(2) L'urgence de la mise en oeuvre du plan « santé outre-mer »

En mai 2008, le ministre de la santé a lancé un plan « santé outre-mer ». Dans le prolongement du rapport de la commission de concertation sur les missions de l'hôpital, présidée par M. Gérard Larcher, ce plan tend à mieux prendre en compte les spécificités de l'outre-mer en matière de santé . Il s'agissait de « décliner » outre-mer certains des mécanismes du projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires ».

Pourtant, la loi ne contient en définitive que très peu de dispositions particulièrement adaptées à l'outre-mer , hormis la possibilité de créer des agences régionales de santé (ARS) entre des collectivités à statut différent : une ARS devrait ainsi être commune à La Réunion et à Mayotte et une à la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

La création des ARS devrait permettre de mettre fin au morcellement des compétences entre la prévention, le soin, la médecine ambulatoire, l'hôpital et le secteur libéral et assurer un meilleur pilotage de la politique de santé publique. Cela répond particulièrement aux spécificités sanitaires des territoires ultramarins. Il est en effet important de mieux mettre en réseau et de mieux mutualiser les données entre les différents intervenants du système de santé outre-mer : DRASS, conseils généraux et régionaux, agence régionale de l'hospitalisation (ARH), établissements de santé, professionnels...

Cependant, au-delà de ce projet de loi, le plan « santé outre-mer » doit être global et intégrer plusieurs dispositifs complémentaires.

Proposition n°92 : Mise en oeuvre urgente du « Plan Santé outre-mer ».

(a) Combler les retards

• Un plan de rattrapage global en équipements de santé

Le taux en équipements de santé est globalement inférieur dans les DOM par rapport à la métropole ; la Martinique fait exception à ce constat, elle a d'ailleurs une vocation interrégionale, certains patients gravement atteints pouvant y être accueillis en provenance de Guadeloupe, de Guyane, de Saint-Martin ou de Saint-Barthélemy.

Le nombre de lits en médecine et chirurgie, rapporté au nombre d'habitants, est nettement inférieur à La Réunion et en Guyane qu'en métropole . On peut cependant noter que le taux d'équipement en lits d'obstétrique est supérieur à celui de la métropole dans les quatre DOM ; ceci s'explique naturellement par les taux de fécondité qui y sont plus élevés, sauf pour la Martinique.

Les écarts d'équipements sont particulièrement criants pour la psychiatrie, pour les soins de suite et de réadaptation et pour les soins de longue durée . Cette activité en soins de longue durée prend en charge des patients non autonomes dont l'état nécessite une surveillance médicale constante ; les établissements sont peu nombreux dans les DOM et ils arrivent quasiment à saturation, comme en métropole d'ailleurs. Le nombre de lits y est proportionnellement très inférieur à celui de la métropole, notamment à La Réunion : 1,0 contre 11,8 pour 10 000 habitants en 2005.

Taux d'équipement de lits en hospitalisation complète pour 10 000 habitants en 2005

Guadeloupe

Martinique

Guyane

La Réunion

Métropole

Médecine, chirurgie, obstétrique

34,8

39,4

30,7

25,5

36,9

Psychiatrie

6,8

7,3

4,2

4,3

9,4

Soins de suite et de réadaptation

9,9

11,7

3,7

4,3

14,9

Soins de longue durée

7,8

4,3

5,8

1,0

11,8

Source : « L'activité des établissements de santé dans les DOM en 2005 », Etudes et résultats n° 614, décembre 2007, direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, ministère de la santé.

Au regard de ce constat, un plan de rattrapage des équipements sanitaires s'impose en Guyane et à La Réunion , départements particulièrement sous-dotés en la matière. Il doit prendre en compte la démographie particulière de la Guyane, tant en termes de natalité que d'immigration. La Guadeloupe et la Martinique connaissent des difficultés pour les soins de suite et de réadaptation et pour les soins de longue durée.

Il conviendrait enfin de prévoir, notamment aux Antilles, le respect des toutes dernières normes parasismiques à l'occasion de toute construction hospitalière nouvelle ou opération de réhabilitation de structures existantes.

• Un renforcement des personnels et des appareils de formation médicale et paramédicale

Les DOM connaissent une sous-médicalisation, par exemple en nombre de médecins généralistes ou spécialistes installés en libéral : 161 pour 100 000 habitants à La Réunion contre 198 en métropole. La situation est particulièrement grave en Guyane 179 ( * ) où la densité médicale est très faible : 5 médecins généralistes pour 100 000 habitants contre 100 en métropole !

Pour compenser ces déficits de professionnels, il est tout d'abord nécessaire de renforcer les filières locales de formation médicale , en mettant en place des cycles complets dans les DOM et en accroissant le numerus clausus pour atteindre au minimum la moyenne nationale. Une telle démarche devrait notamment permettre de faire face à la pénurie actuelle de praticiens et de prévenir les effets du vieillissement du personnel médical, constaté partout en France. Elle est d'autant plus indispensable que, selon les dernières statistiques, plus de 60 % des médecins ou paramédicaux s'installent dans la région où ils ont fait leurs études.

En second lieu, les facultés de médecine et les centres hospitaliers universitaires doivent être confortés : la faiblesse des effectifs de personnels hospitalo-universitaires, 23 personnes à la faculté Antilles-Guyane, constitue un handicap pour attirer des médecins spécialistes et restreint les possibilités de formation pour les internes. Pour résoudre ces difficultés structurelles, en partie liées à la taille limité des territoires, il est tout à la fois nécessaire de recruter de nouveaux personnels et de développer les activités à temps partiel pour permettre par exemple à un professeur ou à un maître de conférences de venir enseigner durant quelques mois dans l'année, sans quitter son activité principale dans un autre établissement métropolitain ou local.

* 179 « L'offre de santé dans les collectivités ultramarines », avis présenté par Mme Jacqueline André-Cormier, rapporteur de la section des affaires sociales, et adopté en séance plénière par le Conseil économique, social et environnemental le 24 juin 2009.

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