V. UNE QUESTION NON RÉSOLUE : L'UTILISATION DE LA CHLORDECONE EN DEHORS DES DÉPARTEMENTS ANTILLAIS

Le développement qui suit pourrait s'intituler « à la recherche de la chlordécone perdue ».

Car si vos rapporteurs se réfèrent aux éléments en leur possession, il existe une disproportion entre les 300 tonnes de chlordécone épandues aux Antilles de 1972 à 1978, puis de 1981 à 1993 et les 1 600 tonnes de la molécule qui ont été produites aux Etats-Unis, avant son interdiction, en 1976.

Où ces 1 600 tonnes de chlordécone ont-elles été utilisées 27 ( * ) ?

Cette question n'est pas purement académique.

En premier lieu, sans rien retirer au caractère préoccupant des conséquences de cet épandage aux Antilles, la réponse à cette question permettrait d'éviter de pointer de façon exclusive les cas de la Guadeloupe et la Martinique, alors même que la molécule a été largement employée dans le monde.

Par ailleurs, compte tenu de la rémanence du produit dans les sols et de la relative spécialisation de l'usage agricole de la chlordécone (pomme de terre, arboriculture, bananeraies) 28 ( * ) , les mêmes causes ont pu produire ailleurs les mêmes effets qu'aux Antilles françaises. On serait alors en présence d'un problème sanitaire et environnemental de dimension mondiale, ce qui devrait renvoyer à une coopération internationale, tant dans le domaine épidémiologique que dans celui de la remédiation .

Mais l'interruption de commercialisation des formulations de la molécule, en 1976 aux Etats-Unis, et en 1991 en France, ne facilite pas les réponses à la question posée.

Principalement, parce qu'à l'opposé des pesticides encore produits et utilisés, la chlordécone n'est plus recherchée et donc absente des programmes de surveillance et de contrôle menés à l'échelle internationale et dans les Etats.

A. UN STATUT INTERNATIONAL EN VOIE D'ÉVOLUTION

1. L'organisation des Nations-Unies pour l'alimentation et l'agriculture29 ( * )

La chlordécone y est considérée comme un pesticide obsolète, ce qui explique aussi qu'elle ne fasse plus l'objet de fixation de limites maximales de résidus dans le codex alimentaire géré en commun par la FAO et l'OMS.

Par ailleurs, la FAO tient un registre international d'informations sur les pesticides.

Ce registre est déclaratif, ce qui en limite la portée.

Une quarantaine de pays de tous les continents ont fait des déclarations sur la chlordécone 30 ( * ) .

Il ressort de celles-ci :

1. que la molécule n'était pas employée ;

2. et que son usage était interdit ou annulé (Suède, Australie) ou bien sévèrement réglementé (Pays-Bas - ce qui peut sembler contradictoire avec le fait qu'elle n'y était plus employée).

Le sentiment des responsables de l'organisation entendus par vos rapporteurs est que, dans ces conditions, il était peu probable de trouver des traces d'une molécule qui n'était pas produite et qui ne figurait plus dans les plans de contrôle et de surveillance des pesticides.

* 27 A l'exclusion des 120 tonnes utilisées aux Antilles sur la période 1972-1978.

* 28 Surtout lorsque l'on sait que la molécule est dosée à 5 % pour lutter contre le charançon du bananier mais à 90 % pour lutter contre le doryphore et les vers taupins de la pomme de terre.

* 29 Plus connue sous son acronyme anglais (FAO)

* 30 Mais pas la France...

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