b) Des flux migratoires atypiques

Par ailleurs, il faut souligner l'existence de dynamiques démographiques complexes dans ces départements qui combinent immigration étrangère, départ et retour des jeunes actifs ou étudiants, et surtout migrations entre les DOM et la métropole.

(1) Les départements d'outre-mer : terres d'immigration

Les DOM sont devenus des terres d'immigration importante. Outre leur accroissement naturel, les départements reçoivent divers apports extérieurs souvent mal maîtrisés.

Selon l'INSEE, les étrangers en situation régulière étaient fin 2007 18 200 en Guadeloupe (soit 4 % de la population locale), 5 800 en Martinique (1,2 %), 29 000 en Guyane (15%) et 4200 à La Réunion(1%).

Mais c'est l'immigration clandestine qui retient surtout l'attention.

En Guyane , il s'agit d'une question majeure en raison de son ampleur, l'immigration irrégulière étant estimée dans ce département à environ 40 000 personnes, soit 20 % de la population locale 150 ( * ) . Au total, la population étrangère (régulière et clandestine) représente donc au moins un tiers des habitants de la Guyane.

Elle est sans doute encore plus importante car la géographie de ce département rend les frontières totalement perméables et impossibles à contrôler. Seulement 8 000 personnes par an, en provenance des États voisins (Surinam, Haïti, Brésil, Guyana...), sont reconduites à la frontière.

Les caractéristiques de cette population sont autant de défis pour les collectivités d'accueil : leur taux de chômage (50 %), leur concentration géographique (2/3 sur le centre littoral, le nombre d'enfants (un enfant sur deux vit dans une famille immigrée), un niveau scolaire de formation très faible (80 % sans diplôme)...

L'immigration en Guyane

La Guyane abrite, depuis plusieurs décennies, une forte proportion d'immigrés. Dès le début des années 80, la part des immigrés dans la population est supérieure à 25 %. Un maximum est atteint au recensement de 1990, avec l'afflux des réfugiés fuyant la guerre civile au Surinam (1982-1992). La population guyanaise compte alors 30,4 % d'immigrés. L'immigration se féminise, signe du passage progressif d'une immigration de travail à une immigration familiale : 59 % des immigrés étaient des hommes en 1974, contre 49 % en 1999. Les sept principales nationalités représentaient moins de 83 % des immigrés en 1974, contre 92 % en 1999. La présence des natifs du Surinam se renforce considérablement pendant la guerre civile : elle double entre 1982 (16 %) et 1990 (38 %) et se stabilise à un tiers des immigrés depuis 1999. L'immigration haïtienne est stable en 1982 (29 %) et en 1999 (28 %). À l'inverse, l'immigration sainte-lucienne décroît de 27 % des immigrés en 1974 à 3 % seulement en 1999. L'immigration brésilienne enfin varie sur la période. Elle représentait près d'un immigré sur quatre en 1974, une proportion en baisse sensible dans les années 80 et 90.

29 % d'immigrés en 2005

Unités : nombre et %

1974

1982

1990

1999

2005*

Ensemble de la population

57 348

73 012

114 808

156 790

191 000

Nombre d'immigrés

6 412

18 803

34 923

41 649

55 390

Part des immigrés dans la population

11,2

25,8

30,4

26,6

29,0

Les immigrés : répartition par sexe

Hommes

Femmes


59,0
41,0


56,2
43,8


54,3
45,7


48,7
51,3

Les immigrés : nationalité au recensement

Etrangers

Français


88,6
11,4


83,1
16,9


91,6
8,4


87,7
12,3

Les immigrés : pays de naissance

Surinam

Haïti

Brésil

Guyana

Sainte-Lucie

Chine

Laos

Autres pays de naissance


19,4
7,4
24,2
nd
26,7
4,9
nd
17,4


15,9
29,0
17,9
4,7
10,0
2,3
4,2
16,0


38,2
24,0
15,5
5,6
4,3
2,4
2,3
7,6


33,1
28,2
16,8
5,8
3,0
3,1
1,9
8,2

Ensemble des immigrés

100,0

100,0

100,0

100,0

* Données estimées. Les résultats des enquêtes de recensement 2004 et 2005 ne permettent pas encore de préciser les répartitions par sexe, nationalité ni pays de naissance.

En 2005, la part des immigrés dans la population retrouve le même niveau qu'en 1990, soit 29 % de la population contre 7 % en moyenne nationale. Le rythme de croissance de la population immigrée s'est donc accéléré, passant de 2 % par an en moyenne entre 1990 et 1999 à environ 4 % par an sur la période 1999-2005. Les deux tiers sont installés dans le centre littoral - dont 44 % à Cayenne ou à Kourou. Ainsi, la plupart des immigrés chinois sont concentrés dans l'île de Cayenne (65 %), de même que les natifs de Sainte-Lucie (90 %), du Guyana et d'Haïti (75 %). Les natifs de Surinam sont installés dans les communes qui jouxtent le fleuve frontière Maroni. Enfin, les immigrés natifs du Brésil sont présents sur l'ensemble du territoire mais privilégient les grandes communes (15 % à Kourou, 31 % à Cayenne et 20 % dans l'Est guyanais).

La moyenne d'âge des immigrés est nettement supérieure à celle de l'ensemble de la population (33 ans contre 27) : 8 immigrés sur 10 sont d'âges actifs. Nombreux sont sans diplôme (plus de 8 sur 10), quel que soit le pays d'origine concerné.

Près d'un actif immigré sur deux est au chômage contre moins d'un actif sur trois sur l'ensemble de la région. Cette situation n'a pas cessé de se dégrader dans les années 90. Le chômage touche 60 % des femmes, qui conjuguent donc faible taux d'activité et faible taux d'emploi. L'insertion sur le marché du travail varie enfin fortement selon le pays d'origine (7 % des Chinois contre presque 60 % des Haïtiens sont au chômage).

Caractéristiques de l'emploi des immigrés en Guyane en 1999
selon le pays de naissance *

Unités : %

Ensemble des immigrés

Brésil

Chine

Guyana

Haïti

Sainte

-Lucie

Surinam

Ensemble de la population

Taux d'activité

56,3

60,4

69,5

58,3

64,3

40,1

42,2

60,5

Taux d'emploi

29,8

33,5

64,5

27,9

26,1

27,7

20,1

42,4

Taux de chômage

47,1

44,6

7,2

52,2

59,4

31,0

52,3

30,0

* Source : Insee - Recensements de la population 1999.

Moins importante, mais néanmoins réelle dans les autres DOM, l'immigration clandestine est également une donnée préoccupante en Guadeloupe (15 000) 151 ( * ) et, mais dans une moindre mesure, en Martinique (2 000) avec des populations principalement en provenance de Sainte-Lucie, Haïti et de la République dominicaine. La Réunion a été jusqu'ici relativement à l'écart des grands flux migratoires mais l'évolution de l'immigration illégale est sensible (1 500), surtout depuis des Comores.

* 150 Source MIOM-CT/ SEOM

* 151 Il s'agit d'estimations de 2007 du ministère de l'intérieur et du secrétariat d'État chargé de l'outre-mer.

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