurisés, il convient enfin de souligner la performance de l'Imprimerie nationale en termes de délais de réalisation . Celle-ci est en effet liée, par convention, avec l'ANTS sur ce critère de performance, ainsi que l'indique le tableau ci-dessous.

Le haut niveau de performance de l'Imprimerie nationale en matière de respect des délais de réalisation des titres d'identité

Passeport électronique

Passeport biométrique

Délai de production fixé par convention avec l'ANTS

100 % en 7 jours ouvrables

100 % en 4 jours ouvrables

40 % en 4 jours ouvrables

40 % en 3 jours ouvrables

Délai effectif

100 % en 4 jours ouvrables

Non communiqué

80 % en 2 jours ouvrables

Source : Imprimerie nationale

* 21 Ce classement rend compte des mesures de sécurisation du site mises en oeuvre par l'Imprimerie nationale afin d'assurer la sécurité des documents d'identité fabriqués.

* 22 Il faut relever que l'Imprimerie nationale produit également les cartes de conducteur permettant la mise en oeuvre de la chronotachygraphie électronique, qui permet d'assurer le respect de la législation du travail en matière de temps de travail pour le transport de marchandises ou de passagers.

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