(b) Les programmes et les méthodes

La nécessité d'une adaptation des programmes locaux est évoquée depuis plus de dix ans. Elle a notamment été abordée par le rapport Lise-Tamaya publié en 1999 au chapitre : « De nouvelles responsabilités dans le domaine de l'éducation et de la culture », dans les domaines de l'histoire et de la géographie ainsi que des langues régionales.

Proposition n°73 : Développer les formations techniques offrant des débouchés locaux et valorisant notamment les ressources de la mer et l'environnement naturel.

S'agissant de l'histoire et de la géographie , des adaptations ont néanmoins été mises en oeuvre à partir de « notes de service » dès 2000 et poursuivies depuis dans les programmes suivants :

- le programme de la classe de troisième du collège avec l'étude d'un département ou région d'outre-mer en tant qu'« étude de cas », en introduction au thème consacré au « rôle mondial de la France et de l'Union européenne 161 ( * ) »;

- les programmes nationaux d'enseignement de l'histoire et de la géographie pour les départements et régions d'outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion) dans le cycle terminal de la série « Sciences et technologies de la santé et du social »;

- les programmes nationaux d'enseignement de l'histoire et de la géographie pour les départements et régions d'outre-mer dans le cycle terminal de la série « Sciences et technologies de la gestion »;

- les programmes d'histoire et de géographie en séries ES, L, S.

Malgré des adaptations, le bilan final apparaît, somme toute, assez limité. De même en est-il de l 'enseignement des langues locales.

Au niveau général, le pourcentage d'élèves de l'enseignement primaire recevant un enseignement de langues vivantes dans les académies de Guyane et de Martinique se rapproche de celui rencontré au plan national 162 ( * ) , soit 94,49 % des effectifs (4 959 élèves) en Guyane et 99,39 % (5 179 élèves) en Martinique en CM2 (99,67 % au plan national). Ces chiffres sont indisponibles, selon le ministère de l'éducation nationale, pour les académies de Guadeloupe et de La Réunion. Les langues vivantes étrangères enseignées sont principalement l'anglais (plus de 80 % des élèves pratiquent cette langue) qui devance l'espagnol enseigné à plus de 10 % des élèves.

Mais l'enseignement des langues créoles est encore peu développé dans les DOM. Au total, seulement 8,67 % des élèves guyanais et 1,31 % des élèves martiniquais pratiquent une langue régionale à l'école.

S'agissant de l'enseignement des langues créoles, le ministère reconnaît que le travail de rédaction de programmes nationaux n'a été engagé que récemment. Il doit porter, dans un premier temps, sur le primaire et la première année du collège. La rédaction de ces projets de programmes a été confiée à de petits groupes locaux composés d'un inspecteur d'académie, d'enseignants du primaire et du secondaire et d'universitaires. Parmi les projets que le ministère doit recevoir avant la fin décembre 2009, des exemples de « formulations » seront proposés pour les différentes variantes du créole pour la Guadeloupe, la Guyane, La Réunion et la Martinique.

On ne peut que regretter le caractère tardif de cette mobilisation, alors même qu'une disposition récente de la loi de développement des outre-mer vient de rappeler l'importance des langues créoles dans le patrimoine national ( l'article 73 de la LODEOM qui dispose que « les langues créoles font partie du patrimoine national »).

Les jeunes des DOM disposent d'atouts évidents en raison de leurs sociétés multiculturelles, de l'environnement régional et des possibilités d'échanges ainsi que du développement des mariages mixtes et du métissage...Or, ce potentiel reste largement négligé dans les programmes.

Selon la mission, l'éducation devrait développer l'enseignement et faciliter la pratique des langues des pays de l'environnement régional par leur apprentissage dès le plus jeune âge, et accorder une part plus importante aux langues vivantes dans les programmes et aux échanges scolaires régionaux.

Proposition n° 74 : Faire de l'enseignement des langues des pays de l'environnement régional un volet important des programmes scolaires.

La mission a également pu constater que la prise en compte des contextes locaux dans les méthodes pédagogiques était encore très limitée.

La pénurie des équipements informatiques et des supports modernes pour rendre l'enseignement plus attrayant a été souvent relevée.

On soulignera néanmoins les initiatives audacieuses lancées par certaines académies comme celle de la Guadeloupe. Dans son projet d'académie 2009-2012, elle prévoit de promouvoir les langues régionales et une meilleure connaissance de l'histoire locale à partir d'outils pédagogiques valorisant les riches archives départementales et ouvrant le débat sur les événements du passé et de renforcer l'intégration régionale, notamment en développant les échanges culturels au sein de la Caraïbe.

L'isolement ou le manque de transports collectifs, l'explosion démographique et la part de populations non francophones contraignent les DOM à rechercher d'autres méthodes que celles en vigueur en métropole.

Il conviendrait notamment :

- d'adapter davantage le contenu pédagogique en fonction de la localisation (histoire, environnement régional, langues...) ;

- d'élargir et moderniser les outils pédagogiques (archives locales, nouvelles technologies, télé-enseignement...).

À cette fin, la mission suggère d'avoir recours au Fonds d'expérimentation pour la jeunesse.

Créé par la loi généralisant le RSA votée en décembre 2008, le Fonds d'expérimentation pour la jeunesse est doté de contributions de l'État et de toute personne morale de droit public ou privé qui s'associe pour financer et piloter des programmes expérimentaux visant à améliorer l'insertion des jeunes de 16 à 25 ans.

La LODEOM a prévu un abondement de ce fonds dans le cadre des contreparties aux avantages fiscaux dont bénéficient les entreprises des Zones Franches Globales d'Activité (ZFGA). Ces entreprises devront en effet consacrer au moins 1 % de la quote-part de leurs bénéfices, soit globalement plus de 2 millions d'euros par an au Fonds d'expérimentation pour la jeunesse.

Lors de son audition devant la mission le 25 mai dernier, le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer a clairement évoqué une extension de son emploi aux méthodes pédagogiques et en particulier en matière de télé-enseignement.

Proposition n° 75 : Utiliser le Fonds d'expérimentation pour la jeunesse pour financer de nouvelles méthodes d'enseignement.

* 161 Voir BO spécial du ministère de l'éducation nationale du 28 août 2008 et BO n° 31 du 6  août 2009).

* 162 La Martinique est la seule académie d'outre-mer à avoir mis en place une initiation en ce domaine dès le cours préparatoire : elle concerne 25,59 % des effectifs (1 394 élèves) contre 31,13 % au plan national.

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